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Rythmologie et rythmo interventionnelle

Publié le 29 nov 2011Lecture 5 min

Les défibrillateurs implantables - To test or not to test, that is the question

H. BLANGY, N. SADOUL, E. ALIOT, Institut des maladies du cœur et des vaisseaux Louis Mathieu, CHU de Nancy

Depuis le développement du défibrillateur implantable (DAI) à la fin des années 80, le test de défibrillation fait partie intégrante de la procédure d’implantation. Il consiste à induire une fibrillation ventriculaire (FV) et à vérifier que l’appareil est capable de défibriller correctement.

L'induction est classiquement obtenue en synchronisant un choc sur l’onde T en période vulnérable, ou par application de courant continu ou de haute fréquence (figure 1). Figure 1. Test d’induction utilisant l’application de courant continu. Défibrillation efficace. L’opérateur peut se contenter de mettre en évidence une marge de sécurité, habituellement définie par un choc efficace au moins 10 joules sous l’énergie maximale que peut délivrer le boîtier, ou rechercher le seuil de défibrillation (defibrillation threshold : DFT) le plus souvent par méthode décroissante, le DFT étant l’énergie la plus faible capable d’arrêter la FV induite. Même si elles sont rares, des complications peuvent survenir et posent la question de la réelle utilité de ce test. Il n’existe à ce jour aucune étude randomisée publiée test vs no test, alors que de nombreux progrès ont été réalisés au niveau du matériel, avec l’arrivée de boîtiers actifs capables de délivrer entre 35 et 40 J. Dans ces conditions, la marge de sécurité de 10 J est obtenue dans 95 % des cas au premier essai, avec une probabilité de succès du premier choc maximal de 99 %(1).   Doit-on tester ? Le test de défibrillation est cité dans les recommandations de bonne pratique américaines (2004) et françaises (2005), mais il n’est pas fait mention de son caractère obligatoire. Il ne semble donc pas qu’il y ait d’obligation légale à le mettre en œuvre. En revanche, toutes les grandes études de prévention primaire et secondaire avec le DAI, sur lesquelles reposent les recommandations actuelles des sociétés savantes, ont été réalisées en testant les DAI à l’implantation. Nul ne peut donc dire si les très beaux résultats de ces études auraient été identiques avec des appareils non testés.   Pourquoi teste-t-on ? Pour vérifier que ça marche ! Le test met le système en situation réelle. Il permet de vérifier l’intégrité du système et des connections, la qualité de détection du signal en FV, l’efficacité du choc et la fameuse marge de sécurité. Il permet aussi de mesurer l’influence de certains traitements sur la défibrillation (amiodarone) et de programmer en fonction l’énergie du premier choc. Classiquement, certains facteurs élèvent le DFT, ils sont en rapport avec : – le système : position du boîtier à droite, surface et position de la sonde, simple ou double coil, vecteur, polarité, forme de l’onde de choc (réglables dans certains cas) ; – le test : type et durée d’anesthésie, protocole d’induction, nombre de FV induites et durée ; – le patient : indice de masse corporelle, cardiomyopathie, classe NYHA, FEVG, hypoxie, ischémie, médicaments (lidocaïne, amiodarone, vérapamil). Afin de prévenir un risque de DFT élevé, certaines mesures peuvent être proposées : optimiser le patient, considérer l’arrêt de drogues susceptibles d’augmenter le DFT, boîtier haute énergie pectoral gauche, sonde (double coil ?) à l’apex, optimisation de l’onde de choc. Devant un DFT malgré tout élevé, il est possible d’inverser la polarité, de modifier la forme de l’onde de choc, de repositionner la sonde, d’ajouter un coil ou un patch sous-cutané, si bien que les échecs vrais restent exceptionnels.   Pourquoi pourrions-nous peut-être ne pas tester ? Le résultat du test est une fonction probabiliste dont la reproductibilité est discutable. De plus : – une FV induite sous anesthésie générale est différente d’une FV spontanée à l’effort ou en pleine ischémie myocardique ; – la plupart des indications actuelles sont prophylactiques, les événements sont rares et en particulier les FV. Dans MADIT II et SCD-HeFT, moins de 30 % des patients présentent une arythmie ventriculaire durant le suivi(2,3). La plupart des patients implantés présentent des TV accessibles à la stimulation antitachycardique ; – le test est souvent bon, la marge de 10 J est obtenue dans 97,8 % dans SCD-HeFT(4) ; – les DAI modernes délivrent entre 35 et 40 J et le premier choc est souvent programmé au maximum ; – le test nécessite une anesthésie générale ; – les risques liés au test et à l’anesthésie chez des patients coronariens et/ou insuffisants cardiaques sont les suivants : dépression myocardique, dissociation électromécanique, complication thromboembolique, décès ; – enfin, quelques études ont montré qu’il n’existe pas de différence de survie à long terme entre les patients testés ou non testés(1).   Le test de défibrillation pourrait aussi être faussement rassurant En effet, dans SCD-HeFT, l’efficacité du premier choc (sur une majorité de TV) n’est que de 83 %, sans différence selon les résultats du test réalisé à l’implantation(4) (figure 2). Figure 2. FV spontanée. Échec du premier choc programmé à 30 J, succès du second choc à 41 J. Les complications liées au test sont rares (entre 0 et 0,5 %), mais redoutables Dans un registre canadien portant sur plus de 19 000 implantations, on relève 3 décès, 5 accidents vasculaires cérébraux (AVC) et 22 séjours prolongés en réanimation pour choc cardiogénique, soit un taux de complications de 0,18 %(5). Dans un registre italien de 7 857 implantations, le taux de complications est de 0,4 %, dont 4 décès, 6 chocs cardiogéniques et 3 AVC(6). Dans ce registre, 30 % des DAI n’ont pas été testés, les facteurs prédictifs d’absence de test sont les indications de prévention primaire et de resynchronisation. Pourtant, certaines publications montrent que les candidats à la resynchronisation pourraient avoir un DFT plus élevé, > 20 J dans environ 12 % des cas. Les facteurs prédictifs seraient la largeur du QRS pour Mainigi et coll.(7), la taille du VG et la durée de la procédure pour Shuger et coll.(8).   Prévention des complications Elle fait appel à des mesures simples et à un minimum de rigueur : – la procédure doit être précédée d’une évaluation préanesthésique soigneuse ; – un défibrillateur externe doit être systématiquement installé, prêt à fonctionner ; – les caractéristiques de stimulation et de détection de la sonde doivent être testées en premier lieu (détection, impédance, seuil de stimulation) ; – le circuit haute tension doit être testé par une impulsion infraliminaire (impédance de choc) ; – respecter 4 minutes au moins entre 2 FV induites ; – respecter les contre-indications listées dans l’encadré ci-dessus, sachant que les contre-indications absolues représentent 5 % des implantations et les contre-indications relatives 15 à 30 %(1). Au total : quels patients tester ou ne pas tester ? “Everything should be made as simple as possible, but not simpler” (Albert Einstein) Dans l’attente des résultats d’études randomisées en cours (SIMPLE), il convient de continuer à tester les DAI à l’implantation, ne serait-ce que pour avoir l’assurance que le système fonctionne. Il faut cependant reconnaître que les dysfonctionnements sont rares, ils peuvent la plupart du temps être anticipés par des mesures simples. Parallèlement, les complications du test sont rares aussi, mais toujours sérieuses. Ainsi, pour ces patients fragiles, des précautions doivent être prises et des contre-indications respectées. Le rapport bénéfice/risque doit être évalué individuellement pour chacun.

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