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Échocardiographie

Publié le 12 jan 2010Lecture 7 min

Évaluation de l'hypertrophie ventriculaire gauche : qu'attendre de l'échocardiographie ?

F. RAOUX, Centre chirurgical Marie Lannelongue, Le Plessis Robinson

L’échocardiographie est devenue la méthode de référence pour la détermination de la masse myocardique et de la présence ou non d’une hypertrophie ventriculaire gauche. En effet, la sensibilité et spécificité de dépistage de l’hypertrophie ventriculaire par cette méthode sont bien supérieures à celles de l’électrocardiogramme(1). Les premières comparaisons entre la masse myocardique et les mesures échocardiographiques passaient par la mesure du poids du VG post mortem et les mesures TM du ventricule gauche sur les séries autopsiques de Devereux et Reicheik(2 et 3). Ces auteurs ont par ailleurs été les premiers à proposer des modèles mathématiques en confrontant ces données, permettant de déterminer la masse ventriculaire gauche en tenant compte de 3 paramètres indissociables : diamètre télédiastolique du ventricule gauche, épaisseur du septum et épaisseur de la paroi postérieure.

Mesure de la masse ventriculaire gauche Mesures de référence TM La mesure de la masse myocardique passe donc par l’analyse de l’épaisseur pariétale. Quelle que soit la formule utilisée, l’acquisition de ces paramètres échocardiographiques commence par une coupe TM de bonne qualité, notamment après repérage en bidimensionnel (parasternale grand axe « PSGA » ou coupe sous costale (figure 1)), en prenant garde d’éliminer les bandelettes de la valve tricuspide ou d’éventuels faux tendons du VD ou parfois sur le versant septal gauche (faux tendons septo-septal).   Figure 1. Incidence para sternale grand axe (LV ventricule gauche, Ao aorte, LA oreillette gauche, RV ventricule droit, CS sinus coronaire, DA aorte descendante). La coupe parasternale petit axe « PSPA » (figure 1bis a) peut être envisagée en complément de la coupe PSGA, mais ne peux pas la remplacer si la coupe grand axe est impossible du fait d’un mauvais alignement perpendiculaire par rapport aux parois du ventricule gauche (figure 4). Figure 1 bis. a : incidence parasternale petit axe et b : incidence sous costale (RV ventricule gauche, RV ventricule droit). Figure 4. Mesure de l’épaisseur pariétale en coupe TM, sur une incidence para sternale petit axe. La ligne de tir TM doit être perpendiculaire aux parois du VG afin d’éviter d’obtenir un angle de tir surestimant l’épaisseur notamment lors des VG « coudés » ou en rotation anti-horaire (figure 2 et 2 bis). L’utilisation de la voie sous-costale est intéressante chez ces patients présentant un ventricule gauche désaxé. Figure 2. Exemple de tir TM correct (en vert) en para sternal grand axe (à gauche) et para sternal petit axe (à droite).La ligne de tir apparaît bien perpendiculaire aux parois du VG (notez les flèches en blanc correspondant aux limites VG-VD). Figure 2 bis. Mauvais alignement du tir TM, le risque est d’alors sur-estimer l’épaisseur pariétale. Selon Abergel, il existe une corrélation intéressante de l’évaluation de la masse VG entre la coupe traditionnelle PSGA et la coupe sous-costale (figure 1bis b)(5), en respectant bien sur les mêmes précautions de mesures. Le défilement doit être rapide (100 mm/s par exemple) et la fenêtre de tir TM large afin d’assurer la meilleure précision de mesure. La ligne de tir TM doit être à l’extrémité des feuillets de la valve mitrale en position fermée(4). Toutefois, ces mesures sont peu reproductibles, soit parce qu’il y a eu des modifications réelles de la morphologie du VG, soit parce que la mesure elle-même est difficilement reproductible. Il est souhaitable d’effectuer 3 mesures minimum (5 si le patient est en fibrillation auriculaire) et de moyenner ces mesures(4). Par ailleurs, il semble que l’imagerie d’harmonique surestime la masse ventriculaire par rapport à l’imagerie fondamentale. Calcul de la