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Diabéto-Cardio

Publié le 11 oct 2005Lecture 10 min

Lecture des grands essais cliniques chez le diabétique

A. MARQUAND, Saint-Raphaël

Les Journées Nationales de la SFC

Les Journées Nationales 2005 de la Société Française de Cardiologie (SFC), qui se sont tenues à Lyon du 2 au 4 juin dernier, ont comporté une séance plénière commune avec l’ALFEDIAM (Association de Langue Française pour l’édude du Diabète et des maladies métaboliques), organisée avec le soutien des laboratoires GlaxoSmithKline. Cette séance a été coprésidée par J.-C. Daubert (Rennes), président de la SFC, et G. Slama (Paris), président de l’ALFEDIAM.

Glycémie et coronaires : étude DIGAMI 2 Les résultats de DIGAMI 2 P. Valensi, Bondy Le risque de décès des diabétiques après un infarctus du myocarde (IDM) est augmenté de 48 % d’après le registre suédois RISK entre 1995 et 1998. Or, les diabétiques bénéficient des traitements autant que les non-diabétiques. Le registre GRACE a confirmé encore plus récemment (entre 1999 et 2001) que l’IDM augmente le risque de mortalité et de survenue d’une insuffisance cardiaque après un syndrome coronarien aigu (SCA), IDM ST+, ST-, ou angor instable, le risque étant ici augmenté de 80 %. L’Euro Heart Survey a confirmé la grande prévalence du diabète et de l’intolérance aux hydrates de carbone (HC) chez les victimes d’IDM : 31 % de diabétiques connus, et l’hyperglycémie provoquée (HPO) situe le total de ces patients (diabétiques ou intolérants aux HC) entre 50 et 60 %. De là est née l’idée de la première étude DIGAMI. C’est une étude multicentrique suédoise ayant inclus 620 patients qui ont reçu soit une perfusion insuline-glucose puis des multi-injections d’insuline pendant au moins les « mois suivants », soit un traitement conventionnel. Le premier groupe a fortement bénéficié de cette prise en charge diabétologique, avec une réduction de plus de 1 point de l’HbA1c, plus du double du groupe 2 ; ce bénéfice et ces différences se sont maintenues à 1 an. La mortalité a fortement baissé dans le groupe 1 : - 28 % (p = 0,011) à 3,4 ans, soit une vie sauvée pour 9 patients traités. L’étude DIGAMI 2 a visé à affiner les résultats de DIGAMI 10 ans plus tard mais n’a pas été à la hauteur des espérances : inclusions insuffisantes, mortalité identique à celle des non-diabétiques, équilibre glycémique voisin dans les 3 groupes, et non atteint dans le groupe 1, le plus interventionniste, problèmes méthodologiques ne permettant pas de différencier les résultats des différents groupes… sans oublier les progrès réalisés en 10 ans, dans la prise en charge des SCA. En conclusion   L’équilibre glycémique est un prédicteur indépendant de mortalité à long terme chez le diabétique de type 2 après un IDM. Les diabétiques de type 2 justifient d’un contrôle strict après un IDM et en tirent un grand bénéfice ; À équilibre glycémique comparable, l’insulinothérapie n’est pas supérieure aux autres traitements hypoglycémiants en termes de mortalité ; La perfusion d’insuline n’a pas montré de bénéfice clinique (DIGAMI 2) mais elle permet de réduire rapidement la glycémie, et est utile si la glycémie d’admission est élevée.   La lecture critique du diabétologue : quel avenir pour le glucose-insuline-potassium (GIK) au cours de l'insuffisance coronaire aiguë ? A. Grimaldi, Paris, La Pitié-Salpêtrière A. Grimaldi a rappelé que les données apportées par DIGAMI sont établies : 1 point d’HbA1c en moins réduit la mortalité CV de 10 à 15 %, sans bénéfice spécifique de l’insuline. Si la glycémie initiale est prédictive de la mortalité à court et à moyen terme, sa correction est-elle bénéfique et l’insuline apporte t-elle un bénéfice spécifique ?   Deux métaanalyses différentes (1997 et 2004, puis DIGAMI 1) sont en faveur du protocole GIK, mais avec des méthodologies très diverses : doses d’insuline, délai avant traitement, concentration du glucosé utilisé… puis sont arrivées des études négatives, DIGAMI-2 et CREATE-ECLA. Or, le GIK repose sur des effets métaboliques très favorables de l’insuline à la phase aiguë de l’ischémie myocardique, parfaitement documentés au plan expérimental. Chez l’homme, l’hyperglycémie aggrave le remodelage ventriculaire à la phase aiguë de l’IDM et la mortalité à 30 jours : + 1 mmol/l = + 12 % de mortalité ; l’hyperglycémie est un facteur de « no reflow » (perméabilité coronaire sans reperfusion), phénomène lié à une destruction de la microcirculation et touchant 30 % des IDM antérieurs. Toutefois, abaisser la glycémie amène la mortalité à des niveaux comparables à ceux des non-diabétiques. En conclusion En attendant de nouvelles études randomisées, il convient de : - corriger l’hyperglycémie aiguë lors de l’IDM, par insuline ou sulfamides (sauf glibenclamide) ; - si le protocole GIK a déçu, l’insuline garde tout son intérêt.   