HTA
Publié le 14 jan 2014Lecture 17 min
M. AZIZI, Unité d’hypertension artérielle, HEGP, Paris
L’implication du système nerveux végétatif dans la physiopathologie de l’hypertension artérielle (HTA) a été remise à l’ordre du jour par la publication des premiers résultats de la dénervation sympathique rénale par voie endovasculaire chez des hypertendus résistants. Le système nerveux sympathique rénal efférent joue un rôle direct dans la régulation de la pression artérielle (PA) en stimulant la réabsorption sodée, la libération de rénine et la vasoconstriction. Les afférences végétatives modulent l’activité sympathique globale de l’organisme sous l’influence de stimuli mécaniques ou chimiques induits, par exemple, par l’ischémie rénale. Les filets nerveux de ces deux voies cheminent dans l’adventice du pédicule artériel rénal.
La dénervation rénale chirurgicale (sympatho-splanchnicectomie dorsolombaire ou intervention de Smithwick) a été pratiquée chez les hypertendus sévères et compliqués, dès la fin des années 1930, quand les traitements médicamenteux n’étaient pas encore disponibles. Cette intervention était grevée d’une mortalité périopératoire élevée et d’effets indésirables fréquents et invalidants. L’avènement des médicaments antihypertenseurs a entraîné l’abandon de cette technique.
En dépit de la mise à disposition de nombreux médicaments, les objectifs tensionnels ne sont pas atteints chez un nombre significatif d’hypertendus. L’enquête nationale Nutrition Santé réalisée en 2006- 2007 a montré que 30 % des adultes en France métropolitaine avaient une HTA, et que 50 % des HTA traitées étaient insuffisamment contrôlées ; mais ce chiffre ne tient pas compte du nombre de classes d’antihypertenseurs prescrits. L’HTA résistante répond à une définition adoptée par toutes les sociétés savantes : « PA restant au-dessus de la cible thérapeutique fixée (140/90 mmHg en mesure clinique) chez un patient observant d’une association de trois médicaments dont un diurétique à dose optimale. » Le pronostic des patients ayant une HTA résistante est défavorable, car elle est associée à une atteinte des organes cibles et à un haut risque d’événements cardiovasculaires. Les HTA qui résistent aux stratégies d’optimisation thérapeutique illustrent les limites d’une approche purement pharmacologique et expliquent l’intérêt croissant suscité par des approches non médicamenteuses. Les progrès technologiques récents permettent ces approches invasives, comme la dénervation rénale par voie endovasculaire.
La dénervation rénale endovasculaire par radiofréquence est une nouvelle approche thérapeutique non médicamenteuse, élective dans le traitement de l’HTA résistante, et qui s’accompagne d’une réduction stable de la pression artérielle. Toutefois, la qualité, les effectifs et le recul des études publiées sont encore insuffisants à évaluer l’effet antihypertenseur sur le long terme, ainsi qu’une estimation fiable de l’incidence des complications précoces et tardives. Dès lors, les différentes techniques de dénervation rénale (radiofréquence, cryo-ablation, ou ultrasons) doivent être évaluées au cours de protocoles, dans une démarche de recherche et d’évaluation. L’indication actuelle, selon les recommandations nationales et internationales, reste l’HTA essentielle résistante.
De nombreuses communications sont consacrées à la dénervation rénale dans les congrès de cardiologie, de radiologie et de néphrologie, comme celui de l’ESH. Ce dossier fait le point sur cette actualité.
De nombreuses communications à l’ESH ont concerné la dénervation rénale par voie endovasculaire.
Le réseau ENCORE D
Ce réseau européen académique concernant la dénervation rénale coordonné par A. Persu et J. Staessen (Belgique) dont fait partie la France représentée par l’HEGP (M. Azizi) – a rapporté son expérience de la dénervation rénale dans 10 centres européens. Ces résultats, présentés en late-breaking session, concernent 109 patients âgés de 58 ans, qui avaient une hypertension artérielle résistante caractérisée par une PAS à 175 mmHg et PAD à 101 mmHg en consultation, correspondant à une pression ambulatoire des 24 h de 157/ 94 mmHg. Les patients étaient traités par 4,7 traitements antihypertenseurs de différentes classes. Ils ont été traités par une dénervation rénale par voie endovasculaire utilisant la technique de radiofréquence.
