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Coronaires

Publié le 13 nov 2007Lecture 5 min

Comment évaluer la fonction rénale chez les sujets âgés ?

B. DUSSOL, hôpital de la Conception, Marseille

Faut-il parler d’insuffisance rénale chez le sujet ayant une clairance estimée à moins de 60 ml/min quel que soit l’âge ? Comment évaluer la fonction rénale chez le sujet âgé ?

Le vieillissement physiologique des reins : mythe ou réalité ?(1) La question de l’existence même du vieillissement physiologique des reins n’est pas encore tranchée. Plusieurs approches sont possibles pour répondre à cette question, mais en fait, très peu d’études y ont été consacrées. Les études radiologiques utilisant la tomodensitométrie pour mesurer le volume rénal et les études autopsiques sont concordantes. Il existe bien une diminution d’environ 40 % de la masse rénale entre la 4e et la 9e décennie. Cependant, cette diminution est strictement proportionnelle à la baisse de la masse corporelle avec l’âge. Les études fonctionnelles ont évalué l’évolution du flux sanguin rénal, des résistances vasculaires rénales et du débit de filtration glomérulaire (DFG) avec l’âge(2). Le flux sanguin rénal diminue de 30 à 40 % entre l’âge de 20 et de 70 ans. Cette diminution est plus importante que celle de la masse rénale et en est donc la cause. Les résistances vasculaires rénales s’élèvent avec l’âge du fait de lésions dégénératives des artérioles rénales. L’évolution du débit de filtration glomérulaire a été évaluée dans des études longitudinales et transversales. Toutes les études longitudinales montrent une diminution du DFG avec l’âge mais cette diminution est faible, de l’ordre de 0,75 ml/min/an à partir de la fin de la 4e décennie(3). Cependant, la plupart des sujets âgés indemnes de toute pathologie n’ont aucune diminution du DFG. À l’inverse, la diminution du DFG est plus importante dès que le sujet est porteur d’affections compromettant la vascularisation rénale (diabète, HTA, insuffisance cardiaque, athérome, etc.) ou en présence de facteurs délétères pour les reins (tabagisme, obésité, consommation élevée de protéines animales). Les études transversales ont confirmé que le DFG se maintenait au-dessus de 100 ml/min chez des sujets de 70 ans indemnes de pathologie rénale ou cardiovasculaire(2). Enfin, les études qui ont évalué l’excrétion urinaire d’albumine chez des sujets âgés ne mettent pas en évidence d’augmentation significative de la microalbuminurie. En effet, l’excrétion reste inférieure à 30 mg par jour, même à un âge avancé.   Au total Il existe un mythe du vieillissement physiologique du rein chez l’homme. En effet, le DFG diminue modestement avec l’âge. Il reste supérieur à 100 ml/min au début de la 7e décennie. Le flux sanguin rénal diminue plus nettement. Cette diminution est la conséquence de l’élévation des résistances vasculaires rénales secondaires aux lésions dégénératives des artérioles rénales. Mais le mythe s’efface très souvent devant la réalité du déclin de la fonction rénale dès que le sujet âgé présente une affection compromettant la vascularisation rénale ou des facteurs délétères pour le rein. Or, rares sont les sujets âgés fréquentant les cabinets médicaux ou les hôpitaux et cliniques indemnes de ces pathologies ou de ces facteurs délétères. Il est donc clair qu’une grande majorité de malades pris en charge dans les différents domaines de la pathologie cardiovasculaire (hypertensiologie, cardiologie interventionnelle ou médicale, médecine vasculaire) sont porteurs d’une insuffisance rénale, même si leur dossier médical n’indique pas l’existence d’une pathologie néphrologique ou urologique propre. Compte-tenu de ces éléments, il est donc clair qu’un sujet ayant moins de 60 ml/min/1,73 m2 de clairance estimée est porteur d’une insuffisance rénale et ce, quel que soit son âge. C’est d’ailleurs la définition de l’insuffisance rénale choisie par l’ANAES (tableau 1). À ce stade se pose le problème de l’évaluation de la fonction rénale. Faut-il utiliser la créatinine sérique, la clairance de la créatinine endogène, la clairance de Cockcroft ou la clairance MDRD sachant que la méthode de référence (clairance de l’inuline ou de l’EDTA) n’est pas accessible en pratique médicale courante ?   Comment évaluer la fonction rénale chez le sujet âgé ?   La créatinine sérique est un mauvais marqueur de la fonction rénale chez le sujet âgé du fait de la diminution de la masse musculaire. Cela explique la normalité des chiffres de créatinine sérique, même en présence d’une insuffisance rénale importante. À ce défaut, il faut ajouter le manque de sensibilité de la créatinine sérique qui commence à s’élever alors que plus de 40 % des néphrons sont détruits. En 2007, si la créatinine sérique doit impérativement être dosée, c’est moins pour connaître sa valeur que pour l’utiliser dans les formules permettant d’estimer la fonction rénale par les formules de Cockcroft et MDRD. La clairance de la créatinine endogène n’est pas plus rentable que la créatinine sérique. Elle repose sur la classique formule des clairances rénales (clairance = U.V/P), ce qui nécessite un recueil des urines dès 24 heures pour déterminer le débit urinaire (V) et la créatininurie (U). Outre qu’elle reprend les défauts de la créatinine sérique (P), elle y ajoute les erreurs (très fréquentes) concernant le recueil urinaire sur 24 heures et les fluctuations importantes de créatininurie d’un jour à l’autre et d’un individu à l’autre ! Clairement, cette méthode ne doit pas être utilisée pour évaluer la fonction rénale du sujet âgé. La formule de Cockcroft (tableau 2) a été pendant longtemps la seule formule permettant de mieux estimer la valeur de la fonction rénale(4). Cependant, elle sera probablement remplacée par la formule MDRD car elle présente plusieurs défauts. En effet : - il s’agit d’une estimation de la clairance de la créatinine endogène et non pas du DFG (or, la clairance de la créatinine endogène surestime le DFG en cas d’insuffisance rénale) ; - elle n’est pas suffisamment validée chez les femmes ; - elle n’est pas utilisable : • chez tous les sujets dont le poids corporel ne reflète pas la masse musculaire : sujet œdémateux, obèse (IMC > 30) ou dénutri (IMC < 20). • chez les sujets > 70 ans et chez les sujets jeunes < 20 ans, En raison de sa simplicité et en dépit de ses défauts, il est justifié de continuer à utiliser la formule de Cockcroft, mais en ayant à l’esprit ses limites, en particulier chez le sujet âgé. La formule MDRD (Modified Diet in Renal Diseases, tableau 2) est la seule estimant le DFG(5). Elle a été développée avec un groupe de malades en insuffisance rénale chronique et validée par la suite pour d’autres groupes de patients. La complexité de la formule (même dans sa version simplifiée) nécessite un ordinateur de poche ou une calculatrice online (www.kdoqi.org è Professionals è Clinical tools è GFR calculator). À l’inverse de la formule de Cockcroft, la formule MDRD fait l’estimation de la filtration glomérulaire normalisée sur la surface corporelle. Bien qu’elle n’ait pas été explicitement validée chez les sujets de plus de 70 ans, c’est la formule qui donne la meilleure estimation de la fonction rénale chez le sujet âgé(6).

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