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Publié le 15 déc 2021Lecture 8 min

Ballon IN.PACT™ pour le traitement des sténoses de fistules artérioveineuses : la durabilité est confirmée

Raphaël COSCASa,b, a. Service de chirurgie vasculaire, CHU Ambroise Paré, Boulogne-Billancourt, France. b. UMR 1018, Inserm-Paris11 - CESP, Université de Versailles Saint-Quentin-en-Yvelines, Université Paris-Saclay, Hôpital Paul Brousse, Villejuif.

Les sténoses de fistule artérioveineuse (FAV) représentent par ordre de fréquence la première complication des abords vasculaires d’hémodialyse(1-12). Ces sténoses posent des problèmes d’utilisation de la FAV en dialyse, diminuent la qualité de l’hémodialyse et menacent la perméabilité de la FAV(1-12). En sus de la pénibilité pour les malades, il s’agit d’un problème de santé publique majeur avec un coût important pour le système de santé(13-14).

La composante d’hyperplasie myo-intimale dans les sténoses de FAV a fait penser que les ballons actifs au paclitaxel pourraient être une arme utile puisque c’est le processus contre lequel le paclitaxel agit. C’est pour démontrer cette efficacité du ballon actif IN.PACT™ que l’étude IN.PACT AV a été conçue. Les résultats à 6 mois ont été publiés en 2020 dans le New England Journal of Medicine(15). Nous disposons à présent des résultats à 12 et 24 mois. Rationnel et design de IN.PACT AV L’objectif de l’étude IN.PACT AV est de comparer l’angioplastie au ballon actif à l’angioplastie standard au ballon nu pour le traitement des sténoses de novo ou des resténoses sur FAV native au membre supérieur(15). Il s’agit d’une étude prospective multicentrique randomisée (randomisation 1 pour 1) en simple aveugle incluant 330 patients. Le suivi prévu est de 5 ans. Les patients ont été inclus sur 29 sites aux États-Unis, au Japon et en Nouvelle- Zélande. D’importance, cette étude utilise un core lab Doppler, un core lab pour angiographie et un comité d’événements cliniques, tous trois indépendants et aveugles. Critères d’inclusion et de non-inclusion Ces critères sont voisins de ceux utilisés dans la plupart des études sur le sujet. Pour être inclus, les patients devaient avoir une espérance de vie supérieure à 12 mois, une FAV créée au moins 60 jours avant l’angioplastie, une FAV utilisée en hémodialyse sur au moins 8 sessions sur 12 lors des 4 dernières semaines, un diamètre de vaisseaux cible compris entre 4 et 12 mm, une lésion cible < 100 mm de long, et une prédilatation par un ballon à haute pression (≤ 30 % de sténose et absence de dissection limitant le flux) réussie. Les patients n’étaient pas inclus s’ils présentaient un des critères suivants : intervention sur la lésion cible dans les 30 jours précédents, antécédent de thrombose ou FAV actuellement thrombosée, reprise chirurgicale prévue au site d’angioplastie, sténose centrale hémodynamiquement significative ne pouvant être traitée préalablement à l’angioplastie, stent en place dans l’accès vasculaire cible, lésion pouvant poser un problème d’insuffisance d’inflation au niveau de la lésion cible, présence d’un anévrisme ou pseudo-anévrisme nécessitant un traitement au niveau de la lésion cible, autre lésion nécessitant un traitement secondaire dans les 30 jours postprocédure. On peut relever dans ces critères quelques éléments spécifiques comme le fait que la sténose devait être levée par un ballon à haute pression (ballons à athérotomes exclus) et l’exclusion des indications de maturation ballon-assisté sur FAV non encore utilisée. La lésion devait être une sténose de novo ou une resténose (hors resténose intrastent) ≥ 50 % située entre les 20 mm précédant l’anastomose et la jonction axillo-sous- clavière. Critères de jugement Il y a un critère principal de jugement de sécurité et un critère principal de jugement d’efficacité (comme dans la plupart des études randomisées portant sur les ballons actifs). Le critère de sécurité est la survenue d’un événement indésirable grave dans les 30 jours postprocédure. Le critère d’efficacité est la perméabilité primaire de la lésion cible à 6 mois. Cette dernière est définie par l’indemnité de réintervention basée sur les indications suivantes : – sténose ≥ 50 % (confirmée par core lab) associée à une dysfonction du circuit de dialyse ; – sténose ≥ 70 % sans anomalie autre. Population et données basales Il y avait 170 patients dans le groupe IN.PACT et 160 dans le groupe témoin. À l’inclusion, les deux populations n’étaient pas différentes sur les critères usuels (âges, comorbidités). Les FAV traitées étaient généralement des radiocéphaliques (environ 50 % des patients) et des brachiocéphaliques (un tiers des patients). Les lésions étaient longues de 47 mm dans le groupe IN.PACT et 40 mm dans le groupe témoin (p = 0,02) avec un pourcentage moyen de sténose de 65 %. Les FAV étaient plutôt anciennes, âgées de plus de 3 ans en moyenne. Il s’agissait majoritairement de resténoses (70 %) contre 30 % de sténoses de novo. Résultats À 6 mois (critère principal de jugement) Le déploiement des ballons ne posait pas de problème dans les deux groupes. La procédure était considérée comme un succès (≤ 30 % de sténose et absence d’événement indésirable) dans 73,5 % des cas dans le groupe IN.PACT versus 76,9 % dans le groupe témoin (p =0,49 ; non significatif). Concernant le critère de jugement principal d’efficacité, il existait une supériorité significative du ballon IN.PACT par rapport au ballon nu avec une perméabilité primaire de la