Rythmologie et rythmo interventionnelle
Publié le 09 juin 2009Lecture 6 min
L. FAUCHIER, Centre Hospitalier Universitaire Trousseau, Tours
Les sessions du congrès Rhythm se sont déroulées cette année à Boston. Après les progrès majeurs réalisés ces dernières années dans quasiment tous les domaines de la rythmologie et de la stimulation, certains esprits un peu chagrins, sans doute légèrement blasés, se sont plaints d’une évolution du congrès vers la formation médicale continue plus que vers la recherche ou vers la réflexion électrophysiologique pure. On pourra, certes, également regretter les présentations nombreuses sous forme de controverse, qui ont parfois un côté artificiel pour ne pas dire anti-pédagogique. Nous retiendrons donc principalement les résultats des grands essais cliniques présentés en deux sessions.
Les anti-arythmiques dans la fibrillation auriculaire (FA)
ATHENA. La dronédarone va bientôt être disponible comme anti-arythmique pour traiter la FA. L’étude ATHENA a été la première à montrer que, dans la FA, elle permet de diminuer un critère de morbi-mortalité et pas simplement le taux de rechute des fibrillations auriculaires. Compte tenu d’un surcroît de mortalité sous ce traitement dans l’étude ANDROMEDA chez les patients en insuffisance cardiaque instable, il a été présenté une analyse secondaire de l’étude ATHENA dans le sous-groupe particulier des patients avec insuffisance cardiaque. Chez ceux qui étaient en classe NYHA III, le nombre de décès et d’hospitalisation a diminué de 44 % avec la dronédarone. Il n’y a pas eu de surcroît de mortalité. Chez les patients avec fraction d’éjection du ventricule gauche < 35 %, la diminution de risque de survenue de l’événement du critère principal a été de 32 %.
Ces résultats sont donc rassurants quant à l’utilisation de ce nouvel anti-arythmique dans l’insuffisance cardiaque, du moins lorsqu’elle n’est pas instable.
PASCAL. Ont aussi été présentés les résultats de l’étude PASCAL évaluant l’efficacité anti-arythmique d’un autre analogue de l’amiodarone, la budiodarone, qui a la particularité d’une demi-vie plus courte permettant éventuellement d’éviter les effets secondaires liés à l’accumulation tissulaire. L’étude réalisée chez des patients porteurs de stimulateur double chambre permettait d’avoir une évaluation précise de la charge en FA. Elle n’a finalement pu être réalisée que chez 61 patients. Chez ceux-là, la budiodarone a significativement diminué de 75 % la charge en FA au cours d’un suivi de 12 semaines, avec une bonne tolérance clinique.
Traitement de la FA par technique ablative
L’étude THERMOCOOL AF, prospective randomisée, a évalué l’efficacité de l’ablation par radiofréquence comparativement aux traitements pharmacologiques anti-arythmiques chez 159 patients avec FA paroxystique. Ces patients avaient pour la plupart un échec préalable des traitements anti-arythmiques et 3 épisodes symptomatiques d’arythmie au cours des 6 derniers mois. L’ablation par cathéter a été beaucoup plus efficace au terme du suivi que le traitement anti-arythmique (37 % de rechutes versus 83 %) si l’on considère comme critère d’évaluation une rechute de FA durant plus de 30 secondes. En outre, l’ablation a été associée à une amélioration significative de la qualité de vie, et la technique n’a pas été associée à un taux de complications majeures plus important.
STAR AF. Cette étude s’est intéressée à la stratégie électrophysiologique à employer en cours de procédure d’ablation des fibrillations auriculaires. Elle a comparé trois stratégies :
– l’isolation des veines pulmonaires seule,
– l’ablation isolée des potentiels complexes fractionnés auriculaires (CFAE),
– une stratégie associant l’isolation des veines pulmonaires et l’ablation des complexes fractionnés auriculaires.
L’étude a porté sur 100 patients avec FA paroxystique (16 épisodes par mois en moyenne) ou persistante. La stratégie la plus efficace a été celle qui associait l’isolation des veines pulmonaires à l’ablation des CFAE puisqu’après une ou deux procédures, le taux de succès était de 88 % dans ce groupe. Il était seulement de 66 % pour les patients qui n’avaient qu’une isolation des veines pulmonaires, et il était franchement bas (32 %) pour les patients dont la stratégie se limitait à une ablation des CFAE.
