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Cardiologie générale

Publié le 22 nov 2005Lecture 5 min

Attitude pratique devant une hypertrophie gauche ventriculaire chez un sportif

A. OBLAK, hôpital européen Georges Pompidou, Paris

Chez le sportif, il est habituel de constater une augmentation de l’épaisseur pariétale du ventricule gauche (VG) et/ou une dilatation cavitaire. Il peut alors parfois se poser le diagnostic différentiel avec une cardiomyopathie hypertrophique (CMH) ou dilatée (CMD). Distinguer dans ce cas une hypertrophie ventriculaire gauche (HVG) physiologique d’une HVG pathologique est essentiel puisque la CMH est la principale cause de mort subite chez l’athlète. L’apport de l’échocardiographie est précieux car il va permettre de préciser le diagnostic en visualisant toutes les structures cardiaques. Un interrogatoire minutieux et une bonne connaissance de la discipline vont également contribuer à orienter le diagnostic.

Attention aux pièges - Se méfiez de soi si l’on est l’échographiste ! En effet, la mesure d’un faux tendon ou d’une bandelette peut, à tort, faire croire à une HVG pathologique. - Ne pas hésiter non plus à refaire les mesures (en BD et en TM) et s’astreindre à rechercher la meilleure incidence pour mesurer le diamètre télédiastolique du VG (DTDVG), en se positionnant avec la sonde un espace au-dessus (figure 1). A. Surestimation à tort de l’épaisseur septale. B. Une fenêtre échographique réalisée un espace plus haut permet de distinguer une bandelette et de ne pas porter le diagnostic d’hypertrophie septale. Figure 1. Faux tendon. - Se méfier du « tout sportif peut avoir des modifications de la morphologie cardiaque » ! Exiger un entraînement d’au moins dix heures hebdomadaires. Une fois le diagnostic d’HVG posé, l’échographiste va commencer son examen à la recherche d’autres éléments qui l’orienteront vers une HVG pathologique ou physiologique.   Rappels de la définition de l’HVG pathologique La CMH se caractérise par une hypertrophie ventriculaire gauche et/ou droite, généralement asymétrique, touchant le septum interventriculaire. Un rapport des épaisseurs du septum sur paroi postérieure Ž 1,3 aurait une sensibilité et une spécificité > 90 % pour le diagnostic. L’épaisseur seuil considérée comme pathologique d’une forme sporadique est de 15 mm et de 13 mm en cas de forme familiale. Le volume ventriculaire est normal ou réduit. Un gradient systolique intraventriculaire est fréquent, avec une obstruction sous aortique ou médioventriculaire. La spécificité de la présence d’un mouvement systolique antérieur d’un feuillet valvulaire serait > 97 % pour le diagnostic de CMH. Des anomalies de structure mitrale seraient présentes dans plus de 50 % des cas. En cas de CMH non obstructive, la fonction systolique est généralement normale, ou altérée en cas de CMH évoluée..   Différences échographiques entre HVG pathologique et HVG physiologique   Hypertrophie VG/dilatation VG Dans la CMH, l’hétérogénéité génétique explique l’hétérogénéité clinique, et notamment la variation de l’épaisseur pariétale. Une épaisseur > 15 mm au niveau du septum postérieur ou de la paroi libre est considérée comme un des critères majeurs de CMH. La distribution de l’hypertrophie est souvent hétérogène. Chez le sportif, l’épaisseur pariétale dépasse rarement 15 mm, a une distribution homogène et est associée à un DTDVG > 55 mm. Dans la CMH, le DTDVG n’excède 55 mm que chez des patients hautement symptomatiques avec dysfonction systolique. Dans les autres cas, il est en général < 45 mm.   