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Rythmologie et rythmo interventionnelle

Publié le 04 nov 2008Lecture 7 min

La rythmologie : la fibrillation atriale, encore et toujours...

J.-Y. LE HEUZEY, Hôpital Européen Georges Pompidou, Paris


ESC
La rythmologie tient toujours une place importante au congrès de la Société européenne de cardiologie. Parmi toutes les propositions de communications envoyées cette année, ce sont celles concernant les arythmies qui sont les plus nombreuses, au nombre de 1 265, soit 13 % du total. Même si l’on trouve encore, en « fouillant » dans le programme, des sujets variés concernant d’autres domaines de la rythmologie, l’immense majorité des communications concerne la fibrillation atriale, encore et toujours…

Fibrillation auriculaire Un très grand nombre de communications libres ont été consacrées à la fibrillation atriale (FA). Des séances « poster » entières n’avaient pour thème que cette arythmie. On pouvait trouver des communications sur tous les aspects de la FA, qu’il s’agisse des mécanismes, y compris intracellulaires, de l’épidémiologie, de la thérapeutique : médicaments antiarythmiques, nouvelles thérapies antithrombotiques et ablation bien entendu. Il faut cependant souligner qu’il n’y a pas eu de révélation majeure lors de ce congrès dans le domaine de la FA. On a reparlé d’un certain nombre de grands essais qui avaient été présentés voire publiés dans ces derniers mois et pour lesquels des analyses complémentaires ont été réalisées. ATHENA C’est ainsi que l’on a reparlé de l’étude ATHENA. S. Connolly (Hamilton, Canada) a présenté des données complémentaires de cette étude. Rappelons qu’elle avait été présentée pour la première fois lors du congrès de la « Heart Rhythm Society » à San Francisco au mois de mai dernier par S. Honhloser (Franckfort). La communication de S. Connolly concernait plus particulièrement les accidents vasculaires cérébraux (AVC). L’étude ATHENA avait pour but de tester l’efficacité de 400 mg de dronédarone administrés per os 2 fois/j pour la prévention des hospitalisations ou des décès chez des patients en FA. Plus de 4 600 patients ont pu être inclus. Le critère d’évaluation principal associait la mortalité toutes causes et les hospitalisations de cause cardiovasculaire. Les patients qui étaient inclus étaient âgés de plus de 75 ans ou de plus de 70 ans mais avec au moins un facteur de risque supplémentaire de mauvais pronostic tel qu’un diabète, une fraction d’éjection basse, une hypertension artérielle, une dilatation auriculaire gauche ou encore des antécédents d’AVC ou d’accident ischémique transitoire (AIT). Les patients ayant une insuffisance cardiaque sévère en stade IV étaient exclus de l’étude. Il avait été montré par S. Honhloser à San Francisco une diminution de 24 % du critère combiné qui associait risque d’hospitalisation d’origine cardiovasculaire ou de décès. La dronédarone diminue également de 45 % le risque de décès arythmique et de 25 % le risque de première hospitalisation pour raison cardiovasculaire. Les résultats que Stuart Connolly a présentés à Munich portaient sur les AVC eux-mêmes mais cette analyse n’avait pas été préspécifiée. La conclusion est que la dronédarone réduit de 34 % le risque d’AVC avec un effet qui s’additionne à celui du traitement antithrombotique conventionnel. Le bénéfice apparaît dès le 12e mois et se maintient jusqu’au 30e mois. Ces données sont donc très intéressantes, à porter au crédit de ce nouvel antiarythmique qui, pour l’instant, est le seul à avoir montré une diminution de mortalité cardiovasculaire chez les patients atteints de FA. ADVANCE et FA L’étude ADVANCE, présentée par A. Patel (Sidney, Australie), s’adressait à des patients diabétiques de type 2 et s’intéressait, d’une part, au contrôle optimal de la pression artérielle, d’autre part, au contrôle optimal de la glycémie. Le travail présenté par A. Patel concernait spécifiquement le risque d’événements cardiovasculaires chez les patients qui avaient à la fois ce diabète de type 2 et une FA. Il est connu que le diabète peut être un facteur de mauvais pronostic chez les patients atteints de FA. Dans le score CHADS2, la lettre D signifie diabète et le diabète en lui-même comporte un risque supplémentaire. Les auteurs d’ADVANCE retrouvent ce facteur avec une différence significative après ajustement, en termes de survenue d’AVC majeurs (figure), de mortalité toutes causes, de décès cardiovasculaires ou de survenue d’événements coronaires majeurs et d’insuffisance cardiaque chez les patients qui avaient à la fois une FA et un diabète, comparativement à ceux qui n’avaient que le diabète sans la FA. On connaît la prévalence élevée du diabète dans les grandes études sur la FA, de 20 % dans l’étude AFFIRM et de 21 % dans l’étude AF-CHF. Il existe des limitations indiscutables à cette étude qui sont, d’une part, que le diagnostic de FA n’a été fait qu’à l’inclusion (il n’a pas été tenu compte ensuite des nouveaux cas de FA) et, d’autre part, que les patients ayant une FA silencieuse n’ont pas été pris en compte. Ainsi, il est probable qu’un certain nombre de patients considérés comme étant dans le groupe sans FA avaient en fait une FA restée silencieuse. Par ailleurs, un