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Paramédical

Publié le 31 mai 2013Lecture 7 min

Les occlusions coronaires chroniques

M. BIGEON (IDE), Centre Hospitalier Lagny/Marne-la-Vallée

Face aux lésions devenues de plus en plus complexes, les cardiologues interventionnels disposent à l’heure actuelle de diverses armes technologiques et stratégiques pour réussir leurs gestes de revascularisation du myocarde par angioplastie percutanée. L’une de ces techniques est spécifiquement dédiée aux occlusions coronaires chroniques, encore appelées CTO (chronic total occlusion). Nous verrons dans cet article les caractéristiques de ces lésions, comment elles sont abordées par les opérateurs et quel est le rôle des paramédicaux de salle de cathétérisme dans cette approche thérapeutique. 

Dans le service de cardiologie interventionnelle de S. Elhadad (Centre hospitalier de Lagny/Marne), 102 des 1 312 angioplasties réalisées en 2012 étaient classées en CTO (soit 7,7 %), plaçant ainsi le centre comme centre de référence au niveau national en matière de traitement des occlusions coronaires chroniques. Caractéristiques d’une CTO L’occlusion totale L’occlusion coronaire doit être totale, c’est-à-dire que le flux antérograde doit être de type TIMI 0 (encadré). Ce flux TIMI 0 révèle souvent une occlusion ayant la morphologie appelée « moignon » et constitue le premier critère angiographique caractérisant une lésion de type CTO (figure 1).   Figure 1. Occlusion chronique d’une artère interventriculaire antérieure avec un flux TIMI 0. L’occlusion chronique Il existe deux éléments fondamentaux qui permettent de préciser l’aspect d’occlusion « chronique » d’une lésion coronaire, les critères angiographiques et cliniques.  Les critères angiographiques, par opacification du réseau homo- ou controlatéral (injection par exemple du réseau droit lors du cathétérisme du réseau gauche). Dans l’approche technique d’une CTO, l’abord par le réseau opposé s’appelle la « voie rétrograde » ou « controlatérale » (figure 2).  Les critères cliniques peuvent à l’interrogatoire du patient révéler une symptomatologie d’angor stable depuis plus de 3 mois. Des examens complémentaires et bien spécifiques comme la scintigraphie myocardique, l’IRM ou l’échographie de stress vont démontrer les bénéfices de l’angioplastie par rapport au traitement médical ou au recours à la chirurgie par pontage aortocoronaire, bénéfices établis de façon théorique comme suit : amélioration de la symptomatologie angineuse, majoration de la fraction d’éjection ventriculaire gauche (FEVG), réduction de la prédisposition aux troubles du rythme, alternative à la chirurgie par pontage. Figure 2. Occlusion coronaire chronique d’une CD (A) avec opacification du lit d’aval par l’IVA (B). Quel type de CTO et quels technique et matériel choisir ? Le cardiologue interventionnel doit établir sa stratégie en fonction des aspects angiographiques et anatomiques de la lésion : taille et diamètre de l’artère, taux de calcification de la lésion, caractère ostial ou non de l’occlusion, angulation, etc. Deux éléments contre-indiquent formellement un geste par angioplastie :  - l’absence de lit d’aval avec un risque de faux chenal (recanalisation en dehors de la lumière), de perforation, d’effraction et par conséquent de tamponnade trop élevé ;  - l’absence de viabilité myocardique. La procédure et le matériel utilisé La recanalisation d’une CTO est une procédure faisant appel à un matériel spécifique et souvent complexe. Dans notre unité de cardiologie interventionnelle, environ 60 % des CTO sont réalisés par un abord fémoral en 6 F. Le double abord fémoral/fémoral ou fémoral/radial est classique pour permettre l’opacification de la reprise controlatérale et la visualisation de la distalité ou lit d’aval de l’artère occluse. Lorsque l’évolution du matériel par voie antérograde avec opacification controlatérale se solde par un échec, la voie rétrograde représente une réelle alternative, en utilisant l’une des branches du réseau opposé.  Le matériel spécifique Le microcathéter : cathéter spécifique pouvant évoluer dans la sonde porteuse et glisser sur un guide d’angioplastie. Il permet principalement d’apporter un maximum de support au plus près de la lésion. Il présente la possibilité d’un échange de guide rapide et d’une opacification du lit d’aval une fois la lésion franchie pour s’assurer que le guide se retrouve dans la bonne lumière.  