Effet de l’arrêt de l’activité sportive Il existe une réduction de l’épaisseur pariétale du VG après arrêt transitoire de l’entraînement lorsque l’HVG est physiologique. Six athlètes ayant participé aux jeux de Séoul en 1988 ont ainsi été évalués avant et après une période de 13 semaines d’arrêt de l’activité sportive  : l’épaisseur du septum interventriculaire (SIV) passait de 13,8 mm au maximum à 10,5 mm. Quarante athlètes hommes présentant au cours de leur activité une épaisseur pariétale de 13 mm et une dilatation cavitaire > 60 mm ont été suivis après avoir arrêté l’entraînement 5 ans en moyenne : 22 % ont gardé un VG dilaté, mais tous ont récupéré une épaisseur pariétale normale. Même si aucun de ces athlètes n’a présenté de symptôme clinique d’insuffisance cardiaque, on ne peut pas préjuger de l’absence d’évolution à plus long terme vers la CMD. En pratique, il faut souligner la difficulté d’obtenir un arrêt prolongé (environ 3 mois) du sport afin de vérifier si l’hypertrophie se modifie.   Fonctions systolique et diastolique VG Le sportif garde une fonction VG systolique normale, voire légèrement abaissée. Une échographie cardiaque d’effort normale rend compte de la contractilité intrinsèque normale du VG. Dans la CMH, la FEVG est également conservée : la dysfonction systolique étant associée à une CMH évoluée. La fonction diastolique est normale chez le sportif avec une grande onde E diastolique en doppler pulsé. En cas d’HVG associée, un rapport E/A inversé doit faire suspecter une HVG pathologique. Dans la CMH, tous les profils de flux mitral peuvent se voir, ne préjugeant pas de la valeur des pressions de remplissages du VG. Oreillette gauche Elle est dilatée dans la CMH, son mécanisme n’est pas clairement connu. Plusieurs causes ont été évoquées : l’insuffisance mitrale, l’anomalie de compliance, et le gradient d’obstruction intra-VG. DTI tissulaire pulsé et couleur En DTI pulsé, une vitesse de l’onde systolique S à l’anneau (moyenne des 4 sites) < 9 cm/s a une spécificité de 97 % et une sensibilité de 87 % pour le diagnostic d’hypertrophie pathologique. La présence d’une onde E < 9cm/s a également une spécificité de 97 % et une sensibilité de 73 % pour ce diagnostic. Il existe chez le sportif un gradient de vélocité comparable au sujet normal malgré la présence de l’hypertrophie, alors que dans la CMH, le gradient physiologique de vitesse entre l’endocarde et l’épicarde n’est plus retrouvé. Une étude chez 158 sujets répartis en plusieurs groupes (HVG primitive, HVG secondaire à un entraînement sportif intense, HVG secondaire à une HTA) a montré que le gradient était abaissé en cas de CMH : un gradient transmural de vitesse inférieur ou égal à 7 cm/s lors du remplissage rapide permettait de distinguer une HVG pathologique de l’HVG des athlètes avec une sensibilité de 96 % et une spécificité de 95 %. D’autres travaux ont confirmé l’existence de profils différents en doppler couleur tissulaire pour différencier ces deux types d’HVG. Les principales différences entre HVG pathologique et physiologique sont rapportées dans le tableau. En conclusion   Toujours s’assurer de l’exactitude des mesures échographiques réalisées : les faux diagnostics d’hypertrophie sont fréquents. Une épaisseur pariétale de plus de 15 mm chez l’athlète homme et de plus de 13 mm chez l’athlète femme reste rare et doit faire rechercher d’autres critères de CMH. Un diamètre de plus de 55 mm associé à une hypertrophie pariétale comprise entre 13 et 15 mm est plus en faveur d’une HVG physiologique. Une FEVG modérément abaissée chez l’athlète doit faire réaliser une ETT d’effort. L’évaluation après arrêt de tout entraînement de plus de 3 mois est difficile à obtenir mais peut s’avérer utile pour constater une régression de l’HVG chez le sportif. Un rapport E/A inversé est très suspect d’une HVG pathologique chez le sportif de haut niveau. Des vitesses de l’onde systolique S à l’anneau (moyenne des 4 sites) inférieure à 9 cm/s et de l’onde E < 9cm/s sont en faveur d’une HVG pathologique.

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