Publié le 25 oct 2021Lecture 6 min
Angioplastie des lésions de novo par ballon actif SeQuent® Please Neo - Une alternative crédible au stent actif ?
Michaël ANGIOI, Polyclinique Louis Pasteur, Essey-lès-Nancy
Si l’utilisation des ballons actifs (drug coated balloon ou DCB) est bien documentée dans le traitement de la resténose intrastent avec des recommandations de traitement et un remboursement en France pour la resténose intrastent (nu ou actif), les résultats de l’étude randomisée BASKET-SMALL 2 laissent penser que les DCB peuvent trouver leur place dans la prise en charge des lésions de novo.
LES BALLONS ACTIFS ET LE BALLON ACTIF SEQUENT® PLEASE NEO
Les DCB ne sont pas des ballons de dilatation, mais des systèmes de thérapie in situ qui permettent de larguer un produit actif antiprolifératif au site d’angioplastie pour prévenir la resténose. La molécule très majoritairement utilisée est le paclitaxel en raison de sa lipophilie qui favorise sa diffusion tissulaire. Des ballons actifs au sirolimus sont actuellement disponibles mais avec des données cliniques en coronaire très limitées.
Le ballon actif SeQuent® Please (B.Braun) est celui utilisé dans l’étude BASKET-SMALL 2. Il s’agit donc d’un DCB au paclitaxel (lipophile) à la concentration de 3 μg/mm2 avec une matrice de iopromide (hydrophile). La combinaison de ces deux éléments (technologie Paccocath™) permet le détachement de la molécule du ballon et sa diffusion rapide dans la paroi artérielle à une haute concentration ce qui détermine l’efficacité du système. La combinaison de ces deux éléments est très importante puisque la concentration de paclitaxel est comparable entre les différents DCB, ce qui n’est pas le cas de la matrice et qui explique les différences de résultats entre les DCB ; les résultats des essais ne sont pas transposables d’un DCB à l’autre. La prévention de la resténose est liée aux propriétés antiprolifératives de la molécule mais aussi à l’effet sur le remodelage artériel négatif qui est le mécanisme prédominant de la resténose au ballon. Ce point particulier est très bien documenté avec un remodelage positif et un élargissement de la lumière artérielle à distance du geste d’angioplastie par DCB.
L’EFFICACITÉ DU BALLON ACTIF DANS LES PETITES ARTÈRES : L’ESSAI BASKET-SMALL 2
L’étude BASKET-SMALL 2 est une étude randomisée de non-infériorité qui a comparé l’utilisation du DCB SeQuent® Please Neo à celle des stents actifs de 2e génération (DES) dans les petites artères (< 3 mm). Initialement, la comparaison devait se faire avec un stent au paclitaxel, Taxus® (Boston Scientific), mais celui-ci étant devenu rapidement indisponible durant l’essai il a été remplacé par le Xience™ (Abbott) et le calcul des effectifs a été ajusté en conséquence.
Au total, 28 % des patients dans le groupe DES ont reçu un stent Taxus® et 72 % un Xience™. Les patients étaient randomisés après une prédilatation au ballon à condition d’avoir une sténose résiduelle < 30 % sans dissection pouvant compromettre la perméabilité artérielle (type C à F). Trois cent quatrevingt-deux (382) patients ont été inclus dans le groupe DCB et 376 dans le groupe stent actif ; 19 patients du groupe ballon actif ont également eu un stent (5 %) principalement un DES. Pour les patients stables, une durée de bithérapie de 4 semaines était prévue pour le groupe DCB et 6 mois pour le groupe DES. En cas de syndrome coronaire aigu la durée était de 12 mois pour tout le monde. En cas de combinaison DCB et stent nu la durée était de 3 mois.
Le critère de jugement principal était la survenue d’un événement cardiaque majeur (MACE) à 1 an : décès cardiaque, infarctus (IDM) non létal et revascularisation du vaisseau cible (TVR). Le critère de non-infériorité (analyse perprotocole) a été atteint avec un taux de MACE à 1 an de 8 % dans le groupe DCB et 8 % dans le groupe DES (p = ns). Si on compare les différents composants du MACE, il n’y a là encore pas de différence entre les 2 groupes traités (DEB vs DES) : décès 3,1 vs 1,3 % ; IDM 1,6 vs 3,5 % ; TLR 3,4 vs 4,5 %. Si on compare les différents sous-groupes, on a un taux de MACE dans le groupe DCB seul à 7 %, Xience™ 5,7 % (p = ns), Taxus® 12,8 % et DCB + stent 15,8 %.