masse ventriculaire selon les différentes conventions On définit les abréviations suivantes : MVG : Masse Ventriculaire Gauche MM : masse myocardique HVG : Hypertrophie Ventriculaire Gauche MMi : Masse Myocardique Indexée à la surface corporelle DIVGd : Diamètre Interne Ventriculaire Gauche télédiastolique SIVd : Épaisseur du Septum Inter Ventriculaire Gauche en diastole PPd : Épaisseur Paroi Postérieure en diastole. DVGdi : Diamètre Ventriculaire Gauche diastolique indexé à la surface corporelle. VG : Ventricule Gauche Il existe 2 conventions validées : Convention de l’ American Society of echocardiography (ASE)(6) : Convention ASE MVG (corrigé) = 0,8 [1,04 (DIVGd + SIVd + PPd)3 - DIVGd3 ] + 0,6 grammes. En appliquant la formule des cubes non corrigés la MVG est surestimée de 20 % par rapport aux mesures autopsiques, ce qui explique le facteur correctif 0,8. La technique de mesure correspond à la position du curseur « bord d’attaque à bord d’attaque » en démarrant les mesures au pied du QRS. C’est la technique la plus utilisée car la plus homogène et précise (figure 3). Figure 3. Exemple de mesure TM PSGA permettent d’évaluer l’épaisseur pariétale (mesure selon la convention ASE en débutant au pied du QRS). Figure 3 bis. Détail de la mesure de l’épaisseur pariétale selon la convention de l’ASE. Convention de Penn(2) : Convention Penn MVG (corrigé) = 1,04 [(DIVGd + SIVd+ PPd)3 - DIVGd3] – 13,6 grammes. Les corrélations anatomiques par rapport aux séries autopsiques sont excellentes malgré le facteur correctif modeste (– 13,6 grammes). Cette fois la mesure est faite au pic de l’onde R et exclus l’endocarde qui sera inclus dans les mesures de diamètre. La plupart du temps les machines d’échocardiographie intègrent automatiquement une formule de calcul de la MMi dans leurs logiciels. Il convient de savoir quelle convention est utilisée par le fabriquant afin d’effectuer les calculs correctement. L’évaluation de la MM en échographie bidimensionnelle reste compliquée, car soumise à des formules complexes. Le plus simple reste la méthode des volumes ventriculaires interne et externes. En assimilant le ventricule gauche à un cylindre hémi ellipsoïdal, on peut obtenir un volume externe correspondant à la planimétrie des contours épicardique et un volume interne correspondant à la planimétrie du contour endocardique. Donc : Vint = 5/6 (Splanint x Lint) V int = volume interne Splanint = Planimétrie des contours endocardiques Lint = longueur du plan de l’anneau mitral jusqu’à la pointe Vext = 5/6 (Splanext x LExt) V ext = volume externe Splanext = Planimétrie des contours épicardiques Lext = Lint-1 (épaisseur de la pointe) La masse myocardique est alors définie par : MM = 1,05 x 5/6 [(Splanext x Lext)-(Splanint x Lint)] Mais cette mesure impose des coupes parfaites notamment pour la planimétrie interne et externe et des repérages des bords épicardiques irréprochables. Cette méthode reste peu utilisable en pratique. Autres mesures La détermination de la MMi ne suffit pas à définir l’hypertrophie ventriculaire gauche. Notamment il faut également apprécier la géométrie ventriculaire afin d’établir avec précision le type d’hypertrophie. La première étape consiste à rechercher une asymétrie de l’épaisseur des parois grâce au rapport SIVd/PPd. Un rapport SIVd/PPd > 1,5 définie une hypertrophie septale asymétrique (figure 5). Figure 5. Exemple d’hypertrophie septale asymétrique touchant le septum ; le rapport SIVd/PPd apparaît très nettement supérieur à 1.5 La deuxième étape est donc la détermination de l’épaisseur relative des parois (h/r), dont la définition dans la littérature varie : 2SIVd/DIVGd ; 2PPd/DIVGd ou SIVd+PPd /DIVGd. • Masse myocardique indexée normale et rapport h/r < 0,45 : masse normale. • Masse myocardique indexée normale et rapport h/r ≥ 0,45 : remodelage concentrique du ventricule gauche. • Masse myocardique indexée augmentée et rapport h/r < 0,45 : hypertrophie excentrique • Masse myocardique indexée