Publié le 15 juin 2018Lecture 6 min
Fermeture percutanée de FOP et de CIA : quels enjeux pour les paramédicaux ?
Nathalie LATTARICO, MERM, CHU de Grenoble
La cardiologie interventionnelle structurelle prend une place importante dans notre activité quotidienne. Le rôle du paramédical en salle devient de plus en plus polyvalent, partagé entre coronarographie, angioplastie, CTO, TAVI, MitraClip, fermeture d’auricule et traitement des cardiopathies congénitales.
Parmi ces différents examens, les fermetures percutanées du foramen ovale perméable (FOP) et des communications inter-auriculaires (CIA) représentent une activité importante qui nécessitent une organisation spécifique dans toute unité de cardiologie interventionnelle. Le paramédical participe au bon déroulement de l’examen et à la qualité des soins donnés au patient.
Quels traitements proposés dans les FOP et CIA ?
La chirurgie a été pendant longtemps le traitement de référence pour les CIA, anomalie cardiaque congénitale fréquente. Mais grâce au développement des techniques percutanées, la fermeture percutanée est devenue la thérapeutique de choix pour les CIA de type ostium secondum (les CIA primum et sinus veinosus restant des indications de fermeture chirurgicale).
La mise en évidence d’un foramen ovale perméable (FOP) est importante dans différentes situations cliniques, en particulier lors d’accidents vasculaires cérébraux (AVC) inexpliqués chez le sujet jeune. Une surveillance simple était alors préconisé.e avec la prescription de traitements anticoagulants ou d’antiagrégants plaquettaires.
Plusieurs études (CLOSE, REDUGE ou RESPECT)(1-3) ont récemment validé l’intérêt de la fermeture percutanée du FOP pour les récidives d’AVC ou d’AIT.
FOP et CIA, de quoi parle-t-on ?
Le FOP se définit par la persistance, après la naissance, d’une communication entre les deux oreillettes. Cette communication, indispensable au cours de la vie fœtale, s’oblitère après la naissance dans la grande majorité des cas. Mais la communication persiste au niveau du septum interauriculaire dans environ 30 % de la population. Contrairement aux CIA, il ne s’agit pas d’un orifice par manque de substance, mais plutôt d’un défaut d’accolement des septums primum et secondum, qui forment le septum interauriculaire du cœur adulte (figure 1). Lorsque le FOP reste perméable(4) avec un shunt droit gauche et est associé à un anévrisme du septum inter-auriculaire (ASIA)(5), il peut être un facteur favorisant l’AVC.
Figure 1. Foramen ovale perméable avec le shunt D/G.
L’examen qui permet d’identifier le FOP est l’échographie transœsophagienne (ETO) avec une épreuve de bulles(6) (microbulles obtenues par agitation de sérum salé auquel est ajouté 1 ml d’air, avec mouvement de va-et-vient rapide entre deux seringues réunies par un robinet 3 voies), mettant en évidence un passage de microbulles dans l’oreillette gauche après l’injection par voie veineuse périphérique. L’ETO permet d’évaluer l’anatomie du septum interauriculaire et d’identifier la présence d’un anévrisme.
Le FOP peut être responsable d’embolie artérielle, d’AVC/AIT inexpliqués et récidivants, d’hypoxie non corrigeable sous oxygène, de syndrome de décompression chez le plongeur et de migraine non soulagée par traitement. Sa découverte peut amener à discuter d’une fermeture par voie percutanée(7). Il est donc important de disposer de techniques de détection fiables, à la fois sensibles et spécifiques.
La CIA est une malformation cardiaque congénitale fréquente, se présentant sous la forme d’une ouverture anormale dans le septum interauriculaire. La pression sanguine du côté gauche du cœur étant supérieure à celle du côté droit, le sang s’écoule en permanence vers l’oreillette droite par cette ouverture (figure 2).
Figure 2. Communication interauriculaire.
La CIA touche un enfant sur 1 500 naissances, et est la deuxième cardiopathie congénitale(8) après la bicuspidie aortique. Elle est responsable d’une dilatation des oreillettes et des cavités droites. A l’âge adulte, cette pathologie peut favoriser l’hypertension artérielle pulmonaire (HTAp), un AVC et/ou une fibrillation auriculaire (FA).
L’indication de fermeture des CIA est retenue en cas de shunt important, de dilatation ventriculaire droite et d’apparition de symptômes tels que dyspnée ou diminution de la capacité physique. Un cathétérisme cardiaque est alors proposé pour vérifier les pressions et les résistances pulmonaires.