La baisse de pression artérielle à 6 mois était de 17,6/7,1 mmHg pour la pression de consultation, et de 5,9/3,5 mmHg pour la pression ambulatoire des 24 h, 6,2/3,4 mmHg pour la pression ambulatoire diurne et de 4,4/2,5 mmHg pour la pression nocturne. Le score de traitement n’a baissé que très modérément de 4,9 à 4,5 médicaments antihypertenseurs à 6 mois. La baisse de pression artérielle clinique et ambulatoire était fonction du niveau tensionnel initial : plus il était élevé, plus la baisse de pression artérielle était grande. La normalisation de la pression artérielle clinique (< 140 mmHg) ou en mesure ambulatoire des 24 h (< 130 mmHg) n’était observée que chez 22,9 % et 14,7 % des patients, respectivement.
Une amélioration tensionnelle caractérisée par une réduction de 10 mmHg indépendamment de la technique de mesure était observée chez 59,6 % et 54,4 % des patients, respectivement. Il faut noter que 22,9 % des patients en mesure clinique et 17,1 % des patients en mesure ambulatoire, n’ont eu aucune amélioration de leur niveau de pression artérielle. La réponse tensionnelle à la dénervation était donc très variable et plus faible que celle initialement rapportée dans les essais. Elle pourrait, en partie, être expliquée par un effet placebo ou une régression vers la moyenne. Il reste à prouver, comme le demandent les nouvelles recommandations, que la baisse tensionnelle observée après dénervation se traduira par une diminution des événements cardiovasculaires.
Peu d’indications
Plusieurs études se sont concentrées sur le bilan nécessaire avant toute indication de dénervation et ont conclu dans la même direction, montrant que le pourcentage de patients pour lesquels une indication pourrait être posée reste faible, et confirmant ainsi les premiers travaux déjà montrés par le groupe de l’HEGP (S. Savard, M. Sapoval, M. Azizi).
L’importance du bilan
J. Rosa (République tchèque), insiste sur l’importance d’un bilan complet devant une hypertension résistante avant toute dénervation. Deux cent cinq patients ayant une hypertension sévère ont été adressés à leur centre de référence à Prague. Pour chacun d’eux, une mesure ambulatoire de pression artérielle, une recherche d’une étiologie secondaire et une recherche d’inobservance au traitement par la mesure des concentrations plasmatiques des médicaments dans le sang par spectrométrie de masse ont été réalisées. La résistance au traitement a été confirmée chez 148 patients en mesure clinique, confirmée uniquement chez 117 d’entre eux par la mesure ambulatoire de pression artérielle. Une étiologie secondaire à l’hypertension était retrouvée chez 45 patients. Parmi les 72 patients ayant une hypertension essentielle, une inobservance au traitement était notée chez 27 d’entre eux. Seuls 45 patients avaient donc une hypertension essentielle, résistante au traitement, avec une observance correcte. Quatorze avaient une contre-indication à la dénervation à cause d’une insuffisance rénale ou d’une anatomie inappropriée, et parmi les 31 patients finalement éligibles pour une dénervation, seuls 15 ont accepté la dénervation. Leur approche a permis d’exclure plus de 78 % des patients adressés à leur centre pour dénervation rénale qui, finalement, n’étaient pas éligibles.
La proportion de patients éligibles
A. Persu (Belgique) a évalué la proportion de patients éligibles pour dénervation dans le réseau européen ENCORE D. Trois cent huit patients adressés pour dénervation dans 7 centres européens ont été évalués. L’âge moyen était de 58 ans, dont 43 % de femmes. La pression artérielle clinique était de 174 mmHg et le nombre de classes d’antihypertenseurs de 5, proches des données des études SYMPLICITY. Soixante-seize pour cent des patients étaient adressés par des spécialistes. La proportion de patients éligibles pour dénervation selon les critères SYMPLICITY HNTN- 2 était de 39 %. Celle-ci était de 33 % selon les critères internes aux différents centres.
Les raisons principales de nonéligibilité étaient la normalisation de la pression artérielle après adaptation du traitement (48 %), incluant dans 24 % une faible dose de spironolactone, les raisons anatomiques (16 %), une fonction rénale altérée (11 %), un effet blouse blanche (8 %), une hypertension secondaire (8 %) ou un âge trop élevé (8 %).
