publicité
Facebook Facebook Facebook Partager

Cardiologie générale

Publié le 08 déc 2009Lecture 9 min

Un siècle de cardiologie - Grandes avancées thérapeutiques

C. RÉGNIER

En 1903, le chirurgien George W. Crile (1864-1943) met au point un protocole de réanimation qui associe :

Histoire mouvementée du massage cardiaque En 1903, le chirurgien George W. Crile (1864-1943) met au point un protocole de réanimation qui associe : – l’intubation trachéale, – ventilation au masque, – des intraveineuses d’adrénaline, - un vêtement gonflable en caoutchouc recouvrant l’abdomen et les membres inférieurs (pour améliorer le retour veineux), – la compression rythmée de l’hémithorax gauche. Sur dix essais, Crile obtient un seul succès définitif. La méthode de Crile – qui inspire les techniques actuelles de réanimation – connaît un certain écho dans les pays anglo-saxons. Jusque dans les années 50, une floraison de techniques et d’appareils destinés à la réanimation générale est proposée ; les manœuvres mécaniques de ventilation artificielle s’efforcent de produire une compression externe des cavités cardiaques. Ces techniques de massage cardiaque à thorax fermé demeurent expérimentales et confinées au laboratoire ; les chirurgiens préfèrent le massage cardiaque à thorax ouvert et les médecins se contentent de la ventilation artificielle (figure 15). Dans la revue Anesthésie Analgésie de décembre 1955, Maurice Cara et Michel Poisvert décrivent la technique du massage cardiaque externe sans en expliquer le mécanisme. L’article passe inaperçu. En juillet 1960 (figure 16), William Kouwenhoven (1886-1975), James Jude et Guy Knickerbocker, chirurgiens de l’hôpital universitaire John Hopkins de Baltimore, édictent les règles techniques et expliquent les fondements théoriques du massage cardiaque externe tel qu’il est pratiqué aujourd’hui. Leur article Closed-chest cardiac massage paru dans le JAMA indique, schéma à l’appui, que les compressions doivent être exercées au rythme de 60 par minute par les deux mains croisées et appliquées sur le sternum. Placé en décubitus dorsal sur un support rigide, le patient a les mains croisées dans le dos ; il est souhaitable de lui poser une canule oropharyngée et de pratiquer le bouche-à-bouche en alternance. Les enfants, dont le thorax est plus souple, sont les premiers à bénéficier de cette nouvelle technique de réanimation cardiaque qui fait rapidement ses preuves. Associé à la ventilation artificielle, à des injections intraveineuses de cardiotoniques, éventuellement à une défibrillation par choc électrique, le massage cardiaque externe par la méthode de Kouwenhoven est réalisé sur 20 patients âgés de 2 mois à 80 ans. Le massage dure entre 1 à 65 minutes. Tous les patients sont réanimés. Dans les années 80, l’équipe de Michaël Rudikoff démontre que le cœur est sensible aux variations de pression intrathoracique provoquées par le massage : la théorie de la pompe thoracique complète celle de Kouwenhoven. Des techniques permettant d’augmenter la compression et la décompression des organes thoraciques sont inventées : insufflation (Chandra, 1981), compression abdominale alternée (Sack, 1992), veste pneumatique thoracique gonflée par intermittence connue sous le nom de vest CPR (Halperin, 1993) ou ventouse thoracique (Cohen, 1993). Aucune de ces innovations ne semble avoir apporté de réel bénéfice de survie chez les patients réanimés. Les stimulateurs cardiaques : histoire de miniaturisations (1930…) En 1932, à New York, Albert S. Hyman (1893-1972), élève du célèbre cardiologue écossais James Mackenzie (1853-1925), conçoit le premier stimulateur cardiaque appelé pacemaker. Dans les arrêts du cœur, le seul geste connu et pratiqué était l’injection intracardiaque d’épinéphrine, de digitaline, d’éther, de camphre ou de caféine. Hyman considère que les succès obtenus dans la réanimation sont dus davantage au contact métallique de l’aiguille avec le myocarde qu’aux substances injectées. Il fabrique donc son premier pacemaker qui pèse 7,2 kg ; il est constitué d’une dynamo mue par un moteur à ressort remonté avec une manivelle (toutes les six minutes), d’un interrupteur de courant rotatif et d’une aiguille électrode bipolaire introduite dans l’oreillette droite (pour éviter le risque de fibrillation ventriculaire). Hyman utilise 44 fois son pacemaker et obtient 14 succès. Destiné à la trousse d’urgence du médecin, ce premier stimulateur cardiaque externe ne connaît aucun succès. Dans les années 50, à Harvard, l’équipe de Paul Maurice Zoll (1911-1999) étudie le syndrome d’Adams-Stokes qui fauche la moitié des patients dans l’année qui suit la première attaque. Reprenant les travaux du chirurgien canadien Wilfred G. Bigelow (1913-), les cardiologues d’Harvard mettent au point en 1952 un stimulateur externe qui délivre une onde monophasique de 2/1 000 seconde, 80 à 180 fois par minute. Constituées de disques de métal enduits de pâte conductrice, les électrodes sont maintenues sur le thorax avec des bandes de caoutchouc. L’électrode négative est disposée à la pointe du cœur et l’électrode positive en un point symétrique à droite. Des succès sont enregistrés mais le système est imparfait : les électrodes brûlent la