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Rythmologie et rythmo interventionnelle

Publié le 15 nov 2011Lecture 6 min

Ablation de la fibrillation atriale

S. TRAULLE, J.-S. HERMIDA, CHU Amiens-Picardie

12es Journées de rythmologie

Le traitement pharmacologique de la fibrillation atriale (FA) s’est révélé décevant, tant en termes de capacité à éviter les récidives qu’en termes d’effets secondaires, de persistance des symptômes et d’hospitalisations itératives. Si la controverse a été vive entre contrôle de la fréquence et contrôle du rythme, il semble intuitivement évident que la seconde option est plus physiologique. L’indication d’ablation pour laquelle il y a actuellement un consensus est celle de la FA paroxystique récidivante ou persistante, symptomatique, sur cœur normal ou pathologique, résistante à au moins un traitement antiarythmique majeur. L’ablation de la FA constitue la seule perspective de guérison, son impact sur la qualité de vie des patients symptomatiques est majeur et l’indication de ce traitement occupe désormais une place incontournable.

Quelles techniques/technologies utiliser pour la FA paroxystique ? M. Haïssaguerre(1) et l’équipe de Bordeaux ont été les premiers à décrire le mécanisme focal des FA en 1998. Ils ont pu établir que certaines FA trouvaient leur origine dans des foyers auriculaires qui déchargeraient de manière intermittente une activité électrique rapide entraînant une déstabilisation auriculaire, évoluant en FA. Il est rapidement apparu que dans 80 à 95 % des cas, l’origine de ces extrasystoles est confinée dans une ou plusieurs veines pulmonaires (VP). L’isolation électrique consiste à placer une série de lésions d’ablation circonférentielle dans l’oreillette gauche autour des ostia des veines pulmonaires. Cette isolation circonférentielle déconnecte électriquement les veines pulmonaires du reste de l’oreillette. La justification de cette procédure est que l’isolation électrique des veines rend les déclencheurs de la FA qui siègent dans ces veines incapables d’initier une arythmie dans l’oreillette. Au cours de la procédure typique d’isolation d’une veine pulmonaire, un cathéter de cartographie est placé dans la veine pulmonaire. Les caractéristiques des signaux anormaux de cette veine arythmogène sont documentées. Le point final pour l’ablation autour de cette veine est la suppression de ces signaux anormaux, ce qui signifie la déconnexion électrique complète de la veine de l’oreillette. L’ablation par courant de radiofréquence est la technique de référence qui a permis l’essor de la rythmologie interventionnelle moderne. Il est admis que l’utilisation de cathéters irrigués réduit le risque de coagulation et de carbonisation, limitant ainsi les complications emboliques. Depuis quelques années, sont apparus de nouveaux outils, qu’il s’agisse de cathéters spécialement dessinés pour l’isolation des veines comme le PVAC (Pulmonary Vein Ablation Catheter), cathéter circulaire qui permet à la fois l’enregistrement des potentiels veineux et l’ablation par courant de radiofréquence en combinant une énergie uni- et bipolaire, ou encore l’utilisation de nouvelles sources d’énergie comme la cryothérapie. Certaines équipes ont fait le choix de réaliser uniquement l’isolation des veines pulmonaires par cryothérapie, en première intention, pour traiter les FA paroxystiques. La technique conventionnelle nécessite trois étapes : – la première consiste à localiser les structures actives au moyen d’un cathéter de cartographie de type lasso (10 électrodes) ; – la deuxième étape est l’occlusion des veines par inflation du ballon de cryothérapie et application du froid ; – la dernière étape est la vérification de la déconnexion des VP en utilisant le lasso. Un nouveau cathéter de cartographie Achieve® (8 électrodes) a été conçu pour être utilisé en même temps que le ballon de cryothérapie, ce qui permet de simplifier la procédure en évitant les changements de cathéters, sources de complications et d’allongement de la procédure, et aussi d’observer la déconnexion des VP pendant l’application. Une approche radiologique bidimensionnelle classique peut être utilisée pour l’isolation simple des veines pulmonaires, mais les systèmes de cartographie tridimensionnelle se sont imposés rapidement. Une segmentation de l’oreillette gauche est généralement réalisée avant l’ablation grâce aux données numériques provenant d’un scanner ou d’une IRM cardiaque. Cette géométrie de référence est comparée, voire fusionnée avec celle qui est faite en cours de procédure par les cathéters positionnés dans l’oreillette gauche préalablement introduits par voie transseptale. La navigation 3D permet d’accroître la précision du geste, mais aussi de limiter l’irradiation du patient et de l’opérateur.   