Prévention et protection
Publié le 14 déc 2014Lecture 3 min
Prévention primaire - Y a-t-il une place pour les statines ? Oui, bien sûr !
P. SABOURET, ACTION Study Group et Institut du Cœur, Pitié-Salpêtrière, Paris
Les inhibiteurs de l’HMG-CoA réductase, appelés aussi « statines », font partie de l’arsenal thérapeutique incontournable de la prise en charge des patients dont le risque cardiovasculaire est élevé (RCVA > 20 % à 10 ans sur l’échelle de Framingham, ou > 5 % sur l’échelle de risque SCORE). L’évaluation du risque cardiovasculaire peut également être effectuée sur la sommation des facteurs de risque selon les recommandations anciennes de l’Afssaps en 2005 (tableau 1), mais ces données sont peu adaptées en 2014 et les seuils d’intervention (par exemple les seuils de LDL-C supérieur à 1,90 g/l et 1,30 g/l) reposent sur un niveau de preuves faible, pour employer un euphémisme.
Il faut donc idéalement utiliser l’échelle de risque SCORE, qui évalue le risque de mortalité cardiovasculaire à 10 ans dans les populations à bas risque, dont fait partie la France, avec des variations régionales (cf. les données de MONICA) dont il faut tenir compte en pratique clinique (figures 1 et 2).
Figure 1. SCORE. Risque de mortalité cardiovasculaire à 10 ans dans les populations à bas risque.
Figure 2. Quel est le risque cardiovasculaire ?
Les patients à très haut risque (SCORE ≥ 10 %) en prévention primaire sont les patients diabétiques avec une atteinte d’un organe cible (AOC) et/ou les patients avec une insuffisance rénale chronique modérée à sévère (GFR < 60 ml/min/1,73 m2 sur le MDRD).
Les objectifs de LDL-C chez les patients à très haut risque sont un LDL-C < 0,7 g/l, ou une amplitude de baisse du LDL-C d’au moins 50 % par rapport au niveau initial si l’objectif ne peut être atteint. On remarquera que la plupart des stratégies permettant d’obtenir une baisse de 50 % du LDL-C (rosuvastatine à fortes doses, inhibition combinée d’une statine puissante avec de l’ézétimibe) sont soumises depuis peu à une demande d’entente préalable de la CPAM de France, ce qui ne devrait pas faciliter la prise en charge des patients en prévention primaire à très haut risque.
Pour les patients à haut risque, à savoir patients avec élévations majeures d’un facteur de risque isolé, tous les autres diabètes de type 2, et les patients dont le risque SCORE est compris entre 5 et 10 %, l’objectif de LDL-C est inférieur à 1 g/l selon les recommandations de l’ESC/EAS, avec des études randomisées (HPSdiabetes, ASCOT LLA, CARDS notamment) confortant ces objectifs.
Enfin, pour les patients dont le risque est modéré, ces mêmes recommandations préconisent un LDL-C inférieur à 1,15 g/l, mais sans preuves cliniques bien établies.
Soulignons que la notion d’amplitude de baisse est fondamentale, puisque la baisse de 50 % du LDL-C permet une stabilisation, voire une régression de l’athérome (étude REVERSAL(1), étude ASTEROID(2)), mais qu’elle n’a été intégrée que récemment dans les recommandations, alors que la métaanalyse de Law(3), réalisée à partir de données individuelles, donc d’une grande valeur scientifique, avait souligné les bénéfices cliniques en fonction de l’amplitude de baisse, ainsi que l’intérêt du maintien au long cours de cette baisse de LDL-C.
Rappelons enfin que l’hypercholestérolémie familiale (HCF) doit être recherchée en cas d’élévation du LDL-C > 1,90 g/l, qu’elle s’inscrit dans un contexte familial (transmission autosomique dominante), avec à l’examen clinique la présence de xanthomes, et sur le plan génétique, une mutation des LDL-récepteurs. Sa prise en charge se fait en service spécialisé, l’HCF étant en dehors des recommandations françaises.
En pratique
On voit donc que l’emploi des statines en prévention primaire a toute sa place dans la prise en charge des patients à haut et à très haut risque, n’en déplaise aux révisionnistes de la lipidologie ou aux experts autoproclamés dont les médias sont friands, en rappelant que toutes les statines, à l’exception de la rosuvastatine, sont génériquées, et que la rosuvastatine est bien positionnée dans le rapport d’efficience des statines de la HAS, mais la CPAM en tient-elle compte ?
Figure 3. Relation entre la réduction de l’incidence des événements coronaires majeurs et la réduction moyenne du LDL-C à 1 an.
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