Rythmologie et rythmo interventionnelle
Publié le 02 juin 2009Lecture 5 min
Que dire au patient avant l'implantation d'un pacemaker ?
Y. MOUHOUB, Institut de Cardiologie, GH Pitié-Salpêtrière, Paris
Il faut expliquer au futur implanté les bénéfices attendus de la stimulation : ils dépendent du motif de l’implantation. La grande majorité des indications de PM repose sur des symptômes qui vont pouvoir être résolutifs (lipothymie, syncope, arrêt circulatoire sur asystolie, asthénie, insuffisance cardiaque, palpitations) ou améliorés avec le PM (stimulation multisite et insuffisance cardiaque). Plus rares sont les indications de PM prophylactique où le boîtier ne va changer en rien une symptomatologie inexistante, mais peut jouer un rôle pronostique (bloc infrahisien).
Le patient sera informé du déroulement de la procédure, des suites à court et long termes et du suivi nécessaire.
L’intervention
Sa durée dépend du nombre de sondes à implanter (simple chambre, double chambre ou multisite) et de l’expérience de l’opérateur. L’implantation d’une sonde VG peut rallonger considérablement la durée de l’intervention car elle nécessite la cathétérisation du sinus coronaire et d’une veine coronaire latérale. La durée moyenne d’implantation d’un PM double chambre (le plus fréquent) varie de 30 min à 1 h selon la difficulté rencontrée (abord vasculaire, qualité du myocarde et des seuils notamment).
La qualité de préparation du patient est primordiale, afin de minimiser les risques d’infection de loge, dont les conséquences peuvent être dramatiques. Il faut s’assurer de l’absence d’infection évolutive et de l’intégrité cutanée dans la région sous-claviculaire par une anamnèse et un examen clinique rigoureux, complétés par un bilan inflammatoire. Sauf exception (PM en urgence), l’intervention sera différée à distance (> 15 j) de la pose d’un cathéter central ou d’un épisode infectieux. L’antibioprophylaxie par céfamandole, adaptée à la fonction rénale, doit être systématique (classiquement 1,5 g IVL, 1 h avant le bloc et 750 mg, 6 h après la première injection ; vancomycine 1 g sur 1 h, dans l’heure qui précède le bloc, en d’allergie aux ‚b-lactamines). L’utilisation d’un champ bétadiné autoadhésif réduit les risques de contamination et l’utilisation de deux paires de gants diminue le risque de perforation.
La gestion des anticoagulants en période périopératoire est délicate. Il faut prévoir un arrêt des antivitamines K (AVK) 3-4 j avant l’admission afin d’obtenir un INR < 2, avec relais par HBPM selon le risque thromboembolique, sans injection le matin de l’intervention. Pour un changement simple de PM, un INR entre 2 et 2,5 est acceptable et permet d’éviter les relais AVK-HBPM ou héparine-AVK, grevés d’une morbidité importante (en particulier chez les porteurs de valve mécanique).
Figure 1. A quoi ressemble mon pacemaker, Docteur ?
Figure 2. PM double chambre et ses sondes (atriale à barbes en haut, ventriculaire à vis en bas).
Période postopératoire
En l’absence de complication, le patient sort classiquement 48 h après l’intervention. Pour éviter tout hématome, un pansement compressif est confectionné au bloc opératoire et maintenu 48 h, ou plus. Les AVK seront repris précocement, avec ou sans relais par héparine, selon l’indication initiale de l’anticoagulation, en évitant dans la mesure du possible l’association HBPM+AVK en ambulatoire. Dans la FA non compliquée, une suspension du traitement AVK d’une semaine est autorisée sans relais (Recommandations ACC/AHA/ESC, Circulation 2006). On réalise une radiographie de thorax au lit à J0 et face + profil à J2 pour confirmer le bon positionnement des sondes et l’absence de pneumothorax. Le patient évitera de mobiliser le bras homolatéral durant une période d’un mois (pas de mouvement de rétropulsion ou d’abduction du bras > 90 °), afin d’éviter un déplacement de sonde.
