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Insuffisance cardiaque

Publié le 28 fév 2014Lecture 5 min

Première implantation d’un cœur artificiel - CARMAT : l’une des plus grandes innovations médicales

G. GERTNER, d'après un entretien avec D. DUVEAU, Nantes

L’annonce de l’implantation du cœur artificiel CARMAT a fait l’objet d’une diffusion de l’information au niveau des médias grand public à la hauteur de l’événement. Cardiologie Pratique a voulu en savoir plus sur les aspects médicaux et chirurgicaux de cette grande première. Nous avons demandé à Daniel Duveau, chirurgien cardiaque à Nantes, qui a fait partie de l’équipe chirurgicale ayant implanté le premier cœur artificiel, de nous en préciser quelques aspects. 

  Cardiologie Pratique - Pouvez-vous décrire simplement l’anatomie et la physiologie de ce cœur artificiel : oreillettes, ventricules, valves auriculoventriculaires… Daniel DUVEAU - Le cœur Carmat est un monobloc de 900 g ressemblant, sur le plan morphologique, à un cœur dilaté humain. Il contient deux ventricules et quatre valves : deux valves auriculo- ventriculaires et deux valves ventriculo-artérielles. Ce sont quatre valves bioprothétiques en péricarde, selon le modèle créé par le Pr Alain Carpentier il y a de nombreuses années. L’implantation chirurgicale se fait après résection des deux massifs ventriculaires et des deux valves auriculo-ventriculaires (les valves aortique et pulmonaire ont été réséquées avec les ventricules). Une « lunette » biocompatible est suturée sur les anneaux auriculo-ventriculaires ; le ventricule viendra se clipser sur cette « lunette ». Les oreillettes natives restent donc en place. La continuité ventriculo-artérielle est rétablie par l’interposition d’une prothèse vasculaire « classique » entre les sorties artérielles du ventricule artificiel et les gros vaisseaux en suture termino-terminale. Le cœur Carmat contient donc – entre autres – deux cavités ventriculaires dont le design vise à simuler l’anatomie du cœur humain, deux cavités divisées par une membrane biologique en une partie sanguine et une partie pour le fluide d’actionnement de cette membrane. Ce fluide est activé par deux minimoto-pompes qui déplacent les biomembranes en simulant les mouvements des parois du cœur humain.   Par quel mécanisme, ce cœur artificiel modifie-t-il le débit cardiaque en fonction des besoins ? D. DUVEAU - Le cœur contient des capteurs de position et de pression qui détectent les besoins du patient. Un dispositif électronique embarqué et intégré, grâce à des algorithmes informatiques, gère le remplissage et le rythme des ventricules pour simuler un fonctionnement physiologique.   Comment évaluez-vous la compatibilité du patient avec le poids et le volume du cœur artificiel ? D. DUVEAU - Il existe un système de simulation d’implantation virtuelle qui permet, à partir d’un scanner thoracique, d’évaluer l’encombrement thoracique et de reconstruire l’implantation en 3D.   Comment l’énergie est-elle délivrée ? La nuit et en cours de journée ? Avec quelle autonomie pour le patient ? D. DUVEAU - L’énergie électrique est transmise au ventricule via un câble transcutané qui traverse la paroi abdominale au niveau de l’hypochondre droit. Le cœur est relié à une console (version hospitalière) ou à un boîtier (version domicile) qui contiennent des batteries assurant l’autonomie nécessaire à une vie confortable ; ces « machines » sont connectables sur une prise de courant ordinaire pour assurer la recharge des batteries et une autonomie illimitée. Un système de piles à combustible en développement assurera une autonomie de 12 heures.   Quels sont les traitements médicaux envisagés avant et après l’implantation ? Quelle est la place de l’anticoagulation ? D. DUVEAU - Comme pour les bioprothèses valvulaires, l’objectif est un traitement par les AVK pendant 6 à 8 semaines, associé à un traitement antiagrégant qui sera maintenu à vie. Dans un premier temps, si le traitement AVK est maintenu au-delà de 6 à 8 semaines, l’objectif de l’INR sera bas (type prise en charge de la FA, par exemple) pour limiter les accidents qui en dépendent. Pour le traitement « cardiologique », c’est surtout un contrôle de la TA comme avec toute assistance circulatoire.   Y a-t-il un risque d’échauffement du dispositif ? D. DUVEAU - A priori, non. On reste dans des températures physiologiques. De toute façon, la température du dispositif est monitorée en continu.   Si l’ECG n’a plus sa place, quels sont les paramètres de suivi du fonctionnement du cœur artificiel lui-même ? D. DUVEAU - La tension artérielle et les paramètres biologiques d’une bonne perfusion d’organes (lactates, etc.) sont les éléments essentiels. Sur la machine, les consoles donnent un grand nombre d’informations sur les pressions, les débits, les courbes de remplissage et de vidange, etc.   Ce cœur artificiel est-il IRMcompatible ? D. DUVEAU - Non.   Quelles sont les principales caractéristiques qui distinguent Carmat d’Abiocor ? D. DUVEAU - Je ne dispose pas assez d’informations sur l’AbioCor pour répondre précisément à cette question. Les caractéristiques essentielles de Carmat sont sa biocompatibilité (cœur biologique avec revêtements en péricarde) et son fonctionnement automatique et physiologique (régulation sophistiquée). D’autre part, ici l’électronique est embarquée dans le ventricule et les batteries sont externes. Pour l’AbioCor, l’électronique est dans un boîtier séparé et implanté dans le malade, de même qu’une batterie et la transmission électrique se fait en transcutané. Cela fait beaucoup de matériel implanté, avec tous les risques que cela comporte.   Les critères d’inclusion et d’exclusion ont été définis en amont. Cependant, au-delà de ces critères, comment sélectionnez-vous les candidats à l’implantation : selon les comorbidités ? le degré d’urgence ? le profil psychologique ? l’environnement social du patient ? D. DUVEAU - Nous sommes dans un protocole de recherche clinique, donc les critères d’inclusion et d’exclusion sont clairement définis. Les comorbidités peuvent constituer des critères d’exclusion : troubles de la coagulation, infection systémique, etc. Comme beaucoup d’appareils d’assistance circulatoire lourde, ce n’est pas spécifiquement un appareil pour les situations d’urgence extrême ; mais où se situe la limite de l’urgence d’un malade en situation de fin de vie pour insuffisance cardiaque globale et dépendant de drogues inotropes ? Bien sûr que comme pour toute assistance circulatoire et transplantation cardiaque, le contexte psychologique et social est pris en compte vu les conséquences en termes de prise en charge et d’assimilation de cette nouvelle situation, et de suivi.   En quoi le suivi médical des patients implantés diffère-t-il des patients qui ont une assistance ventriculaire ou qui ont subi une greffe cardiaque ? D. DUVEAU - Il n’y a pas de différence avec le suivi d’un malade sous assistance à domicile. Par rapport à la greffe, on échappe aux problèmes liés au traitement immunosuppresseur et à toutes ses conséquences.   Quelle est l’espérance de vie que l’on souhaite atteindre avec ce cœur artificiel ? D. DUVEAU - Aujourd’hui, le dispositif est testé avec un objectif à 5 ans, mais évidemment la perspective à 10 ans est dans tous les esprits.   Quelles peuvent être les futures indications du cœur artificiel ? D. DUVEAU - La défaillance biventriculaire en phase terminale en alternative à la transplantation cardiaque.  

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