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Congrès et symposiums

Publié le 31 déc 2015Lecture 10 min

L’imagerie à l'AHA 2015

B. DIÉBOLD, Hôpital Cochin et HEGP, Paris

L’imagerie à l’AHA est, maintenant, une affaire de cliniciens. Les temps ont changé, l’époque où on voyait des salles de cathétérisme sur les stands est révolue. Les fournisseurs d’échographes ne viennent plus : ils se sont concentrés sur les deux grands congrès d’échocardiographie, ASE et Eurœcho. Il n’y a donc plus d’introduction spectaculaire de nouvelles modalités ou de nouveaux appareils. L'AHA est le lieu des applications cliniques en cours de validation. Deux sujets ont nettement émergé : le scanner coronaire et le strain échographique.

Le scanner cardiaque Ce décalage entre nouveautés techniques et applications cliniques est particulièrement net dans le domaine du scanner cardiaque. Les derniers appareils comportent une grande avancée technologique, ils tournent plus vite, ils vont bien au-delà des 64 barrettes, ils n’ont plus besoin de combiner plusieurs acquisitions spiralées pour couvrir le cœur, en un mot, ils font beaucoup mieux, sans toutefois approcher la résolution spatiale de la coronarographie sélective (0,6 versus 0,15 mm) ni régler totalement le problème de l’éblouissement lié aux calcifications. Au congrès de l’AHA, ce n’est guère le sujet car on ne dispose pas encore des grandes séries, des valeurs pronostiques. Les grandes études qui ont été discutées ou rediscutées sont ROMICAT, RESCUE, PROMISE et quelques autres.   ROMICAT II ROMICAT II (Rule Out Myocardial Infarction/Ischemia Using Computer Assisted Tomography) est une étude multicentrique consacrée aux patients se présentant aux urgences avec une suspicion de syndrome coronarien aigu. Cette étude randomisée a inclus 1 000 patients (douleur évoquant un angor instable, pas de signe ECG typique, capacité à une apnée de 10 secondes, pas d’insuffisance rénale, pas d’élévation de la troponine, pas d’antécédent connu de maladie coronaire, pas d’obésité morbide, pas de contre-indication aux bêtabloquants, pas de grossesse, pas de consommation récente de cocaïne). Au total, 499 patients ont eu une prise en charge traditionnelle et 501 sont entrés dans le bras « scanner d’emblée » ; 28 n’ont pas eu de scanner et 1 a été exclu à cause d’images ininterprétables. En fonction du bras, les données analysées ont été le taux d’admission, les tests complémentaires qui ont été prescrits, les devenirs hospitaliers et extrahospitaliers jusqu’à 28 jours, les diagnostics finaux. L’âge moyen des patients était de 54 ± 8 ans avec 46 % de femmes. Les résultats ont montré 43 % de syndrome coronarien aigu dans le bras « scanner » versus 32 % dans l’autre (p = 0,28). L’élément majeur qui a été étudié a été la durée d’hospitalisation exprimée en heures (23,2 ± 37,0 versus 30,8 ± 28,0 ; p = 0,0002). Cette différence a été encore plus nette chez les patients ayant un diagnostic final d’angor instable (17,2 ± 24,6 versus 27,2 ± 19,5 ; p < 0,0001). Les éléments secondaires ont été le taux de syndrome coronarien méconnu dans les 72 heures (0 versus 0) et le taux d’événement coronaire majeur adverse dans les 28 jours (2 versus 5), le taux de sortie directe (46,7 % versus 12,4 % ; p < 0,001), le taux cumulé d’irradiation (scanner + scintigraphie + coronarographie = 14,3 ± 10,9 mSv versus 5,3 ± 9,6). Les taux cumulés d’intervention coronaire ont été comparables (6,4 % versus 4,2 % ; p = 0,16) et les coûts totaux quasiment identiques (4 004 ± 6 907 $ versus 3 828 ± 5 289 ; p = 0,78). Au total, l’utilisation d’emblée du scanner coronaire peut réduire la durée de prise en charge, aux urgences, de dou-leurs thoraciques.   Autres études Les résultats de ROMICAT II sont en accord avec ceux de CTCOMPARE, étude monocentrique randomisée qui a inclus 562 patients suspects d’angor instable et a comparé un bras avec « scanner d’emblée » versus un bras avec « ECG d’effort ». Elle a montré que le scanner d’emblée permet une réduction de la durée de séjour de 35 % et une réduction des coûts (australiens) de 20 %. ACRIN PA 4005 avait un dessin proche et elle avait montré, elle aussi, qu’une stratégie « scanner en premier » procure un bénéfice pour la prise en charge des douleurs thoraciques se présentant aux urgences. PROMISE a comparé deux stratégies pour la détection de la maladie coronaire chez des patients symptomatiques : le scanner coronaire d’emblée versus un test fonctionnel (ECG d’effort, médecine nucléaire ou échographie de stress). Au total, 10 003 patients âgés de 60,8 ± 8,3 ans ont été enrôlés. En fonction du sexe, des facteurs de risque et des caractéristiques des douleurs, la probabilité de maladie coronaire était, avant test, de 53,3 ± 21,4 %. Le critère de jugement principal a été, comme bien souvent, composite : décès, infarctus du myocarde, hospitalisation pour angor instable ou complication