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Cardiologie générale

Publié le 09 fév 2016Lecture 8 min

Syndrome d’apnées obstructives du sommeil de l’enfant - Les critères diagnostiques

N. BEYDON, Unité fonctionnelle d’exploration fonctionnelle respiratoire et du sommeil, hôpitaux universitaires Est Parisien (AP-HP), hôpital Armand-Trousseau, Paris

Le syndrome d’apnées obstructives du sommeil (SAOS) de l’enfant est une pathologie respiratoire du sommeil durant laquelle la ventilation est perturbée, voire le sommeil modifié, du fait d’obstructions partielles ou totales suffisamment prolongées et fréquentes des voies aériennes supérieures. Bien qu’existant aussi chez l’adulte, le SAOS répond à des critères diagnostiques spécifiques chez l’enfant, avec une présentation clinique et des altérations du sommeil qui lui sont propres.

Populations concernées   Il est classique de distinguer 3 profils différents d’enfants susceptibles d’avoir un SAOS en fonction des pathologies associées au SAOS : - l’obstacle ORL chez un enfant « sain par ailleurs » : typiquement, il s’agit d’une hypertrophie des amygdales (tonsilles) palatines ; - l’obésité ; - les pathologies avec malformation crânio-faciale (trisomie 21, achondroplasie, Pierre Robin, Crouzon, etc.), hypotonie musculaire (maladie neuromusculaire), maladie respiratoire chronique, laryngomalacie, drépanocytose et autres maladies métaboliques. L’interrogatoire à la recherche de troubles du sommeil doit être systématique chez les enfants porteurs de pathologies fréquemment associées à un SAOS, mais tous les enfants sont susceptibles d’avoir un SAOS à un moment de leur développement et son dépistage ne se conçoit pas sans des éléments d’orientation d’interrogatoire et un minimum d’examen clinique. Le pic de fréquence du SAOS par hypertrophie amygdalienne se situant entre 3 et 8 ans, il ne faut pas oublier de questionner les parents sur le sommeil de leur enfant durant cette période, tout en recherchant des éléments d’orientation clinique.   Signes et symptômes cliniques   On peut distinguer les signes nocturnes et diurnes directement en rapport avec l’obstruction des voies aériennes et les symptômes nocturnes et diurnes en rapport avec la mauvaise qualité de sommeil. Signes nocturnes D’abord les signes purement nocturnes. On doit rechercher en premier la triade évocatrice : ronflements, respiration laborieuse, irrégularités respiratoires ou apnées. Les ronflements ne signent pas le SAOS, mais c’est un des signes majeurs souvent spontanément rapportés par les parents. La fréquence du ronflement habituel (≥ 3 nuits/semaine) chez l’enfant est de l’ordre de 10 % alors que celle du SAOS est comprise entre 1 et 4 % : ce sont donc les signes associés qui doivent faire pencher la balance du côté du ronflement isolé (« ronfleur simple ») ou du ronflement probablement associé à un SAOS. Les autres signes (respiration laborieuse et pauses ou apnées) doivent être recherchés soigneusement en reformulant souvent les questions pour s’assurer d’une bonne compréhension, sans en influencer la réponse. En effet, ces signes sont constatés par l’entourage et ils le seront d’autant plus qu’ils sont fréquents pendant le sommeil. Leur absence de repérage ne les exclut pas formellement. On notera les circonstances dans lesquelles ces signes ont été relevés (enfant qui dort régulièrement avec ses parents, signes notés à l’occasion de conditions de couchage inhabituelles – vacances – ou régulières). Les positions anormales sont essentiellement l’hyper-extension du cou ou l’enfant qui dort au sommet d’une montagne d’oreillers, coussins, peluches, etc. Le sommeil est agité car l’enfant cherche la position qui lui assure une meilleure perméa bilité des VAS. Cette agitation peut aller jusqu’au réveil de l’enfant. L’hypersudation (ou diaphorèse) doit être franche et ne pas être localisée à la tête. Il faut encourager les parents à filmer leur enfant dormant, si