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Mise au point

Publié le 31 mai 2012Lecture 5 min

L’échographie endocoronaire

M. GILARD, Hôpital de la Cavale Blanche, CHU de Brest

Depuis plus de 50 ans, la coronarographie permet de diagnostiquer l’existence de sténoses coronaires, de les localiser et d’en apprécier la sévérité. Mais elle a plusieurs limites. Elle ne visualise que la lumière de l’artère à l’aide du produit de contraste. Elle donne une représentation bidimensionnelle de l’artère pouvant, malgré des incidences multiples, méconnaître une sténose excentrée. Elle analyse mal les vaisseaux sinueux, les bifurcations ou superpositions de vaisseaux, auxquels s’ajoutent les effets de distorsion radiologique. Enfin, elle n’apporte aucune information sur la structure de la plaque athéromateuse (aspect géométrique et composition) et l’état de la paroi artérielle.

L’échographie endocoronaire (IVUS, intravascular ultrasound) offre une image de haute résolution, en temps réel, de toute la paroi artérielle. Elle s’est développée depuis les travaux de N. Bom et son équipe en 1971(1,2). Les premières images échographiques de vaisseaux datent des années 1980(3) et c’est en 1988 que cette technique a été utilisée dans les artères coronaires humaines. La miniaturisation  du matériel utilisé avec l’IVUS (actuellement 2,9 F soit 0,9 mm pour une fréquence de 40 MHz) permet de l’utiliser aisément. De plus, elle présente de nombreux avantages : • la possibilité de détecter une plaque d’athérosclérose et d’en déterminer grossièrement sa composition (fibreuse, cellulaire, calcique) ; • la possibilité d’assurer une quantification précise des dimensions endoluminales, des dimensions artérielles totales et des dimensions spécifiques de la plaque d’athérosclérose. Elle a aussi permis d’analyser les effets de l’angioplastie et de mieux comprendre ses complications aiguës – dissections, thromboses – et chroniques – resténoses. Ainsi, grâce à ces données inestimables, l’angioplastie s’est améliorée progressivement. Mieux visualiser la paroi des artères coronaires L’IVUS permet de visualiser la paroi des artères coronaires à la différence de la coronarographie conventionnelle. On objective ainsi l’aspect de la plaque athéromateuse, le remodelage du vaisseau en sa présence. Le phénomène de remodelage des artères athéromateuses est un concept ancien et bien connu des pathologistes(4), qui a été redécouvert in vivo par l'échographie intravasculaire(5). En effet, in vivo, dans les segments adjacents aux sténoses, une expansion de la paroi externe du vaisseau coronaire compense à 60 % l'accumulation de matériel athéroscléreux composé en grande partie d'un matériel peu échogène et souple, et permet ainsi le maintien d'une lumière vasculaire angiographiquement normale dans des vaisseaux pathologiques. Au niveau des segments artériels de référence apparemment normaux en angiographie, l'échographie peut révéler des lésions athéromateuses parfois volumineuses (figure 1). Figure 1. Remodelage artériel. A : coronarographie ; B : IVUS de l’artère circonflexe ; C : IVUS de l’IVA ; D : remodelage positif de la circonflexe ; E : remodelage négatif de l’IVA. Ainsi, on peut utiliser l’IVUS afin d’affirmer l’origine coronaire d’un syndrome douloureux thoracique alors que la coronarographie objective un vaisseau sub-normal. Dans ces cas, l’IVUS peut objectiver une rupture de plaque partiellement thrombosée. L’IVUS permet ainsi de détecter un plus grand nombre de plaques instables que l’angiographie (figure 2)(6).     Figure 2. Rupture de plaque non détectée par la coronarographie. A : coronarographie au décours d’un SCA ; B et C : la rupture de plaque est détectée uniquement par échographie (IVUS). Mieux évaluer les lésions L’IVUS bénéficie d’autre part d’une haute résolution spatiale de 90 μm (coronarographie : 200 μm), ce qui permet une mesure plus exacte du diamètre des vaisseaux et de la longueur de la zone athéromateuse. Cette étude morphologique prend toute son importance lors de l’analyse du tronc commun. Elle permet ainsi de déterminer l’importance des lésions athéromateuses, leur diffusion sur l’ostium ou la bifurcation. Elle est utile dans le traitement des bifurcations chez les patients à haut risque afin de réaliser une cartographie précise des lésions et après l’angioplastie de confirmer la bonne apposition des stents (figure 3).   Figure 3. IVUS après l’implantation d’un stent dans l’IVA de part et d’autre de la bifurcation avec la diagonale. A : coronarographie poststent ;  B : IVUS de l’IVA en amont de la bifurcation ; C : IVUS de l’IVA en aval de la branche diagonale.On objective une malapposition du stent en IVUS (B), non détectée par l’angiographie.   L’IVUS comparé aux autres techniques Scanner et IRM Lorsque l’on compare l’IVUS aux autres techniques d’imagerie en coupes telles que le scanner ou l’IRM, il faut toujours se rappeler que la résolution spatiale entre ces techniques est différente et qu’elle détermine la pertinence des données obtenues : 90 μm pour l’IVUS comparé à 350 μm pour le MSCT (la meilleure des deux autres techniques). OCT Une autre technique d’imagerie en coupes invasive possède une résolution spatiale bien supérieure : la tomographie par cohérence optique (OCT). Cependant, cette nouvelle imagerie ne permet pas une visualisation de l’ensemble de la paroi. Ainsi, elle ne donnera pas d’informations sur l’épaisseur des plaques, sur le remodelage, sur l’adventice dont on sait qu’elle participe fortement dans le processus athéromateux. Elle est actuellement moins performante sur les gros vaisseaux tels que le tronc commun. En ce qui concerne le caractère fonctionnel d’une sténose, des surfaces seuils ont été définies. Cependant, en 2012, si l’on veut déterminer au cours de la coronarographie le caractère hémodynamiquement significatif d’une sténose coronaire, il faut utiliser la FFR (fractional flow reserve) et non l’IVUS. En effet, à l’IVUS le retentissement ischémique d’une sténose est déterminé par une surface luminale inférieure à 4 mm2. Or, cela ne peut être appliqué qu’au niveau de la partie proximale des coronaires et varie selon le sexe et la taille. De plus, ces études reposent sur un petit nombre de patients. Conclusion L'IVUS, grâce à sa haute résolution spatiale et sa possibilité d'analyser la paroi du vaisseau dans sa globalité nous a permis d'améliorer nos connaissances sur la maladie athéromateuse et de perfectionner la revascularisation coronaire percutanée. Il est un outil indispensable dans toute unité de cardiologie interventionnelle, pour analyser une image ambiguë à la coronarographie et pour guider un geste d'angioplastie chez les patients à haut risque.

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