Quels potentiels cibler dans la FA persistante ? L’isolation électrique des veines pulmonaires est la cible première de l’ablation de la FA. Il est toutefois fréquemment nécessaire, principalement dans le cadre des formes persistantes de FA, d’associer d’autres techniques ablatives dans l’oreillette gauche pour transformer une « tentative d’ablation » en succès. Les électrogrammes atriaux complexes et fragmentés (CFAE : complex fragmented atrial electrograms des Anglo-Saxons), retrouvés dans de nombreuses zones de l’oreillette gauche au cours d’épisodes de FA, sont également devenus une des cibles privilégiées de l’ablation(2). Le raisonnement qui sous-tend cette démarche est fort simple puisqu’il repose sur l’hypothèse que « l’anarchisme morphologique » de ces électrogrammes endocavitaires traduit la présence de fronts d’activation multiples, de troubles de conduction et d’asynchronisme des périodes réfractaires sous l’électrode exploratrice. Comme corollaire, on suppose qu’une micro-réentrée ou, plus généralement, qu’une source de la FA puisse être « hébergée » par ces CFAE. Les zones avec CFAE ont été localisées de manière préférentielle autour des veines pulmonaires, au niveau de la paroi antérieure de l’oreillette gauche et au niveau du septum atrial(3). Leur ablation n’a pas d’intérêt dans les FA paroxystiques, mais elle améliore sensiblement les résultats dans la FA persistante. A. Verma a montré dans l’étude STAR AF(4) que, sur une base de succès de 66 % pour les paroxystiques et de 33 % pour les persistantes lorsqu’on fait seulement l’isolation des veines, l’ablation des CFAE n’apporte rien pour les paroxystiques, mais fait gagner un peu plus de 10 % de succès pour les persistantes. Il existe cependant des controverses liées à la disparité des résultats des études cliniques, à l’absence de standardisation de la définition des CFAE, qui constituent donc une limitation quant aux résultats publiés, si bien que leur validité doit être restreinte à la définition adoptée dans chacune de ces études. De plus, il est possible que les CFAE fixes (présents avant et après isolation des veines pulmonaires) soient « autonomes » et puissent jouer un rôle actif dans la perpétuation de la FA, alors que la disparition de CFAE dans d’autres zones de l’oreillette traduit simplement une activation locale « anarchique » mais passive, provenant d’une source à distance. Un autre élément alimentant la controverse est celui de la variabilité temporelle de ces potentiels(5). Peut-être le futur s’ouvrira-t-il sur de nouvelles cibles par l’utilisation de logiciels de cartographie permettant d’identifier des zones ayant une activité très rapide, continue, avec une fragmentation des électrogrammes, qui seraient des points d’ancrage fonctionnel de microréentrées (rotor) permettant la perpétuation de l’arythmie. Le travail de S. Narayan(6) va dans ce sens.   Faut-il réaliser des lignes dans la FA persistante ? La notion de « masse critique » du tissu atrial nécessaire et indispensable pour la perpétuation de la FA est basée sur le principe de micro-ondelettes de réentrée, voyageant de manière aléatoire dans les oreillettes en envahissant à chaque instant de nouveaux territoires, pérennisant de ce fait l’anarchie électrique du tissu auriculaire. L’application de lignes d’ablation par radiofréquence en vue de segmenter l’oreillette droite et réduire ainsi cette masse critique, a connu des schémas variés, certains très complexes et complets, d’autres plus simples et limités. L’intérêt de la pratique des lignes d’ablation (ligne du toit de l’oreillette gauche reliant les deux veines pulmonaires supérieures(7), ligne de l’isthme mitral reliant une veine pulmonaire gauche et la portion latérale de l’anneau mitral, au besoin complétée par l’application épicardique de tirs via le sinus coronaire(8)) proposée par l’équipe de Bordeaux, est controversé puisqu’elle a comme conséquence très fréquente des récidives sous forme de flutter gauche, au moins aussi mal toléré que la FA, dans une proportion de cas importante. En effet, les lignes obligent l’influx à suivre un certain chemin et il ne peut plus désorganiser la totalité du massif atrial comme dans une FA. La difficulté majeure de ce type d’approche était de créer des lésions à la fois transmurales et continues, seules capables de garantir un bloc de conduction complet autour des régions délimitées. Il suffit d’un gap pour générer un flutter gauche bien difficile à traiter par une nouvelle ablation. M. Wright a ainsi montré que si une seule ligne augmente le taux de succès par rapport à l’ablation isolée des veines, plusieurs lignes risquent de tout compromettre, surtout dans les FA « long-lasting »(9). L’ordre précis des lésions n’est pas encore codifié, varie selon les équipes et dépend du type de FA. P. Jais a suggéré une approche d’ablation par étapes pour ces patients, avec l’ablation étendue jusqu’à ce que la FA soit convertie en une tachycardie auriculaire. La tachycardie auriculaire peut alors être cartographiée.

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