Congrès et symposiums
Publié le 01 mar 2019Lecture 4 min
Patients coronariens : quelles solutions pour réduire le risque résiduel lié au LDL-C ?
JESFC
Le registre CORONOR fournit un bon exemple du chemin à parcourir chez le patient coronarien stable pour diminuer le risque lié au LDL-C. Ce registre regroupe 4 184 patients inclus de 2010 à 2011 par des cardiologues dans le Nord-Pas-de-Calais à distance du dernier événement coronarien (≥ 1 an) et suivis durant 5 ans. Le taux de LDL-C moyen à l’inclusion était de 0,9 g/l ; un quart seulement des patients étaient à la cible de 0,7 g/l. Cette population de patients a été divisée en 3 groupes de LDL-C : > 1 g/l, 0,7-1 g/l et < 0,7 g/l. Le risque cardiovasculaire augmente significativement dès que le LDL-C est > 0,7 g/l ; la récidive d’infarctus est augmentée de 6 % pour chaque augmentation de 0,1 g/l de LDL-C.
Cibler le LDL-C plus fort et plus tôt
Plusieurs modalités thérapeutiques permettent de réduire le LDL-C au-delà des statines : l’ézétimibe limite l’absorption digestive du cholestérol et a fait la preuve de son efficacité en ajout d’une statine de puissance modérée, en prévention au long cours des événements athérosclérotiques dans l’étude IMPROVE-IT (sur un suivi moyen de 6 ans). Une autre option serait possible avec les anti-PCSK9, mais n’est pas encore disponible dans cette indication ; les deux grandes études FOURIER et ODYSSEY ont démontré une réduction majeure du LDL-C de 60 % sous évolocumab et alirocumab, respectivement, qui va de pair avec une réduction significative des événements cardiovasculaires majeurs.
Un groupe français a établi un algorithme de prise en charge des patients post-SCA basé sur le traitement par statine (traitement préalable, intensité de la statine) et les valeurs de LDL-C (Schliele F et al. EHJ Acute Cardiovasc Care 2018 ; 7 : 532-43). On retiendra en particulier que la valeur seuil de LDL-C est abaissée à 0,55 g/l ; en outre, il est recommandé d’instituer un traitement très précocement en visant une réduction majeure du LDL-C (« low is better ») et ce, rapidement après l’événement coronarien aigu. Ainsi, chez un patient naïf de traitement par statine dont le LDL-C est > 1 g/l à l’admission, le groupe de consensus préconise d’emblée une statine de forte intensité associée à l’ézétimibe.
La lettre de liaison post-SCA
Préparer la sortie du patient et communiquer avec les médecins qui prendront le patient en charge une fois sorti d’hospitalisation font partie des recommandations formulées en prévention secondaire des événements coronariens. La lettre de liaison établie à la sortie a pour but de transmettre les informations nécessaires et non de servir de mémo au praticien hospitalier. L’utilisation d’un formulaire standardisé est encouragée car elle permet d’éviter les oublis et d’inclure un maximum d’informations utiles. Un groupe de praticiens hospitaliers français a débattu sur le format et le contenu optimal de la lettre de sortie. Sa longueur devrait être de 1-2 pages maximum et son délai de rédaction du jour de la sortie à 2 jours après la sortie. Elle devrait être au mieux rédigée, sinon supervisée, par un senior. Elle doit mentionner : l’histoire de la maladie, les facteurs de risque, la stratégie de reperfusion (délai d’admission et reperfusion, atteinte coronaire), l’évaluation de la fraction d’éjection et quelques valeurs biologiques (LDL-C à l’admission, HbA1c, ClCr et pic de troponine). Pour le traitement hypolipémiant, la liste complète des traitements (molécules, doses et durée) doit être complétée d’explications sur les raisons du choix du traitement, la cible de LDL, des notions sur le risque d’hypercholestérolémie familiale si nécessaire, et les analyses visant à apprécier l’efficacité du traitement. Pour le traitement antiplaquettaire, il faut expliquer le choix et la durée des agents prescrits. Comme 25 à 30 % des patients coronariens ont un diabète, connu ou non avant l’événement, la prise en charge n’étant pas optimale, des indications sont ajoutées concernant les cibles d’HbA1c et les moyens d’optimiser les traitements.
Enfin, la stratégie thérapeutique à la sortie d’hospitalisation devrait indiquer la réadaptation à l’effort, encore trop souvent oubliée. Cette lettre de liaison peut aussi inclure des documents (rapport de coronarographie par exemple) et indiquer les tests supplémentaires pouvant être réalisés (exploration des axes périphériques, recherche d’ischémie).
Quels arguments pour motiver le patient ?
Aujourd’hui, les progrès thérapeutiques sont tels que les patients ont l’impression d’être guéris après une hospitalisation pour un événement coronarien. C’est sans compter le risque résiduel qui reste très important dès lors que le patient est entré dans la maladie (30 % d’événements à 7 ans dans l’étude IMPROVE-IT). Une alliance avec le patient doit être établie, permettant au médecin de déterminer dans quelle catégorie de risque est le patient en prévention secondaire (le risque de nouvel événement dépend du nombre de facteurs de risque). À l’issue de cette évaluation du risque, il faut rassurer le patient, le traitement permettant une nette amélioration.
Il dépend du patient d’arrêter le tabac et de suivre les mesures hygiéno-diététiques. Le régime méditerranéen et l’exercice physique ont un effet additif et synergique au traitement hypolipémiant ; ils ont un effet bénéfique sur l’inflammation, même si le bilan lipidique reste inchangé.
La réduction du risque est d’autant plus importante que le LDL-C est bas ; le patient doit être rassuré si les valeurs lipidiques sont extrêmement basses, toutes les études d’intervention en témoignent.
L’éventualité d’effets secondaires devrait être abordée d’emblée, en précisant qu’ils sont gérables et que la balance bénéfice-risque est en faveur du traitement par hypolipémiants.
Enfin, le dernier argument repose sur le concept de décision partagée, qui suppose une discussion et un choix thérapeutique partagé entre le patient et le médecin. Le succès repose sur un plan d’action développé entre ces deux acteurs pour fixer les objectifs et les délais pour y parvenir.
D’après G. Lemesle, F. Schiele et M. Farnier
Débat organisé avec le concours de MSD France
JESFC 2019
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