Insuffisance cardiaque
Publié le 23 jan 2007Lecture 4 min
Le sport chez l'insuffisant cardiaque : est-ce bien raisonnable ?
F. CARRÉ, Explorations fonctionnelles, hôpital Pontchaillou, Rennes
L’insuffisance cardiaque (IC) peut être définie comme l’incapacité du cœur à répondre à la demande des tissus, ce qui induit une fatigue et/ou une dyspnée d’effort ou de repos. Ces symptômes, qui limitent en eux-mêmes l’activité physique, peuvent être en partie à l’origine d’un cercle vicieux qui aboutit au déconditionnement physique du patient. Pour limiter la participation périphérique au syndrome d’IC, une activité physique régulière d’intensité modérée et individuellement adaptée doit être prescrite. Les effets bénéfiques d’une telle pratique sont en effet bien reconnus.
D'après le Larousse universel, le sport est défini comme l’ensemble des exercices physiques présentés sous forme de jeux individuels et collectifs pratiqués en observant certaines règles précises. Les notions d’intensité élevée et de compétition ne sont donc pas obligatoirement associées à la pratique sportive. C’est ici que le mot raisonnable, c’est-à-dire suffisant sans excès, revêt toute son importance.
L’autorisation d’une pratique sportive par un insuffisant cardiaque oblige à se poser d’emblée deux questions :
• une dysfonction ventriculaire gauche débutante peut-elle être aggravée par cette pratique ?
• en cas de dysfonction ventriculaire gauche affirmée, cette pratique peut-elle induire des complications à type de poussées aiguës, d’arythmie, d’aggravation d’une fuite mitrale ou d’une hypertension pulmonaire ?
Hormis la notion qu’un entraînement « intense » ne s’accompagne pas d’altération de la dysfonction ventriculaire gauche, force est de constater que l’analyse de la littérature apporte peu de réponses aux autres questions.
Adaptations cardiorespiratoires à l’exercice de l’insuffisant cardiaque
Les adaptations à l’exercice de l’insuffisant cardiaque diffèrent de celles du sujet sain et ce, d’autant plus que la pathologie est sévère. L’hyperventilation à l’effort de l’IC est basée essentiellement sur une augmentation de la fréquence respiratoire, ce qui majore son espace mort et limite son efficacité. Une réserve ventilatoire persiste cependant à l’effort maximal. Les adaptations cardiovasculaires diffèrent aussi de celles du sujet sain (schéma) et ce, d’autant plus que la pathologie est sévère.
Schéma des adaptations cardiovasculaires à l’exercice maximal de l’insuffisant cardiaque : comparaison avec un sujet sain apparié pour l’âge.
Le bilan de non-contre-indication à la pratique d’un sport
L’interrogatoire, outre la pathologie en cause, le traitement en cours et la symptomatologie fonctionnelle en particulier à l’effort, précisera le passé sportif et le désir actuel de pratique (goûts, motivation, niveau technique éventuel).
L’examen physique ne se limitera pas à l’appareil cardiovasculaire mais évaluera aussi l’état ostéoligamentaire, aidé si besoin par un avis spécialisé.
Un électrocardiogramme (ECG) et une échographie cardiaque de repos, avec analyse des fonctions systoliques et diastoliques ventriculaires gauche et droite, étant donné le rôle important des cavités droites dans les adaptations à l’effort, sont bien sûr indispensables. De plus, connaissant les limites des données cliniques et échographiques de repos pour préciser les capacités d’effort de l’IC, une évaluation à l’effort est obligatoire. Les capacités individuelles et la tolérance myocardique (contractile, ischémique, hémodynamique, arythmique, etc.) à l’effort doivent être appréciées lors d’une épreuve d’effort limitée par les symptômes avec analyse des échanges gazeux. La place de l’échocardiographie d’effort, dans ce contexte, reste encore à préciser. En cas d’arythmie notable, la réalisation d’un enregistrement Holter est justifiée.
Outre l’équilibre thérapeutique du patient, l’ensemble de ce bilan permettra d’évaluer précisément la gravité de la maladie et la capacité physique individuelle chiffrée en METs. Les contre-indications à la pratique sportive par un IC sont résumées dans le tableau 1. La capacité physique individuelle aide à sérier les activités sportives réalisables par le patient (tableau 2).
Bien que non scientifiquement validée, une capacité de 5 METs, semble la limite minimale requise pour autoriser une pratique sportive à un patient insuffisant cardiaque.
L’utilisation de ces équivalences (tableau 2) impose des précautions essentielles :
• le coût énergétique équivalent au sport considéré a été évalué chez des sujets sains avec un bon niveau technique ;
• l’intensité d’un effort correspondant à la puissance maximale donc à la consommation maximale d’oxygène peut être maintenue pendant quelques minutes (4 à 6 minutes chez le sujet sain) ;
• les valeurs maximales rapportées correspondent à une pratique intense du sport considéré, cette intensité étant modulable. La non-contre-indication d’une pratique sportive par un insuffisant cardiaque devra toujours tenir compte de l’ensemble de ces paramètres.
Quel sport autoriser à quel insuffisant cardiaque ?
Les sports sont classés en fonction de leurs composantes statique et dynamique. Cette classification classique très utile présente cependant des limites à connaître. En effet, des facteurs comme l’intensité et la durée de l’effort, l’environnement (altitude, température), le niveau technique et la motivation, qui modifient les adaptations cardiovasculaires, doivent toujours être évalués afin d’établir un « profil sportif » individuel de l’insuffisant cardiaque.
En dehors de quelques exceptions (tableau 3), la pratique du sport en compétition par l’insuffisant cardiaque n’est pas autorisé. Les autres recommandations générales sont résumées dans le tableau 4. Le tableau 5 propose des sports qui peuvent raisonnablement être autorisés en loisir à l’insuffisant cardiaque.
En pratique
La pratique d’une activité physique régulière d’intensité modérée privilégiant l’endurance en environnement favorable et la musculation légère doit toujours être encouragée chez l’insuffisant cardiaque.
Le sport n’est pas synonyme de compétition ni de performance, ainsi la pratique d’un sport de loisir adapté à ses capacités physique et technique peut être autorisée chez un insuffisant cardiaque. Le patient devra toujours être spécifiquement éduqué sur les bonnes pratiques de l’activité sportive La pratique d’un sport en compétition par un insuffisant cardiaque reste en revanche une exception.
De nombreuses questions, concernant en particulier l’éventuel facteur aggravant de la pratique sportive intensive sur une insuffisance cardiaque débutante, restent cependant posées.
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