Publié le 27 oct 2009Lecture 3 min
Fréquence cardiaque : la nouvelle cible dans la maladie coronarienne
E. MILLARA

ESC
Il est aujourd’hui bien établi que la fréquence cardiaque joue un rôle important dans la physiopathologie des maladies ischémiques. En effet, l’élévation de la fréquence cardiaque contribue au déséquilibre entre apports et besoins en oxygène, en provoquant simultanément un accroissement de la demande myocardique en oxygène et une réduction du flux coronaire, via un raccourcissement de la diastole pendant laquelle a lieu la perfusion du myocarde.
Au niveau vasculaire, l’augmentation mécanique des contraintes pariétales conduit à des lésions endothéliales et pariétales, et favorise la progression de l’athérosclérose, augmente le stress oxydatif ainsi que la rigidité artérielle et l’instabilité des plaques athéromateuses. Une fréquence cardiaque élevée contribue en outre au déclenchement de l’ischémie, au risque de rupture de plaque, au remodelage cardiaque et au développement de l’insuffisance cardiaque.
Une fréquence cardiaque élevée est associée à une augmentation de la morbi-mortalité
De nombreuses études ont montré l’impact de la fréquence cardiaque sur le pronostic des coronariens. Chez des patients hypertendus et coronariens, l’étude INVEST a rapporté qu’au-delà de 70 bpm, la fréquence cardiaque est associée à une augmentation des événements cardiovasculaires majeurs. Une analyse post-hoc de TNT, étude ayant suivi 9 580 patients coronariens stables durant en moyenne 5 ans, a encore très récemment confirmé ce constat. De même, le bras placebo de l’étude prospective BEAUTIFUL a permis d’observer qu’une fréquence cardiaque ≥ 70 est un puissant prédicteur indépendant d’événements péjoratifs chez les coronariens à dysfonction VG, avec une mortalité cardiovasculaire augmentée de 34 % (p = 0,0041) ainsi qu’un surcroît d’hospitalisations pour infarctus myocardique de 46 % dans le sous-groupe de patients coronariens dont la fréquence cardiaque était ≥ 70 par comparaison à ceux dont la fréquence cardiaque était < 70.
Inversement, selon une métaanalyse portant sur 11 études et 16 000 patients, en postinfarctus, il existe une relation linéaire entre la réduction de la FC et celle de la mortalité. Une autre méta-régression portant sur 17 études calcule qu’une baisse de 10 bpm de FC réduit de 30 % la mortalité cardiaque en postinfarctus. Dans l’angor stable, d’un point de vue épidémiologique, une fréquence cardiaque de repos plus faible est associée à des niveaux plus élevés d’exercice physique, moins d’obésité, un taux plus faible de comorbidités, sans que l’on puisse déterminer la part respective de ces facteurs protecteurs dans l’abaissement consécutif du risque cardiovasculaire et de la mortalité. Une approche de réduction exclusive de la fréquence cardiaque, sans aucun autre effet sur le myocarde, est devenue récemment possible, avec le développement de l’ivabradine (Procoralan), premier inhibiteur du courant If, qui réduit la fréquence cardiaque sans aucun effet sur la conduction auriculoventriculaire ni sur l’inotropisme ou sur les résistances périphériques. Grâce à cette nouvelle approche, il a été observé dans le cadre d’une étude d’intervention randomisée (BEAUTIFUL) que la réduction exclusive de la fréquence cardiaque par l’ivabradine permet une réduction des événements coronariens chez des patients coronariens à dysfonction VG et dont la fréquence cardiaque était initialement ≥ 70.
La fréquence cardiaque reste trop élevée chez les coronariens avec ou sans bêtabloquant
En dépit de la valeur pronostique considérable d’une réduction de la fréquence cardiaque chez les coronariens, les traitements bradycardisants sont sous-utilisés. La European Heart Survey, ayant inclus 3 779 patients atteints d’angor stable dans 35 pays, a montré une fréquence cardiaque moyenne de 73 bpm, bien que 67 % des patients aient été traités par bêtabloquants. En effet, la dose moyenne de ces derniers représentait la moitié de celle utilisée dans les grands essais cliniques.
Ces observations sont très semblables à ce qui est retrouvé dans la cohorte française LHYCORNE de 8922 coronariens stables bêta bloqués pour 62 % et conservant malgré cela une FC ≥ 70 bpm dans un cas sur deux. Une observation similaire ressort du Danish National Registry : sur 55 315 patients ayant survécu à un infarctus myocardique, 58 % recevaient un bêtabloquant à leur sortie de l’hôpital, à une dose inférieure de moitié de celle des essais cliniques. Bien que 40 % des patients de l’étude REALITY reçoivent des antagonistes calciques, et 85 % des bêtabloquants, 70 % des patients conservaient une fréquence cardiaque > 60 et 35 % > 70 bpm. De même, dans l’étude BEAUTIFUL, chez des coronariens avec dysfonction VG, 87 % recevaient des bêtabloquants, avec une fréquence cardiaque moyenne de 69 ± 8 bpm, supérieure à 70 bpm chez plus de la moitié des patients.
D’après les communications de M. Böhm, J. S. Borer et A. Hjalmarson
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