En conclusion, même dans une population de patients très sélectionnés avec une hypertension artérielle résistante, seul un tiers est éligible pour dénervation. Dans la moitié des cas, la pression artérielle peut être contrôlée par adaptation du traitement antihypertenseur. Dans l’attente de nouveaux résultats d’essais thérapeutiques contrôlés, la dénervation doit encore être réservée aux patients chez qui un screening complet a été effectué et le traitement antihypertenseur médicamenteux a été optimisé.
Expérience de screening
Le groupe de Copenhague (Olsen) a aussi rapporté son expérience de screening chez 84 patients adressés pour dénervation rénale entre mars 2011 et septembre 2012. Soixante-huit étaient des hommes d’âge moyen de 60 ans prenant 3,9 médicaments antihypertenseurs, avec une pression clinique de 176/99 mmHg et une pression ambulatoire de 156/88 mmHg. Quarante-sept pour cent des patients étaient candidats pour dénervation. Dans 37 % des cas, la dénervation était réfutée, pour raison anatomique, athérosclérose sévère, tumeur surrénalienne, sténose artérielle rénale et comorbidité sévère. Huit patients n’ont pas souhaité avoir de dénervation. Enfin, 9 patients sur 84 avaient une hypertension secondaire, soit 11 %, et il s’agissait le plus fréquemment d’une sténose artérielle rénale.
Critères anatomiques favorables
Koppelstaedder (Autriche) a évalué dans une cohorte de patients non sélectionnés la probabilité d’avoir les critères anatomiques favorables pour une dénervation. Les angioscanners de 102 malades ont été réévalués rétrospectivement. Chez 18,6 % des patients, l’artère rénale principale faisait moins de 2 cm de longueur et, chez 22,5 % des patients, le calibre artériel rénal était inférieur à 4 mmHg. Une dysplasie fibromusculaire a été retrouvée chez 2 patients, une sténose artérielle rénale chez 1 patient. Des artères rénales multiples étaient observées chez 36,2 % des patients, ceux qui ne sont pas accessibles à la dénervation selon les recommandations actuelles. En combinant l’ensemble des critères, 51 % des patients n’étaient pas éligibles sur le plan anatomique. Une imagerie par angioscanner ou IRM est nécessaire avant tout geste de dénervation rénale, comme le stipulent les recommandations de la conférence de consensus français.
Vérifier la résistance tensionnelle
Fadl-Elmuna (Norvège) a vérifié la résistance tensionnelle par une prise médicamenteuse en présence médicale au cours d’une hospitalisation chez des patients adressés pour dénervation rénale. Dix-huit patients ont été adressés à leur centre sur une période de 6 mois entre décembre 2011 et juin 2012. L’hypertension résistante était définie par une pression artérielle clinique > 140 mmHg malgré la prise de 3 antihypertenseurs à doses maximales incluant un diurétique. Ces patients devaient avoir aussi une mesure ambulatoire de pression artérielle > 135 mmHg immédiatement après une administration contrôlée des médicaments en présence médicale. Bien que la plupart des patients aient été adressés par des centres spécialisés, 12 patients ont dû être exclus, car la pression artérielle ambulatoire s’est normalisée chez 5 d’entre eux, 2 avaient une protéinurie massive, 1 avait une anomalie artérielle rénale et 4 avaient des pathologies associées dont un hyperaldostéronisme primaire. La dénervation n’avait été réalisée que chez 6 patients. Chez les patients pour lesquels l’indication a finalement été posée, la pression artérielle clinique et ambulatoire ne s’est pas modifiée à 1, 3 et 6 mois, voire a augmenté chez 4 patients. Deux patients ont néanmoins eu une baisse marquée de la pression artérielle.
Les auteurs suggèrent qu’une part importante de la baisse de pression après dénervation pourrait être expliquée par une amélioration de l’observance au traitement. Il peut aussi y avoir des répondeurs à la dénervation pour lesquels il n’existe pas encore aujourd’hui de marqueurs bien définis.
