publicité
Facebook Facebook Facebook Partager

Paramédical

Publié le 15 oct 2017Lecture 8 min

Indice de résistance microcirculatoire (IMR) au cath-lab

Nathalie LATTARICO, MERM, CHU Grenoble

La maladie coronaire est le plus souvent définie par la présence de sténose coronarienne épicardique. L’utilisation de la FFR (Fractional Flow Reserve) est devenue la référence pour diagnostiquer ces sténoses. Cependant, il n’est pas rare d’avoir à réaliser des coronarographies chez des patients avec des douleurs thoraciques, malgré un test d’ischémie non invasif positif (épreuve d’effort, scintigraphie ou échographie de stress), sans mettre en évidence de sténose coronarienne significative.

Avant de rechercher une douleur d’origine extracardiaque, il faut savoir que dans plus de 60 % de ces cas, la cause est bien cardiaque avec une atteinte de la microcirculation coronaire(1). Ainsi, les altérations de la microcirculation induisent aussi une ischémie myocardique, la microcirculation représentant 80 % de la vascularisation du myocarde dont l’exploration est à l’heure actuelle difficile. En effet, étant non visualisable à toutes les techniques d’imagerie, il faut donc utiliser des techniques d’exploration fonctionnelle pour l’évaluer, comme l’IRM de perfusion ou la tomographie par émission de positrons(2). En cardiologie interventionnelle, certains guides coronaires de pression munis d’un système de thermodilution, dont le guide Certus™ (Abbott Vascular anciennement St. Jude Médical), permettent en complément de la FFR, d’évaluer l’atteinte de la microcirculation en mesurant l’indice de résistance microcirculatoire (IMR) ou la CFR (Coronary Flow Reserve) qui calcule de son côté la réserve coronaire (figure 1)(3-6). Figure 1. Schéma de la microcirculation. Les indications actuelles de l’IMR La mesure de l’IMR va donc être intéressante dans certaines pré­entations cliniques et dans le domaine de la recherche : • chez des patients avec douleurs thoraciques ou avec un test d’ischémie positif avec absence de lésion coronaire épicardique à l’examen coronarographique(7) ; • lors d’un SCA ST+ et après revascularisation du myocarde par angioplastie, l’IMR permet d’identifier les patients pouvant présenter une destruction de la micro-vascularisation de mauvais pronostic(8) ; • chez les patients présentant certaines cardiomyopathies diabétiques (étude EVARESERVE actuellement en cours). Dans le service de cardiologie interventionnelle du CHU de Grenoble, une étude sur la microcirculation nommée « EVARESERVE » est réalisée et encadrée par le Pr G. Barone-Rochette. L’objectif de cette étude est d’évaluer la corrélation de l’atteinte de la microcirculation coronaire entre celle mesurée par l’IMR et celle mesurée par la scintigraphie myocardique. Pour la technique en salle de cathétérisme, nous utilisons un matériel spécifique, notamment un guide Certus™ et une machine dédiée à l’examen, le moniteur RadiAnalyzer™ Xpress (figure 2). L’adénosine est utilisée comme vasodilatateur. Figure 2. Matériels nécessaires à l’examen. Réalisation de l’examen Les guides Certus™ sont utilisés par thermistance, ce qui permettra de détecter les éventuels changements de température. Ainsi le temps de transit d’une solution saline injectée à température ambiante est déterminé avec une technique de thermodilution. En pratique On réalise 3 injections de 3 ml de solution saline à la température ambiante (réalisées 2 fois) dans l’artère coronaire explorée, permettant la mesure du temps moyen de transit (Tmn), correspondant au temps mis par la solution pour arriver à la partie distale de la coronaire. Puis une perfusion intraveineuse d’adénosine (140 µg/kg min) pendant 3 minutes est effectuée pour induire l’état d’hyperémie maximale. L’hyperémie IV périphérique est réalisée avec 30 mg/10 ml d’adénosine, avec