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Explorations-Imagerie

Publié le 06 avr 2010Lecture 6 min

Les modèles de mesure du risque

F. DIEVART, Dunkerque

Les modèles de mesure du risque prennent en compte un ou des paramètre(s) corrélé(s) au risque. L’utilisation d’un paramètre commence par sa mesure et ne permet que d’estimer un risque relatif. L’évaluation du risque absolu nécessite d’utiliser plusieurs marqueurs. Plusieurs méthodes ou modèles peuvent alors être employés : elles ont toutes des avantages et des limites.

Un paramètre Un risque relatif à analyser en fonction du risque absolu En ne prenant en compte qu’un seul paramètre, un seul marqueur de risque, la seule estimation qui peut être fournie est celle d’un risque relatif par rapport à une autre valeur du paramètre que celle mesurée chez un sujet. Par exemple, si la pression artérielle systolique (PAS) d’un sujet est à 150 mmHg, il est possible de dire que le risque d’AVC à 10 ans est plus important de 40 % et le risque d’infarctus du myocarde plus important de 25 % par rapport à une valeur de PAS de 140 mmHg. L’excès de risque estimé par cette méthode peut paraitre considérable (augmentation du risque de 40 % et 25 %), mais, de fait, l’importance de cette estimation doit prendre en compte le risque absolu, qui ne peut être fourni par un seul marqueur. Comparons ainsi deux sujets : - le premier à un risque absolu d’infarctus de 0,5 % à 10 ans, car il est jeune : diminuer sa pression artérielle à 140 mmHg, amènera son risque absolu d’infarctus du myocarde à 0,375 % ; - le second sujet a un risque absolu d’infarctus du myocarde de 20 % à dix ans : diminuer sa pression artérielle à 140 mmHg, diminuera son risque absolu à 15 %. L’ampleur relative de diminution du risque d’infarctus sera la même chez les deux sujets (25 %), la diminution absolue du risque sera très différente : 0,125 % pour le premier sujet et 5 % pour le second. Transformation d’une variable quantitative en variable qualitative : avantages et limites L’utilisation d’un unique marqueur a un avantage : pouvoir fixer le seuil déterminant la maladie. Ainsi, en prenant la pression artérielle qui est une variable quantitative continue, corrélée linéairement au risque d’infarctus du myocarde et d’AVC, il a été choisi de la transformer en variable qualitative à deux classes pour définir l’hypertension artérielle avec comme seuil la valeur de 140/90 mmHg. En dessous de cette valeur, il n’y a pas d’hypertension artérielle, au-dessus, le patient est hypertendu. Ce choix a l’avantage d’être pratique d’un point de vue opérationnel mais ne rend pas compte d’une réalité : un patient ayant 135/85 mmHg de pression artérielle n’est, dans cette définition, pas hypertendu mais son risque d’infarctus du myocarde et d’AVC est nettement et relativement plus élevé que s’il avait une pression artérielle à 110/75 mmHg. Or, si au-delà de 140/90 mmHg de pression artérielle le risque d’infarctus et d’AVC est encore plus grand, un grand nombre d’infarctus et d’AVC surviendra dans une population chez les patients ayant une pression artérielle inférieure à ces chiffres car ils sont nombreux (figure 5). Figure 5. Le risque d’infarctus du myocarde augmente avec la pression artérielle. Les patients les plus à risque sont cependant moins nombreux que les patients moins à risque. Ainsi, le plus grand nombre de décès par infarctus dans cette population sera constaté chez les patients de moindre risque. Un deuxième problème posé par la transformation d’une variable quantitative en variable qualitative est celui de la sensibilité et de la spécificité du seuil choisi car ces deux caractéristiques varient en sens inverse : plus la sensibilité augmente, plus la spécificité diminue (figures 6 à 9). Figure 6. Il est souhaité qu’un marqueur de risque puisse discerner des patients à risque des patients non à risque. Une valeur de ce critère permettrait de distinguer clairement ces deux populations. Ce critère serait alors très sensible (il identifierait tous les patients à risque) et très spécifique (tous les patients situés au-delà.) Figure 7. Les études épidémiologiques ont montré qu’il y a un grand chevauchement de la distribution des valeurs d’un marqueur de risque dans une population entre ceux qui feront l’événement clinique et ceux qui ne le feront pas : il n’est