Publié le 23 jan 2007Lecture 4 min
Ventilation non invasive au cours de l'OAP cardiogénique
R. ROBERT, hôpital Jean Bernard CHU, Poitiers
La ventilation non invasive (VNI) dans le traitement de l’œdème aigu du poumon (OAP) cardiogénique est de plus en plus utilisée en phase préhospitalière et dans les services d’urgence. Les recommandations européennes publiées en 2005 intègrent la VNI dans la prise en charge initiale de l’OAP avec pour objectifs :
• d’améliorer rapidement les symptômes de détresse respiratoire aiguë et les conditions d’oxygénation,
• d’éviter l’intubation,
• et de réduire la mortalité en phase aiguë.
VNI : conséquences physiologiques
Au cours de l’OAP, on observe une augmentation de l’eau intrapulmonaire, une réduction de la compliance thoraco-pulmonaire et une augmentation des résistances des voies aériennes. L’hypercapnie, fréquemment observée au cours de l’OAP, est liée essentiellement à la fatigue des muscles respiratoires. La dépression inspiratoire majeure augmente la pression transmurale du ventricule gauche et la postcharge, et contribue aux altérations hémodynamiques liées à la dysfonction myocardique elle-même. La ventilation spontanée avec pression positive (VS-PEP) améliore le débit cardiaque et le volume d’éjection systolique
La VNI en pratique
Deux modes sont principalement utilisés.
La VS-PEP, encore appelée ventilation en pression positive continue (PPC) et qui correspond à la CPAP (continuous positive airway pressure) des Anglo-Saxons. Ce mode, comme son nom l’indique, est un mode de ventilation spontanée utilisant un masque facial hermétique et une pression positive placée sur le circuit expiratoire. Ce système n’offre qu’une assistance respiratoire très minime lorsque les circuits utilisent de fort débits de gaz. Des systèmes simples utilisant le principe Venturi (masque de Boussignac) et ne nécessitant qu’une quantité plus modérée de gaz peuvent être facilement utilisés en préhospitalier.
La VS-AI-PEP, il s’agit de la ventilation spontanée avec aide inspiratoire et pression expiratoire positive, autrement appelée ventilation à deux niveaux de pression (bilevel ventilation). Ce mode nécessite un respirateur de complexité variable. Le premier niveau de pression correspond à la pression d’inspiration (niveau d’aide inspiratoire : AI) et le second niveau à la pression expiratoire positive (PEP). La pression inspiratoire totale correspond à la somme AI + PEP.
Quel que soit le mode utilisé, la VNI utilise des interfaces qui sont le plus souvent des masques naso-buccaux (ou faciaux). Leur taille et leur mode de fixation doivent être choisis avec soin pour obtenir une bonne tolérance de la technique et un taux de fuites minime.
Une technique supérieure à l’O2 à fort débit
De nombreuses études randomisées ont comparé la VNI à l’oxygénothérapie simple à fort débit au cours de l’OAP. La synthèse des résultats de ces études a été récemment publiée dans trois métaanalyses. Les résultats montrent clairement la supériorité de la VNI sur l’oxygénothérapie à fort débit avec une amélioration plus rapide du score de dyspnée, de l’oxygénation des malades et une baisse plus rapide la PaCO2 quand existe une hypercapnie. Elles montrent surtout une réduction majeure du taux d’intubation de l’ordre de 60 % et une réduction du nombre de décès de 40 %.
Quand la VS-PEP est utilisée, les niveaux de PEP recommandés dans la littérature vont de 5 à 10 cm d’eau. Pour la VS-AI-PEP, l’objectif est d’atteindre une AI de l’ordre de 15 cm d’eau associée à une PEP de 5 cm d’eau.
Même si la VS-AI-PEP paraît plus logique lorsque l’OAP est hypercapnique en raison de l’assistance inspiratoire qu’elle apporte, il n’a pas été mis en évidence de supériorité de la VS-AI-PEP sur la VS-PEP ni en termes de réduction du taux d’intubation ni en termes de réduction de mortalité. Les neuf études comparant les deux techniques sont, là aussi, résumées dans les métaanalyses.
Controverse sur un risque d’ischémie myocardique
La possibilité d’aggraver une ischémie coronarienne lors de l’utilisation de VS-AI-PEP a été suggérée dans deux études. Dans la première, le taux de troponine était plus élevé à l’admission dans le groupe recevant la VNI. Dans la seconde étude, la dose de dérivés nitrés était très inférieure à celle du groupe témoin. De plus, les niveaux d’AI utilisés étaient trop faibles pour obtenir un résultat satisfaisant. Depuis, deux études spécifiquement focalisées sur le risque d’ischémie coronarienne lors de la VNI ont clairement éliminé le rôle potentiel de la VS-AI dans la survenue ou l’aggravation d’ischémie coronarienne chez le malade en OAP. Toutefois, il est important de souligner que la VNI ne doit pas retarder la reperméabilisation coronarienne quand elle est indiquée.
Les critères d’indication
La VNI n’est pas indiquée de façon systématique dans l’OAP. Elle doit être utilisée d’emblée quand les signes de détresse respiratoires sont majeurs ou quand il existe une hypercapnie (si les gaz du sang sont disponibles). La VNI est également indiquée en cas de non-réponse au traitement médicamenteux initial. Dans tous les cas, la VNI ne se conçoit qu’en association avec le traitement médicamenteux de l’OAP : dérivés nitrés et/ou diurétiques.
La mise en œuvre de VNI nécessite une équipe formée aux choix des interfaces, au réglage du ventilateur et à la surveillance des fuites. La formation à l’utilisation de VS-PEP est plus facile et plus rapide que pour la VS-AI-PEP.
En pratique
La VNI doit être recommandée pour le traitement de l’OAP dans sa forme sévère.
Elle doit être associée au traitement médicamenteux.
Aucune supériorité de la VS-AI-PEP par rapport à la VS-PEP n’a été démontrée.
Ainsi, chaque équipe doit utiliser la technique qu’elle maîtrise le mieux.
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