lésion cible à 6 mois de 82,2 % dans le groupe IN.PACT versus 59,5 % dans le groupe témoin (p < 0,001). La différence semble significative dès 120 jours de suivi, une fois passé l’effet mécanique de la dilatation. Il est intéressant de noter que cette supériorité se retrouve aussi en termes de perméabilité primaire du circuit de dialyse à 6 mois, définie par l’indemnité de réintervention et de thrombose postprocédure sur l’accès vasculaire cible (73,2 % vs 48,0 % en faveur du groupe IN.PACT ; p < 0,001). Ces éléments ont un net impact sur le taux de réinterventions sur la lésion cible (16,3 % dans le groupe IN.PACT versus 39,9 % dans le groupe témoin ; p < 0,001). Surtout, le nombre total de réinterventions nécessaires au niveau de la lésion cible pour maintenir la perméabilité primaire à 6 mois est diminué de moitié. Résultats à 12 et 24 mois Les résultats du suivi à 12 mois de l’étude IN.PACT ont été présentés au congrès LINC 2020. Ils confirment le maintien de la supériorité du ballon IN.PACT™ sur l’angioplastie non imprégnée en termes de perméabilité primaire (65,3 % vs 46,3 % ; p < 0,001 au log-rank) et de perméabilité globale du circuit de dialyse (55,1 % vs 35,0 % ; p < 0,001 au log-rank). Il est intéressant de noter qu’à l’échelle de l’étude, le nombre total d’interventions destinées à maintenir la perméabilité de la lésion cible et la perméabilité globale du circuit de dialyse est inférieur de 35,4 % et 34,5 % respectivement dans le groupe IN.PACT. Les résultats à 24 mois ont finalement été présentés très récemment au congrès Charing Cross 2021. La supériorité du ballon IN.PACT™ sur l’angioplastie non imprégnée reste maintenue en termes de perméabilité primaire (52,2 % vs 36,2 % ; p < 0,001 au log-rank, figure 1) et de perméabilité globale du circuit de dialyse (39,5 % vs 25,4 % ; p < 0,001 au log-rank, figure 2). Là aussi, à l’échelle de l’étude, le nombre total d’interventions destinées à maintenir la perméabilité de la lésion cible et la perméabilité globale du circuit de dialyse est inférieur de 23,4 % et 24,3 % respectivement dans le groupe IN.PACT. La diminution progressive du différentiel dans le temps entre les groupes semble assez logique et trouve probablement son explication dans l’atténuation de l’effet du paclitaxel à 24 mois. L’analyse plus fine des courbes de perméabilité primaire en Kaplan-Meier permet de déduire que l’utilisation du ballon IN.PACT™ permet de gagner environ 15 mois de perméabilité primaire moyenne en comparaison à l’angioplastie au ballon non imprégnée. Analyses en sous-groupes Les analyses des sous-groupes étaient très attendues car elles pouvaient permettre de dégager les populations pouvant bénéficier le plus de l’angioplastie au ballon IN. PACT™. Elles ont été réalisées à 6, 12 et 24 mois selon le type de lésion (de novo, resténose), le type de FAV (radiocéphalique, brachiocéphalique, brachiobasilique, etc.) et la localisation de la lésion (versant artériel, anastomose, zone de cannulation, etc). Elles font apparaître une supériorité particulièrement significative du ballon IN.PACT™ pour le traitement des resténoses (vs les sténoses de novo), des fistules céphaliques (radiocéphaliques et brachiocéphaliques) et des sténoses situées au niveau de l’anastomose, de la zone de cannulation et de la crosse de la céphalique. En y regardant de plus près, des différences en faveur du ballon IN.PACT™ existent également dans les autres sous-groupes mais cela n’est pas significatif, probablement du fait d’un manque de puissance en lien avec de faibles effectifs. Sécurité Depuis l’alerte sur un possible risque de surmortalité avec les ballons actifs dans les artères des membres inférieurs, ce point est regardé de près. Il n’y a pas de différence concernant le critère de jugement principal de sécurité (survenue d’un événement indésirable grave dans les 30 jours postprocédure ; 4,2 % dans le groupe IN.PACT vs 4,4% dans le groupe témoin). Mieux, à 180 jours, le taux d’indemnité d’événement indésirable est significativement supérieur dans le groupe IN.PACT en comparaison au groupe témoin (75,6 % vs 51,9 %). La mortalité a également été analysée et rapportée. La survie à 12 et 24 mois est similaire dans les deux groupes (90,6 % dans le groupe IN.PACT vs 90,4 % dans le groupe témoin à 12 mois et 82,4 % dans le groupe IN.PACT vs 82,8 % dans le groupe témoin à 24 mois) (figure 3). Ces éléments vont dans le sens d’une précédente métaanalyse sur la sécurité des ballons actifs dans les abords vasculaires d’hémodialyse(16). Conclusion Les résultats de l’étude prospective multicentrique IN.PACT AV démontrent la supériorité du ballon actif IN.PACT™ sur le ballon nu dans les sténoses d’abords vasculaires d’hémodialyse (fistules natives utilisées). Les critères de jugement principaux d’efficacité à 6 mois et de sécurité à 30 jours sont atteints avec significativité statistique. Le nombre de réinterventions sur la lésion cible est diminué de moitié à 6 mois. Les résultats à 12 et 24 mois récemment présentés confirment l’effet durable de l’utilisation de ce ballon actif dans les sténoses de FAV sans élément d’inquiétude concernant le critère de sécurité. Les resténoses, les fistules céphaliques et les sténoses situées dans certains localisations spécifiques (anastomose, zone de cannulation et crosse de la céphalique) bénéficient le plus de cette thérapie. Le rapport coût-efficacité devra être évalué dans les années à venir.

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