Publié le 09 jan 2018Lecture 3 min
Actif ou passif, le tabagisme des jeunes reste préoccupant
Denise CARO, d’après les communications de Nicols Simon (Marseille), Isabelle Pin (Grenoble) et Anne-Laurence le Faou (Paris) au congrès de la Société française de pédiatrie
Avec près de 80 000 morts par an en France, le tabac est la première cause de mortalité prématurée évitable. « Cela équivaut à un Boeing de fumeurs qui s’écrase chaque jour », a souligné Isabelle Pin (Grenoble). Or la communication pour la lutte anti-tabac n’est pas à la hauteur de l’enjeu de santé publique. Le tabagisme passif et le tabagisme des jeunes sont deux sujets majeurs de préoccupation.
En 2014, 28 % des élèves de terminales fumaient de façon régulière, 67 % avaient l’expérience du tabac. Dès la 4e, un élève sur trois avait déjà fumé et 6 % fumaient régulièrement. Le collège et le lycée sont des périodes d’initiation, d’intensification et de création de la dépendance. Or, plus un individu est exposé tôt, plus il a de risques de devenir dépendant. Le tabagisme jeune est également un facteur prédictif d’abus et de dépendance à l’alcool(1). Enfin, il a été montré que la durée de l’intoxication compte plus que le nombre de cigarettes fumées. Un fumeur régulier sur deux ayant commencé à l’adolescence décède d’une maladie liée au tabac.
Le dépistage du tabagisme chez l’adolescent diffère de chez l’adulte. Le test doit être expliqué au jeune avant sa réalisation, afin que celui-ci adhère à la démarche. La discussion doit être ouverte avec pour seul objectif de rechercher une exposition sans jugement, ni culpabilisation.
La plupart des tests, comme celui de Fagerström, ont été développés et validés pour les adultes ; ils sont mal adaptés aux modes de consommation des adolescents. Il faut leur préférer des tests comme le Hooked on Nicotine Checklist (HONC) en 10 questions, l’échelle Autonomy Over Smoking Scale (AUTO) en 12 items auto-administrés ou le Brief Screener for Tobacco, Alcohol and other Drugs (BSTAD) qui a le mérite d’être très sensible mais l’inconvénient de ne pas être validé en français(2).
À côté du dépistage d’un tabagisme actif chez l’adolescent, la recherche d’un tabagisme passif chez l’enfant est également très importante. Aux États-Unis, 40 % des enfants de 3 à 11 ans sont exposés au tabac(3). Or le dépistage en pédiatrie n’est pas à la hauteur du risque : 45 % des enfants âgés de 6 ans en moyenne vus en pédiatrie n’ont pas eu de dépistage d’un tabagisme et parmi les 55 % qui en ont bénéficié, près de 30 % étaient effectivement exposés au tabac. Même parmi les jeunes venant consulter pour une pathologie pouvant être en rapport avec une exposition au tabac, 4 sur 10 n’ont pas eu de dépistage(4).
Le tabagisme passif de l’enfant peut commencer très tôt dès la vie intra-utérine, du fait d’une exposition active ou passive au tabac de la mère pendant la grossesse. En 2003, 63 % des femmes arrêtaient de fumer au cours de la grossesse (dont 85 % au 1er trimestre, 10 % au 2e et 5 % au 3e), ce qui signifie que 37 % continuent de fumer.
Or l’exposition in utero ou à un très jeune âge a des répercussions importantes sur l’état respiratoire de l’enfant. Plusieurs études ont montré l’augmentation de fréquence des sifflements à l’âge de 2 ans chez les enfants qui avaient été exposés in utero ; le trouble persistait à l’âge de 3 ou 4 ans(5,6).
De même, de nombreux travaux mettent en évidence les conséquences délétères d’un tabagisme passif sur l’asthme, avec une augmentation du risque d’asthme et d’absentéisme scolaire ; si les deux parents fument, ce risque est multiplié par 4,45(7). Un taux élevé de cotinine sérique (métabolite de la nicotine) est associé à un asthme modéré ou sévère, à plus de 6 jours d’absence dans l’année, et à au moins une visite urgente dans l’année(8). Le tabagisme passif est un facteur indépendant de défaut de contrôle des symptômes et d’un débit expiratoire de pointe (DEP) altéré (RR = 3)(9). De plus, une exposition in utero est associée à une réduction des paramètres de la fonction respiratoire chez le nouveau-né, ces anomalies persistant à 2 et à 12 mois(10).
"Publié dans Pédiatrie Pratique"
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