Le suivi à 3 ans de la population a fait l’objet d’une publication additionnelle avec un taux de MACE à 15 % dans les 2 groupes DCB et DES donc, là encore, sans aucune différence significative. En ce qui concerne les sousgroupes, on retrouvait 14 % dans le groupe DCB seul, 13 % dans le groupe Xience™, 21 % dans le groupe Taxus® et 26 % dans le groupe DCB + stent.
QUAND ENVISAGER UNE ANGIOPLASTIE PAR DCB SEUL DANS LES LÉSIONS DE NOVO ?
Les dernières recommandations de l’ESC concernant la revascularisation myocardique datent de 2018 et n’intègrent pas ces résultats. On peut néanmoins se baser sur le dernier rapport de l’International DCB consensus group de 2020 pour dégager des indications indiscutables ou potentielles.
Concernant spécifiquement les lésions de novo, l’étude BASKET- SMALL 2 valide l’indication dans les petits vaisseaux avec une non-infériorité du DCB utilisé par rapport aux DES 2e génération, majoritairement des stents aux limus. S’il s’agit incontestablement de l’étude la plus importante, ce n’est pas la seule. On peut citer BELLO, plus ancienne (vs des stents au paclitaxel) et l’étude RESTORE SVD qui est une étude chinoise de moindre ampleur (230 patients) versus RESOLUTE INTEGRITY (DES 2e génération) avec des résultats similaires.
Il n’y a pas eu d’essai comparable dans les artères de plus de 3 mm même si des données de registre montrent que les résultats sont également satisfaisants.
Des études ont également été réalisées dans le traitement des bifurcations avec essentiellement une utilisation de DCB pour traiter la collatérale au niveau de son ostium en association avec un stent actif dans la branche principale et qui ont montré que le ballon actif était supérieur au ballon simple dans des procédures avec stenting provisionnel. Plus rarement, le ballon actif a été utilisé seul dans la branche principale avec des données plus limitées.
D’autres indications découlent non pas de lésions particulières mais de situations cliniques particulières. Des données ont suggéré que le paclitaxel pouvait être supérieur aux limus chez les diabétiques, mais il n’y a pas d’essai randomisé confirmant ce fait. Enfin, dans toutes les situations où une durée de bithérapie antiagrégante plaquettaire doit être limitée au strict nécessaire, en particulier chez les patients à haut risque hémorragique ou sous anticoagulant au long cours, la possibilité d’une angioplastie au DCB seul se pose.
GESTION D’UNE CONCLUSION ANGIOPLASTIE AVEC DCB : CAS CLINIQUES
Si on veut intégrer un DCB à sa stratégie d’angioplastie il faut d’abord dilater la lésion et obtenir un bon résultat. Le standard actuel étant le stenting souvent sans prédilatation, cela demande évidemment une certaine adaptation de ses pratiques.
La prédilatation est réalisée avec un ballon semi-compliant ou non compliant avec un ratio 1/1 par rapport au diamètre artériel et en couvrant bien la lésion. L’utilisation de ballons spéciaux type scoring balloon a été évaluée dans ce contexte dans le registre PASSWORD avec de bons résultats. Les différents systèmes d’athérectomie peuvent également être utilisés. Si après une préparation adaptée on a une lésion résiduelle significative (> 30 %), ou s’il existe une dissection menaçante (type C à F), il est préférable d’implanter un stent. Dans les autres cas, on peut donc compléter par l’application d’un DCB qui doit couvrir la lésion traitée et les extrémités en débordant un peu (2 mm de part et d’autre) pour éviter les effets bords ultérieurs. Une durée d’inflation minimale est requise (généralement 45 à 60 secondes) pour permettre la délivrance in situ du paclitaxel. Si on se réfère à BASKET-SMALL 2 une stratégie d’angioplastie avec DCB est réalisable après prédilatation chez 86 % des patients, il sera intéressant de comparer avec les résultats de l’étude française SCRAP qui sera publiée prochainement. Celle-ci étant basée sur une population non sélectionnée avec des patients consécutifs.
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