donc pas possible de trouver une valeur de ce marqueur qui sera sensible à 100 % et spécifique à 100 %. Il faut donc choisir une valeur de compromis tout en sachant que plus cette valeur sera spécifique moins elle sera sensible, et vice versa. Figure 8. En choisissant une valeur très basse, la sensibilité sera grande puisque tous ou presque tous les patients à risque seront identifiés. Mais la spécificité sera faible puisque, au-delà de cette valeur, il y aura de très nombreux patients qui ne sont pas à risque. Figure 9. En choisissant une valeur très élevée, la spécificité sera grande puisque tous ou presque tous les patients situés au-delà de cette valeur seront à risque. Mais la sensibilité sera faible puisqu’un grand nombre de patients à risque ne seront pas identifiés. Plusieurs paramètres Pour certains marqueurs, il existe une relation linéaire avec le risque d’événements cardiovasculaires : il en est ainsi de la pression artérielle ou de la cholestérolémie totale, mais aussi de l’âge. Dès lors, deux attitudes sont possible pour utiliser ces marqueurs du risque : soit construire une équation de risque où sera prise en compte chaque valeur du paramètre, soit transformer la variable continue en variable quantitative. Dans le second cas, une valeur est définie arbitrairement qui fixe l’aspect que prendra le paramètre dans le modèle de risque : le marqueur sera présent ou absent. Ainsi, l’équation de Framingham a choisi de maintenir le statut de variable continue pour certains marqueurs (âge, pression artérielle systolique, cholestérolémie totale et HDL) et de transformer d’autres marqueurs en variable qualitative : la glycémie est devenue présence ou absence de diabète, le nombre de paquets-années de cigarettes est devenu tabagisme présent ou absent, la valeur de l’indice de Sokolow est devenu présence ou absence d’hypertrophie ventriculaire gauche, l’âge auquel les parents ont eu un infarctus du myocarde est devenu présence ou absence d’hérédité cardiovasculaire. Ce modèle s’appuie donc sur quelques variables simplifiées en mode qualitatif et sur très peu de variables utilisées en variables continues. En intégrant les données recueillies chez un patient dans ce modèle, il va être possible d’obtenir une valeur de risque définissant le risque absolu. Les accords consensuels indiqueront alors si cette valeur doit être considérée comme marquant un risque faible, intermédiaire ou élevé. En France, les recommandations pour la prise en charge de l’hypertension artérielle, des paramètres lipidiques et du diabète ont choisi une méthode qui est celle de la sommation des marqueurs de risque, chacun étant transformé en variable qualitative, dont on a vu les limites aux paragraphes précédents. Une valeur définit la présence ou l’absence d’un marqueur de risque (ces marqueurs étant systématiquement dénommés facteurs dans ces textes de recommandations). Donc, en fonction de la valeur de certains marqueurs, le médecin indique qu’il est présent ou non, et fait la somme des marqueurs présents dans la liste proposée qui reprend les principaux marqueurs recensés par l’étude de Framingham. Il peut ainsi évaluer le risque comme faible, moyen ou élevé en fonction du nombre de marqueurs présents. La méthode de sommation des marqueurs choisie a l’avantage de la simplicité, puisqu’il n’y a pas besoin d’outils de calcul autres que les doigts de la main. Elle a plusieurs limites : - elle n’est pas validée au-delà de son aspect pragmatique : en d’autres termes, sa mise en application permet-elle de diminuer le risque de façon optimale, ou une autre méthode serait-elle plus efficace ? - son apport pédagogique pour les patients est limité. Ainsi, un patient qui a une atteinte d’un organe cible (AOC) sera considéré comme à risque élevé dès que sa pression artérielle est > 140 mmHg, quels que soient les efforts qu’il fera pour arrêter de fumer, pour diminuer son LDL-cholestérol, pour faire de l’exercice physique… S’il regarde la grille de risque, il peut penser que le seul moyen de diminuer éventuellement son risque est de diminuer sa pression artérielle en dessous de 140 mmHg et que le reste est de peu d’utilité (tableau 2). En pratique Choisir une méthode d’évaluation du risque a des avantages et des limites induits par la méthode elle-même.

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