Publié le 03 oct 2006Lecture 6 min
Comment traiter l’hypertendu à risque ?
C. WATKINS, Montréal
L’hypertension artérielle (HTA) non contrôlée est un facteur de risque majeur à l’origine d’une mortalité et d’une morbidité élevées. Son traitement se doit de plus en plus d’intégrer la notion de risque cardiovasculaire global qui prend en compte non seulement l’hypertension en elle-même, mais aussi les facteurs de risque associés, notamment le tabagisme, le diabète, les dyslipidémies, le syndrome métabolique ou encore l’obésité.
La notion d’HTA à risque se définit par l’existence de facteurs associés, volontiers multiples, qui aggravent son pronostic cardiovasculaire et méritent une prise en charge à la fois globale et spécifique. À la lueur des études épidémiologiques et des grands essais contrôlés consacrés au traitement de l’HTA, cette notion de risque a évolué au fil des vingt dernières années. Dans le même temps, les critères diagnostiques de l’HTA ont été singulièrement revus à la baisse et c’est à partir d’une PAS >130 mmHg et/ou d’une PAD > 85 mmHg qu’il convient d’évoquer une augmentation significative de la PA, à condition d’avoir effectué une mesure tensionnelle optimale à l’aide d’un tensiomètre adapté, notamment chez le sujet obèse.
L’HTA à risque : une éventualité fréquente et préoccupante en pratique courante
Parmi les facteurs de risque associés à l’HTA, le diabète, les dyslipidémies, l’obésité et le syndrome métabolique occupent une place à part, à la fois par leur prévalence, leur impact pronostique et les difficultés de leur prise en charge.
HTA et diabète
HTA et diabète ont tendance à coexister et tout prête à penser qu’ils peuvent s’exacerber mutuellement et précocement pour déboucher sur une atteinte plus rapide et plus sévère de leurs organes-cibles communs. Avec les critères actuels de définition de l’HTA chez le diabétique (>130/85 mm Hg) la prévalence de l’HTA atteindrait 40 % au cours du diabète de type 1 et 80 % dans le diabète de type 2. L’HTA systolique, chez le diabétique, est en outre, à âge égal, trois fois plus fréquente que dans la population générale.
Si un trouble de la glycorégulation prédispose à l’HTA, à l’inverse, dans l’étude de cohorte prospective ARIC (Atherosclerosis Risk in Communities) publiée en 2000, l’apparition d’un diabète de type 2 s’est révélée 2,5 fois plus fréquente chez les hypertendus que chez les normotendus.
Au cours du diabète de type 2, de nombreux essais contrôlés démontrent désormais que le contrôle rigoureux des chiffres tensionnels (<130/80 mm Hg) permet de réduire très significativement la mortalité et la morbidité cardiovasculaires, mais aussi la fréquence de l’insuffisance rénale terminale.
HTA et obésité
La prévalence de l’HTA est étroitement corrélée à l’index de masse corporelle (IMC), puisqu’elle atteindrait 50 % dans l’obésité sévère.
Quant à l’obésité abdominale isolée, facteur de risque majeur d’insulinorésistance et de diabète de type 2, elle est fréquemment associée à une HTA.
HTA et dyslipidémies
Les dyslipidémies (élévation du LDL-cholestérol ou des triglycérides), fréquentes au cours de l’HTA, aggravent également le pronostic de l’HTA.
HTA et syndrome métabolique
L’association d’une HTA, de troubles de la tolérance glucidique, a fortiori d’un diabète, d’une dyslipidémie, d’une obésité centrale ou encore d’une insulinorésistance définit le syndrome métabolique. Quelle que soit la définition retenue, il faut souligner que sa prévalence dans la plupart des pays du monde ne cesse d’augmenter. Dans la population adulte des États-Unis, elle serait comprise entre 20 et 25 %.
Quelle attitude adopter en pratique ?
En clinique, le praticien est plus souvent confronté à une HTA à risque qu’à une HTA isolée, que l’élévation tensionnelle soit associée à un diabète, une obésité globale ou abdominale, une dyslipidémie ou un syndrome métabolique ou à tous ces facteurs de risques à la fois.
Pour faire face à cette situation, il lui faut bien sûr d’abord s’attaquer aux facteurs de risque associés par des mesures hygiéno-diététiques spécifiques (régime alimentaire, augmentation de l’activité physique…) tout en instaurant un traitement antihypertenseur.
Mais il faut être conscient que l’observance de ces recommandations générales est bien souvent médiocre et dans les cas très fréquents où les facteurs de risque associés ne peuvent être amendés par ces mesures, le problème essentiel reste le choix de l’antihypertenseur.