en cours de procédure. Il a été atteint chez 164 des 4 996 patients explorés d’emblée par scanner (3,3 %) et chez 151 des 5 007 (3,0 %) explorés par un test fonctionnel. Cette différence n’est pas significative (p = 0,75). La stratégie basée sur le scanner de première intention a conduit à moins de coronarographies normales (3,4 % versus 4,3 %) et cette différence est significative (p = 0,02), alors même que le nombre de patients coronarographiés (dans les 90 jours) a été plus élevé dans le groupe « scanner » (12,2 % versus 8,1 %). La dose médiane de rayons X (calculée par patients) a été plus faible dans le groupe « scanner » que dans le groupe « test fonctionnel » (médiane, 10,0 mSv versus 11,3 mSv), mais, pour la dose moyenne c’est l’inverse (moyenne, 12,0 mSv versus 10,1 mSv ; p < 0,001) car 32,6 % des patients du groupe « test fonctionnel » n’ont eu aucune exposition. Au total, sur cette cohorte de patients symptomatiques justifiant la recherche non invasive d’une maladie coronaire, la stratégie qui a placé le scanner coronaire en première ligne n’a pas été plus performante que les tests fonctionnels et elle n’a pas procuré de bénéfice clinique, du moins lors des 2 ans du suivi. Elle n’a pas non plus été inférieure, ce qui ouvre un vaste champ de réflexion. L’étude RESCUE-ACRIN 4701 compare actuellement dans une population souffrant de symptômes à l’effort, l’efficacité d’une approche « scanner d’emblée » à une approche commençant par la médecine nucléaire. Au total, 1 050 patients ont été randomisés (518 scanner, 532 médecine nucléaire). Ces tests ont débouché sur 27 revascularisations dans le bras « scanner » versus 20 dans le bras « médecine nucléaire » et, surtout, 4 événements dans le groupe « scanner négatif » versus 14 dans le groupe « médecine nucléaire négative ». En un mot, la session dédiée à l’état des protocoles évaluant les performances du scanner coronaire a démontré que les évidences sont fortement convergentes. Elles devraient stimuler l’essor du scanner coronaire dans la prise en charge hospitalière de la maladie coronaire. Cependant, toutes ces études supposent une grande disponibilité du scanner et, surtout, pour les syndromes coronariens aigus, la présence de radiologues compétents 24 h/24, 7 j/7. Cet impératif limite, dans l’état actuel de nos structures, la mise en œuvre de cette approche à quelques gros centres très spécialisés. Cet état des lieux apparaît positif alors même que plusieurs innovations sont très récentes et/ou peu répandues. L’innovation récente, c’est le changement de détecteur avec une couverture plus large, la possibilité d’acquérir le cœur sur un seul tour et, donc, la suppression des artefacts de jonction. Sans attendre la généralisation de cette nouvelle génération, d’autres exploitations des données ont été présentées. Dans le cadre du programme ROMICAT, il a été montré que la texture des plaques est une donnée importante : les plaques jugées à risque sur la présence d’un remodelage positif, d’un rehaussement autour de la lumière, de zones hypodenses et de calcifications éparses dans la plaque sont associées à une risque accru de syndrome coronarien aigu, comparable à celui induit par les sténoses de plus de 50 %. Le scanner coronaire permet d’aller, dans certaines conditions, au-delà de la simple détection des sténoses. Il offre la possibilité de prédire la FFR branche par branche en s’appuyant sur une analyse très stricte de la géométrie 3D des sténoses. Par ailleurs, sa capacité à donner des valeurs absolues de concentration de produit de contraste ouvre la porte à des mesures de perfusion tissulaire myocardique après injection d’adénosine. Dans ce cas, un examen unique fournit, à la fois, une analyse des sténoses et une analyse de leur retentissement fonctionnel.   Le strain   Les calculs de strain sont réalisés sur des séquences d’images échocardiographiques noir et blanc. Le principe de base est un suivi des granités présents dans les images, un suivi des textures par des calculs de corrélations entre images successives. Avec ce type de logiciel, on suit le myocarde et on s’affranchit des limites propres aux détections de l’endocarde. De ces corrélations, on peut dériver les déplacements, les pourcentages instantanés de déplacement (strain rate), le pourcentage global de déplacement calculé depuis les complexes QRS jusqu’à la télésystole (strain). On peut aussi extraire des vitesses et des accélérations. Avec le temps, il est apparu que le strain systolique moyen mesuré sur les coupes apicales est le paramètre le plus reproductible et qu’il est même plus reproductible que les mesures de la FEVG réalisées en échographie 2D. Cette reproductibilité a beaucoup soutenu son essor alors même que les logiciels varient encore d’un industriel à l’autre et, de plus, d’une machine à l’autre chez un même industriel. C’est donc une méthode perfectible qui trouve sa place