Effet de la spironolactone à faibles doses
X. Girerd (Paris) a évalué l’effet de la spironolactone à faibles doses (25 mg) comme traitement médicamenteux ajouté à une trithérapie des patients adressés pour dénervation rénale, selon les recommandations du consensus français. Parmi 796 patients suivis par ce centre, une hypertension résistante était observée chez 13,6 % des patients traités par une trithérapie. L’ajout de spironolactone 25 mg, à un traitement standardisé comportant un diurétique thiazidique, un antagoniste de l’angiotensine II, un antagoniste calcique, a réduit cette proportion. Seulement 2,1 % des patients recevant un traitement standardisé incluant la spironolactone avaient une résistance au traitement. L’angioscanner rénal montrait des artères rénales multiples dans 35 % des cas, et des sténoses artérielles rénales ou une dysplasie ou la présence d’un stent dans 21 % des cas. Une tumeur rénale ou un incidentalome surrénalien était observé dans 12 % des cas. Après suivi et scanner, seuls 2,1 % des patients traités avaient une indication à la dénervation, confirmant les premières données françaises issues de l’Hôpital européen Georges-Pompidou. Le même groupe a recherché des prédicteurs de la réponse tensionnelle à la dénervation rénale. Vingt patients hypertendus résistant à une quadrithérapie ont été traités par dénervation. Après 3 mois de suivi, une réponse tensionnelle positive était observée chez 40 % des patients. Celle-ci était définie comme une baisse de pression artérielle ambulatoire des 24 h de plus de 10 mmHg. Le traitement antihypertenseur n’a pas été modifié entre les deux examens. Dans ce sousgroupe de 8 patients, la variation en mesure ambulatoire était de 18,4/19,6 mmHg. Deux paramètres permettaient de prédire la réponse tensionnelle après dénervation : la pression pulsée ambulatoire et le dipping de la pression artérielle diastolique nocturne. Quand la pression pulsée était < 65 mmHg, la sensibilité à prédire une réponse positive était de 100 % et la spécificité de 67%. Si le dipping nocturne de la pression artérielle diastolique est inférieur à 15 %, la sensibilité de ce critère est de 100 % et la spécificité de 83 %. Ainsi, la pression pulsée des 24 h < 65 mmHg et un dipping nocturne de la pression artérielle diastolique < 15 % pourraient identifier les répondeurs et l’efficacité de la dénervation rénale. Un plus grand nombre de patients est nécessaire pour évaluer le caractère prédictif de ces mesures.
Apport de la scintigraphie rénale à la MIBG
D. Eftinck (Hollande) a évalué l’apport de la scintigraphie rénale à la MIBG marquée à l’iode 123 comme marqueur prédictif de la réponse tensionnelle à la dénervation. Le constat qu’il existe une forte variabilité de la réponse tensionnelle est peut-être lié à une impossibilité à réaliser une ablation sympathique rénale suffisante. En analogie à la scintigraphie cardiaque à la MIBG comme mesure de l’activité sympathique cardiaque, les auteurs ont évalué la scintigraphie rénale à la MIBG. Les deux examens ont été réalisés avant dénervation rénale, puis 6 semaines après chez 6 patients. La pression artérielle ambulatoire est passée de 176/106 mmHg à 151/95 mmHg. Le washout de la MIBG rénale diminuait de 21 %. Le washout de la MIBG cardiaque n’était pas modifié. Le rapport du washout cardiaque/rénal de la MIBG diminuait de 16 %. Ces données préliminaires suggèrent que la MIBG rénale puisse devenir une méthode non invasive pour évaluer la réduction de l’activité sympathique rénale après dénervation rénale.
Réponse tensionnelle après dénervation
Hering (Australie) a évalué la réponse tensionnelle après dénervation en présence ou en l’absence d’un traitement par un antihypertenseur central (moxonidine). Trente-trois patients recevaient de la moxonidine, en plus de leur traitement habituel, contre 32 patients qui n’en recevaient pas. La pression artérielle de base était similaire entre les 2 groupes. La baisse de pression systolique après dénervation était plus marquée chez les patients recevant de la moxonidine que ceux qui n’en recevaient pas à 3 et 6 mois (19 mmHg). L’activité sympathique de base mesurée par microneurographie péronière était similaire dans les deux groupes. La réduction de cette activité sympathique était similaire à 3 et 6 mois pour les deux groupes. La réponse tensionnelle à la dénervation est plus marquée chez les patients qui reçoivent un antihypertenseur central d’action sympatholytique comme la moxonidine. Le fait qu’en dépit d’un traitement par moxonidine, les patients aient le même niveau d’activité sympathique initiale pourrait montrer une relative résistance à l’action centrale de la moxonidine ou, alternativement, qu’un haut niveau d’activité sympathique centrale était réduit par la moxonidine avant traitement. Quelle que soit l’explication, les patients ayant une hypertension résistante qui ont un haut niveau d’activité sympathique malgré un traitement sympatholytique ont une plus grande réponse à la dénervation. Il est encore prématuré d’affirmer que la réponse à la moxonidine puisse être utilisée comme outil de prédiction de la réponse tensionnelle après dénervation.
