Publié le 16 mar 2021Lecture 8 min
Actualités de la cardiologie interventionnelle
Olivier VARENNE, Hôpital Cochin, Paris
Un dossier réalisé avec la collaboration d'Olivier Varenne, Paris
Angioplasties électives : clopidogrel ou ticagrélor ?
ALPHEUS, essai randomisé, a cherché à savoir si une réduction des complications ischémiques péri-interventionnelles était associée à l’utilisation de ticagrélor comparativement au clopidogrel lors d’angioplasties coronaires électives jugées à haut risque.
Les 1 910 patients avec syndrome coronaire chronique étaient randomisés pour recevoir 180 mg de ticagrélor puis 90 mg deux fois par jour pendant 30 jours (n = 956), ou du clopidogrel 300-600 mg puis 75 mg par jour pendant 30 jours, (n = 954).
Le critère primaire, le taux d’infarctus type 4 évalué à 48 h ou à la sortie de l’hôpital, était de 35 % versus 36 % chez les patients sous ticagrélor et sous clopidogrel, respectivement (OR : 0,97 ; IC 95 % : 0,80-1,17 ; p = 0,75). Le critère de sécurité (saignements majeurs) était similaire dans les deux groupes, mais les saignements mineurs plus fréquents en cas de prise de ticagrélor (11 % vs 8 % ; p = 0,0070).
Le ticagrélor n’est donc pas plus efficace que le clopidogrel pour limiter le risque d’infarctus périprocéduraux et augmente le risque de saignements.
Silvain J et al. Lancet 2020 ; 396 (10264) : 1737-44.
Résultats de SCOPE 2
L’étude SCOPE 2 est une étude randomisée comparant la valve ACURATE Neo (Boston Scientific) et la valve CoreValve Evolut™ supra-annulaire (Medtronic) dans les procédures de TAVI.
Les 796 patients (≥ 75 ans) avec une indication de TAVI par voie fémorale étaient randomisés pour être traités par ACURATE Neo (n = 398) ou CoreValve Evolut™ (n = 398).
L’âge moyen des patients était 83 ans et ils avaient un score STS PROM de 4,6. Le critère primaire de non-infériorité, le taux de décès et d’AVC à 1 an, est survenu chez 15,8 % vs 13,9 % des patients traités par ACURATE Neo et Core-Valve Evolut™, respectivement (différence de risque absolu de 1,8 % ; p = 0,0549 pour la non-infériorité). Le critère secondaire majeur, l’implantation d’un stimulateur cardiaque définitif à 30 jours est survenu chez 10,5 % et 18,0 % des patients traités par ACURATE Neo et CoreValve Evolut™, respectivement (différence de risque absolu de -7,5 % ; p = 0,0027). La mortalité cardiaque à 30 jours (2,8 % vs 0,8 % ; p = 0,03) et à 1 an (8,4 % vs 3,9 % ; p = 0,01), et les insuffisances aortiques modérées à sévères à 30 jours (10 % vs 3 % ; p = 0,002) étaient augmentées dans le groupe traité par ACURATE Neo.
Dans les TAVI transfémoraux, la valve auto expandable ACURATE Neo n’atteint pas le critère de non-infériorité par rapport à la valve CoreValve Evolut™, mais elle est associée à moins d’implantations de stimulateurs cardiaques et un excès de fuites aortiques et de mortalité à 30 jours et 1 an.
Tamburino C et al. Circulation 2020 ; doi: 10.1161/ CIRCULATIONAHA.120.051547.
STEMI : utilisation du prasugrel en préhospitalier
L’essai randomisé COMPARE CRUSH a évalué 727 patients avec STEMI en phase aiguë ayant reçu deux formes de prasugrel dans l’ambulance avant la salle de cathétérisme : 60 mg de prasugrel en comprimés traditionnels ou sous forme écrasée.
Le temps médian entre la prise en charge et le passage du guide dans la lésion coronaire était de 57 (47-70) minutes. Le critère primaire de l’étude à savoir le taux d’artères responsables avec flux TIMI 3 au moment de la coronarographie, était présent chez 31 versus 33 % des patients ayant respectivement reçu le prasugrel « écrasé » et « non écrasé » (RR : 0,92 ; IC 95 % : 0,65-1,30 ; p = 0,64).
La résolution totale du sus-décalage du segment ST à l’ECG était de près de 60 % et était similaire dans les deux groupes. La réactivité plaquettaire, quant à elle, était plus altérée dans le groupe prasugrel « écrasé » (192 vs 227 PRU ; p ≤ 0,01). Enfin, les saignements majeurs (TIMI majeurs ou BARC ≥ 3) étaient similaires dans les deux groupes.