et s’installe dans la pratique. En échographie 2D, elle bénéficie des progrès dans la qualité et dans les cadences des images. Elle a essentiellement été développée sur le ventricule gauche et les logiciels les plus récents sont largement automatisés. Plusieurs travaux ont été réalisés sur des collectifs de patients relativement importants. La valeur additionnelle du strain a ainsi été rapportée pour : - le pronostic des insuffisances mitrales sévères asymptomatiques ayant une FEVG préservée (737 patients) ; - la prédiction de la dysfonction VG postopératoire dans les fuites mitrales sévères asymptomatiques (448 patients) ; - la prédiction des complications chez les patients souffrant d’une sténose aortique serrée asymptomatique avec FEVG préservée (370 patients) ; - l’étude de la réserve contractile des sténoses aortiques à bas gradient et bas débit (185 patients) ; - le pronostic des patients souffrant d’une cardiomyopathie ischémique ou non ischémique (179 patients) ; - le pronostic des cardiomyopathies dans le choc septique (111 patients) ; - l’analyse des résultats des interventions sur les fuites mitrales fonctionnelles secondaires chez les patients ayant une cardiomyopathie dilatée (76 patients traités par plastie chirurgicale ou MitraClip). Le strain a fait l’objet de développement supplémentaire pour s’adapter à l’échographie 3D : l’hypothèse de travail est que le suivi des textures dans les 3 dimensions de l’espace fournira des données plus robustes malgré la cadence image et la qualité image plus faibles. Un travail de Portland a testé cette approche pour l’analyse de la fonction VD, il a donné des bons résultats mais dans des conditions techniques très favorables : des cœurs de porc excisés analysés dans un banc hydraulique, sans problème d’échogénicité.   L’échocardiographie 3D   L’échographie 3D connaît une sorte de stabilité : sa qualité d’image a progressé mais elle reste distancée par les images 2D. Elle trouve sa place dans les géométries complexes comme l’analyse fine du mécanisme des régurgitations mitrales en vue d’une plastie. Dans ce domaine, des traitements d’images sont proposés pour essayer de quantifier le degré d’élongation des cordages et/ou les contraintes s’exerçant sur les feuillets. En s’appuyant sur l’écho-Doppler couleur 3D, une technique a été proposée pour quantifier les régurgitations mitrales, en particulier dans le cas complexe des régurgitations résiduelles après MitraClip. De fait, dans ce cas, la pose d’un clip transforme un jet important unique en deux jets séparés pour lesquels les méthodes classiques sont mal adaptées. La nouvelle méthode proposée a comme a priori le fait que les valeurs du Doppler couleur 3D sont exactes et c’est peut-être là son point faible. Elle propose d’utiliser un volume couleur 3D pour placer une zone d’intérêt circulaire sur l’anneau mitral, de façon à intégrer le flux diastolique de remplissage et pour placer une deuxième zone d’intérêt circulaire sur l’anneau aortique, de façon à intégrer le flux éjecté dans l’aorte. Ces deux flux sont laminaires, ce qui simplifie leur mesure. La différence entre ces deux flux donne le flux régurgité dans l’oreillette en systole.   Les analyses de la fonction VD   Une session a été dédiée aux analyses de la fonction VD. De fait, c’est un challenge important : élément majeur dans le diagnostic des dysplasies arythmogènes du VD, elle a une forte valeur pronostique dans les insuffisances cardiaques gauches et dans les cœurs pulmonaires chroniques. La structure du VD crée une situation très spécifique du fait de la contribution du septum interventriculaire. Des études animales ont montré que, même sans contraction de la paroi libre, il persiste une courbe de pression et une éjection. La finesse de la paroi et les comportements des fibres rendent ce ventricule très intolérant aux surcharges aiguës de pression alors que les pathologies l’obligent, parfois, à supporter des pressions multipliées par 10 (versus 3 pour le VG). L’échographie reste l’outil de première ligne mais il est limité par les fenêtres acoustiques qui empêchent un choix libre des incidences et des vues. Le TAPSE et l’onde S’ de la portion latérale de l’anneau tricuspide ont des limites mais ils gardent une forte valeur prédictive de la mortalité. Les problèmes propres aux postopératoires n’ont pas été discutés. L’accélération iso-volumétrique a été évoquée mais jugée peu reproductible car la durée du temps d’accélération est peu précise du fait de sa brièveté. L’IRM est très clairement la méthode de référence : les coupes peuvent être choisies librement, les mesures de volumes et de fraction d’éjection sont reproductibles, il est possible de détecter des jets dans le plan et de mesurer des vitesses et des débits au travers de différents plans (orifice pulmonaire, orifice tricuspide, etc.).

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