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Valvulopathies

Publié le 09 oct 2007Lecture 6 min

RA : quand demander une épreuve d'effort ?

P.-L. MASSOURE, HIA Robert Picqué, Bordeaux Armées, et H. DOUARD, hôpital cardiologique Haut-Lévêque, Pessac

Le test d’effort est utilisé depuis plusieurs décennies pour évaluer les patients ayant un rétrécissement aortique (RA) car ce test a une valeur prédictive de la survenue d’un événement cardiaque chez les patients encore asymptomatiques avec un RA serré ou moyennement serré. Il est également utile pour évaluer les symptômes qui sont souvent non spécifiques telle la dyspnée ou limitation à l’effort.

Seuls les RA valvulaires serrés ou moyennement serrés asymptomatiques peuvent induire des anomalies à l’effort. En cas de RA peu serré sans dysfonction ventriculaire gauche (gradient moyen < 25 mmHg, vélocité maximale < 3 m/s, surface valvulaire > 1,5 cm2), les anomalies éventuelles du test d’effort ne sont pas imputables à la valvulopathie(1). Nous nous limiterons à l’exploration des RA orificiels dégénératifs.   Indications   D’après les recommandations françaises et nord-américaines, il n’y a pas d’indication reconnue (classe I) du test d’effort dans l’évaluation du RA(2,3). Cependant ces recommandations retiennent des indications « possibles » : - l’évaluation des capacités physiques du patient, - la recherche des symptômes dont le patient se plaint à l’effort, - l’aide à la décision d’intervention, - l’évaluation du rétrécissement aortique du sujet jeune. L’AHA recommande (classe IIb) le test d’effort pour évaluer les symptômes d’effort et la réponse tensionnelle chez un patient avec un RA considéré comme asymptomatique(4). Le test d’effort est également utile pour évaluer les patients atteints de RA asymptomatique qui désirent commencer une activité physique, voire sportive. D’après la 36e Conférence de Bethesda (2005), le sport de compétition n’est pas contre-indiqué en cas de RA peu serrés asymptomatiques. Dans les RA moyennement serrés à serrés, la compétition est contre-indiquée pour les sports à haute composante statique et dynamique.   Modalités   Dans la plupart des séries, le test d’effort est réalisé selon le protocole de Bruce ou des protocoles voisins (Bruce modifié chez les moins valides, Ellestad…) sur tapis roulant. Les épreuves sur bicyclette ergométrique sont plus utilisées en Europe. Les paliers doivent être progressifs et, plus que le protocole, c’est la surveillance du patient qui est importante surtout si le RA est serré. Les symptômes de repos et d’effort doivent être recueillis de manière rigoureuse : - le monitorage de la pression artérielle doit être réalisé au moins toutes les 2 minutes, - le monitorage de l’ECG doit être de bonne qualité (survenue d’un trouble du rythme ventriculaire toujours possible). Un matériel de réanimation complet doit être sur place. En pratique, près de 90 % des patients avec un RA atteignent au moins 80 % de leur fréquence maximale théorique(5). Sécurité du test d’effort   Les contre-indications formelles de l’épreuve d’effort sont les sténoses aortiques ayant provoqué des symptômes à l’effort (syncope, œdème pulmonaire) et les contre-indications classiques associées (infarctus du myocarde récent, sténose serrée du tronc coronaire gauche, HTAP fixée…). Le RA serré a longtemps été considéré comme une contre-indication du test d’effort mais les études les plus récentes sont rassurantes lorsque le RA est asymptomatique, les patients réalisent naturellement des exercices physiques dans leur vie quotidienne. Le test d’effort est sûr tant que : - l’on utilise des protocoles progressifs (Bruce modifié par exemple) ; - les symptômes restent limités, - les critères d’arrêt sont respectés, en particulier si la pression artérielle systolique chute de 10 mmHg, si un sous-décalage du segment ST > 2 mm apparaît (5 mm pour certains) et en cas d’arythmie significative(4-6).   