utilisation de 30 ml pour un site à explorer. La vitesse d’administration se fait en fonction du poids du patient. Puis 3 injections de 3 ml de solution saline à température ambiante sont réalisées (renouvelées 2 fois), pour déterminer le Tmn hyperémique. Des mesures simultanées de la pression aortique moyenne (Pa) par le cathéter de coronarographie et la pression distale coronarienne (Pd) par le guide de pression endocoronaire seront également enregistrées dans les conditions de repos et hyperémiques. Le flux de réserve coronaire (CFR) sera calculé comme Tmn au repos/Tmn hyperémique. La FFR sera calculée selon le rapport de Pd/Pa à hyperémie maximale. L’IMR sera calculé par les formules suivantes : Il n’y a pas de réel cut-off reconnu unanimement pour un IMR pathologique. Retenons néanmoins que c’est la valeur supérieure au 75e percentile d’une population qui est retenue, qu’une valeur est dite « pathologique » lorsque le score est > 23(10) et qu’un score > 40 représente la valeur pronostique péjorative dans le STEMI(8). Déroulement de l’examen En pratiquant les premiers examens de recherche sur l’index de résistance microcirculatoire en cath-lab, dans le cadre de l’étude EVARESERVE, le personnel paramédical est confronté à des situations délicates comme : – l’utilisation de la machine permettant l’examen : la réalisation de cet examen n’est pas fréquente d’où la nécessité d’avoir un paramédical référent dans l’équipe ; – l’utilisation des pousse-seringues à grandes vitesses pour la bonne imprégnation du produit. Ce matériel demande aussi une formation spécifique pour le personnel ; – la surveillance des effets secondaires liés à l’injection du vasodilatateur, pour lesquels les paramédicaux doivent être formés. Enfin, on peut relever qu’au niveau clinique, les sueurs, l’augmentation du rythme cardiaque, une sensation de bouche sèche, les maux de tête ou une sensation de malaise sont les principaux signes relevés pendant l’examen. Rôle des paramédicaux circulants La préparation et l’installation du patient bénéficiant d’une exploration IMR sont superposables à tout examen réalisé en salle de cathétérisme (accueil et explication de l’examen, présentation de l’ensemble des équipes médicales et paramédicales, vérification de la signature par le patient du consentement éclairé, installation confortable du patient, préparation des voies radiales et fémorales, monitoring classique (SPO2, tension, ECG), mise en place d’une voie veineuse de gros calibre pour la perfusion d’adénosine et pour pouvoir intervenir en cas d’urgence, disponibilité du matériel d’urgence). Lors de la coronarographie, une FFR est toujours associée à une mesure de l’IMR et de la CFR dès que l’état de la microcirculation est recherché. Effets indésirables attendus Les effets indésirables pouvant être observés lors de cet examen sont identiques à ceux relevés à l’examen coronarographique. Il y a notamment ceux liés à l’exposition aux rayonnements ionisants (bonnes pratiques de radioprotection avec utilisation des diaphragmes, des paravents plombés, de la filtration, réduc­tion de la cadence des images, etc.) et ceux liés au cathétérisme et l’injection de produit de contraste (intolérance à l’iode, complications cliniques, hémo­dynamiques comme le malaise, les douleurs dans la poitrine, les palpitations liées à un trouble du rythme, etc.). Les risques vasculaires attendus liés à cet examen sont les mêmes que ceux engendrés par un guide d’angioplastie comme la dissection ou l’occlusion du vaisseau, la perforation, l’embolie ou le spasme. Enfin, l’utilisation de l’adénosine peut générer d’autres complications, notamment lorsque l’injection est réalisée à vitesse rapide. En cas de survenue d’effets graves, il faut immédiatement arrêter l’injection de ce médicament afin que les effets indésirables s’estompent. Préparation