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Complication

Publié le 31 mai 2011Lecture 8 min

Fermeture percutanée de CIV postinfarctus

L. LEBORGNE, G. JARRY, D. MALAQUIN, A. FOURNIER, Hôpital sud, CHU d’Amiens

Les communications interventriculaires (CIV) sont une complication rare (0,5 %) de l’infarctus du myocarde (IDM) mais dont l’évolution spontanée est mortelle dans plus de 90 % des cas. La fermeture chirurgicale est donc actuellement recommandée mais reste délicate car il est difficile au chirurgien de suturer de façon fiable le patch dans un tissu très friable à ce stade. D’autre part, du fait du contexte clinique dans lequel est réalisée cette fermeture, la mortalité opératoire est élevée (20 à 87 % dans les séries les plus récentes). La fermeture de la CIV par voie percutanée représente une alternative à la chirurgie soit définitive, soit temporaire, et dans ce cas, peut être considérée comme un pont à la chirurgie et permettre de la réaliser une fois le patient stabilisé et les tissus fibrosés.

Situation clinique Une patiente de 81 ans est hospitalisée pour un IDM inférieur constitué (J4) avec un souffle systolique intense, qui se complique très rapidement avec un oedème aigu pulmonaire (OAP), d’une hyperlactatémie et d’une cytolyse hépatique.  L’échocardiographie montre une akinésie inférieure avec une CIV inféroseptale au niveau de la partie médiane du septum interventriculaire (figure 1). Le diamètre du jet couleur est mesuré à 11 mm. Les piliers des valves mitrale et tricuspide les plus proches se situent à 11 mm des berges de la CIV. Il existe une importante dilatation ventriculaire droite avec un ventricule droit hypokinétique, mais sans zone akinétique et une insuffisance tricuspidienne de grade I. La FEVG est estimée à 45 %. La coronarographie montre une atteinte monotronculaire correspondant à une occlusion de la coronaire droite en S2 juste après le départ d’une belle marginale du bord droit. Il n’y a pas de geste réalisé étant donné le délai tardif de la prise en charge et la CIV.    Une contre-pulsion par ballon intra-aortique (CPBIA) est mise en place en fémoral droit. Sous traitement médical optimal, la patiente continue à se dégrader rapidement avec une augmentation progressive des lactates et de la cytolyse hépatique.    Figure 1. Discussion thérapeutique  Il est évident à ce stade que le traitement médical seul ne permettra pas de stabiliser la patiente. Une chirurgie dans les conditions présentes (âge, état de choc, infarctus récent, localisation inférieure de la CIV, petite surface corporelle de la patiente) semble à trop haut risque et nous décidons de réaliser une fermeture par voie percutanée avec un Amplatzer®.  Procédure  La procédure est réalisée sous anesthésie générale, sous contrôle ETO. Un désilet 6 F est inséré au niveau de l’artère fémorale gauche (AFG). La valve aortique est franchie à l’aide d’une sonde diagnostique type JR4. Un guide 0,035’’ Starter® (Boston Scientific) franchit la CIV et est placé dans le tronc de l’artère pulmonaire (AP). La JR4 est placée dans l’AP. Un échange de guide est réalisé avec un guide de 260 cm hydrophile Extra Stiff Terumo®. Parallèlement, un désilet (9 F) est placé dans la veine jugulaire droite (VJD). Un lasso EN Snare® (Endovascular Snare System ; Merit Medical) est descendu par cette voie et permet de récupérer l’extrémité distale du guide Terumo® dans l’AP. Le guide est alors extériorisé par le désilet veineux jugulaire (figure 2A). Ce guide donnera un excellent support droit/gauche pour l’avancée du système d’occlusion Amplatzer®. En ETO, la CIV est de nouveau évaluée à 12 mm de large (figure 3). On choisit une prothèse Amplatzer® Cribriform de 25 mm de diamètre. La gaine et le dilatateur franchissent la CIV sur le guide Extra Stiff (figure 2B). Le dilatateur est retiré (figure 4A). Le contrôle ETO permet en permanence de confirmer la bonne position de la gaine dans le VG (figure 4B). La prothèse est ensuite descendue dans la gaine. Le disque ventriculaire gauche est alors déployé et délicatement appliqué sur le septum (figure 5A). Lors de la traction très modérée de la prothèse, il n’y a pas de protrusion du disque gauche vers le VD, les bords de la prothèse paraissent bien recouvrir les berges de la CIV en ETO (figure 5B).    Figure 2. Figure 3. Figure 4. Figure 5. Dès ce stade, on observe une nette diminution du shunt en Doppler couleur. Le disque ventriculaire droit est alors déployé (figure 6A). L’ETO confirme le bon positionnement des deux disques (figure 6B) et vérifie qu’il n’y a pas d’insuffisance mitrale ou tricuspide significative par capture ou lésion de cordage. La prothèse est alors libérée du câble. En ETO, elle est stable et épouse les planchers ventriculaires droit et gauche. Il persiste un shunt gauche droit minime confiné à la pointe du VD. Il n’y a pas d’insuffisance mitrale, mais en revanche on note une restriction des mouvements de la valve septale tricuspide avec une IT grade 2. L’ETT confirme les données de l’ETO (figure 7).    