Efficacité de la dénervation dans des formes moins sévères
B. Ott (Allemagne) a évalué l’efficacité de la dénervation dans des formes moins sévères d’hypertension artérielle résistante. En effet, jusqu’à présent, seuls les patients ayant une pression artérielle systolique ≥ 160 mmHg ou 150 mmHg pour les diabétiques, ont été traités. Les auteurs ont voulu savoir si en appliquant les critères de l’ESH d’hypertension résistante, c’est-à-dire une pression artérielle > 140 et/ou 90 mmHg en pression clinique avec 3 antihypertenseurs, dont 1 diurétique à des doses adéquates, confirmée par une mesure ambulatoire, la dénervation aurait les mêmes effets tensionnels. Soixante-deux patients ayant une hypertension résistante selon ces critères ont eu une dénervation. Ils étaient traités par 5,1 médicaments antihypertenseurs. La pression artérielle clinique était diminuée de 13/7 mmHg six mois après dénervation de 151 à 138 mmHg. La mesure ambulatoire n’était obtenue que chez 39 patients, et montrait une baisse de 14/7 mmHg, passant de 151 à 136 mmHg. La pression artérielle clinique était contrôlée en dessous de 140/90 mmHg chez 52 % des patients. Ces données montrent que, dans une étude ouverte non randomisée, la pression artérielle clinique et ambulatoire est susceptible de baisser après dénervation rénale.
L’hétérogénéité de réponse tensionnelle nécessite de rester très prudent quant à l’indication de la dénervation. L’essai français DENER-HTN coordonné par l’HEGP permettra de répondre à cette question.
Efficacité de la dénervation en présence ou en absence d’artères rénales multiples
Weiss (Allemagne) a évalué l’efficacité de la dénervation rénale en présence ou en l’absence d’artères rénales multiples chez 42 patients traités par dénervation. Le résultat du traitement semble être influencé par la variabilité anatomique artérielle rénale. Ainsi, les patients ayant des artères polaires, des artères accessoires ou des branches précoces ou des artères rénales doubles n’ont pas eu de baisse de pression artérielle significative. En revanche, une baisse de pression artérielle effective était observée chez 74 % des 23 patients ayant une seule artère rénale pour chaque rein. La baisse de pression artérielle se maintenait après 1 an. La taille de cette étude ne permet pas de conclure avec certitude sur l’inefficacité en présence d’artères multiples.
Rappelons que le consensus français recommande la présence d’une artère rénale unique pour chaque rein pour une dénervation.
Nouvelle classification de l’anatomie des artères rénales
T. Okada et coll. (HEGP, Paris) ont conçu une nouvelle classification de l’anatomie des artères rénales (AR) à l’angioscanner fondée sur les besoins spécifiques de la dénervation artérielle rénale (DR), car l’anatomie des AR est un déterminant majeur de la faisabilité du geste chez les patients ayant une HTAR. L’anatomie des AR de 131 patients a été classée comme (A1) s’il y avait 1 artère rénale principale (ARP) ≥ 20 mm de longueur et ≥ 4 mm de diamètre sans artères rénales accessoires (ARA), (A2) en présence de 1 ARP ≥ 20 mm de longueur et ≥ 4 mm de diamètre avec des ARA < 3,0 mm de diamètre, (A3) en présence de 1 ARP ≥ 20 mm de longueur et ≥ 4 mm de diamètre avec des ARA ≥ 3 mm de diamètre, (B1) en présence de 1 ARP < 20 mm longueur et (B2) en présence de 1 ARP < 4 mm de diamètre.
La faisabilité de la DR a été évaluée pour 2 cathéters de dénervation différents. Neuf patients avaient une sténose d’une ARP > 30 % de diamètre et ont été exclus. Chez les 122 patients restants, une ARA était présente dans 39 % des cas. Quatre-vingt-dix-sept pour cent des patients ayant un type A1, A2 ou A3 sont accessibles à un traitement par au moins un dispositif de DR. Il existe une forte prévalence d’artères rénales accessoires (ARA) chez les patients ayant une HTA résistante.
