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Cardiologie générale

Publié le 09 déc 2008Lecture 6 min

Ce que veulent les internes

G. MOUBARAK, Hôpital Lariboisière, Paris

Pour faire face à la pénurie médicale programmée (et du moins assurer le remplacement des départs à la retraite), le numerus clausus des études médicales a augmenté de 78 % entre 2001 et 2008. Mécaniquement, le nombre d’étudiants se présentant aux épreuves classantes nationales (ECN) a crû en parallèle. Ainsi, 5 366 postes étaient offerts aux étudiants en juin 2008 (+ 13 % par rapport à 2007), dont 835 postes en spécialités médicales. L’arrêté du 30 juin 2008 porte ces chiffres à 5 704 (+ 6 %) et 885 (+ 6 %) respectivement pour les prochaines ECN en 2009. Toute la question est de savoir si cette augmentation va profiter de manière égale à toutes les spécialités ou si elle se fera au profit des spécialités les plus sinistrées.

  La cardiologie avait été épinglée par la circulaire du 30 mai 1997 de la Direction générale de la Santé et de la Direction de l’Enseignement supérieur comme une discipline excédentaire, mais le rapport 2006-2007 de l’ONDPS (Observatoire national de la démographie des professions de santé) a confirmé que notre spécialité était encore relativement prisée par les internes. En effet, 14,8 % des internes de spécialité médicale de 5e semestre ou plus (au moment où l’inscription au DES est effectuée) étaient des jeunes cardiologues, représentant ainsi le deuxième plus gros effectif après les radiologues. Sous l’égide du Collège national des enseignants de cardiologie, un panorama des internes de cardiologie a été dressé en 2007. Ses objectifs étaient d’évaluer les raisons de l’attrait des internes vers la cardiologie, mais aussi et surtout de connaître leurs aspirations de carrière future et leurs besoins en formation afin de pouvoir leur fournir un enseignement de qualité leur permettant de faire face aux exigences de la prise en charge des affections cardiovasculaires. En voici les principales conclusions. Qui sont les internes de cardiologie en France ? En juin 2007, 413 internes étaient inscrits au DES de cardiologie et maladies vasculaires, dont 81 en Ile-de-France. Parmi eux, on dénombre 182 femmes (44 %). À ce jour, la cardiologie est l’une des spécialités les moins féminisées (16 % des effectifs) mais on voit clairement que cette tendance va s’infléchir au cours des prochaines années.186 internes (45 %) ont répondu à l’enquête. Il s’agissait de 101 hommes (54 %) et 85 femmes, d’âge moyen 28 ± 2 ans, en majorité en deuxième moitié d’internat (74 %). La moitié réalisent leur internat dans une ville différente de celle de leur externat, principalement parce que leur classement au concours de l’internat (ou plus tard aux ECN) les y obligeait, mais également dans le but de rechercher une meilleure qualité de vie (37 %) et une meilleure formation (33 %). La cardiologie est considérée très tôt comme une spécialité attractive puisque 71 % des internes l’avaient choisie dès leur externat. Sont-ils satisfaits de leur formation ? Le travail personnel pour présenter un dossier d’un patient ou préparer une mise au point sur un sujet précis est perçu comme le meilleur moyen de se former. Les journaux médicaux et les recommandations des sociétés savantes tiennent également une place importante. Les cours organisés dans le cadre de l’enseignement du DES sont par contre le plus souvent moins bien considérés, de sorte que seuls 25 % des internes sont plutôt satisfaits du volet théorique de leur formation, et seule une minorité (22 %) pense se former correctement dans tous les domaines de la cardiologie. Malgré tout, la majorité (69 %) des internes se déclarent plutôt satisfaits de leur formation pratique, et reconnaissent l’importance qui leur est allouée dans la prise en charge quotidienne des malades. En effet, 83 % se jugent indispensables pour assurer la continuité de la prise en charge du patient pendant la durée de son séjour hospitalier et 62 % influencent fortement les décisions concernant leurs patients. Alors comment améliorer la formation ? Cette enquête a été l’occasion d’associer les internes à la réflexion sur l’amélioration de leur enseignement. Ils sont dans l’ensemble (81 %) favorables à une uniformisation nationale de celui-ci, alors qu’actuellement chaque inter-région est libre d’en définir le contenu et les modalités. Il est également proposé l’accompagnement de chaque interne par un tuteur (67 % d’opinions favorables) afin de s’assurer de l’acquisition adéquate des connaissances, tout en évaluant régulièrement et de manière formelle ces acquis (66 %). Enfin, les internes souhaitent massivement la prolongation d’une année de la durée de l’internat à la condition sine qua non que s’y associe un accès plus aisé à la formation technique. Autant l’internat actuel à 4 ans paraît, de l’avis de tous, insuffisant pour apporter une formation complète dans les différents domaines de la cardiologie et de la médecine vasculaire, notamment en raison des 3 semestres obligatoires hors filière, autant la perspective d’un passage à 5 ans se heurte aux impératifs économiques et ne peut être envisagée à courte échéance. Le Ministère de la santé consentira-t-il à recruter les quelques 7 000 internes de chaque promotion pour une année supplémentaire, sachant que le coût moyen d’un poste médical d’interne est évalué à 33 530 euros par an, charges patronales comprises (estimation DHOS 2006) ? Comment voient-ils leur exercice futur ? 