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Paramédical

Publié le 30 sep 2010Lecture 7 min

Tester l’efficacité de l’antiagrégation plaquettaire en salle de cathétérisme

G. WILHELM, manipulateur radio, Hôpital Albert Schweitzer, Colmar

L’hémostase primaire est un mécanisme conditionnant l’agrégation plaquettaire sur une brèche vasculaire dans le but de stopper un saignement. Cet « atout » physiologique devient un inconvénient majeur après l’implantation d'un stent. En effet, un geste d’angioplastie induit des lésions endothéliales entraînant une activation plaquettaire, pouvant mener à l'occlusion de l’endoprothèse et donc à un infarctus du myocarde. Sans une couverture antiagrégante pendant la phase d’endothélisation, la thrombose de stent serait rédhibitoire. Le traitement antiagrégant de référence est une association entre l’aspirine et le clopidogrel. Cette bithérapie a permis de limiter le taux de thrombose à 1 % des procédures(1) (encadré).  

Toutefois, ces antiagrégants plaquettaires n’ont pas la même efficacité à posologie égale chez tous les individus(2,3). Cette variabilité de réponse induira forcément des devenirs cliniques différents(4,5). La proportion de patients « résistants » ou plutôt mauvais répondeurs est de 13 % pour le clopidogrel(4) et de 19 % pour l’aspirine(5).    Fort de ce constat, le monitorage antiplaquettaire de nos patients semble une solution séduisante afin de leur offrir l'efficacité d’une médication à « la carte ».  Il est possible d’évaluer l’efficacité de l’antiagrégation directement dans le service de cardiologie interventionnelle par des tests simples et rapides. Ils sont réalisés dans notre unité à l’aide d’automates d’analyses tels que le PFA-100 (Platelet Fonction Analyser) de Siemens ou le VerifyNow® d’Accumetrics/AAZ.  Le PFA-100  Le PFA permet l’analyse in vitro de l’hémostase primaire avec la particularité de déceler l'activité antiagrégante de l’aspirine. C’est le test de référence dans l’étude ITALIC.  Principe Le test consiste au prélèvement du sang veineux total avec une aiguille d’au moins 21 G sur un tube citraté tamponné à 3,8 %, laissé à température ambiante. La stabilité du prélèvement n’excède guère 3 heures. Conservées au réfrigérateur, les cartouches d'analyses sont laissées 10 minutes à température ambiante avant le test. L’analyse se fait sur 800 μl de sang délicatement homogénéisés et transférés dans une cartouche d’analyse épinéphrine (EPI) à usage unique.  L’échantillon placé sur le carrousel est pris en charge par l'automate. Une pompe à vide fait circuler le sang dans un capillaire métallique simulant ainsi les conditions physiologiques de flux. Le sang amené par ce capillaire s’écoule à travers l’ouverture d’une membrane pour mimer une brèche vasculaire. Cette membrane en nitrocellulose est recouverte de collagène additionné d’épinéphrine lyophilisée, réhydratée avant le passage du sang avec une solution déclenchante à 37 °C (figure 2).    Figure 2. Les plaquettes, leurrées par les activateurs de la membrane et les forces de cisaillement induites par le flux, vont former un clou plaquettaire qui va obstruer cette ouverture. Le PFA mesure le temps (en secondes) nécessaire à cette occlusion (figure 3).    Figure 3. Valeurs normales  Le temps d'occlusion normal avec la cartouche EPI est compris entre 85 et 165 secondes(6). Les patients traités avec de l’aspirine depuis au moins 5 jours sont considérés comme bons répondeurs au-delà de 165 secondes(7) (cut off de l’étude ITALIC).  Le test VerifyNow®  VerifyNow® (validé par la FDA en 2006) est un automate d’analyse, capable d'évaluer sélectivement l'efficacité de l'antiagrégation plaquettaire induite par l’aspirine, les thiénopyridines (clopidogrel, prasugrel), et les antiglycoprotéines IIb IIIa. C'est le test de référence dans l'étude ARTIC.  Principe  Chaque médicament est testé à partir d'un échantillon de sang total (veineux ou artériel) prélevé sur un tube citraté tamponné à 3,2 % avec une aiguille d’au moins 21 G. La cartouche d'analyse à usage unique sera choisie en fonction de la molécule à tester.  