Figure 6. Figure 7. Évolution  La diurèse est rapidement améliorée et la patiente est extubée et sevrée de la CPBIA à J1. En 72 h, la cytolyse hépatique régresse avec survenue secondaire d’une anémie hémolytique modérée en rapport avec le shunt résiduel minime.  Discussion  La fermeture percutanée des CIV congénitales, musculaires ou périmembraneuses est bien maîtrisée. À l’inverse, la fermeture percutanée des CIV postinfarctus est une technique rarement utilisée. Moins de 150 cas de fermeture de CIV post-IDM sont rapportés dans la littérature(1-7).  La plus grande série, publiée par un centre allemand comprend 29 patients consécutifs(7). Les investigateurs ont choisi dans ce registre prospectif une fermeture percutanée en première intention sauf en cas de defect large supérieur à 35 mm et de CIV apicale ou septale basse trop proche de l’appareil sous-valvulaire tricuspide ou mitral. Les systèmes Amplatzer® atrial, Amplatzer® ventriculaire ou Amplatzer® dédié au postinfarctus étaient utilisés indifféremment.  Les complications perprocédurales qui peuvent survenir sont :  - bloc auriculaire ventriculaire (BAV) complet sans échappement ; - échec de pose du fait d’une trop grande taille de CIV ;  - en postprocédure, une migration du système liée à un défaut d’ancrage peut aussi survenir.  La technique permet une réduction du shunt chez tous les patients sauf pour certains gardant un rapport des débits supérieur à 1,5. Il n’y a pas de différence de succès procédural en fonction du type de système implanté (atrial, ventriculaire ou dédié post-IDM). Chez les patients sans choc cardiogénique et avec un bon succès procédural, la mortalité est de 36 % à 30 jours ce qui est bien inférieur à la mortalité spontanée attendue (87 à 100 % dans GUSTO-1 et dans le registre SHOCK)(8). D’une manière générale, la mortalité à 30 jours reportée dans les différentes séries ayant testé cette technique est comprise entre 30 et 40 %.  Dans notre cas, la taille de la prothèse choisie a été de 25 mm pour une CIV mesurée à 12 mm dans son plus grand axe. La taille du système de fermeture doit correspondre à 2 fois la largeur du defect ou dépasser de 10 mm la taille de celui-ci. La prothèse Amplatzer® atriale (figure 8A) a l’avantage de présenter une large gamme de diamètres (4 à 40 mm), ce qui permet de choisir la prothèse la mieux adaptée. Par ailleurs, du fait d’un « moyeu » central moins large que les prothèses dédiées aux CIV postinfarctus, les disques viennent recouvrir les berges de manière plus importante.    Figure 8. Dans certaines séries la taille de la CIV a été mesurée par ballonnet ; dans la série allemande la taille était mesurée en ETO comme dans notre cas. Du fait du caractère potentiellement extensif de la CIV avec l’augmentation de la zone de nécrose avec le temps, la taille de la CIV doit plutôt être surestimée lors du choix du diamètre de l’Amplatzer®. La prothèse dédiée aux CIV postinfarctus a un « moyeu » de connexion des deux disques large mais la couverture de part et d’autre de celui-ci est donc moins importante (figure 8B). Cette particularité peut cependant être intéressante pour les CIV apicales et très basses au niveau du septum pour éviter la prise de cordage par le disque. Les tailles disponibles vont de 16 à 24 mm et sont donc moins variées que pour les prothèses atriales. Enfin, les prothèses dédiées aux CIV post-IDM ne sont pas disponibles dans le cadre de l’urgence en France actuellement.  Le shunt résiduel est assez fréquent et le maillage polyester situé sous la structure en nitinol est trop perméable alors que les gradients transventriculaires sont élevés (contrairement à la situation dans les fermetures atriales). Le shunt persiste jusqu’à l’endothélialisation complète de la prothèse ou sa thrombose. Un shunt modéré ne nécessite pas une correction chirurgicale systématique, la chirurgie laissant de toute façon elle-même souvent des communications résiduelles.  L’ETO permet d’être particulièrement attentif aux structures sous-valvulaires tricuspide et mitrale puisque les cordages peuvent être piégés ou arrachés par la prothèse. L’absence d’insuffisance mitrale ou tricuspide significative doit absolument être vérifiée après le déploiement des disques respectifs. Dans la littérature, ce type de complication est cependant peu souvent mentionné. Enfin, la fermeture percutanée de la CIV présente des taux de mortalité comparables à ceux de la chirurgie. Elle est réalisable rapidement et peut permettre d’améliorer la situation hémodynamique de ces patients en évitant une chirurgie à très haut risque à ce stade. Lorsque la fermeture ne pas être complète par l’Amplatzer®, le patient peut être adressé en chirurgie secondairement, si besoin, à un stade plus favorable pour le chirurgien.  Conclusion  Lorsque le risque opératoire d’une fermeture de CIV post-IDM est jugé très élevé ou lorsque les conditions anatomiques sont optimales (CIV de taille moyenne située au centre du septum), une procédure percutanée doit être considérée comme une alternative à la chirurgie.  

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