Complications
Précoces
Les complications liées à l’abord vasculaire sont rares mais potentiellement graves.
Il s’agit bien sûr du pneumothorax en cas de ponction veineuse sous-clavière ou jugulaire (voie rarement utilisée) ou d’une plaie vasculaire. Ce risque est inférieur à 1 % et peut être supprimé par l’abord céphalique, réalisable en pratique dans plus de la moitié des cas pour un PM double chambre. Pour un PM multisite, l’abord sous-clavier est inévitable. Rarement peuvent être observés un lymphœdème du bras ou une thrombose veineuse profonde, en général résolutive sous traitement anticoagulant.
Les risques d’hématome de loge et de déglobulisation sont accrus par l’anticoagulation et les traitements antiagrégants plaquettaires. Néanmoins, en cas de cardiopathie ischémique, l’intervention peut être réalisée sous aspirine-clopidogrel en pratiquant une hémostase soigneuse. Après une angioplastie coronaire et en l’absence d’urgence rythmique, l’implantation de PM sera reportée à plus de 15 j de la dose de charge de clopidogrel. L’hématome favorise les désunions de cicatrice et augmente le risque d’infection de loge.
Dans le premier mois et surtout au lever du patient, il existe un risque de déplacement de sonde nécessitant une reprise chirurgicale. Très rarement peuvent être observés un épanchement péricardique, une tamponnade ou une perforation myocardique du fait de l’utilisation de sondes vissées qui ont l’avantage par rapport aux sondes à barbes d’être positionnables sur tout le myocarde, aisément extirpables en cas d’infection et plus stables.
Des complications indirectes en rapport avec la gestion du traitement anticoagulant sont également possibles (AVC ischémique, thrombose de prothèse mécanique).
Tardives
Les risques d’infections latentes à plus d’un an de la primo implantation existent (0,5 % environ) et imposent une prise en charge spécialisée. Le seul traitement valable en cas d’infection documentée est l’ablation complète du matériel, aisée dans les 2 premières années et à haut risque de complications lorsque les sondes sont anciennes. Le risque infectieux augmente avec les antécédents d’hématome et le nombre de réinterventions (changements de PM). L’infection de loge peut se compliquer d’endocardite d’Osler. Une greffe bactérienne est toujours possible secondairement sur les sondes de PM.
Le risque de fracture de sonde de PM est très bas contrairement aux sondes de défibrillation. Ce risque augmente avec l’activité et la jeunesse du patient. Certains sports sont à éviter (crawl, swing du golf, squash, etc.). Des élévations tardives de seuils sans fracture sont possibles mais rares et se rencontrent essentiellement dans les cardiomyopathies. En cas d’ajout de sonde, se pose le problème de l’accès vasculaire avec la possibilité de sténoses ou d’occlusions veineuses.
Quel suivi et pourquoi ?
Le carnet de PM sera remis au patient à la sortie. Le patient devra l’avoir toujours sur lui car il apporte des informations précieuses (cf. Suivi du patient implanté).
Un boîtier dure entre 7 et 10 ans, dépendant du taux de stimulation, de l’impédance et des seuils de stimulation, de l’activation de l’asservissement à l’effort, des fonctions spéciales (mémoires) et du nombre de cavités stimulées. D’où la nécessité d’un suivi régulier pour permettre un réglage optimal et économe du PM.
Le patient doit être revu 4 à 8 semaines après l’implantation (quand les seuils sont stabilisés), puis tous les 6 mois en moyenne. Dans la première moitié de vie du boîtier, l’intervalle peut être étendu à 8-9 mois. À l’approche de la fin de vie (ERI), surtout chez un patient stimulo-dépendant, on rapprochera les consultations (tous les 3 mois).
En pratique
L’implantation d’un PM vise à supprimer ou améliorer des symptômes sur lesquels reposent la majorité des indications. Les complications sont rares mais potentiellement graves, rendant indispensable un suivi régulier. Néanmoins, hormis une période de convalescence d’un mois post-implantation, le patient peut et doit mener une vie normale avec son boîtier.
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