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Cardiologie générale

Publié le 01 jan 2017Lecture 5 min

Endocardites infectieuses : les points forts

B. IUNG, Hôpital Bichat, Paris


L’endocardite infectieuse est une pathologie rare mais particulièrement grave, avec une mortalité intrahospitalière autour de 20 % et une mortalité à 5 ans autour de 40 %. Ces dernières années ont été marquées par une meilleure connaissance de l’épidémiologie contemporaine, des avancées diagnostiques et une évaluation plus précise de la chirurgie valvulaire effectuée en phase aiguë d’endocardite. Les recommandations 2015 de la Société européenne de cardiologie sur la prévention, le diagnostic et le traitement de l’endocardite infectieuse prennent en compte ces données récentes afin d’optimiser la prise en charge des patients(1).

Épidémiologie L’incidence de l’endocardite infectieuse est estimée entre 15 et 60 cas par an par million d’habitants de façon concordante dans plusieurs études en population générale(2). Cette incidence n’a pas évolué au cours des dernières décennies. En revanche, la présentation de l’endocardite a évolué. Elle atteint désormais des patients plus âgés et le staphylocoque est devenu plus souvent responsable de l’endocardite que le streptocoque. Les endocardites sur matériel étranger (prothèse valvulaire, stimulateurs, défibrillateurs implantés) sont en fréquence croissante et représentent désormais environ 20 % des endocardites(3). L’évolution des cardiopathies sousjacentes suit l’épidémiologie des valvulopathies en population générale avec une prédominance de valvulopathies dégénératives et un nombre croissant de patients opérés. La prédominance du staphylocoque est surtout imputée à l’augmentation des endocardites liées aux soins. Prévention Il est désormais admis que les bactériémies de faible intensité mais répétées ont probablement une responsabilité dans l’endocardite au moins aussi importante que des bactériémies intenses et transitoires suivant des procédures interventionnelles, en particulier bucco-dentaires. De ce fait, l’antibioprophylaxie n’est plus recommandée qu’avant les procédures dentaires à haut risque, effectuées chez les patients à haut risque d’endocardite infectieuse, principalement les patients ayant une prothèse valvulaire, un antécédent d’endocardite ou une cardiopathie congénitale cyanogène non corrigée(1). En revanche, la prévention de l’endocardite privilégie désormais les mesures d’hygiène non spécifique, en particulier bucco-dentaires et cutanées (encadré). Tous les professionnels de santé doivent en particulier veiller aux mesures d’asepsie afin de limiter le risque d’endocardites liées aux soins. Certaines publications récentes ont suggéré une augmentation de l’incidence de l’endocardite à la suite de la restriction des indications d’antibioprophylaxie. Ces constatations sont toutefois controversées car reposant sur l’analyse de bases de données administratives et discordantes avec d’autres études. Diagnostic Les deux composantes majeures du diagnostic de l’endocardite demeurent la mise en évidence de l’atteinte de l’endocarde et l’isolement du micro-organisme responsable. Le diagnostic peut toutefois être difficile dans les cas où l’échocardiographie ou les hémocultures ne sont pas contributives. Même si l’échocardiographie transoesophagienne est nettement plus sensible que la voie transthoracique, elle peut être mise en défaut, en particulier dans les endocardites sur matériel étranger. Des études récentes ont montré la valeur diagnostique de la tomographie par émission de positons (TEP) en cas d’endocardites sur prothèse ou matériel de stimulation. La sensibilité élevée de la TEP permet de reclasser un nombre important d’endocardites initialement considérées comme possibles en endocardi tes certaines. La scintigraphie aux leucocytes marqués est une autre technique de médecine nucléaire moins sensible mais plus spécifique que la TEP, et qui peut donc utilement compléter celle-ci dans les cas où le diagnostic demeure incertain(4). Malgré l’apport indiscutable des techniques de médecine nucléaire, il existe des limitations en rapport avec leur disponibilité, l’irradiation, la résolution spatiale limitant leurs performances dans les endocardites sur valve native et l’existence de fixations non spécifiques de la TEP autour des prothèses en l’absence d’infection, en particulier dans les mois suivant l’intervention. Ces techniques doivent donc être mises en œuvre dans des équipes ayant une expertise particulière dans l’endocardite et les résultats doivent être interprétés en fonction du contexte clinique et des autres examens. Le diagnostic microbiologique a également progressé ces dernières années. Les hémocultures demeurent la référence pour identifier le micro-organisme responsable, mais la spectrométrie de masse permet une identification plus rapide. Le diagnostic moléculaire basé sur l’amplification génique (PCR) est actuellement utilisé sur les valves explantées où sa performance diagnostique est meilleure que la culture bactérienne. Toutefois, le diagnostic est seulement rétrospectif chez les patients opérés. Les techniques d’amplification génique applicable au sang sont prometteuses mais leur utilisation demeure très limitée(5). Les techniques d’imagerie extracardiaque (scanner et imagerie par résonance magnétique) sont utiles pour dépister des complications emboliques cliniquement silencieuses, qui sont fréquentes dans l’endocardite. Leur mise en évidence représente un critère mineur de la classification de Duke et peut donc contribuer au diagnostic d’endocardite. Ces nouvelles techniques d’imagerie multimodale ne sont évidemment pas nécessaires dans tous les cas d’endocardite, mais leur utilisation doit être réservée aux situations où le diagnostic demeure incertain après l’échocardiographie (figure 1). Figure 1. Algorithme décisionnel pour le diagnostic d’endocardite infectieuse. Recommandations 2015 de la Société européenne de cardiologie(1). Indications de chirurgie valvulaire en phase aiguë d’endocardite Les indications de chirurgie valvulaire découlent du traitement ou de la prévention des complications de l’endocardite infectieuse, qui sont classées en complications hémodynamiques (insuffisance cardiaque due à une régurgitation valvulaire aiguë), infectieuses (extension périvalvulaire de l’infection ou sepsis réfractaire avec persistance d’hémocultures positives sous traitement) et emboliques, en rapport avec la migration de végétations(1). Ces indications, de même que leur chronologie, sont détaillées dans les recommandations européennes. Les indications les plus urgentes sont d’ordre hémodynamique an cas de fuite sévère mal tolérée (figure 2). En pratique, les indications opératoires doivent être confrontées à l’estimation du risque opératoire en fonction des caractéristiques du patient et du type de complications liées à l’endocardite. Par exemple, en cas d’accident vasculaire cérébral hémorragique, il est recommandé de différer si possible la chirurgie de 3-4 semaines en raison du risque d’aggravation de l’hémorragie. En revanche, il n’y a pas lieu de différer la chirurgie après un accident vasculaire cérébral ischémique, sauf en cas de déficit massif ou de coma. Figure 2. Endocardite mitrale. Perforation de la valve explantée. Conclusion Environ trois quarts des patients présentent une indication opératoire théorique en phase aiguë d’endocardite et environ la moitié sont effectivement opérés. Le bénéfice de la chirurgie en phase aiguë d’endocardite a parfois été controversé mais, pour la première fois, une étude randomisée a montré le bénéfice d’une chirurgie précise chez des patients présentant une grosse végétation associée à une régurgitation sévère(6,7).

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