Valvulopathies
Publié le 20 oct 2009Lecture 6 min
ESC - Quoi de neuf en chirurgie cardiaque ?
P. NATAF, Hôpital Bichat, Paris
Faut-il préférer l’angioplastie au pontage coronaire en cas d’atteinte pluritronculaire ou du tronc commun ? Faut-il considérer que l’implantation percutanée de bioprothèses aortiques est un traitement fiable du rétrécissement aortique calcifié (RAC) symptomatique chez les patients à haut risque ou contre indiqués pour la chirurgie? Deux questions dont les réponses ont des implications directes sur notre pratique quotidienne. Les résultats à 2 ans de Syntax comparant après randomisation chirurgie et angioplastie, chez les patients porteurs de lésions tritronculaires ou de lésions du tronc commun, et les données du registre Source portant sur plus de 1 000 malades ayant bénéficié de l’implantation percutanée d’une bioprothèse aortique ont été présentés lors du congrès de l’ESC 2009.
RAC : on attend la confirmation du bien-fondé del’implantation percutanée
Le remplacement valvulaire aortique est le traitement du RAC symptomatique. Dans certains cas, la chirurgie est contre-indiquée ou le risque paraît trop élevé. Chez ces patients, il est actuellement parfois proposé de réaliser l’implantation transvasculaire ou transapicale d’une prothèse valvulaire.
L’expérience totale avec cette technique porte aujourd’hui dans le monde sur plusieurs milliers de cas. La faisabilité de la procédure et ses résultats immédiats ont été présentés par Martyn Thomas dans le cadre du registre Source. Ce registre est constitué de 1 038 patients consécutifs pour lesquels l’implantation d’une bioprothèse par cathétérisme (TAVI) a été effectuée entre novembre 2007 et janvier 2009 dans 32 centres. Une voie transapicale a été réalisée dans 575 cas et une voie transfémorale dans 463 cas. Le risque opératoire prédictif était significativement plus élevé dans le groupe transapical que dans le groupe transfémoral avec respectivement un EuroSCORE de 29,5 % vs 25,7 % (p < 0,005). Cette différence est liée à une incidence plus fréquente de comorbidités dans le groupe transapical (artériopathie périphérique, atteinte carotidienne, maladie coronaire, insuffisance rénale, etc.).
Avec l’expérience, le taux de succès de l’implantation a été de 93,8 %.
La survie à 30 jours a été de 91,5 %. Les taux de complications majeures ont été similaires dans les deux groupes (AVC : 2,5 % ; dialyse : 4,3 % ; pacemaker : 7 %). Les complications vasculaires majeures ont été surtout observées en cas d’implantation par voie fémorale (10,6 % vs 2,4 %).
Ceci est expliqué par la taille encore importante des cathéters introduits par l’artère fémorale qui est souvent de petit diamètre ou très calcifiée et athéromateuse chez les sujets âgés. Par ailleurs, la tortuosité des vaisseaux fémoraux, iliaques ou de l’aorte peuvent être source de non-franchissement ou de blessures vasculaires.
Pour la voie transapicale, des déchirures de la pointe du cœur immédiates ou secondaires sont possibles et devraient également être limitées par la réduction du diamètre des cathéters utilisés. Le bon positionnement de la prothèse évitant le risque de migration (0,3 %), d’occlusion coronaire (0,6 %), ou de fuites paraprothètiques est également un élément nécessitant une réflexion technique (expérience des équipes, exploration angiographique, échographique, voire scannographique perprocédure, etc.) et technologique (matériel utilisé, système d’imagerie performant, etc.). Les régurgitations périvalvulaires actuellement observées ont rarement été importantes mais il est nécessaire d’évaluer leur devenir et leur retentissement à moyen terme. Enfin, la durabilité de ces substituts n’est pas encore connue, de même que la faisabilité d’une réintervention.
Un suivi à moyen terme est donc indispensable avant de confirmer le bien-fondé de cette nouvelle technique. Une étude randomisée comparant les voies d’abord transvasculaire ou transapical doit également être réalisée sur des populations comparables de patients de façon à définir la technique la moins invasive. Les résutats de l’étude Partner US, qui randomise traitement médical versus traitement par cathéter chez les malades non opérables et traitement chirurgical classique versus traitement par cathétérisme chez les malades à haut risque chirurgical, devraient être disponibles au milieu de l’année 2010.
L’approche par voie transapicale permet une implantation antérograde directe et simple. Elle permet d’éviter les complications vasculaires majeures de la voie fémorale.
Technique de remplacement valvulaire aortique, une bioprothèse remplace la valve native.