La lecture critique du cardiologue : prévalence du diabète dans l'IDM aigu N. Danchin La proportion de diabétiques parmi les patients admis pour syndrome coronarien aigu (SCA) ne cesse d’augmenter : de 17 (étude France USIC de 1995) à 21 % (France USIC 2000) puis 23 % (Europe EHS 2001). Pourtant, les anomalies du métabolisme du glucose dans les SCA sont encore sous-estimées : l’étude RICO retrouve 38 % de diabétiques, 15 % de glycémies limites entre 6,1 et 7 mmol) chez 47 % de sujets « normaux ». C’est dire que les patients indemnes de diabète et/ou d’intolérance aux HC représentent moins de la moitié des SCA de nos jours. Les diabétiques sont désavantagés face au SCA : si la thrombolyse reperméabilise assez bien leur coronaire occluse, leur pronostic est plus grave (GUSTO IIb), et leur mortalité hospitalière doublée. Les résultats de DIGAMI 2 s'inscrivent dans un continuum de preuves. On note une mortalité supérieure dans les groupes d’intervention intensive (insuline), quoique cette différence n’atteigne pas le seuil statistique. Pourtant, tout avait bien commencé avec DIGAMI : le groupe traité par insuline avait eu une mortalité réduite de 28 %, avec même une mortalité hospitalière réduite de 12 à 5 % (et un risque global réduit de 51 %), chez les patients à risque réduit. DIGAMI a montré un effet surtout dans le groupe à faible risque : mortalité divisée par 2. En revanche, chez les patients à risque élevé, DIGAMI n’avait pas procuré d’avantage ; ce fut l’inverse dans PAMI : là, l’angioplastie primaire a réduit de 80 % la mortalité dans le groupe à risque moyen ou élevé, et a discrètement aggravé le groupe à faible risque. On est étonné donc que le bénéfice le plus efficace soit constaté chez les patients à risque faible. Qu’en est-il du débat sur la prétendue toxicité des sulfamides hypoglycémiants ? Les sulfonylurées interagissent-elles avec le préconditionnement ischémique, médié par l’ouverture des canaux potassiques KATP myocardiques. Le blocage des canaux potassiques par certains sulfamides (glibenclamide) supprime les mécanismes de préconditionnement. Le glibenclamide altère la FEVG en cas de stress ischémique. Un travail de la Mayo Clinic a montré une mortalité hospitalière passant de 11 à 24 % lors des angioplasties primaires pour IDM aigu chez les diabétiques. La réalité française a été bien montrée par le grand registre USIC 2000 : cette enquête a recueilli les données de 83 % des USIC de France, soit 2 320 patients ; 21 % étaient considérés comme diabétiques dont 44 % sous sulfamides, et 35 % ont reçu un traitement de reperfusion. Chez ces patients, pourtant plus souvent hypertendus (PAS moyenne 144 vs 133 mmHg à l’admission) on constate moins de décès hospitaliers (10 vs 17 % (p < 0,05), de « décès ou AVC » (11 vs 18 % (p < 0,05) et de FV (2 vs 6 % (p = 0,052). Chez les diabétiques sous sulfamides, le pronostic a été bien meilleur lorsqu’on a utilisé l’angioplastie pendant le séjour et surtout en cas d’angioplastie primaire (tableau). Ainsi, quel que soit le modèle statistique, le traitement par sulfonylurée avant l’admission chez les diabétiques du registre USIC 2000 est associée à une réduction de mortalité d’environ 60 %, hautement significative. Le traitement par insuline ou GIK confère-t-il une protection particulière ? Ce n’est pas ce que nous apprend l’étude USIC 2000. On y constate une surmortalité hospitalière chez les diabétiques traités précocement par l’insuline : 15,1 contre 12,7 %. Chez les non-diabétiques, le GIK n’est pas efficace. La glycémie est même nettement supérieure, 6 heures après le groupe GIK : 1,87 contre 1,48 g/l dans le groupe témoin. De plus, le traitement insulinique fait courir un risque d’hypoglycémie qui peut elle-même aggraver le pronostic. USIC 2000 confirme nettement ces données, avec ce qui peut être appelé une courbe en J de la glycémie. De même, DIGAMI 2, qui montre une franche surmortalité en cas d’hypoglycémie dans les 24 premières heures. La glycémie à l’admission garde pourtant son rôle pronostique Dans USIC 2000, la glycémie à l’admission, est élevée, plus le pronostic est grave. La glycémie influe aussi sur la perméabilité coronaire dans l’IDM aigu. Le risque d’avoir un TIMI 0 ou 1 en cas de glycémie Ž 1,40 multiplié par 2,6. Il existe une très forte corrélation entre le phénomène de « no reflow » et la glycémie : le risque est multiplié par près de 4 si la glycémie dépasse 1,59 g/l. Enfin, la glycémie à l’admission est corrélée de manière exponentielle à la survenue de FV. En conclusion   Les résultats de DIGAMI 2 ne paraissent pas surprenants au regard des donnés d’observation en France ; Au stade aigu, les sulfamides n’ont pas d’effets délétères et pourraient même avoir un effet bénéfique ; d’autres études sont nécessaires pour voir si les sulfamides ont un impact différent les uns des autres ; Passer à l’insuline de façon systématique dans les conditions du protocole DIGAMI 2 n’améliore pas le pronostic ; La glycémie d’admission reste un index pronostique puissant, y compris chez les non-diabétiques. Dans ce cadre, un traitement (par insuline ?) selon un protocole n’entraînant pas d’augmentation de la glycémie mais limitant le risque d’hypoglycémie mériterait certainement d’être étudié.   