du matériel Pour la réalisation de cet examen, les conditions sont les mêmes que pour toute exploration coronaire, avec la nécessité d’avoir un désilet artériel de 5 ou 6 F, des sondes diagnostiques 5 F (le premier temps de l’examen sera toujours un temps diagnostic), un cathéter guide 5 ou 6 F (pour le temps de la mesure de l’IMR), le matériel et la machine spécifiques pour le calcul et, enfin, le guide Certus™. Lors de l’IMR, un paramétrage adéquat de la machine est essentiel, pour éviter tout dysfonctionnement ou mauvais résultat. Le réglage est géré par le paramédical, en collaboration avec le cardiologue interventionnel en charge de l’examen. L’importance de chaque étape Après la mise en place par l’opérateur du cathéter guide dans la coronaire, puis celle du guide Certus™ en aval de la lésion, le paramédical égalise les courbes et met en route le mode IMR sur la machine. Dans un premier temps, le paramédical enregistre les mesures à l’état basal ou repos (le médecin vérifie l’absence de produit de contraste dans la sonde et attend au moins 1 minute avant de commencer les injections de solution saline). Puis, il enregistre les mesures en hyperémie (cet effet est provoqué par l’injection en continu d’adénosine en intraveineux sur une durée de 3 minutes, avec une vitesse proportionnelle au poids du patient). Enfin, les résultats de l’IMR sont analysés par le médecin pendant la procédure (figures 3 à 5). Figure 3. Présence du paramédical en salle de cathétérisme pour l’enregistrement de la thermodilution. Figure 4. Résultats après hyperémie. Figure 5. Impression des résultats. Conclusion L’IMR est un examen complémentaire utile en salle de cath-lab pour mesurer l’atteinte de la microcirculation coronaire. Le rôle du paramédical en salle lors de l’examen est capital. Au-delà de la surveillance clinique et hémodynamique du patient, il doit parfaitement connaître le matériel afin que l’examen se déroule dans les meilleures conditions. Il doit être capable de gérer à tout moment les éventuelles complications liées à l’examen.   Cas clinique ➜ Chez cette patiente de 77 ans, il est réalisé une exploration macro et microscopique de la vascularisation coronaire. Elle présente des douleurs thoraciques assez suspectes à l’effort dans un contexte de dyslipidémie et d’hérédité coronarienne avec, par ailleurs, une hypothyroïdie. La symptomatologie apparaît uniquement à l’effort, et la scintigraphie réalisée est rassurante cliniquement et électriquement. Le coroscanner quant à lui retrouve un score calcique intermédiaire avec une sténose à 50 % sur l’IVA. L’échographie ne met pas en évidence de valvulopathie significative et pas d’HTAP. La coronarographie réalisée par voie radiale est assez informative puisqu’on retrouve bien sûr la sténose intermédiaire sur l’IVA proximale, moins péjorative sous certaines incidences. Il est donc réalisé comme convenu une mesure invasive de la FFR, de la CRF et de l’IMR. Les résultats sont probants, montrant une atteinte sévère de la microcirculation mais pas de la vascularisation épicardique. La FFR est à 0,96, réalisée sous 140 µg/kg/mn intraveineux d’adénosine, la réserve coronaire est très altérée à 1,4 pour une normale > 2 et l’IMR est à 56-55 pour une normale < 20. Les éléments sont concordants pour une atteinte épicardique microvasculaire modérée et sévère et la patiente est donc mise sous traitement médical. Elle sera revue pour adaptation thérapeutique et pour authentifier l’amélioration des symptômes.

Attention, pour des raisons réglementaires ce site est réservé aux professionnels de santé.

pour voir la suite, inscrivez-vous gratuitement.

Si vous êtes déjà inscrit,
connectez vous :

Si vous n'êtes pas encore inscrit au site,
inscrivez-vous gratuitement :

Version PDF

Articles sur le même thème

  • 10 sur 11
publicité