L’administration de prasugrel sous une forme écrasée plutôt que traditionnelle n’améliore pas la perméabilité de l’artère responsable de l’infarctus chez les patients avec STEMI traités par angioplastie primaire.
Vlachojannis GJ et al. Circulation 2020 ; 142 (24) : 2316-28.
Arrêt cardiaque sans sus-décalage de ST à l’ECG : coronarographie ou immédiate ou non ?
Le bénéfice éventuel d’une coronarographie immédiate chez les patients survivant à un arrêt cardiaque extrahospitalier est toujours très débattu chez les patients sans sus-décalage du segment ST à l’ECG.
Dans l’étude PEARL interrompue précocement, seuls 99 patients ont été randomisés entre une coronarographie immédiate (≤ 120 min) ou une absence de coronarographie immédiate. La coronarographie immédiate révèle une lésion potentiellement responsable de l’arrêt cardiaque chez 47 % des patients. Au total, 14 % des patients du groupe coronarographie précoce avaient une occlusion coronaire aiguë. Le critère primaire, associant efficacité et sécurité, n’était pas différent entre les deux groupes de patients (55 % vs 46 % ; p = 0,64). Une coronarographie immédiate n’était pas associée à une amélioration de la survie (55 % vs 48 % ; p = 0,55).
Cette étude de faible puissance ne suggère pas de bénéfice à la coronarographie immédiate chez les patients survivant à un arrêt cardiaque extrahospitalier et sans sus-décalage du segment ST à l’ECG.
Kern KB et al. Circulation 2020 ; 142 (21) : 2002-12.
Angioplastie coronaire des lésions vulnérables
Les auteurs ont examiné quels événements cliniques survenaient après angioplastie coronaire de plaques coronaires vulnérables non sténosantes.
Chez 898 patients présentant un IDM, une imagerie endocoronaire par échographie (IVUS) et spectroscopie (NIRS) des trois vaisseaux était réalisée après angioplastie coronaire de lésions coronaires significatives. Les 182 patients avec sténoses non significatives mais avec charge athéromateuse ≥ 65 % ont été randomisés entre traitement médical seul ou avec angioplastie par stent résorbable.
Le diamètre médian des lésions était de 42 %. Une surveillance angiographique était réalisée à 25 mois et un suivi clinique à 4 ans. À l’IVUS, la surface des artères sténosées était de 6,9 ± 2,6 mm2 versus 3,0 ± 1,0 mm2 avec et sans stent résorbable (p < 0,0001). Les taux de TLF à 24 mois étaient similaires dans les deux groupes (4,3 % vs 4,5 % ; p = 0,96).
L’angioplastie avec des stents résorbables de lésions non significatives avec une charge athéromateuse importante est associée à de plus larges lumières coronaires sans signal négatif sur les événements cliniques.
Stone GW et al. JACC 2020 ; 76(20) : 2289-301.
Utilisation du ticagrélor seul dans le post-STEMI
Une stratégie de traitement par ticagrélor en monothérapie n’a jamais été testée chez les patients avec SCA. Cette étude analyse chez 3 056 patients avec SCA suivis dans 38 centres sud-coréens, l’interruption de l’aspirine après 3 mois de double antiagrégation plaquettaire (ticagrélor monothérapie 90 mg x 2/j ; n = 1 529) comparativement à sa poursuite sur 12 mois (n = 1 527).
Les patients avaient 61 ans et étaient traités pour STEMI (36 %).
Le critère primaire, un critère composite comprenant les saignements majeurs et les MACE à 1 an, est survenu chez 3,9 % des patients sous monothérapie ticagrélor vs 5,9 % de ceux sous monothérapie ticagrélor et double thérapie (RR : 0,66 ; IC 95 % : 0,48 à 0,92 ; p = 0,01). Les saignements majeurs sont survenus chez 1,7 % des patients sous ticagrélor versus 3,0 % des patients sous DAPT (RR : 0,56 ; IC95 % : 0,34 à 0,91 ; p = 0,02). L’incidence de MACE n’était pas différente entre les deux groupes de patients (2,3 % vs 3,4 % ; p = 0,09).
Une monothérapie par ticagrélor à 3 mois de la revascularisation pour SCA semble possible et sûre et est associée à une réduction significative des saignements majeurs.
Kim BK et al. JAMA 2020 ; 323 (23) : 2407-26.
Aspirine avec ou sans clopidogrel après TAVI ?
POPular TAVI est une étude randomisée dont un sous-groupe incluait 665 patients ayant eu un TAVI sans indication de traitement anticoagulant ; ils étaient randomisés entre un traitement par aspirine seule ou associée au clopidogrel.
