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Valvulopathies

Publié le 10 avr 2007Lecture 6 min

RAC : les progrès du traitement percutané : une solution irremplaçable dans le futur ?

A. CRIBIER, H. ELTCHANINOFF, C. TRON, F. BAUER, B. BAALA et D. BRUNET, CHU de Rouen


Les Journées européennes de la SFC
Le développement récent de l'implantation percutanée de bioprothèses aortiques a introduit une ère nouvelle dans le traitement des patients atteints de rétrécissement aortique calcifié (RAC) et considérés comme non opérables ou à haut risque chirurgical. Le but de la technique est de pallier les limitations des dilatations aortiques percutanées qui s'adressaient à la même population. Après plus de dix ans de recherche, la première valve a pu être implantée chez l'homme par notre équipe en avril 2002. Deux études de faisabilité successives ont ensuite été réalisées dans le service de cardiologie de Rouen avant l'extension des investigations à d'autres centres en Europe, au Canada et aux États-Unis. De nombreuses améliorations technologiques ont été développées, simplifiant la procédure et améliorant les résultats. À ce jour, près de 300 patients ont été implantés dans le monde avec la bioprothèse du fabricant Edwards Lifesciences dans le cadre de protocoles de recherche multicentriques.

    Dilatation valvulaire aortique   Une procédure palliative La dilatation valvulaire aortique au ballonnet a longtemps été considérée comme une procédure difficile et à risques, avec en outre un taux de resténose rédhibitoire à moyen terme. Elle a, de ce fait, été abandonnée par la plupart des équipes. Cette technique palliative connaît aujourd'hui un net regain d'intérêt compte tenu du vieillissement de la population et du nombre accru de patients pour lesquels la chirurgie cardiaque n'est pas envisageable. De fait, comme cela a été démontré en Europe et aux États-Unis, un tiers des patients atteints de RAC et symptomatiques ne sont pas opérés, malgré un pronostic redoutable à court terme. Le grand âge, la dysfonction ventriculaire et les comorbidités sont le plus souvent à l'origine des abstentions chirurgicales.   Une technique améliorée La technique utilisée pour les dilatations aortiques a été fortement améliorée avec de nouveaux cathéters de bas profil, une meilleure technique de dilatation, offrant de meilleurs résultats et une diminution des complications, notamment vasculaires : - elle est réalisée sous anesthésie locale et ne nécessite que deux jours complémentaires d'hospitalisation ; - elle permet un soulagement rapide des symptômes et une amélioration clinique prolongée d'un an ou plus en dehors de cas particuliers ; - elle peut aussi être renouvelée après récidive des symptômes. La dilatation aortique, geste indispensable avant toute implantation valvulaire transcutanée, devrait être en outre réactualisée dans toutes les équipes se sentant concernées à brève échéance par cette technique émergente.   Implantation transcutanée des prothèses aortiques   Matériel utilisé et méthodologie La bioprothèse aortique (Edwards Lifesciences) est une valve biologique tricuspide en péricarde bovin suturée dans un stent en acier inoxydable, dont deux diamètres sont disponibles, 23 et 26 mm. La bioprothèse est sertie sur un cathéter à ballonnet (Z-MED II, NuMED). L'ensemble est compatible avec un désilet de 22F ou de 24F en fonction de la taille de la prothèse (figure 1). Figure 1. Vue de la bioprothèse avant et après son sertissage sur le ballonnet. La voie d'abord était initialement antérograde transseptale, mais les améliorations technologiques, notamment le développement d'un nouveau système de délivrance (le cathéter Rétro-Flex, à extrémité distale orientable) ont favorisé la voie artérielle fémorale, plus simple, plus rapide et mieux tolérée. La voie transapicale, réalisée dans des salles hybrides de chirurgie cardiaque (bloc opératoire avec amplificateur de brillance) permet depuis peu de pallier les situations non compatibles avec la voie rétrograde. Quelle que soit la technique utilisée, une prédilatation de la valve native doit être auparavant réalisée à l'aide de ballonnets de 20 ou de 23 mm. La prothèse est larguée sous stimulation rapide du ventricule droit à 200 ou 220/min pour annuler transitoirement (4 à 5 s) le flot sanguin à travers l'orifice aortique (figure 2). Figure 2. Dilatation valvulaire aortique. Le ballonnet est gonflé au centre de la valve native (A) sous stimulation cardiaque rapide à 200/min (B) afin de réduire le flot sanguin et stabiliser sa position. Après dilatation, l'angiographie aortique montre l'absence de régurgitation valvulaire (C) et la diminution du gradient de 50 à 12 mmHg (D). Investigations cliniques Une évaluation initiale très encourageante Les implantations ne sont toujours réalisables que dans le cadre d'investigations contrôlées. Nous avons conduit à Rouen deux études princeps sur 36 patients, les études I-REVIVE et RECAST, études de faisabilité