Choisir une classe thérapeutique ayant des effets métaboliques positifs
Il convient tout d’abord bien sûr d’éviter les classes d’antihypertenseurs susceptibles d’aggraver les perturbations métaboliques, qu’il s’agisse des diurétiques ou de la plupart des bêtabloquants.
Les inhibiteurs de l’enzyme de conversion (IEC) et les antagonistes de l’angiotensinogène II (AA II) semblent particulièrement intéressants. L’inhibition du système rénine-angiotensine (SRA) pourrait contribuer à prévenir l’installation d’un diabète de type 2 et à améliorer le pronostic cardiovasculaire chez ces malades. De plus, plusieurs études cliniques et expérimentales suggèrent que les AAII diminuent l’insulinorésistance.
Pour ces raisons et du fait de leurs propriétés néphroprotectrices, les AAII sont recommandés par la Haute Autorité de la Santé (HAS) chez les diabétiques de type 2.
Le telmisartan, un AAII aux propriétés métaboliques spécifiques
Le telmisartan est le seul AAII non tétrazolé, il est très liposoluble (ce qui lui confère une longue durée d’action) et il est l’unique AAII à avoir une activité agoniste partielle PPAR-γ (Peroxisome Proliferator-Actived Receptor-gamma) aux concentrations thérapeutiques. Les PPAR-γ sont des récepteurs intracellulaires qui agissent sur la transcription de gènes cibles impliqués dans le métabolisme glucidique et lipidique. Ils jouent un rôle important dans la régulation de la sensibilité à l’insuline.
Cet effet agoniste partiel PPAR-γ a été démontré in vitro, chez l’animal et chez l’homme.
Trois études randomisées récentes menées à double insu, confirment la traduction clinique de ces particularités métaboliques favorables.
Dans une première étude, le losartan (50 mg/j) et le telmisartan (80 mg/j) administrés pendant 3 mois ont été comparés chez 40 hypertendus atteints d’un syndrome métabolique. La pression artérielle systolique et diastolique moyenne sur 24 heures a été mieux contrôlées par le telmisartan que par le losartan (p<0,05). Il en a été de même pour les principaux paramètres glucidiques en fin d’étude, qu’il s’agisse de :
• la glycémie moyenne à jeun : 1versus 1,13 g/l sous losartan (p<0,05) ;
• l’insulinémie à jeun : 16,93 versus 20,14 mU/ml (p<0,06) ;
• l’hémoglobine glyquée : 5,85 versus 6,28 % (p<0,05) ;
• la glycémie à la deuxième heure d’une hyperglycémie provoquée per os : 1,13 vs 1,34 g/l (p<0,01) ;
• l’insulinorésistance (évaluée par le rapport glycémie à jeun multipliée par insulinémie à jeun divisées par 22,5 : 4,24 versus 5,82 ; p<0,05).
Dans une seconde étude, 116 malades ont reçu de la nifédipine à libération retardée (20 mg/j) ou du telmisartan (40 mg/j) pendant 12 mois. Le profil lipidique ne s’est modifié favorablement que dans le groupe telmisartan :
• cholestérol total : - 9 versus –2 % dans le groupe nifédipine (p<0,05) ;
• LDL-cholestérol : -11,5 versus – 1,5 % (p<0,05)
Dans la dernière étude qui a inclus 119 malades, le telmisartan (40 mg/j), l’éprosartan (600 mg/j) et un placebo ont été administrés pendant 12 mois. Au bout de 12 mois de traitement, dans le groupe telmisartan, on a observé, par rapport à l’état basal, une diminution significative :
• du cholestérol total (- 15 mg/l ; p<0,01) ;
• du LDL-C (- 11 mg/l ; p<0,01) ;
• des triglycérides (- 31 mg/l ; p<0,05).
Les paramètres lipidiques sont en revanche restés stables dans les groupes placebo et éprosartan (p<0,05 versus telmisartan).
En pratique clinique, ces effets bénéfiques sur les métabolismes glucidiques et lipidiques pourraient être tout particulièrement intéressants en cas d’HTA associée à une élévation peu marquée de la glycémie ou des lipides, ne constituant pas, en soi, une indication à un hypoglycémiant ou à un hypolipémiant, tout en étant des facteurs de risque vasculaire indiscutables.
Deux programmes d’essais multicentriques internationaux de longue durée, actuellement en cours, respectivement ONTARGET (ONgoing Telmisartan Alone and in combination with Ramipril Global Endpoint Trial) et PROTECTION (Program of Research to shOw Telmisartan Endorgan proteCTIOn poteNtial) visent à confirmer l’intérêt du telmisartan dans la prise en charge de l’hypertendu à risque en terme de morbi-mortalité.
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