Les guides : ils sont nombreux et divers. On peut citer et différencier :  - les guides de première intention, souples, avec une extrémité rigide, pour le franchissement de lésions davantage calcifiées que les lésions standards ;  - les guides hydrophiles qui vont progresser dans la lumière avec un minimum de friction ;  - les guides avec une rigidité croissante à leur extrémité, de 1 à 14 grammes, à manipuler avec une extrême prudence et une dextérité accrue car le risque de perforation est majoré avec ce type de matériel.  Certains guides de CTO ont la particularité d’avoir une partie distale de 0,009’’, contrairement aux guides d’angioplastie conventionnelle de 0,014’’ (figure 3).    Figure 3. Guide de taille 0,009’’ spécifique à la CTO permettant une meilleure évolution dans les microcanaux et un meilleur franchissement des lésions calcifiées (A) ; guide coronaire de taille standard 0,014’’ (B). Les Tornus  Ce sont des fraises manuelles utilisées pour franchir les lésions très calcifiées. Elles sont rarement utilisées devant la grande diversité des guides et l’apport des microcathéters.  Le ballon d’angioplastie et le stent  Dans les CTO, le direct stenting reste rare. La prédilatation progressive au ballonnet est systématique, avec un cathéter d’angioplastie pouvant servir de support supplémentaire pour faire évoluer le guide. Lors du stenting, toute la lésion sera couverte, avec une longueur de stents implantés en moyenne de 55 mm dans notre pratique, soit environ 1,5 stent posé par procédure. Les risques et complications liés à cette technique La désobstruction d’une CTO n’est pas dénuée de risques et de complications qui sont majorés par rapport à une angioplastie conventionnelle. On peut citer les risques d’infarctus du myocarde, la perforation coronaire (en général causée par le guide coronaire), les complications vasculaires au point de ponction, la néphropathie liée au produit de contraste et la radiodermite au point d’entrée du faisceau. Zoom sur le rôle du paramédical Avant l’examen Le rôle du paramédical de salle de cathétérisme est primordial dans la préparation du patient qui sera perfusé par une voie d’abord de qualité. Il vérifie que le consentement a bien été signé par le patient, en s’assurant que l’examen lui a été clairement expliqué. Il est impératif d’évoquer la durée de l’examen. La majoration des risques liée au caractère complexe de la lésion aura au préalable été bien précisée par le cardiologue. En salle de cathétérisme Toute procédure de CTO induit deux paramètres qu’il est primordial de prendre en considération et de surveiller, la radioprotection et la quantité de produit de contraste injectée. Les temps de procédure élevés liés à la complexité des lésions à franchir, les techniques en double abord, la survenue de complications plus importante que dans les angioplasties standards amènent à un temps d’exposition aux rayons X plus long et à une injection de quantité de produit de contraste indéniablement majorée.  Dans ces deux cas, le rôle du paramédical de salle de cathétérisme est double : d’abord sensibiliser l’opérateur au compteur dosimétrique et au volume de contraste injecté, puis tracer les données liées à l’exposition aux rayonnements ionisants et à la quantité de produit iodé injectée dans le dossier médical du patient et le compte rendu de la procédure. Après la procédure Elle concerne la surveillance des points de ponction, afin d’anticiper un éventuel risque hémorragique et cela malgré la fermeture des sites de ponction par des fermetures artérielles percutanées. La surveillance à la fois hémodynamique et clinique du patient est effectuée en salle de surveillance postinterventionnelle (figure 4).    Figure 4. A : occlusion chronique de l’IVA. B : technique par double abord : reprise controlatérale IVA par la CD qui permet de savoir que le guide est dans la bonne lumière. C : résultat final avec mise en place d’un stent actif.  Conclusion La désobstruction d’une occlusion coronaire de plus de 3 mois (CTO) est une procédure à part dans toutes les angioplasties réalisées par les cardiologues interventionnels. Souvent complexe, elle nécessite un diagnostic précis et documenté, une approche technique délicate et un matériel spécifique, et est réalisée par un opérateur expérimenté.  La revascularisation d’une CTO n’est pas dénuée de risques et complications qu’il faudra prendre en compte dans la préparation du patient et dans le traitement de la lésion.   La complicité du binôme opérateur-paramédical, de par leur expérience et leur savoir-faire dans la prise en charge de la pathologie coronaire, est devenue indissociable pour garantir le succès d’un tel geste et offrir aux patients coronariens une qualité de vie améliorée.

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