possible torse nu. La technologie actuelle rend cela très facile. Les autres signes d’obstruction des VAS peuvent être diurnes ou nocturnes et sont essentiellement représentés par l’obstruction nasale chronique chez un enfant respirant par la bouche tout le temps ou seulement la nuit. Les raisons de cette rhinite peuvent être multiples (allergique, infectieuse), mais lorsqu’à l’examen endo-buccal on retrouve un palais haut (ogival) une participation osseuse est probable. Symptômes diurnes La qualité du sommeil perturbée peut entraîner énurésie, parasomnie, bruxisme, mais la fatigue peut retentir sur le comportement de l’enfant pendant la journée. Ainsi, à l’opposé de l’adulte qui a souvent comme symptôme diurne majeur la somnolence, l’enfant est plutôt agité, peu concentré, irritable. Il est très important de se renseigner sur la plainte de l’entourage (personnel de garderie/crèche, enseignants, etc.) en sus de celle des parents dont le ressenti peut être largement faussé par une attitude éducative extrême (dans les deux sens). La simple observation prolongée de l’enfant pendant l’interrogatoire des parents, ainsi que son comportement lors de l’examen clinique permettent aussi de se faire une bonne idée du comportement de l’enfant. La respiration buccale a des conséquences propres avec déglutition primaire, hypotonie des muscles faciaux, pharyngés et du cou faciles à repérer. On n’oubliera pas d’examiner la courbe staturo-pondérale qui s’infléchit lors des SAOS sévères, à la fois par réduction spontanée des apports et augmentation de la dépense énergétique pour assurer une ventilation nocturne contre l’obstacle des VAS, mais aussi par perturbation des sécrétions endocriniennes nocturnes. Des questionnaires de dépistage ont été élaborés dont la valeur prédictive négative toujours bonne est bien supérieure à la valeur prédictive positive, ne permettant finalement pas beaucoup d’améliorer la décision clinique à l’issue d’une consultation. Par ailleurs, des critères cliniques de SAOS chez l’enfant sont proposés dans le rapport technique de la Haute Autorité de santé en 2012 et montrés dans l’encadré 1. Enregistrement du sommeil   L’enregistrement du sommeil de l’enfant doit s’effectuer avec du matériel de taille adaptée à celle de l’enfant, avec des contraintes liées à l’âge de l’enfant (présence d’un parent pour rassurer l’enfant…). Les enregistrements de jour (siestes) sont possibles pour les nouveau-nés et les jeunes nourrissons jusqu’à 6 mois-1 an, sous réserve qu’il comporte 2 cycles de sommeil (soit environ 120 minutes de sommeil) dont du sommeil paradoxal. Dans ces conditions, en cas de discordance entre le tracé de sieste et le contexte clinique après l’âge de 6 mois, un contrôle de nuit est souhaitable. Pour le diagnostic de SAOS de l’enfant, l’analyse des signaux de polygraphie ventilatoire (PV) est primordiale, mais seule la polysomnographie (PSG, qui ajoute à la PV l’analyse électro-encéphalographique du sommeil) permet l’analyse complète des événements respiratoires et reste l’examen de référence. Il est souhaité a priori un enregistrement de PSG mais admis que dans des centres ayant l’habitude des enregistrements pédiatriques, en cas d’impossibilité d’installer une PSG, on se contente d’un enregistrement PV. La PV enregistre au moins 5 types de signaux cardio-respiratoires différents (encadré 2), enregistrement auquel s’ajoutent l’électroencéphalogramme, l’électro-oculogramme et l’électromyogramme mentonnier dans la PSG qui permettront l’analyse complète du sommeil (figure). De façon non obligatoire, on peut s’aider d’une caméra infrarouge, en particulier en cas de parasomnies ou autre troubles moteurs du sommeil rapportés, de capteurs électromyographiques jambiers en cas de suspicion de mouvements périodiques de jambes (avec ou sans syndrome de jambes sans repos clinique). Figure. Installation pour une polysomnographie (l’électrode de PtcCO2 est placée lors du coucher de