augmentée et rapport h/r < 0,45 : hypertrophie concentrique Un autre paramètre vient s’ajouter dans les 2 derniers cas de figure, il s’agit du diamètre ventriculaire gauche télé-diastolique indexé à la surface corporelle (DVGdi) permettant d’apprécier le caractère dilaté ou non de l’hypertrophie. Si le DVGdi < 3,1 : hypertrophie excentrique non dilatée Si le DVGdi > 3,1 : hypertrophie excentrique dilatée Chez l’obèse, on préférera indexer la masse myocardique à la taille(8) afin de ne pas sous-estimer la prévalence de l’HVG en l’indexant à la surface corporelle. Il semble consensuel de proposer chez l’obèse l’évaluation de la masse myocardique par la formule VG/taille 2,7(8,9). Classification de l’hypertrophie ventriculaire gauche Le seuil de la MMi définissant l’hypertrophie reste assez flou. De nombreux auteurs ont proposé différentes valeurs de masse myocardique indexée à la surface corporelle (tableau). Nous avons tendance à appliquer des seuils bas de masse myocardique indexée pour parler d’HVG (MMi 120 g/m2 chez l’homme et 110 g/m2 chez la femme) représentant des mesures intermédiaires entre les différentes méthodes. Par l’indexation de la masse myocardique par la taille 2,7, on parle d’hypertrophie ventriculaire gauche lorsque cette valeur est supérieure à 50 g/m 2,7 chez l’homme et 47 g/m 2,7 chez la femme. Limite du calcul de la MM Il convient de se méfier de certaines limites de quantification liées aux anomalies de la cinétique segmentaire (septum de stimulation, de bloc de branche, séquelle de nécrose, etc.), mais également aux anomalies segmentaires de l’épaisseur pariétale (paroi amincie ou hypertrophie septale localisée) (figure 5). Rappelons également que ces formules de calculs extrapolent un modèle mathématique elliptique, et donc trouvent leurs limites pour des ventricules gauches dilatés (sphériques) ou réduits (cardiomyopathie hypertrophique). Importance de la mesure de la masse myocardique Quelle que soit la méthode d’analyse, l’HVG apparaît comme un facteur de risque indépendant. Le registre Framingham (n) détermine qu’il existe une relation linéaire entre le niveau de MMi et le taux d’événements cardiovasculaires (x 3 chez l’homme et x 4 chez la femme lorsque la MMi > 140 g/m2 par rapport à des valeurs < 90 g/m2). De même l’incidence des AVC suit également cette relation linéaire. Pour Levy(14), lorsque que la MMi > 116 g/m2 chez l”homme le risque cardiovasculaire est multiplié par 3 par rapport à une MMi normale. Il est également admis que la géométrie du VG joue un rôle dans la survenue d’événements cardiovasculaires. Le remodelage concentrique augmente le risque de morbidité cardiovasculaire significativement (x 2 à 3 selon les auteurs(13)) et la mortalité de 3 %. Rappelons que le remodelage concentrique signifie que la MMi reste normale mais là encore le seuil de normalité de la MMi est variable selon les auteurs. En revanche, la plupart des auteurs s’accordent pour dire que la présence d’une HVG concentrique s’accompagne d’un accroissement de la morbi-mortalité cardiovasculaire par rapport à l’HVG excentrique (x 2) ou du simple remodelage concentrique (x7)(15). En pratique La mesure échocardiographique de la MM est bien codifiée et répond à une analyse rigoureuse des parois myocardique en mode TM (coupes perpendiculaires aux parois du VG en PSGA ou sous costale, multiplier les mesures). Ne pas hésiter à renoncer aux acquisitions si l’alignement est impossible. La valeur seuil de la MMi pour définir l’HVG reste difficile à évaluer. L’indexation de la masse myocardique à la taille 2,7 permet d’apprécier au mieux la prévalence de l’HVG chez les gens obèses, en limitant les variations liées au sexe. La masse myocardique ne suffit pas, la détermination de la géométrie ventriculaire gauche (par les rapports h/r, SIVd/ppd, DVGdi…) est fondamentale car directement liée à la prévalence de la morbi-mortalité cardiovasculaire.

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