Les statines chez le diabétique   Le point de vue du diabétologue : les statines chez le diabétique J.-M. Brun, CHU de Dijon Le diabétique est à très haut risque cardiovasculaire : le risque est multiplié par 3 à 5 ; 75 % des diabétiques décèdent d’un accident cardiovasculaire aigu. Les anomalies lipidiques du diabète de type 2 sont très précoces, dès le stade de l’insulinorésistance, avec déjà un risque CV augmenté. Les anomalies sont ensuite aggravées par l’hyperglycémie chronique. Les anomalies lipidiques du diabète de type 2 sont quantitatives (élévation des triglycérides (VLDL), baisse du HDL-cholestérol), et qualitatives : enrichissement en TG des VLDL, LDL et HDL (LDL petites et denses), glycation, oxydation des lipoprotéines (LDL ++). L’hypertriglycéridémie est un facteur indépendant de risque vasculaire : une élévation des TG de 1 mmol/l augmente le risque coronaire de 14 % chez l’homme et de 37 % chez la femme. Dans l’étude VA-HIT, le gemfibrozil a permis une réduction très franche des complications vasculaires et cardiaques chez les diabétiques (25 % du groupe). De même l’étude DAIS a montré une réduction de l’évolution des plaques sous fénofibrate. L’étude Heart Protection Study a inclus un nombre substantiel de diabétiques. Chez ces patients, la simvastatine à 40 mg/jour a permis une réduction substantielle des complications vasculaires et cardiaques, entre 20 et 37 %, indépendamment du contrôle glycémique, de l’ancienneté du diabète et de l’existence d’une dyslipidémie. L’étude CARDS a étudié spécifiquement le bénéfice de l’atorvastatine à 10 mg/j chez 2 838 diabétiques de type 2. Il est apparu une réduction relative de 37 % (p = 0,001) du risque d’accidents CV majeurs sous atorvastatine, la réduction des AVC atteignant 48 % et celle de la mortalité 27,%, cela indépendamment des critères lipidiques, de l’âge et du sexe. Il en résulte que le diabétique de type 2 avec un autre facteur de risque mérite un traitement par statine quels que soient ses taux lipidiques. Pour ce qui est des fibrates, les analyses post hoc montrent que les patients qui en tirent le plus de bénéfices sont : ceux ayant un IMC plus élevé, des TG plus élevés, un HDL plus bas. Ces résultats ne sont pas retrouvés avec les statines. Cependant, même lorsque les diabétiques sont bien traités, le risque résiduel est important et dépasse celui des non-diabétiques recevant le même traitement (HPS). Cela justifie un traitement par doses importantes de statines, comme dans TNT. Pour ce qui est des fibrates, il est important d’attendre les résultats de l’étude FIELD (AHA 2005). Des stratégies d’association peuvent être utilisées. En conclusion   Les statines ont prouvé leur efficacité chez le diabétique, en prévention cardiovasculaire primaire et secondaire ; Toutefois, leur action principale sur le LDL-C de même que la spécificité de la dyslipidémie diabétique peuvent laisser penser que les statines ne sont pas le traitement le mieux adapté ; Cela peut expliquer en partie le risque CV résiduel important chez le diabétique sous statines ; Pour réduire ce risque, nous devons aller au-delà de la seule réduction du LDL-C et prendre en compte l’hyper-TG, le HDL-C bas et les anomalies de structure des LDL ; D’autres classes thérapeutiques ont encore leur place en monothérapie et probablement en association avec les statines. Acronymes des études citées 4S : Scandinavian Simvastatin Survival Study CARDS : Collaborative AtoRvastatin Diabetes Study CARE : Cholesterol And Recurrent Events trial DAIS : Diabetes Atherosclerosis Intervention Study DIGAMI : Diabetes mellitus Insulin Glucose infusion in Acute Myocardial Infarction FIELD : Fenofibrate micronised Intervention and Events Lowering in Diabetes GUSTO : Global Utilization of Streptokinase and Tissue plasminOgen activator for occluded coronary arteries HPS : Heart Protection Study PAMI : Primary Angioplasty in Myocardial Infarction PEACE : Prevention of Events with Angiotensin Converting Enzyme inhibition PROactive : PROspective PioglitAzone Clinical Trial In MacroVascular Events TIMI : Thrombolysis In Myocardial Infarction VA-HIT : Veterans Affairs HDL Intervention Trial

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