Publié le 03 déc 2019Lecture 3 min
Cholestérol alimentaire et consommation d’œufs : sont-ils associés au risque cardiovasculaire ?
Louis MONNIER, Montpellier
En dépit de nombreux travaux, le rôle du cholestérol alimentaire en tant que facteur de risque cardiovasculaire reste controversé. Pour essayer de résoudre cette question, les auteurs ont publié dans le JAMA une métaanalyse réunissant 6 études prospectives. En introduction, les auteurs rappellent que les apports moyens en cholestérol alimentaire dans la population américaine sont de 293 mg/jour. Une grande partie de cet apport dépend de la consommation d’œufs (3 à 4 unités par semaine, chacun apportant 186 mg de cholestérol).
L’étude a porté sur 29 615 sujets (âge moyen 51,6 ans) qui ont été suivis sur une durée médiane de 17,5 années. Pour quantifier l’impact de la consommation alimentaire d’œufs et de cholestérol, les auteurs ont évalué l’augmentation du risque d’accidents cardiovasculaires et de décès quelle qu’en soit la cause. L’analyse statistique a utilisé le modèle du hazard ratio. Les auteurs ont calculé la différence de risque absolu engendrée par chaque incrément de consommation quotidienne égal à 300 mg pour le cholestérol et une demi-unité pour les œufs. Pour chaque incrément supplémentaire de 300 mg dans l’apport alimentaire en cholestérol, le hazard ratio (HR) a augmenté de 17 % (HR = 1,17, IC95% : 1,09-1,26) pour le risque d’événements cardiovasculaires mortels et non mortels et de 18 % (HR = 1,18, IC95% :1,10-1,26) pour la mortalité toutes causes. Pour toute augmentation de consommation égale à un demi-œuf par jour, le HR a augmenté de 6 % (HR = 1,06 ; IC95% : 1,03-1,10) pour le risque global d’événements cardiovasculaires et de 8 % (HR = 1,08 ; IC95% : 1,04-1,11) pour la mortalité totale. Ces résultats sont illustrés sur la figure 1.
Figure 1. Associations des incréments du cholestérol alimentaire ou de la consommation d'œuf avec le risque d'événements cardiovasculaires mortels et non mortels ou avec le risque de décès.
La différence de risque absolu est de 3,24 % (événements cardiovasculaires) et de 4,43 % (mortalité totale) pour chaque incrément de 300 mg/jour dans l’apport alimentaire en cholestérol. Pour chaque consommation additionnelle d’un demi-œuf, la différence de risque absolu est de 1,11 % pour les événements cardiovasculaires et de 1,93 % pour la mortalité globale. La figure 2 illustre l’évolution croissante du risque d’événements cardiovasculaires en fonction de l’apport quotidien en cholestérol dont la distribution dans la population est représentée par un histogramme. La verticale à 640 mg/jour représente le 95e percentile de la consommation du cholestérol, ce qui signifie que 5 % des individus sont au-dessus de cette limite.
Figure 2. Association entre cholestérol alimentaire et risque cardiovasculaire. La ligne verticale en pointillé (640 mg/jour) correspond au 95e percentile de la distribution de l'apport alimentaire en cholestérol dans la population étudiée.
Au terme de ce travail, les auteurs sont arrivés à la conclusion qu’une consommation élevée de cholestérol ou d’œufs est associée avec une augmentation du risque d’accidents cardiovasculaires ou de décès quelle qu’en soit la cause. Les limites de cette étude sont liées au fait qu’il est toujours difficile d’évaluer les apports en cholestérol et la consommation d’œufs. Ces 2 facteurs ne peuvent être recueillis que de manière déclarative à partir d’enquêtes alimentaires. De plus, la consommation d’aliments riches en cholestérol est habituellement associée à un apport augmenté en graisses saturées et en protéines d’origine animale. Pour éliminer ce facteur de confusion, les auteurs ont ajusté leurs résultats sur la consommation d’aliments d’origine animale connus pour apporter des graisses saturées tels que les viandes, les charcuteries, les volailles et les produits laitiers. Après ajustement, les résultats ont montré que l’apport en cholestérol restait un facteur significatif de risque cardiovasculaire et de décès. Dans ces conditions, il apparaît que les recommandations nutritionnelles devraient être libellées de manière plus explicite. Actuellement les dernières recommandations américaines pour la période allant de 2015 à 2020 (Dietary Guidelines for Americans(1,2)) contiennent deux messages en apparence contradictoires : « Le cholestérol n’est pas un nutriment dont la surconsommation serait un problème » ; « les personnes devraient avoir une consommation de cholestérol aussi faible que possible dans le cadre d’une alimentation saine ». Même si l’étude actuelle montre que les relations entre cholestérol alimentaire et consommation d’œufs restent modestes, elles sont suffisantes pour conseiller de réduire leurs apports sans que l’on sache exactement à quel niveau les seuils devraient être fixés.
Zhong VW et al. Associations of dietary cholesterol or egg consumption with incident cardiovascular disease and mortality. JAMA 2019 ; 321 : 1081-95.
Publié par Diabétologie Pratique
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