Tous les tests VerifyNow® fonctionnent sur le même principe : dans la cartouche un agoniste spécifique mis en contact avec le sang tente d’activer la voie d’agrégation bloquée par le médicament que l’on désire évaluer. Les plaquettes restées fonctionnelles s’activent et s’agrègent entre elles par le truchement de microparticules revêtues de fibrinogène. La turbidité* de l’échantillon sanguin diminue en même temps que les plaquettes s’agrègent. S’adossant à cette propriété, VerifyNow®, sorte de spectrophotomètre, mesure une variation de transmittance**. Plus cette grandeur augmente et plus la réponse à l'antiagrégant sera faible. Chaque mesure est confrontée à une valeur seuil pour juger de l'efficacité du traitement (figure 4).  L’utilisation du VerifyNow® se fait en trois étapes (figure 5).    Figure 4. Figure 5. Dosage et résultats Le test VerifyNow® P2Y12 évalue la capacité de blocage des récepteurs P2Y12 par le clopidogrel (ou le prasugrel).  Le test utilise de l’adénosine-5- diphosphate comme activateur plaquettaire. Le résultat s’exprime en PRU (P2Y12 Reaction Unit). L’automate détermine également un pourcentage d’inhibition, obtenu par calcul à partir de la mesure de l’agrégation basale et du PRU. Le dosage sera réalisé entre 10 minutes et 4 heures après le prélèvement.  Le patient est bon répondeur si le PRU < 235 et le pourcentage > 15 %.  Le test VerifyNow® Aspirin évalue la capacité de l’aspirine à inhiber la Cox-1. Le test utilise de l’acide arachidonique comme agoniste. Le résultat s’exprime en ARU (Aspirin Reaction Unit).  Le patient est bon répondeur si son taux d’ARU < 550.  Les tests P2Y12 et Aspirin ne sont pas réalisables si le patient est sous anti-GP IIb/IIIa. Il faudra attendre le rétablissement de la fonction plaquettaire, soit 14 jours pour lʼabciximab et 48 heures pour lʼeptifibatide et le tirofiban.  Le test VerifyNow® IIb/IIIa évalue la capacité de blocage des récepteurs GPIIb/IIIA par leurs antagonistes. Le résultat s’exprime en PAU (unité d’agrégation plaquettaire). Le traitement est efficace si le taux de PAU > 95 %.  N’oublions pas que l’interprétation des résultats se fera toujours, quelle que soit la technique, avec l’éclairage de la clinique et des autres analyses de laboratoire. Les tests évaluent l’action des antiagrégants à un instant T. Pour s’assurer d’une efficacité nycthémérale, nous avons l’habitude de prélever l’échantillon de sang avant la nouvelle prise du traitement. Le rôle du paramédical Sans nous transformer en laborantins, l’arrivée de ces automates a néanmoins bousculé notre quotidien. Leur utilisation est certes aisée, mais nécessite tout de même rigueur et méthode dans la réalisation des tests. En plus des dosages, l’équipe paramédicale doit aussi :  - se charger, si possible, du prélèvement veineux afin de maîtriser la globalité du processus ;  - gérer les consommables ;  - veiller à l'élimination des déchets dans le circuit septique ;  - initier les procédures « d'autocontrôle calibrages et qualités » (en fonction des recommandations des constructeurs) ;  - et, enfin, transmettre les résultats.      Conclusion  Utilisé aujourd’hui comme support dans certaines études cliniques ou bien en « off label » (et donc non remboursé), le monitorage plaquettaire sera peut-être demain une routine, voire une recommandation en cardiologie interventionnelle.  Ces tests sont des aides décisionnelles pour l’angioplasticien et permettent :  - d’adapter la posologie des antiagrégants plaquettaires avant une procédure ;  - de justifier l’administration d’anti-GPIIb/IIIa aux patients ne pouvant attendre l’ajustage posologique avant une angioplastie coronaire ;  - de choisir le mode de revascularisation (chirurgie versus angioplastie pour les non-répondeurs) ;  - de motiver un changement de thiénopyridine en optant pour le prasugrel ;  - d’être sûr de la bonne réponse à l’aspirine après l’arrêt du clopidogrel (surtout pour les patients ayant bénéficié de stents actifs) :  - d’évaluer la fonction plaquettaire avant une chirurgie urgente pour les patients traités au préalable avec des antiagrégants plaquettaires ;  - de rassurer autant le patient que le cardiologue.    

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