Des registres en cours
G. Mancia (Italie) a rapporté les données préliminaires du registre SYMPLICITY en population « réelle ». Il s’agit d’un registre prospectif, multicentrique qui a pour objectif d’inclure 5 000 patients avec une hypertension artérielle ou autre pathologie caractérisée par une augmentation de l’activité sympathique. Tous les patients sont traités avec le système SYMPLICITY. Les données préliminaires de 313 patients hypertendus montrent que l’âge moyen est de 58 ans, 65 % des patients sont des hommes et 43 % ont un diabète. Ils prennent en moyenne 3,7 ± 1 médicaments antihypertenseurs et la pression artérielle de base est de 165/92 mmHg, avec une pression pulsée de 73 mmHg et une fréquence cardiaque de 70 bpm. Les données de ce registre permettront d’avoir des informations importantes sur le rôle de la dénervation dans la prise en charge de l’hypertension artérielle en monde réel.
Buzzi (Italie) a rapporté les données du registre italien de dénervation chez 51 patients. L’âge moyen était de 61 ans, et la pression artérielle clinique était de 194/107 mmHg malgré l’utilisation de 6 médicaments antihypertenseurs. La pression artérielle ambulatoire des 24 h correspondante était nettement plus basse à 147/77 mmHg. Après 6 mois de suivi, la pression artérielle clinique était de 156/85 mmHg sans modification de la fréquence cardiaque. La baisse de pression artérielle ambulatoire des 24 h (10/6 mmHg) est nettement moins marquée que celle de la pression clinique.
Là encore, cette étude montre que l’amplitude de la baisse de la pression artérielle en mesure ambulatoire est nettement moins marquée que celle attendue compte tenu de la baisse de pression clinique. Seule la mesure ambulatoire, comme le rappelle le consensus français, permet d’évaluer avec précision la réponse tensionnelle à ce type d’approche thérapeutique.
ENLIGHT-HTN
Tsioufis (Grèce) a rapporté les résultats partiels à 12 mois de l’étude ENLIGHT-HTN utilisant un cathéter à multi-électrodes St. Jude. Ce cathéter permet une dénervation en déployant « un panier » au contact de la paroi artérielle rénale. Les mailles du panier portent 4 électrodes qui sont disposées de façon spiralée. Les électrodes sont activées de façon séquentielle. Quarante-six patients ayant une hypertension artérielle résistante ont été inclus. En moyenne, 7,7 ablations ont été réalisées et la durée médiane de la procédure était de 34 min. La pression artérielle clinique initiale était de 176/96 mmHg et la pression ambulatoire de 150/83 mmHg. La baisse de pression clinique à 6 mois chez 45 patients était de 26/10 mmHg en moyenne. En revanche, la baisse de pression artérielle de 24 h n’était que de 10/6 mmHg à 6 mois. Trente-trois pour cent des patients avaient une pression artérielle clinique normalisée (< 140 mmHg). Il y a eu trois événements indésirables graves : une maladie hypertensive rénale progressive, une hypotension symptomatique et une sténose artérielle rénale apparaissant sur une sténose préexistante. L’apparition d’une sténose artérielle rénale rapportée avec la plupart des cathéters nécessite une surveillance radiologique par angioTDM ou angioIRM, comme l’a recommandé la conférence de consensus national.
Rappelons les indications de dénervation rénales retenues par la conférence de consensus dont le texte complet est accessible sur le site de la SFHTA. L’indication d’une dénervation rénale doit être posée par un groupe multi-disciplinaire ayant une pratique et une compétence reconnue dans la prise en charge des patients avec HTA, en particulier résistante au traitement (encadré).
Le traitement antihypertenseur ne sera pas interrompu dans les suites immédiates de la dénervation. Les modifications du traitement seront réalisées par le médecin prenant en charge le patient pour son HTA.
Le suivi au long cours des patients est indispensable selon un calendrier précis (tableau).
Le consensus d’experts recommande l’inclusion dans le registre SFHTA/SFC/SFR/GACI de tous les patients ayant bénéficié en France d’une dénervation rénale dans le cadre de protocoles ou d’une prise en charge clinique hors protocole.
Rappelons ici que deux protocoles de recherche nationaux financés par le ministère de la Santé sont en cours en France métropolitaine : DENERHTN dans l’HTA résistante et DERENEDIAB dans la néphropathie diabétique, protocoles coordonnés par le service d’HTA de l’HEGP à Paris.
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