Publié le 01 juin 2022Lecture 4 min
EHRA 2022 - Nouveautés en stimulation cardiaque
Frédéric SEBAG, Institut Mutualiste Montsouris, Paris
Après deux années difficiles, les rythmologues de l’Europe entière se sont massivement retrouvés au congrès de l’EHRA qui s’est tenu à Copenhague (Danemark) au début du mois d’avril. Beaucoup de sujets passionnants ont été discutés. Deux études ont suscité mon intérêt dans la stimulation cardiaque.
RESET-CRT
Des arguments pour préférer l’implantation du stimulateur triple chambre plutôt que le DAI triple chambre
La resynchronisation cardiaque (CRT) est l’un des piliers du traitement de l’insuffisance cardiaque avec altération de la fonction ventriculaire gauche (HFrEF), associée ou non à une prévention de la mort subite par défibrillateur (CRT-D ou CRT-P). Cette option supplémentaire a toujours été très débattue. Encore plus depuis l’avènement de thérapies nouvelles dans l’insuffisance cardiaque. À ce jour, il n’y a pas de réelle comparaison entre CRT-P et CRT-D dans les études randomisées d’HFrEF. RESET-CRT, publiée dans l’European Heart Journal(1) a tenté d’apporter des éléments de réponse. Il s’agit d’une extraction d’une base de données de la 2e plus grande assurance santé d’Allemagne, couvrant 10 % de la population.
Entre 2014 et 2019, 7 110 patients ont été implantés d’un CRT. Parmi eux, 3 569 étaient éligibles au regard des critères d’exclusion (indication de classe I ou IIa, primo-implantation, pas de syncope inexpliquée, pas de syndrome coronarien aigu ou chirurgie valvulaire récente). Le critère de jugement était la mortalité toutes causes.
Parmi les patients, 2 722 avaient été implantés d’un CRT-D et 847 d’un CRT-P. Les patients avec CRT-P avaient 6,7 ans de plus que ceux avec CRT-D, malgré des étiologies d’insuffisance cardiaque similaires. Sur 2,35 ans, 203 décès (24 %) sont survenus dans le groupe CRT-P et 511 (19 %) dans le groupe CRT-D (HR 1,63 ; p < 0,001). Après ajustement sur l’âge, il n’y avait plus de différence significative de décès entre les groupes (HR 1,13 ; p = 0,165). De plus, après ajustement aux autres comorbidités (insuffisance rénale, diabète, fibrillation atriale, BPCO), les courbes de mortalité étaient confondues.
Au total, l’implantation de CRT- D ou CRT-P semble comparable en termes de mortalité. Il s’agit d’une étude rétrospective avec de possibles biais de sélection de population (couverture par cette assurance) ou d’éventuelles erreurs de codage. Cependant, ceci conforte l’attitude d’implantation en France qui privilégie le CRT-P.
Étude MELOS
Résultats encourageants pour la stimulation de branche gauche en Europe
Toujours en stimulation, l’étude MELOS nous donne les premiers résultats d’efficacité et de sécurité de la stimulation de branche gauche à l’échelon européen et en vie réelle. En effet, les seules études d’envergure étaient jusqu’ici chinoises ou américaines.
MELOS, a démarré en juin 2018 dans 14 centres européens, avec 2 533 patients inclus. L’âge moyen était de 74 ans, avec une majorité de femmes (57 %) et une indication de stimulation pour bradycardie dans trois quarts des cas. Le restant étaient des indications de resynchronisation.
La courbe d’apprentissage semble assez longue, avec un plateau autour de 200 procédures. Le taux de succès d’implantation était de 91 % pour les indications de bradycardie. Petite déception, ce taux de succès était seulement de 77 % pour les indications de resynchronisation. Les critères d’échec d’implantation de stimulation de branche gauche étaient la largeur des QRS, une FEVG basse et une insuffisance cardiaque clinique.
Les paramètres électriques étaient satisfaisants avec un seuil moyen à 0,77 V et une détection moyenne à 10,6 mV. La largeur moyenne du QRS stimulé était 140 ms.
On s’attendait à une majorité de stimulation proximale de la branche gauche mais ceci n’a été réalisé que dans 9 % des cas. Dans 70 % des cas la stimulation est fasciculaire, plus distale dans le système de conduction. Cependant, ceci n’altère pas la durée des QRS et il y a même une tendance à l’affinement. Enfin, une stimulation myocardique septale s’observe dans 25 % des cas.
Les investigateurs rapportent 8 % d’événements indésirables, taux comparable à la resynchronisation par sonde dans le sinus coronaire. En revanche, le type de complication change, dominées par les perforations septales dans 3,7 % des cas. Il existe aussi un risque de syndrome coronarien aigu par lésions coronaires mécaniques dans 0,4 % des cas.
MELOS montre que cette technique prometteuse est faisable, même si elle n’atteint pas les taux de succès de la stimulation conventionnelle dans les indications de bradycardie. Il reste des progrès à réaliser pour les indications de resynchronisation. Il s’agit d’une technique assez sûre puisqu’il n’y avait pas de séquelle des complications aiguës.
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