Publié le 30 sep 2013Lecture 5 min
Fonction ventriculaire gauche : pourquoi privilégier l’abord apical en échocardiographie ?
H. LARDOUXa, S. FADILIb, D. DE ZUTTEREc a. Clinique Labrouste, Paris b. CHU de Casablanca c. Institut hospitalier franco-britannique, Levallois-Perret
Réalisée en routine quotidienne par les cardiologues, l’évaluation de la fonction ventriculaire gauche par échocardiographie a considérablement évolué depuis son introduction, dans le milieu des années 1970, alors simple mesure en mode TM, avec sonde monocristal.
Voie parasternale : un abord « classique »
En mode TM, la mesure de la fonction ventriculaire gauche s’effectue soit par abord parasternal, soit, plus accessoirement, par abord sous-costal. Faisant suite à cette période « aveugle », l’imagerie bidimensionnelle a constitué un progrès majeur, permettant l’abord apical et les coupes usuelles « quatre et deux cavités », véritable fenêtre sur les cavités cardiaques et en particulier le ventricule gauche.
Depuis se sont ajoutées les différentes modalités Doppler et, plus récemment, l’étude des déformations faisant appel à la technique du speckle tracking. L’échographie volumique, en plein essor, complète les outils de l’échographie cardiaque
Paradoxalement, l’aspect pratique de la mesure de la FEVG n’a guère évolué depuis ses débuts, selon un rituel immuable : abord parasternal, abord apical, si besoin est sous-costal.
Cet article se propose de souligner l’apport déterminant de l’utilisation systématique, en routine, de la voie apicale pour l’évaluation de la FEVG.
La voie apicale en première intention
Cet abord fournit d’emblée, grâce à une vision rapide et globale, une majorité d’informations : cavités cardiaques ventriculaires et auriculaires, appareils valvulaires (hormis la valve pulmonaire) et péricarde.
Pourquoi reléguer chronologiquement, dans le déroulé de l’examen, une telle source de renseignements – obtenus dans plus de 90 % des cas – à l’étude de la fonction globale et segmentaire du ventricule gauche ? Renseignements autrement plus pertinents (coupes apicales 4C, 2C et 3C, ou encore volumétrie 3D du ventricule gauche) que la méthode de Teicholtz, certes utile, est exclusivement segmentaire et d’obtention moins constante chez l’adulte. S’ajoutent, par voie apicale, l’étude de la fonction diastolique du ventricule gauche et l’analyse de la performance du ventricule droit.
Voie apicale et technologies récentes
Les technologies les plus récentes – mesure globale de la fonction systolique du ventricule gauche (figure 1), déformation longitudinale (figure 2) et sonde volumique (figure 3) – confirment l’apport primordial de la voie apicale.
Figure 1. FEVG méthode de Simpson - imagerie volumique : incidence apicale 4C et 2C (mesure semi-automatique par détection automatique de l’endocarde).
Figure 2. Déformation longitudinale apex 4C (sonde 2D), très abaissée à – 11,6 %, avec altération de la cinétique des segments apicaux, témoin d’une ischémie myocardique (phase de récupération d’une échographie d’effort).
Figure 3. Sonde matricielle 4D : mesure de la FEVG 3D (FEVG normale ; courbe de volume d’éjection systolique).
La mesure de la déformation longitudinale fait désormais partie intégrante de la « routine » de l’examen échographique. La déformation globale (global strain) longitudinale, en fournissant une évaluation de la fonction VG globale (figure 2), complète la mesure de la FEVG par la méthode de Simpson ou du speckle tracking. L’étude de la déformation longitudinale et de la contraction post-systolique (figure 4) contribue au diagnostic de cardiopathie ischémique. Elle peut également être appliquée à l’appréciation de la fonction du ventricule droit.
Figure 4. Échographie 4D volumique : déformation postsystolique normale.
Les sondes matricielles constituent une importante avancée technologique et, par voie de conséquence, diagnostique : mesure de la fonction VG volumique (figures 3 à 5), de la masse myocardique, du débit cardiaque (figure 3) et des déformations globales longitudinale (figure 6), mais aussi circonférentielle et radiale (figure 7).
Figure 5. Sonde matricielle 3D : mesure de la FEVG 3D (altération sévère de la FEVG et aplatissement des courbes de volume segmentaire).
Figure 6. Échographie 4D volumique : déformation longitudinale globale : – 22 % ; FEVG volumique : 64 % ; volume d’éjection systolique : 58 ml.
Figure 7. Échographie 4D volumique : déformation radiale globale : + 48 % ; FEVG volumique : 59 %, volume d’éjection systolique : 54 ml.
Seule restriction actuelle à une utilisation de routine : la qualité de l’imagerie, qui autorise, aujourd’hui, cette possibilité pour un peu plus d’un patient sur deux. Étape clinique majeure, même si la mesure des volumes ventriculaires 3D reste sous-estimée par comparaison avec l’IRM cardiaque, qui demeure la méthode de référence dans ce domaine.
D’autres modalités d’exploration, telles que l’échocardiographie de stress, bénéficient aussi, grâce à l’imagerie volumique en temps réel, du recours à la voie apicale : analyse triplan sur cycle cardiaque unique, imagerie de coupes « i slice » visualisant la totalité du ventricule gauche, de l’apex à la base (figure 8), et analyse de la déformation longitudinale.
Figure 8. Échographie 4D volumique : imagerie de coupe « islice », de l’apex vers la base du ventricule gauche obtenue à partir d’une coupe apicale.
Enfin, les agents de contraste (SonoVue®) contribuent, chez des patients peu échogènes (définition inadéquate de deux segments consécutifs), grâce à une opacification de la cavité ventriculaire gauche, à améliorer la fiabilité de l’analyse segmentaire dans les incidences apicales. Ils sont donc particulièrement indiqués en échographie de stress. Les sondes volumiques de dernière génération permettent, quant à elles, une optimisation additionnelle de l’échographie de contraste grâce à l’imagerie triplan (figure 9) et aux coupes transversales « i slice ».
Limites de la voie apicale
Les limites de la voie apicale se réduisent progressivement. En incidence parasternale gauche, petit axe (valve mitrale, piliers et apex), les sondes conventionnelles (bidimensionnelles) fournissent d’importants renseignements sur la fonction segmentaire VG. Mais cet apport spécifique est aisément obtenu avec les sondes volumiques qui, grâce à la technologie « i slice », réalisent une succession de coupes tomographiques petit axe de l’apex à la base du ventricule gauche (figure 8).
Cette coupe parasternale est aussi largement utilisée en échographie 2D, pour l’étude des cavités droites. L’analyse tridimensionnelle échocardiographique des cavités droites est en cours d’évaluation. L’IRM demeure aussi la méthode de référence.
En conclusion
L’évolution spectaculaire des technologies échocardiographiques a progressivement bousculé notre vision et les modalités d’analyse morphologique et dynamique du ventricule gauche.
La voie apicale, grâce aux multiples informations qu’elle fournit, constitue l’abord de référence et, de ce fait, justifie d’être réalisée, en première intention, lors d’un examen échocardiographique.
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