Le pontage est le traitement de référence dans les lésions complexes tritronculaires ou du tronc commun
À 2 ans, les résultats de Syntax confirment que le pontage coronaire est le traitement de premier choix en cas de lésions complexes tritronculaires ou du tronc commun.
Les avancées de la cardiologie interventionnelle ont permis à l’angioplastie coronaire de tenir un rôle important dans le traitement de la maladie coronaire. Actuellement un nombre important de patients porteurs de lésions du tronc commun ou de lésions tritronculaires, indications classiques de la chirurgie coronaire, se voit proposer une angioplastie. Cependant, le bien-fondé d’une telle attitude n’a jamais été démontré et les risques de cette stratégie percutanée par rapport à la chirurgie n’avaient pas été évalués.
C’est dans ce contexte que l’étude Syntax, randomisant angioplastie et chirurgie afin d’essayer de montrer la non-infériorité de l’angioplastie par rapport au pontage, a été conçue. L’année dernière, les résultats à un an de cette étude portant sur 1 800 patients randomisés ont été présentés. La non-infériorité de l’angioplastie en termes d’événements cardiovasculaires majeurs n’a pas pu être démontrée. Les complications cardiovasculaires majeures (décès, AVC, infarctus du myocarde, revascularisation itérative) étaient significativement plus élevées en cas d’angioplastie comparativement aux pontages (17,8 % vs 12,4 %). Le taux de revascularisation itérative était significativement plus élevé en cas d’angioplastie (13,5 % vs 5,9 %). En revanche, les AVC étaient plus fréquents en cas de chirurgie (0,6 % vs 2,2 %).
La présentation de Pieter Kappetein montre le devenir à 2 ans des patients randomisés. La fréquence des complications cardiovasculaires majeures était significativement augmentée dans le bras angioplastie (23,4 % vs 16,3 % ; p = 0,0002). De façon similaire à la première année, cette augmentation des complications cardiovasculaires majeures en cas d’angioplastie était liée au grand nombre de revascularisation itérative dans ce groupe (17,4 % vs 8,6 % ; p < 0,0001). Le taux d’infarctus du myocarde à 2 ans était également significativement augmenté en cas d’angioplastie (5,9 % vs 3,3 % ; p = 0,01). Surtout, la fréquence des infarctus a été moindre pendant la deuxième année pour les patients pontés plutôt que dilatés (0,1% vs 1,2%), alors que le taux d’AVC était toujours plus élevé dans le groupe pontage (1,4 % vs 2,8 % ; p = 0,03).
Dans le sous-groupe des patients porteurs de lésions du tronc commun, le taux de complications cardiovasculaires majeures était comparable entre l’angioplastie et le pontage (CABG 19,3 % vs PCI 22,9 % ; p = 0,27). Au contraire, en cas de lésions tritronculaires, la différence était en faveur du pontage (CABG 14,4 % vs PCI 23,8 % ; p = 0,0001).
L’impact de la complexité anatomique des lésions sur les résultats de l’angioplastie a pu également être étudié grâce à l’établissement d’un score, le SYNTAX score, actuellement disponible sur le Web (www.syntaxscore.com). Le score Syntax est un nouvel outil angiographique utilisé pour mesurer la complexité des lésions coronaires en se basant sur 9 critères anatomiques incluant le nombre de lésions, leur localisation et leur complexité. Plus le score est élevé, plus le traitement par angioplastie sera difficile. Ce score peut aider au choix du type de revascularisation à proposer.
Le risque de complications cardiovasculaires majeures chez les patients à score Syntax bas ne diffère pas dans les deux groupes (CABG 17,4 % vs PCI 19,4 % ; p = 0,63). Chez les patients à score Syntax intermédiaire, il existe une tendance à une augmentation du risque en cas d’angioplastie (CABG 16,4 % vs PCI 22,8 % ; p = 0,06). Dans les cas de lésions complexes avec un score Syntax élevé, le risque était significativement plus élevé dans le bras angioplastie (SYNTAX Scores ≥ 33 : CABG 15,4 % vs PCI 28,2 % ; p = 0,0001).
En pratique
Ces résultats à 2 ans confirment que le pontage coronaire reste le traitement de référence en cas de lésions coronaires tritronculaires ou du tronc commun à score Syntax élevé.
Dans certains cas simples avec un score Syntax bas, l’angioplastie peut être une alternative acceptable à la revascularisation chirurgicale. Le suivi à 5 ans de ces patients permettra probablement de faire évoluer nos stratégies de revascularisation. Associé à d’autres scores de gravité (Euroscore, etc.) et au contexte clinique, le score Syntax est un nouvel outil qui aidera probablement le cardiologue interventionnel a jugé du bien-fondé de sa technique de revascularisation.
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