publicité
Facebook Facebook Facebook Partager

Cardiologie interventionnelle

Publié le 15 déc 2018Lecture 5 min

Le traitement post-TAVI

Thomas HOVASSE, Institut cardiovasculaire Paris Sud

Le traitement antiagrégant après un remplacement valvulaire aortique par voie percutanée (TAVI) est justifié par une surmortalité liée au événements thrombotiques, principalement cérébraux(1), que ce soient des accidents vasculaires cérébraux ou des accidents ischémiques transitoires. Il est le fruit d’un consensus d’experts qui s’est initialement basé sur l’angioplastie coronaire, avec une bithérapie de 6 mois. Malheureusement, les événements hémorragiques, précoces (dans les 30 premiers jours) ou tardifs, entraînent eux aussi une baisse de la survie(2).

Au fil des ans et au vu des complications hémorragiques chez cette population fragile, ce traitement s’est progressivement allégé, mais les recommandations restent floues et disparates : aspirine au long cours associée à une thiénopyridine pour une durée courte mais indéterminée en Europe, aspirine et clopidogrel pour 6 mois aux États-Unis. Chez les patients justifiant une anticoagulation, généralement pour de la fibrillation atriale, les recommandations européennes préconisent des AVK sans antiagrégant associé (sauf si justifié par une autre indication comme un stent récent). Comme les recommandations, les pratiques restent très variées et les patients ont une monothérapie par aspirine dans 6,7 % des cas. La bithérapie aspirine-clopidogrel est prescrite pour 1, 3 ou 6 mois dans 41 %, 32 % et 14 % des cas respectivement. Chez les patients justifiant une anticoagulation, le traitement par AVK seul est utilisé dans 28,4 % des cas, AVK-aspirine dans 36,3 % et AVK-clopidogrel dans 26,3 % des cas. Seulement 4,2 % des centres prescrivent une trithérapie(3). Un ou deux antiagrégants plaquettaires ? Quand on compare l’utilisation d’un ou deux antiagrégants plaquettaires en post-TAVI, la grande majorité des études et registres montre un excès d’événements hémorragiques sans bénéfice sur la mortalité et le nombre d’AVC avec l’association aspirine-clopidogrel par rapport à une monothérapie. La métaanalyse très récente sur 9 650 patients conforte ces résultats(4). Chez les patients sous AVK, l’adjonction d’un antiagrégant plaquettaire est très clairement délétère(5). L’étude POPULAR TAVI est une étude randomisée, contrairement aux autres, étudiant mono- versus bithérapie et AVK seul versus AVK + clopidogrel en post-TAVI. Les résultats seront publiés début 2020. La persistance des prescriptions de bithérapie est liée à la découverte de thromboses précoces mises en évidences par scanner avec visualisation d’hypodensités et/ou d’un épaississement des feuillets de la bio- prothèse (figure 1). Figure 1. Visualisation à J20 post-TAVI d’hypodensités des feuillets valvulaires. Ces thromboses, assez fréquentes (4 à 14 % des cas) sont dans la plupart des cas infracliniques, sans élévation de gradient, et n’apparaissent pas chez les patients sous AVK ou AOD. Dans des cas beaucoup plus rares (< 1 %), des thromboses plus tardives avec élévation de gradient et des manifestations cliniques peuvent survenir. Elles régressent le plus souvent sous traitement anticoagulant. Deux hypothèses et deux études Pour expliquer ces thromboses, deux hypothèses peuvent être avancées : le risque thrombotique lié à l’interaction plaquette/stent de la bioprothèse et qui pourrait justifier une bithérapie antiagrégante ; le risque thrombotique lié à l’activation de la thrombine dans les 3 mois suivant le TAVI et qui pourrait justifier un traitement par AOD. Deux études ont donc été lancées pour valider ces hypothèses : l’étude GALILEO chez 1 520 patients randomisés entre traitement par rivaroxaban10 mg + aspirine (3 mois puis AOD au long cours) versus bithérapie (3 mois puis aspirine seule). Cette étude a été arrêtée récemment à la fin des inclusions à cause d’un excès de mortalité dans le groupe rivaroxaban + aspirine. Ces résultats confortent le fait de ne pas utiliser de manière systématique une association anticoagulants + antiagrégants, surtout chez les patients sans autre indication d’AVK ou AOD. La deuxième étude, ATLANTIS (1 500 patients)(6), étudie quant à elle de manière beaucoup plus logique 2 groupes de patients : le premier groupe avec les patients justifiant une anticoagulation qui sont randomisés AVK ou apixaban 5 mg x 2/j (2,5 mg x 2 si risque hémorragique élevé) ; le deuxième groupe avec les patients sans indication pour une anticoagulation qui sont randomisés entre antiagrégants plaquettaires (mono- ou bithérapie) ou apixaban 5 mg x 2. Deux tiers des patients ont déjà été inclus sans alerte de sécurité, les résultats seront publiés fin 2019-début 2020. L’étude ATLANTIS comporte également une sous-étude avec suivi scanner qui permettra une analyse de la survenue des thromboses précoces. Les patients ayant bénéficié d’une angioplastie récente nécessitent pour la très grande majorité une bithérapie antiagrégante dont la durée varie en fonction du risque thrombotique lié à la présentation clinique et au stent, et du risque hémorragique. Chez les patients ayant un stent récent et une indication pour des anticoagulants, les études ont montré que la trithérapie devait être courte. Plus encore, l’étude PIONEER a montré une équivalence du rivaroxaban + clopidogrel par rapport à rivaroxaban + bithérapie et une nette supériorité par rapport au groupe AVK + bithérapie. En attendant les résultats d’études randomisées, ceux d’ATLANTIS notamment, le traitement en post-TAVI doit être adapté à chaque patient, notamment en fonction du risque hémorragique de cette population fragile et de plus en plus hétérogène avec l’élargissement des indications de la technique. Figure 2. Durée des AHRE (Atrial high rate events) et incidence des AVC et embolies systémiques dans l’étude ASSERT. En pratique Il n’y a plus lieu de prétraiter les patients avant la mise en place de la bioprothèse. L’hétérogénéité de la population bénéficiant d’un TAVI rend la décision du traitement post-TAVI difficile. On peut néanmoins identifier plusieurs groupes : – TAVI seul sans stent récent et sans indication d’anticoagulant : la bithérapie peut être prescrite sans dépasser un mois, puis monothérapie. Chez les patients à risque hémorragique élevé, une monothérapie par aspirine est indiquée ; – TAVI et indication d’anticoagulation : AVK ou AOD en monothérapie semblent indiqués. Chez les patients à bas risque hémorragique, on peut discuter une association d’un mois en privilégiant AOD + clopidogrel ; – TAVI et stent coronaire récent : la durée de la bithérapie est conditionnée par le stent et devrait normalement être déjà connue et adaptée au patient ; – TAVI, stent récent et indication d’anticoagulants : la trithérapie ne doit pas dépasser un mois, sauf chez les patients à bas risque hémorragique ayant été stentés sur des lésions complexes. L’association AVK et antiagrégant semble inférieure à l’association AOD et antiagrégants. Si l’équilibre des AVK est difficile, c’est une bonne indication pour changer d’association en privilégiant AOD + clopidogrel.

Attention, pour des raisons réglementaires ce site est réservé aux professionnels de santé.

pour voir la suite, inscrivez-vous gratuitement.

Si vous êtes déjà inscrit,
connectez vous :

Si vous n'êtes pas encore inscrit au site,
inscrivez-vous gratuitement :

Version PDF

Articles sur le même thème

  • 14 sur 49
publicité
publicité