Stimulation cardiaque
Un nouveau dispositif. Les résultats d’une étude mondiale randomisée évaluant un nouveau système électronique permettant à un stimulateur cardiaque d’être utilisé dans les appareils d’imagerie par résonance magnétique ont été présentés. Ce dispositif (MEDTRONIC ENRHYTHM) est actuellement déjà disponible dans certains pays d’Europe ou en cours de validation administrative. Les patients avec stimulateur ou défibrillateur cardiaque ont généralement une contre-indication à la réalisation d’une IRM en raison d’un possible dysfonctionnement intermittent ou définitif de la prothèse avec défaut de détection, déprogrammation, échauffement en bout de sonde ou même arythmie à risque létal. Dans l’étude présentée concernant 464 patients répartis en deux groupes avec ou sans réalisation d’une IRM, il n’y a eu aucune différence en termes d’événements cliniques ou de modification des mesures électroniques chez le patient ayant eu une IRM. Cela semble donc indiquer la bonne fiabilité du système qui pourrait faciliter la prise en charge et le diagnostic d’imagerie, aussi bien pour les pathologies cardiaques qu’extra-cardiaques.
Les deux essais PEGASUS CRT et MVP TRIAL aboutissent à un message finalement assez similaire, à savoir qu’il est souvent souhaitable d’éviter la stimulation cardiaque conventionnelle lorsqu’on est porteur d’une prothèse électrique.
• Dans l’étude PEGASUS CRT, 1 433 patients ont reçu un défibrillateur cardiaque biventriculaire et ont été randomisés en trois groupes : DDD 40, DDD 70 ou DDDR 40. L’évaluation s’est faite sur un critère combiné de mortalité, de récidive d’insuffisance cardiaque et d’évolution des symptômes. Il n’y a eu aucune différence significative entre les trois groupes, ce qui permet de conclure qu’il n’y a pas lieu de favoriser une stimulation auriculaire minimale avec l’arrière-pensée d’augmenter le débit cardiaque en augmentant la fréquence cardiaque.
• L’essai MVP chez 1031 patients recevant un défibrillateur ventriculaire (mais ne nécessitant pas de stimulation ventriculaire) a évalué deux stratégies : stimulation ventriculaire isolée en dépannage (VVI) à 40/min ou stimulation auriculaire à 60/min avec un mode MVP privilégiant la conduction ventriculaire spontanée. L’étude évaluait un critère principal de mortalité ou d’aggravation de l’insuffisance cardiaque, et elle a été interrompue prématurément en l’absence complète de différence entre les deux groupes.
Troubles du rythme ventriculaire et mort subite
Les résultats du suivi tardif de l’étude MADIT II ont été présentés. Les résultats initiaux favorables de cette étude de prévention primaire avaient été obtenus avec un suivi de 20 mois sur un critère d’inclusion de dysfonction ventriculaire gauche d’origine ischémique. Avec un suivi prolongé chez 1200 patients jusqu’à la 8e année, le bénéfice a été maintenu avec une réduction de mortalité de 37 % chez les patients traités par un défibrillateur cardiaque automatique implantable. En outre, message rejoignant celui des deux études précédentes, le bénéfice est plus marqué chez les patients porteurs d’un défibrillateur programmé avec une stimulation ventriculaire de dépannage à 40/min seule, comparés à ceux qui avaient une stimulation double chambre plus rapide à 60/min.
L’étude ALTITUDE est un registre d’environ 100 000 patients porteurs pour moitié d’un défibrillateur ventriculaire et pour la part restante d’un défibrillateur cardiaque biventriculaire. Le suivi en a été assuré par le système de télémédecine LATITUDE (Boston Scientific). De manière tout à fait intéressante, dans ce qui constitue actuellement la plus grande cohorte de patients rapportée, la survie a été meilleure que celle rapportée dans les essais randomisés ayant permis de définir nos stratégies thérapeutiques actuelles d’implantation de défibrillateurs. Le taux de chocs appropriés à 5 ans était d’environ 35 %. Ces résultats franchement bons pour des données issues « de la vraie vie » révèlent peut-être le bon sens clinique de l’ensemble des praticiens et le fait que les indications d’implantation soient plutôt bien portées.
S-ICD. Enfin, on retiendra la présentation de l’évaluation clinique d’un système de défibrillateur implantable sous-cutané (S-ICD). L’étude multicentrique internationale a concerné 55 patients avec une indication reconnue d’implantation de défibrillateur automatique. La prothèse leur a été implantée sur la ligne axillaire antérieure en regard de la 6e côte avec une sonde parasternale tunnellisée, sans nécessité de fluoroscopie. Ce dispositif permettrait aussi d’éviter a priori une bonne part des complications à court et à long terme de la mise en place de sondes endocavitaires. À l’implantation, la défibrillation était efficace pour 98 % des patients avec une énergie de 65 joules et une marge de sécurité de 15 joules. Lors d’un suivi à court terme de 30 jours, l’évaluation du système paraissait comparable à celle des défibrillateurs conventionnels pour détecter et traiter les épisodes de tachyarythmie ventriculaire, mais sur un nombre limité d’événements. Un suivi à plus long terme reste donc nécessaire pour une évaluation plus précise du dispositif.
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