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Rythmologie et rythmo interventionnelle

Publié le 24 jan 2012Lecture 5 min

Existe-t-il des indications de l’ablation des veines pulmonaires en première intention dans la fibrillation auriculaire ?

N. SAOUDI, G. LATCU, P. RICARD, J.-P. RINALDI, N. ZARQANE, Centre hospitalier Princesse Grace, Monaco

Jusque récemment, ce titre aurait pu paraître provocateur dans la mesure où cette procédure, quoique ayant évolué vers une meilleure maîtrise au fur et à mesure de l’expérience croissante des opérateurs, reste invasive et grevée de risques importants. Les recommandations européennes et nord-américaines ne l’envisageaient pas en dehors du cas d’un patient symptomatique, après toujours au minimum l’essai d’une drogue antiarythmique, ce qui excluait donc par définition la « première intention ».

Des indications restreintes en 2e intention Par exemple, dans la fibrillation auriculaire (FA) paroxystique, les symptômes devaient être débilitants et le traitement ablatif était envisagé après échec d’un traitement antiarythmique. À cette époque, cette dernière se positionnait au même niveau que l’indication d’un traitement par amiodarone (du fait des effets secondaires de cette dernière drogue à long terme), hormis dans la situation très spécifique de l’insuffisance cardiaque où cette drogue est, en France, pratiquement la seule utilisable. Dans la FA persistante, c’était (et c’est toujours en 2012) après cardioversion et en cas d’échec du traitement antiarythmique associé à un contrôle du rythme, que l’ablation doit être considérée comme indiquée. Le traitement n’était pas envisagé dans la FA permanente. Il est apparu secondairement que le terme lui-même pouvait être ambigu, puisqu’il sous-entendait que toute restauration du rythme sinusal était abandonnée. Il a alors été remplacé par « FA persistante de longue durée » si une tentative de restauration pouvait être discutée, ou « permanente » si celle-ci était définitivement abandonnée. Ce sont essentiellement les risques liés à la procédure qui ont été un frein à son expansion. Parmi les complications répertoriées sur 20 825 procédures chez 16 309 patients, celles-ci étaient majeures chez 741 d’entre eux (4,54 %). Les décès et tamponnades ont concerné 25 et 213 patients (0,15 et 1,31 %). Les fistules atrio-œsophagiennes restent, elles, exceptionnelles (6 patients, 0,04 %), de même que les accidents vasculaires cérébraux (0,94 %). À l’opposé, il est clair que non seulement la technique d’encerclement des veines pulmonaires est très efficace, mais que sa supériorité sur le traitement antiarythmique est maintenant démontrée. Ainsi, il apparaissait depuis quelques mois que l’indication d’ablation par cathéter devait maintenant être élargie.   Élargissement des indications Déjà, les recommandations de la prise en charge de la FA, largement discutées en août 2010 lors du congrès de la Société européenne de cardiologie ont étendu la place de l’ablation dans la FA. Ainsi, l’ablation peut toujours être proposée chez les patients qui restent symptomatiques sous traitement antiarythmique et/ou ralentisseur, mais un certain nombre de facteurs permettent de moduler le caractère précoce de l’indication : – l’état d’évolution de la maladie atriale (type de fibrillation, taille de l’oreillette gauche, ancienneté de celle-ci, la présence et la sévérité de la maladie cardio-vasculaire associée), – les alternatives de traitement, mais aussi et pour la première fois, la préférence du patient (de façon analogue aux recommandations concernant la maladie de Bouveret). Il est important de souligner que les études qui servent de base à l’élaboration de recommandations ont été quasi exclusivement réalisées par des équipes extrêmement expérimentées exerçant dans des institutions spécialisées. • Mais la grande nouveauté réside dans la démonstration du bénéfice potentiel de l’ablation atriale gauche pour le maintien en rythme sinusal dans la catégorie spécifique des patients symptomatiques avec arythmie paroxystique et sans maladie cardiaque associée. Chez ces patients, l’ablation peut être considérée comme la thérapie initiale. Cette indication peut être étendue à la présence d’une « cardiopathie associée minime », telle l’hypertension artérielle sans hypertrophie ventriculaire gauche. • Chez les patients avec FA persistante ou persistante de longue durée, là encore avec pas ou peu de maladie organique cardiaque, le rapport bénéfice/risque de l’ablation par cathéter est moins bien établi, d’autant que les ablations sont fréquemment répétées, extensives et exposent de manière itérative le patient à un risque potentiellement vital à chaque procédure et à un plus haut taux de complications. Le traitement antiarythmique doit alors avoir été essayé et avoir échoué avant que ne soit considérée l’ablation. Celle-ci se positionnera, en revanche, avant l’amiodarone du fait des complications à long terme de ce médicament. • Les athlètes sont une population où l’ablation par cathéter peut aussi se discuter en première intention. De nombreuses données suggèrent que la fibrillation auriculaire est de 2 à 10 fois plus importante chez l’athlète de compétition, mais surtout chez l’ancien athlète de compétition de même que chez les personnes pratiquant intensément les sports d’endurance de façon récréative. Cette population est particulière par la plus grande exposition au flutter 1/1 sous l’effet d’une monothérapie par antiarythmique de classe I, la difficulté de prise de bêtabloquants, qui peuvent diminuer la performance ou être considérés comme des dopants ; finalement, l’ablation peut être considérée en cas de récidive des crises de FA sans qu’un traitement médical ait été nécessaire au préalable. • Un autre cas particulier est celui de la FA chez le patient porteur d’un syndrome de Wolf-Parkinson-White. Dans ces cas, l’ablation est impérative en 1re intention s’il existe des symptômes, mais elle sera dirigée contre la voie accessoire et non contre le myocarde atrial.   La chirurgie a fait aussi une percée remarquable   En effet, si elle est logiquement indiquée chez le patient symptomatique chez qui une indication de chirurgie cardiaque est par ailleurs posée, elle représentera la seule situation où l’ablation pourra être réalisée dans les mêmes conditions chez le patient asymptomatique si le geste peut être réalisé avec un risque minimal. Ces indications sont basées sur l’observation d’une mortalité périopératoire élevée en FA (particulièrement si la FE est < 40 %), mais aussi sur l’amélioration du suivi postopératoire si le rythme sinusal peut être maintenu. Elle permet, en outre, l’ablation ou l’exclusion de l’auricule gauche.   En pratique   Il est très important de noter que l’indication sera toujours réservée aux patients symptomatiques, dans la mesure où cette approche n’a toujours pas montré d’effet bénéfique sur la durée de vie et la prévention des accidents vasculaires cérébraux chez les patients asymptomatiques. L’expérience de l’opérateur est un élément déterminant dans la décision d’exposer le patient à une procédure qui reste complexe et associée à des complications potentiellement très sévères, mais largement couronnées de succès dans des mains expérimentées.

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