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Coronaires

Publié le 15 déc 2016Lecture 7 min

Quelle durée des AAP dans le SCA à haut risque ?

P. SABOURET, Hôpital de la Pitié-Salpêtrière, Paris


CNCF
Cette session, illustrée par des cas cliniques interactifs, a permis de souligner les nouvelles avancées dans la prise en charge des patients coronariens à la phase aiguë et lors du suivi à long terme (au-delà de 12 mois).

Recommandations François Roubille a rappelé que les recommandations européennes récentes sur le choix des antithrombotiques et de leur durée, offrent de nombreuses options. Quels médicaments ? L’aspirine demeure la pierre angulaire du traitement, avec une dose de charge initiale de 150 à 300 mg et une dose d’entretien à 75-100 mg par jour indéfiniment (classe I,A), et la bithérapie antiagrégante plaquettaire (DAPT : Dual AntiPlatelet Treatment) celle de la prise en charge des SCA (syndromes coronariens aigus). L’association à un inhibiteur des récepteurs P2Y12 (P2Y12i) pour une durée optimale de 1 an au décours du SCA, reste également un des éléments clés en raison des bénéfices démontrés lors des études CURE, TRITON-TIMI 38 et PLATO (classe I,A). Le choix des inhibiteurs des récepteurs des P2Y12 doit se porter sur les nouvelles molécules selon les recommandations européennes. Ainsi, le ticagrelor est recommandé en première ligne à la dose de charge de 180 mg, avec une dose d’entretien de 90 mg x 2 par jour, pour un large spectre de patients (patients avec PCI, ou traités médicalement, ou bien encore pontés) présentant un STEMI, ou NSTEMI à risque intermédiaire ou élevé) (classe I,B). Le ticagrelor est donc indiqué préférentiellement au clopidogrel pour des profils de patients et des situations cliniques larges et variées. Le prasugrel est également indiqué, à la dose de charge de 60 mg avec dose d’entretien de 10 mg par jour, mais uniquement chez les patients dont l’anatomie coronaire est connue, et pour lesquels une revascularisation coronaire percutanée (PCI : Percutaneous Coronary Intervention) a été réalisée, sans qu’il y ait eu préalablement une dose de charge de clopidogrel. Le clopidogrel est maintenant mis en deuxième ligne, à la dose de charge de 300 à 600 mg, suivi d’une dose d’entretien de 75 mg par jour. La place du vorapaxar, qui présente une action antithrombinique spécifique, n’est pas encore précisée dans les recommandations européennes, bien qu’il ait été évalué dans deux grandes études randomisées (TRACER et TRA-2P). Quelle durée ? (tableau, figure 1) Figure 1. De nombreux essais sur la durée optimale du traitement antiplaquettaire. L’élément plus récent est la possibilité de raccourcir la durée de la DAPT de 3 à 6 mois, avec les stents de 2e génération, chez des patients dont le risque hémorragique est élevé. Les données des études PRODIGY, REAL-LATE, ZEST LATE et EXCELLENT ont montré la possibilité de raccourcir la durée de la bithérapie, avec un taux d’événements hémorragiques moindres et un taux d’événements ischémiques similaires par rapport à la prolongation de la DAPT. Ces résultats en apparence séduisants sont cependant confrontés à des limites méthodologiques importantes : manque de puissance statistique pour démontrer une différence sur les événements ischémiques entre les groupes randomisés, inclusion d’un grand nombre de patients coronariens stables avec PCI programmée (20 à 25 % de l’effectif), situation où la durée recommandée est de 1 mois et non pas d’un an, effets de drop-in et de drop-out des patients, favorisant l’hypothèse de non-infériorité du raccourcissement de durée de la bithérapie antiagrégante plaquettaire que ces études s’attachaient à démontrer. Par conséquent, l’enseignement de ces essais est que la durée de la bithérapie peut être raccourcie avec un risque ischémique acceptable en cas d’hémorragie grave, et/ou d’intervention chirurgicale urgente, si les patients ont bénéficié des stents de dernière génération lors du SCA. L’emploi des anti-GPIIb IIIa est actuellement limité aux situations de bail-out. Le cangrelor trouve sa place pour les patients avec PCI, n’ayant pas reçu d’autres P2Y12 inhibiteurs. Il est utilisé en « off label » lors de situations complexes périopératoires, en raison de sa disponibilité en perfusion intra-veineuse avec un délai d’action rapide, et une disparition de l’effet tout aussi rapide avant une intervention chirurgicale à risque hémorragique élevé. La prolongation de la DAPT au-delà d’un an est proposée (IIb,A) sur la base de l’étude PEGASUS a démontré les bénéfices du ticagrelor à 90 et 60 mg x 2 par jour sur le long terme, notamment pour les patients diabétiques, polyartériels (présentant une artériopathie des MI), les patients ayant une atteinte coronarienne diffuse et/ou une atteinte du tronc commun gauche (sur la base notamment des données de l’étude PRODIGY, alors que celle-ci visait plutôt à raccourcir la bithérapie antiagrégante plaquettaire), mais aussi pour des patients pour lesquels le rapport bénéfices-risques de la poursuite de la bithérapie antiagrégante plaquettaire semblait plus incertain, tels que les patients insuffisants rénaux ou encore ceux âgés de plus de 75 ans. La prudence s’impose concernant le grand âge (> 85 ans) pour