certain nombre de patients avec des électrocardiogrammes en FA n’ont pas été diagnostiqués, ce qui explique un taux d’anticoagulation très faible dans cette étude, (26 %). AF-CHF : une analyse perprotocole Toujours dans la même séance sur les grands essais concernant la FA, il a été de nouveau question de l’étude AF-CHF grâce à une présentation faite par le leader de l’étude, D. Roy (Montréal). Cette étude comparait, chez des insuffisants cardiaques, les stratégies de contrôle du rythme et de la fréquence. Il n’y avait pas de différence significative entre les deux stratégies. Étant donné qu’un certain nombre de patients étaient passés d’une stratégie à l’autre, il était intéressant de regarder quels étaient les résultats de l’étude analysée en « per protocole » et non plus en intention de traiter. En effet, il est souvent fait la remarque suivante : quelle est la valeur de la comparaison des stratégies en intention de traiter si certains patients ne sont pas restés dans le groupe assigné au départ ? Un certain nombre de patients d’abord randomisés dans le bras contrôle du rythme sont passés dans le bras contrôle de la fréquence lorsque les cardioversions s’avéraient être des échecs ou que des rechutes survenaient et qu’une nouvelle cardioversion n’était pas programmée. À l’inverse, quelques patients, moins nombreux, randomisés initialement dans le bras contrôle de la fréquence ont pu bénéficier secondairement d’une cardioversion, la plupart du temps pour aggravation de l’insuffisance cardiaque. L’équipe de D. Roy a donc fait une nouvelle analyse, cette fois en « per protocole » et non plus en intention de traiter. Cette nouvelle analyse ne modifie pas le message initial d’AF-CHF : il n’y a pas de supériorité de l’une des stratégies par rapport à l’autre. Effet des acides gras polyinsaturés Parmi les très nombreuses présentations consacrées à la FA, il faut également citer le travail de S. Nodari (Brescia, Italie) sur le sujet de l’efficacité éventuelle des acides gras polyinsaturés dans la prévention des rechutes de FA. Les auteurs ont évalué 150 patients traités par amiodarone plus acides gras polyinsaturés après cardioversion, contre placebo. Ils ont constaté un taux plus faible de rechutes de FA dans le groupe traité comparativement au groupe placebo de 16 % contre 26 % à 3 mois, 28 % contre 46 % à 6 mois, et 40 contre 60 % à 12 mois. Ces résultats intéressants concernent un effectif relativement réduit et poussent bien entendu à envisager une étude multicentrique randomisée de grande taille pour définitivement prouver cette efficacité thérapeutique. Nouveaux antithrombotiques Toujours dans le domaine de la FA, la recherche sur les nouveaux antithrombotiques est actuellement très active. Il en a été question à plusieurs reprises au cours de ce congrès, notamment dans le cadre d’une communication de R. Willems (Louvain), qui a fait le point sur ces médicaments dans le cadre d’une session consacré au traitement médical de la FA. Il s’agit d’un domaine hautement compétitif dans lequel de nombreuses firmes pharmaceutiques sont engagées. Aujourd’hui, le médicament dont le développement est le plus avancé est le dabigatran ; cette thérapeutique fait actuellement l’objet d’une étude nommée RELY, dont l’inclusion est terminée. Le suivi est en cours, il sera probablement possible d’avoir les résultats de cette dernière étude lors du prochain congrès de la Société européenne de cardiologie à Barcelone en septembre 2009. D’autres médicaments sont également en développement, il s’agit d’anti-Xa oraux : le rivaroxaban et l’apixaban. Le rivaroxaban est évalué dans une étude contre warfarine en double aveugle (ROCKET AF), l’apixaban évalué dans le même type d’étude contre la warfarine (ARISTOTLE) ainsi que dans une étude de comparaison avec l’aspirine (AVERROES). Enfin, un autre candidat est actuellement en cours de développement, il s’agit de l’idraparinux biotyliné. Le mode d’administration est original puisqu’il s’agit d’une injection sous-cutanée hebdomadaire. Par ailleurs, la forme utilisée dans l’étude actuellement réalisée (BOREALIS AF) est celle d’une molécule biotylinée, c’est-à-dire comportant de la biotine sur laquelle peut se fixer de l’avidine, qui constitue un antidote permettant d’avoir une efficacité en cas d’hémorragie.   Canalopathies L’autre domaine dans lequel les rythmologues sont très actifs est celui des canalopathies. Une session de mise au point a été consacrée à ces anomalies lors de ce congrès. Elle a réuni C. Wolpert (Mannheim), F. Gaita (Asti), A. Leenhardt (Paris) et R. Brugada (Montréal). Quatre canalopathies occupent le devant de la scène : le syndrome du QT long, le syndrome de Brugada, le syndrome du QT court et les tachycardies ventriculaires polymorphes catécholergiques. Dans bien des cas, les conduites thérapeutiques restent difficiles à définir et sources de controverses. C’est par exemple le cas dans les syndromes de Brugada asymptomatiques pour lesquels il existe des discussions sur la valeur pronostique de la stimulation ventriculaire programmée. La décision de mise en place d’un défibrillateur est toujours difficile, d’autant plus lorsqu’il s’agit d’un sujet jeune.

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