Les deux critères primaires étaient les saignements (tous) et les saignements non liés à la procédure sur une période de 21 mois. La plupart des saignements au site de ponction artérielle des TAVI étaient considérés comme non liés à la procédure.
Un saignement est survenu chez 15 % et 27 % des patients sous monothérapie et bithérapie (RR : 0,5 7; IC 95% : 0,42 à 0,77 ; p = 0,001). Un événement (saignement et événement thromboembolique) est survenu chez 23,0 % des patients sous aspirine seule et chez 31,1 % de ceux sous aspirine et clopidogrel (p non-infériorité < 0,001).
Parmi les patients bénéficiant d’un TAVI et ne nécessitant pas d’anticoagulant, les saignements plus les événements thromboemboliques sont significativement moins fréquents sous aspirine que sous DAPT administrée pendant 3 mois.
Brouwer J et al. NEJM 2020 ; 383 (15) : 1447-57.
Revascularisation myocardique complète après STEMI chez les patients pluritronculaires
Les données de 6 essais randomisés comparant revascularisation de l’artère responsable seule et revascularisation complète chez 6 528 patients pluritronculaires souffrant d’un STEMI, ont été analysées et poolées.
Le critère primaire était défini par la mortalité cardiovasculaire après une durée médiane de 2 ans. Il était significativement moindre chez les patients revascularisés de façon totale (RR : 0,62 ; IC 95 % : 0,39-0,97 ; I2 = 29 %). Le nombre de patients à traiter pour éviter un décès était de 70. Les risques de revascularisation et d’infarctus étaient également réduits.
Chez les patients pluritronculaires avec STEMI, une revascularisation complète des lésions coronaires permet une réduction de la mortalité cardiovasculaire à 2 ans.
Pavasini R et al. Eur Heart J 2020 ; 41 (42) : 4103-10.
Utilisation de stents métalliques résorbables chez les patients avec STEMI
L’essai MAGSTEMI a montré une meilleure vasodilatation coronaire chez les patients traités par stents métalliques résorbables au magnésium (MgBRS) comparativement à ceux ayant reçu des stents métalliques classiques (SES).
Dans ce papier, la cicatrisation au niveau des sites d’angioplastie était comparée par OCT à 1 an chez 95 patients (MgBRS = 48, SES = 47). La cicatrisation et la résorption des plateformes étaient catégorisées en 4 groupes :
– les mailles ne sont plus visibles (33 % vs 0 % ; p < 0,001) ;
– les mailles sont intégrées à la paroi vasculaire (22,9 % vs 63,8 % ; p < 0,001) ;
– il y a protrusion de mailles dans la lumière (37,5 % vs 31,9 % ; p = 0,568) ;
– il y a des mailles protrusives et malapposées (6,3 % vs 4,3 % ; p = 0,663).
La lumière minimale était plus large après SES (3,92 ± 2,02 vs 6,31 ± 1,71 mm² ; p < 0,001) et la sténose moins serrée en cas de SES par rapport aux stents résorbables (52,84 ± 18,05 vs 25,02 ± 14,58 % ; p < 0,001). Un effondrement des plateformes résorbables était observé dans 50 % des stents de l’étude MAGSTEMI avec resténose.
Gomez-Lara J et al. EuroInterv 2020 ; 16 : e913-e921.
Lésions coronaires calcifiées : ballons ultra-haute pression versus scoring balloon
Les lésions calcifiées demeurent un défi en cardiologie interventionnelle. L’expansion des stents a été comparée de façon randomisée chez 74 patients selon l’utilisation de deux techniques de prédilatation : les ballons à très haute pression et le scoring balloon dans les lésions résistantes : les patients avaient tous des lésions imparfaitement préparées par des ballons non compliants avant la randomisation. Le critère primaire, l’index d’expansion du stent en OCT, était comparable en cas d’utilisation des ballons très haute pression ou du scoring balloon (0,72 ± 0,12 vs 0,68 ± 0,13 ; p = 0,22).
L’utilisation de ballons à très haute pression est associée à une plus importante augmentation du diamètre de la sténose (2,83 vs 2,65 mm ; p = 0,03) sans différence en termes de succès angiographique (100 % vs 97,3 % ; p > 0,99).
La préparation des lésions résistantes avec des ballons très haute pression ou des scoring balloons apporte un bénéfice aux patients avec des lésions coronaires calcifiées.
Rheude T et al. EuroInterv 2020 ; doi : 10.4244/ EIJ-D-20-01000.
Publié dans Cath'Lab
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