lequel une évaluation individuelle minutieuse tenant du contexte global s’avère fondamentale avant la prise de décision d’une poursuite ou non de la DAPT. Les données des registres scandinaves, notamment SWED-HEART, montrent un bénéfice à la prolongation de la bithérapie aspirine-ticagrelor en vie réelle, confortant les bénéfices observés dans les études randomisées. L’observance au fil du temps La persistance de la bithérapie est un véritable problème en pratique clinique, puisque des données françaises récentes montrent un non-renouvellement des traitements en pharmacie chez 18 à 21 % des patients à 1 mois, avec une deuxième érosion des renouvellements à 6 mois, puis 9 mois, soulignant l’importance d’une bonne coordination entre les différents acteurs du parcours de soins (cardiologues interventionnels, pharmaciens, cardiologues assurant le suivi ambulatoire, et bien évidemment le médecin traitant, dont le rôle de coordinateur est crucial), et une amélioration de l’éducation des patients coronariens. Anne BELLEMAIN a notamment rappelé que le registre américain PARIS soulignait les dangers ischémiques d’un arrêt prématuré et intempestif de la bithérapie antiagrégante, notamment le premier mois. Ces données avaient été confortées par un autre registre, publié par Rossini et Angiolillo, qui retrouvait une augmentation significative des événements cardiovasculaires, notamment lors de l’arrêt de la DAPT à 1, 3 et 6 mois de suivi post-SCA. Les patients les plus à risque de mauvaise observance de la DAPT sont malheureusement les patients également les plus à risque sur le plan ischémique : patients plus âgés, ayant une atteinte coronarienne diffuse, ou associée à une AOMI, de bas niveau socio-culturel, ne bénéficiant pas d’un suivi par un cardiologue, n’ayant pas reçu de documents écrits sur la maladie, l’importance de l’observance, et de fiches-patients. Le parcours de soins est fondamental pour une bonne observance, avec notamment le premier mois, la gestion des « nuisance bleeding » observés chez 15 % des patients, quel que soit l’inhibiteur des P2Y12 utilisé, et qui s’accompagne d’un arrêt intempestif (sans contact téléphonique avec le médecin) de la bithérapie chez près de 80 % des patients concernés. L’étude PEGASUS a démontré l’intérêt de la prolongation de la bithérapie aspirine-ticagrelor au-delà d’un an chez des patients coronariens stables versus l’aspirine seule (figure 2). Figure 2. PEGASUS : décès cardiovasculaires dans la population diabétique. On observe une réduction significative des IDM non seulement au niveau des coronaires revascularisées lors du SCA, mais aussi sur les autres territoires coronaires. Une réduction des AVC ischémiques est également constatée sous aspirine-ticagrelor, ce qui montre que l’athérothrombose est diffuse et que la stratégie antiagrégante apporte des bénéfices bien au-delà de l’artère coronaire stentée. Il n’existe pas d’excès d’hémorragies fatales ni d’hémorragies intracrâniennes dans le groupe aspirine-ticagrelor, confortant la sécurité d’emploi de l’association au long cours. La durée de la bithérapie antiagrégante est donc personnalisée, basée sur les situations cliniques (syndrome coronarien aigu ou revascularisation coronaire percutanée programmée), les caractéristiques des patients (atteinte coronaire diffuse, patient polyvasculaire et/ou diabétique, insuffisants rénaux, etc.), mais aussi du type de stents choisi, notamment avec l’emploi des stents de dernière génération, qui présentent un intérêt certain lorsque la durée de la bithérapie doit être raccourcie, en raison d’un événement intercurrent nécessitant son arrêt transitoire ou définitif (intervention chirurgicale urgente, hémorragie majeure, etc.) (figure 3). Des études sont en cours pour optimiser la prise en charge des patients coronariens, afin de raccourcir la bithérapie (étude TWI-LIGHT, GLOBAL LEADERS, etc.), et de définir la stratégie optimale chez les patients coronariens qui ont une fibrillation atriale (études REDUAL-PCI et ENTRUST). Figure 3. Durée optimale de la bithérapie AAP : synthèse. En pratique Il n’y a plus de raison de préférer un stent nu en cas d’impossibilité de traitement antiplaquettaire prolongé. Chez un patient qui va bien à 12 mois, si le risque hémorragique est faible, discuter la prolongation de la DAPT. Si un événement est survenu avant 12 mois (ischémique ou hémorragique), l’option de la durée de la DAPT est simplifiée. Si le risque hémorragique est fort ou si une interruption est souhaitable (procédure intercurrente, saignements mineurs), c’est devenu possible. Il y a TOUJOURS un risque thrombotique à l’arrêt du traitement, même après 30 mois… Les résultats obtenus avec les inhibiteurs des P2Y12 ne sont pas homogènes (CHARISMA, DAPT, PEGASUS). Les analyses de sous-groupes (polyartériels, diabétiques) permettent d’affiner la stratégie. Appliquer les données récentes en pratique clinique quotidienne (inertie, résistance aux changements) : difficile mais POSSIBLE +++. Rôle pivot du cardiologue (M1, M6, M12 et au-delà). D’après les communications de F. ROUBILLE (Montpellier), A. BELLEMAIN (Antibes) et P. SABOURET (Paris), lors d’un symposium AstraZeneca

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