La cyanose ou l’embolie paradoxaleà travers le FOP (embole systémique d’origine veineuse) sont des signes cliniques importants. Elles surviennent probablement pendant des manœuvres de Valsalva en cas d’hypertension pulmonaire aiguë sur embolie pulmonaire.
L’indication de fermeture percutanée de FOP et CIA doit être posée après un bilan exhaustif réalisé en collaboration avec les neurologues (FOP-AVC), les pneumologues ou réanimateurs (syndrome platypnée-orthodéoxie).
La fermeture percutanée des FOP et CIA se fait avec des prothèses comprenant deux disques (figure 3) qui assurent une fermeture complète du shunt interauriculaire. Dans le FOP, la prévention des récidives repose désormais sur trois options thérapeutiques : traitement médical par antiagrégants plaquettaires ou par anticoagulants et la fermeture par voie endovasculaire(9).
Figure 3. Prothèse avec ses deux disques. A : prothèse déployée ; B : visualisation des 2 disques.
En salle de cardiologie interventionnelle
La fermeture de FOP ou de CIA est réalisée sous anesthésie générale et ventilation mécanique pour permettre le monitoring par ETO durant toute la procédure.
Le patient est sous antiagrégants plaquettaires (aspirine et/ou clopidogrel) et bénéficiera d’une héparinothérapie perprocédure après ponction de la veine fémorale.
Le cardiologue cathétérise l’oreillette droite (OD) avec une sonde diagnostique de type JR4 ou MP 5 F pour franchir le défect septal avec un guide que l’on stabilise dans une veine pulmonaire. On remplace la sonde diagnostique par une gaine porteuse de taille adaptée à la prothèse utilisée. L’ETO permet de confirmer l’anatomie septale puis de définir la taille de la prothèse (figure 4). Dans le cas des CIA, on réalise une calibration à l’aide d’un ballon et d’une réglette (figure 4). Après avoir choisi la prothèse de taille adéquate, elle est, dans un premier temps, trempée dans une cupule d’eau héparinée (50 000 UI d’héparine diluée dans 1 000 ml de NACL) puis vissée sur le système de largage inséré dans la gaine. Les opérateurs procèdent à la mise en place de la prothèse sous scopie et ETO. Dans notre centre, le paramédical ne participe pas directement à la mise en place de la prothèse sur le cathéter d’insertion, contrairement au sertissage d’une valve TAVI. Le largage de la prothèse (figure 5) se fait sous guidage radioscopique et ETO.
Figure 4. Calibration de la CIA. A : contrôle du ballon sous ETO ; B : calibrage avec la réglette ; C : contrôle du ballon sous scopie.
Figure 5. Largage de la prothèse.
Après la procédure, le paramédical assure la traçabilité du matériel utilisé et joint au dossier du patient le compte rendu de l’examen ainsi que la fiche de suivi sur laquelle le cardiologue aura notamment indiqué le traitement antiagrégant plaquettaire ou anticoagulant que le patient devra suivre pendant au minimum 6 mois.
Des complications durant la procédure peuvent survenir
AVC, tamponnade, migration de la prothèse après largage, saignement et hématome au point de ponction. Elles sont rares mais nécessitent une mobilisation immédiate de toute l’équipe pour minimiser le risque de séquelles (thrombectomie artérielle, recapture de prothèse, transfusion, etc.).
Quels rôles pour les paramédicaux
Comme dans toutes les procédures réalisées en salle de cardiologie interventionnelle, le rôle du paramédical est important pour assurer le bien-être et la sécurité du patient, gages de réussite de la procédure. Une parfaite connaissance du matériel utilisé est indispensable. Après avoir validé étape par étape les différents items de la check-list « Sécurité du patient », il est présent pour lui expliquer, le rassurer, l’installer le plus confortablement possible et assurer le bon déroulement de l’examen auprès des médecins. On peut recourir si besoin à l’utilisation du MEOPA ou à des techniques comme l’hypnose en cas d’angoisse ou d’état de stress avant le début de l’examen. Tout au long de l’examen, le paramédical assure la surveillance clinique, technique et hémodynamique, tout en veillant au bon respect des règles de radioprotection, d’hygiène et d’asepsie des opérateurs et du champ opératoire. Une parfaite collaboration entre l’équipe d’anesthésie, les cardiologues interventionnels, les échocardiographistes et les paramédicaux est indispensable pour réaliser une procédure de qualité.
A l’instar de tous les examens réalisés dans notre unité, des protocoles de soins ont été élaborés en collaboration avec l’équipe médicale afin de limiter les aléas perprocédures et guider au mieux l’équipe paramédicale, notamment les nouveaux arrivants.
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