90 % des internes pensent s’orienter vers une sur-spécialité plutôt que vers la cardiologie générale, la plupart portant leur préférence sur 1 ou 2 sur-spécialités. Les plus prisées sont l’échographie (attirant 37 % des internes), la rythmologie (33 %), la cardiologie interventionnelle (27 %) et l’imagerie cardiaque (16 %). L’intérêt intellectuel est la principale raison guidant le choix vers telle ou telle sur-spécialité (87 %), immédiatement suivi par la possibilité de réaliser des actes techniques (51 %). La possibilité de modes d’exercice combinés, la rapidité de l’évolution des connaissances et l’influence d’un mentor sont d’autres facteurs faisant fréquemment pencher la balance. 90 % des internes ont déjà une idée sur leur mode d’exercice futur. Parmi eux, beaucoup plébiscitent un exercice hospitalier exclusif (53 %) ou partiel, associé à une activité libérale (39 %). Ainsi, seule une minorité (5 %) envisage un exercice libéral à temps plein. Ce désintérêt pour la médecine libérale contraste avec la réalité de la démographie des cardiologues (58 % de l’ensemble de cardiologues sont libéraux, mais seuls 39 % des cardiologues de moins de 45 ans le sont). La spécialisation et la technicité croissantes de la cardiologie favorisent l’exercice hospitalier, mais il est indéniable que ce déséquilibre résulte aussi d’un manque de contact des jeunes avec le monde libéral. Rares sont les internes à effectuer des stages « chez le praticien » ou des remplacements, alors que 80 % d’entre eux se déclarent pourtant favorables à un stage optionnel en libéral dans le cadre de leur internat. Y a-t-il une évolution de la manière de concevoir la médecine ? Le rôle des internes dans les services a été redéfini par le repos de sécurité instauré par l’arrêté du 10 septembre 2002. Il est accueilli plutôt favorablement par les internes : ils sont 83 % à juger qu’il s’agit d’une bonne chose pour le patient et 99 % pour l’interne. La moitié des internes reconnaissent passer moins de temps à l’hôpital mais 61 % estiment ainsi avoir davantage de temps pour leur formation personnelle. L’instauration du repos de sécurité a été promue par l’existence d’un lien entre la fatigue des praticiens et les erreurs médicales, et 75 % des internes ont l’impression que ce risque est moindre avec le repos de sécurité. Une crainte suscitée par cette nouvelle réglementation est que les internes seraient moins impliqués au quotidien que leurs aînés. Cette impression n’est pas corroborée par les internes, qui aux deux tiers déclarent n’avoir jamais bâclé la prise en charge des patients en sortie de garde. En réalité, le repos de sécurité est rarement appliqué stricto sensu (11 %) et 65 % des internes ne quittent le service que vers 13 heures le lendemain de leur garde. Son impact réel sur l’activité de soins et l’évolution des mentalités est donc au mieux limité et en tout cas spéculatif, sans élément concret permettant de le préciser à ce jour. Ce qui est indéniable est qu’il s’inscrit dans une évolution plus globale de l’exercice de la médecine, peut-être moins vécue comme un sacerdoce qu’auparavant. En effet, si comme on l’a vu la qualité de vie est un facteur important dans le choix de la ville d’internat, la flexibilité du mode d’exercice (40 %) et la compatibilité avec le choix de vie familial (25 %) sont cités par les internes comme éléments influant sur leur orientation professionnelle future. Que cette évolution doive être considérée comme positive ou négative est laissée à l’appréciation de chacun. En pratique Les internes de cardiologie se sont fortement mobilisés pour exprimer leur avis sur leurs conditions de vie au sens large et faire part de leurs aspirations. Beaucoup de leurs souhaits en termes de formation rejoignent les projets pédagogiques de leurs enseignants. Quant à leur avenir, il serait souhaitable de les initier plus tôt au monde de la cardiologie libérale, qui est considéré comme peu attractif par la plupart mais que beaucoup rejoindront au terme de leur post-internat.

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