chez des sujets âgés, récusés par les chirurgiens, et au pronostic effroyable à court terme en raison de comorbidités majeures (27 patients sont décédés dans l'attente de leur convocation). Malgré les difficultés engendrées par la mise en route d'une technologie nouvelle chez des patients particulièrement fragiles, et la disponibilité d'une seule taille de valve (23 mm), ces études ont été cruciales puisqu'elles ont permis de confirmer : - la possibilité technique d'implantation, - l'absence d'obstruction des coronaires, - l'absence de migration secondaire de la prothèse, - et l'amélioration spectaculaire et immédiate de l'état fonctionnel des patients liée à : • l'augmentation de la surface valvulaire à 1,7 cm2, • à la disparition du gradient, • et à l'amélioration de la fonction ventriculaire gauche. De cette expérience initiale débutée en 2003, 8 patients survivent au-delà de deux ans, et 2 au-delà de trois ans, sans symptomatologie cardiaque, un résultat inespéré dans un tel contexte clinique. Les autres patients sont décédés de causes non cardiaques au cours du suivi, sans aucun dysfonctionnement prothétique. Des progrès techniques Ces deux études (étendues pour quelques cas aux États-Unis et en Europe) ont été suivies par la mise à disposition du cathéter Retro-Flex (réactualisant la voie rétrograde) et de la valve de 26 mm (permettant de diminuer de 25 à 2 % l'incidence des fuites paravalvulaires sévères dans le cas d'anneaux aortiques larges). Pour des raisons de réglementation, ces innovations ont été d'abord utilisées au Canada par J. Webb (étude Special Access) puis aux États-Unis dans trois centres. Une évaluation très rigoureuse Ce n'est que récemment qu'elles ont été introduites en France, utilisées à Rouen, à l’hôpital Bichat et à la clinique de Massy, dans le cadre de l'étude REVIVE qui associe également deux centres en Allemagne et le centre canadien de J. Webb (30 patients inclus à ce jour). Il ne s'agit plus d'études en compassionnel, mais elles portent sur des patients à haut risque chirurgical, évalué par le calcul d'un EuroScore logistique > 20 % (soit > 20 % de mortalité opératoire prévisible). Les résultats sont très encourageants avec une mortalité à un mois de 8 %, très peu d'échecs et de complications. La sélection des patients se base sur une évaluation radiologique de l'axe fémoro-iliaque par scanner (ou IRM en cas d'insuffisance rénale) et par angiographie évaluant le diamètre, les sinuosités et les calcifications vasculaires. L'examen est réalisé sous anesthésie locale ou générale et l'abord fémoral est percutané ou chirurgical, suivant les centres. Dans tous les cas, une prédilatation de la valve aortique est réalisée, puis la bioprothèse sertie est avancée sur un guide rigide jusqu'à la valve native. Sous stimulation rapide, la valve est larguée au centre des calcifications valvulaires. Après implantation, le gradient transvalvulaire est mesuré et une angiographie sus-sigmoïdienne aortique est réalisée pour quantifier une éventuelle fuite paravalvulaire (figure 3). L'artère fémorale est ensuite fermée chirurgicalement. Le résultat échocardiographique est confirmé pendant l'hospitalisation à 24 heures et à 7 jours, à 3, 6 et 12 mois, puis chaque année. Un traitement antiagrégant plaquettaire est administré au long cours, analogue à celui des stents actifs. La voie transapicale suscite actuellement beaucoup d'intérêt auprès des chirurgiens cardiaques. Elle consiste à implanter la valve à l'aide d'une technique similaire à celle utilisée par cathétérisme cardiaque, en introduisant le matériel par la pointe du cœur, après une ouverture limitée de la paroi thoracique. Elle a été utilisée à Vancouver (Special Access), en Allemagne et en Autriche (étude TRAVERCE), avec des résultats très prometteurs (environ 80 patients inclus). Elle devrait pouvoir être utilisée en France en début d'année 2007 (étude PARTNER, en cours d'approbation). Ces nouvelles techniques d'implantation valvulaire pourraient apporter une solution irremplaçable pour des milliers de patients non opérés, et en nombre croissant avec le vieillissement de la population. De nombreux autres modèles de valve sont à l'étude, avec certains projets très avancés, comme la CoreValve, déjà implantée chez plus de 100 patients. Il ne fait plus aucun doute que ces techniques constitueront dans l'avenir un recours optimal chez les sujets à hauts risques chirurgicaux ou ayant des contre-indications formelles au remplacement valvulaire aortique traditionnel. Figure 3. Implantation de la bioprothèse par voie rétrograde. La bioprothèse est avancée sur le guide rigide, poussée par le cathéter Rétro-Flex (A), positionnée au centre de la valve native (B) et larguée sous stimulation rapide (C). Vue de la bioprothèse en place (D). Résultats angiographiques : absence de fuite paravalvulaire (E) et hémodynamique : disparition du gradient transvalvulaire (F).

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