Évaluation des symptômes à l’effort   Attention aux « faux asymptomatiques » ! De nombreux patients ayant un RA présumé asymptomatique ont en fait bien souvent limité leur activité au fur et à mesure que les symptômes apparaissaient et sont en réalité de « faux asymptomatiques «. Dans la plupart des séries, 10 à 15 % des RAC moyennement serrés sont de « faux asymptomatiques « de même que près de 25 % des RAC serrés(7,8). Globalement, jusqu’à 40 % des patients atteints de RA qui se prétendent asymptomatiques ne le seraient pas. L’apparition d’un angor est variable selon les séries (de 3 à 20 %). La survenue d’une dyspnée est fréquente mais non spécifique. La diminution de la tolérance à l’effort est le motif de remplacement valvulaire le plus fréquent, d’où l’intérêt de répéter le test d’effort tous les ans chez le patient asymptomatique(5). L’apparition de symptômes grève le pronostic L’évaluation fonctionnelle est primordiale car la mortalité augmente rapidement (d’environ 3 %) dans les 3 à 6 mois après l’apparition des symptômes(9). La mortalité est de plus de 6 % chez les patients devenus symptomatiques en attente d’un remplacement valvulaire(10). Le risque de mort subite est faible mais réel (environ 1 % par an) en l’absence de symptômes. L’évaluation des symptômes lors du test d’effort manque de spécificité chez les patients de plus de 70 ans. Un test d’effort normal rend peu probable le développement de symptômes dans l’année qui suit, surtout si le RAC n’est que moyennement serré (0,8 à 1,2 cm2)(8). Cependant, une majorité de patients avec un RAC serré asymptomatique développera des symptômes dans les 5 ans qui suivent(9).   Troubles du rythme, syncope   La survenue de troubles du rythme ventriculaire est un critère d’arrêt de l’épreuve d’effort. Une arythmie peut survenir dans 1 à 5 % des cas lors du test d’effort de RA asymptomatiques. Elle est également un témoin de l’hypertrophie ventriculaire gauche, de l’ischémie myocardique mais aussi de la dysfonction ventriculaire gauche sous-jacente. Néanmoins, en l’absence de symptôme et de dysfonction ventriculaire gauche, les conséquences pratiques des troubles du rythme ventriculaire induits par l’effort et leur rôle pronostique restent débattus(11). Une syncope peut survenir lors du test d’effort soit en raison de troubles du rythme ventriculaire soit d’une bradycardie associée à une hypotension artérielle par activation de barorécepteurs ventriculaires gauches.   Analyse de l’ECG d’effort   Le sous-décalage du segment ST survient dans près de 80 % des cas lors du test d’effort chez les adultes avec un RA asymptomatique et n’a pas de valeur pronostique bien établie. Dans un travail récent nous avons constaté que les anomalies de l’ECG d’effort et de récupération dans le RAC étaient le plus souvent similaires aux anomalies constatées chez les coronariens ; seul le sens des boucles d’effort/récupération était significativement différent entre les deux populations(12). Le sous-décalage du segment ST est le plus souvent l’une des manifestations de l’hypertrophie ventriculaire gauche et de la diminution de la réserve coronaire. Le test d’effort ne permet habituellement pas de prédire la possibilité d’une coronaropathie associée qui sera recherchée par d’autres méthodes, d’autant qu’environ 30 % des patients avec un RA « chirurgical « ont des sténoses coronaires significatives. La recherche par un test d’effort d’une insuffisance coronaire associée est une recommandation de classe III dans les recommandations nord-américaines(3).   Analyse du profil tensionnel d’effort   L’absence d’élévation de la pression artérielle systolique (PAS) ou la chute de la PAS est associée à un mauvais pronostic car c’est un facteur prédictif de mortalité, d’événements cardiaques et d’apparition des symptômes dans les 12 mois. Elle reste un critère d’arrêt du test d’effort. Les recommandations françaises et nord-américaines retiennent que l’absence d’augmentation de la PAS (< 20 mmHg) lors du test d’effort est une indication opératoire (classe IIb) dans le RA serré asymptomatique.   En pratique   Le test d’effort, loin d’être contre-indiqué dans le RA, même serré, est un examen de routine pour évaluer les patients présumés asymptomatiques en raison de sa valeur pronostique et préthérapeutique. Il est sûr si l’on respecte les contre-indications et les critères d’arrêt. Ce test connaîtra probablement un regain d’intérêt dans cette indication en le couplant à l’échocardiographie d’effort et au dosage du Brain Natriuretic Peptide (BNP) qui devraient apporter des critères supplémentaires pour la prise en charge des RA serrés asymptomatiques.

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