l’enfant). Cotation des événements respiratoires   Il n’y a pas, contrairement à l’étude du sommeil du patient adulte, de recommandations françaises pour l’interprétation des tracés de sommeil pédiatriques. La plupart des centres utilisent les recommandations américaines, récemment mises à jour pour l’enfant. On retiendra dans ces recommandations les définitions des événements les plus courants : - durée d’un événement respiratoire = 2 cycles respiratoires ; - apnée = absence ou diminution d’au moins 90 % du signal quantitatif de débit aérien ; - apnée obstructive = apnée accompagnée de signaux d’efforts respiratoires ; - apnée centrale = apnée sans signaux d’efforts respiratoires ; - apnée mixte = association au sein d’une apnée d’une période sans et d’une période avec efforts respiratoires ; - hypopnée obstructive = diminution d’au moins 30 % du signal de débit aérien sans diminution importante des signaux d’efforts respiratoires, associée à un micro - éveil cortical ou un éveil, et/ou à une désaturation d’au moins 3 points. Les index horaires d’apnées-hypopnées obstructives (IAHO) sont les critères du SAOS (encadré 3). L’interprétation des index d’apnées-hypopnées est modulée par le médecin du sommeil en fonction d’autres informations telles que : l’index de désaturation (normal < 1,5 souvent considéré pathologique > 2,4) ; l’index de ronflements ; la présence de périodes de limitation du débit (sans réelle hypopnée) associées à des ronflements et à une respiration paradoxale, en faveur d’un syndrome de haute résistance ; la désorganisation éventuelle de la structure du sommeil. Certains laboratoires considèrent les diminutions du débit > 50 %, mais sans éveil ou désaturation comme des événements respiratoires (comme dans les recommandations françaises pour l’adulte) qui sont alors additionnés aux événements de l’IAHO pour rendre un index d’événements respiratoires obstructifs. Il est à noter que la PV rend la cotation des hypopnées non désaturantes difficiles, puisque les microéveils corticaux ne sont pas détectables en l’absence d’EEG, et les éveils seulement supposés. Dans certains cas, il peut être utile devant un grand nombre de diminutions de débit sans désaturation de compléter la PV par une PSG pour mieux évaluer l’IAHO. Enfin, le temps de sommeil est moins précisément évalué par la PV (surveillance d’un tiers indispensable) et selon l’importance de l’erreur faite, les index peuvent s’en trouver plus ou moins mal évalués.   En conclusion   Le contexte clinique et l’examen clinique orientent déjà le diagnostic de SAOS chez l’enfant. L’enregistrement poly(somno)- graphique du sommeil permet une quantification du SAOS en sachant qu’il n’y a pas de parallélisme stricte entre IAHO et importance des signes et symptômes retrouvés chez l’enfant. La PSG est l’examen de référence et la PV est réservée à des centres habitués aux tracés pédiatriques. Toute discordance d’un résultat de PV avec la clinique doit être contrôlée par une PSG. Les tracés de sieste sont réservés aux jeunes nourrissons et doivent être contrôlés par un tracé de nuit en cas de résultat discordant avec la clinique. Pour en savoir plus : • Rapport d’évaluation technologique. Place et conditions de réalisation de la polysomnographie et de la polygraphie respiratoire dans les troubles du sommeil. HAS, mai 2012 : www.has-sante.fr • Recommandations pour la pratique clinique du syndrome d’apnées-hypopnées obstructives du sommeil de l’adulte. Société de pneumologie de langue française. Rev Mal Respir 2010 ; 27 : S166- S178. • Berry RB et al.; American Academy of Sleep Medicine. Rules for scoring respiratory events in sleep: update of the 2007 AASM Manual for the Scoring of Sleep and Associated Events. Deliberations of the Sleep Apnea Definitions Task Force of the American Academy of Sleep Medicine. J Clin Sleep Med 2012 ; 8 : 597-619. "Publié dans Pédiatrie Pratique"

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