peau, le haut voltage employé provoque des contractions musculaires douloureuses, la stimulation électrique ponctuelle n’empêche pas la survenue de récidives mortelles. En 1960, l’équipe de Zoll imagine un nouveau système d’électrodes : la première est introduite sous la peau jusqu’à la pointe du cœur et la seconde est disposée en surface près de la cinquième côte ; les deux électrodes sont reliées à un stimulateur électrique qui envoie 50 à 100 fois par minute un choc électrique d’une durée moyenne de 2/1 000 seconde. (figure 17) Les essais sont concluants, le succès est spectaculaire. Les recherches sur les pacemakers et sur la défibrillation commencent véritablement. La mise au point de pacemakers implantables constitue la grande révolution de la stimulation électrique du cœur. Cette prouesse technique devient possible en 1948 après la découverte du transistor (contraction de Transfer Resistor). Le 8 octobre 1958, à Stockholm, Ake Senning (1915-2000), chirurgien cardiovasculaire, implante un pacemaker de 6 cm de diamètre, pesant 60 g et doté d’une pile au nickel cadmium (rechargeable à l’extérieur). Construit par le physicien Rune Elmquist (1906-1996), l’appareil n’est pas réglable de l’extérieur ; il faut donc procéder en deux temps : appareiller le patient à un stimulateur externe pendant une trentaine de jours afin de stabiliser le seuil, puis implanter ensuite le stimulateur interne. Arne Larsson (1915-2001) est le premier patient ayant reçu un stimulateur cardiaque ; il devint président de la Société suédoise des maladies du cœur. Une histoire des stents : nus et actifs… En 1969, Charles Dotter (1920-1985) expérimente chez l’animal les endoprothèses intra-artérielles en forme de ressort pour assurer le maintien de la paroi vasculaire athéromateuse. En 1974, à Zürich, Andreas Gruentzig (1939-1985) réalise une angioplastie périphérique à l’aide d’un ballon co-axial. Le 16 septembre 1977, il introduit son ballonnet par voie percutanée et ouvre la voie des angioplasties endoluminales. Le chirurgien suisse rapporte une expérience de 169 interventions réussies ; il enseigne sa technique aux cardiologues du monde entier. En mars 1986, à Toulouse, Jacques Puel (1946-2008) pose la première endoprothèse (stent) coronaire chez l’homme sous couvert de la calciparine. La pose de ce premier stent était la concrétisation d’un projet ancien, contemporain de la première angioplastie (…) Dès que l’on a commencé à dilater, est venue l’idée d’étayer avec un ressort (…) Pouvoir expérimenter cette nouvelle technique aussi rapidement chez l’homme serait absolument impossible aujourd’hui du fait des lois de la bioéthique. Ayant déjà réalisé les premières thrombolyses endocoronaires par injection de streptokinase, Puech est un des pionniers de l’« urgence coronaire ». Formé au cathétérisme lors de son internat en pédiatrie cardiologique, il pratique dès 1980 l’angioplastie au ballon. L’implantation de stents chez sept premiers malades pose le problème des thromboses (35 % des patients). Paul Barragan à Marseille propose alors de prévenir la thrombose par un traitement antiplaquettaire associant aspirine et ticlopidine. Au début de l’an 2000, des stents « actifs » enduits de produit antimitotique à élution sont mis sur le marché pour éviter la resténose. La défibrillation externe et les dispositifs implantables En 1904, Maurice d’Halluin, professeur de physiologie à la Faculté de médecine de Lille indique que le massage cardiaque doit être accompagné d’une oxygénation du sang (...) par insufflation pulmonaire au soufflet et d’injections intraveineuses de drogues « cardiosélectives » (chlorure de calcium, sels de potassium, adrénaline). Pour réduire les trémulations fibrillaires (fibrillation), d’Halluin applique un courant de 240 volts directement sur le myocarde. Les travaux d’Halluin restent confidentiels. Dans les années 1920, aux États-Unis, Carl John Wiggers (1883-1963) reprend les études sur les fibrillations auriculaires et emploie le courant électrique alternatif pour les réduire. À Montréal, à la même époque, le chirurgien Mercier-Fauteux (1898-1950) obtient les mêmes succès. En 1939, en URSS, Naum Gurvich (1905-1981) prouve que l’emploi du courant continu est plus efficace et moins dangereux pour les défibrillations ; il teste aussi le choc biphasique. Les premiers défibrillateurs sont construits en Union Soviétique au début des années 50 et largement répandus à l’Est. En 1947, aux États-Unis, W. Weet rapporte deux cas de malades en arrêt cardiaque (au cours d’une thoracotomie) qui sont réanimés par stimulation électrique directe du cœur. La même année, Claude Schaeffer Beck (1894-1971) parvint à défibriller un cœur humain dans les mêmes conditions (à thorax ouvert). En 1952, à Boston, l’équipe de Paul M. Zoll (1911-1999) publie un article relatant le cas de deux malades réanimés par choc électrique externe. Les aiguilles électrodes ont été plantées dans le tissu sous-cutané thoracique. Chez le premier malade, le cœur reprend ses battements pendant 25 min mais le décès survient par tamponnade ; assisté pendant cinq jours, le second malade reprend ses contractions spontanées. Ces demi-succès annoncent le début de la défibrillation cardiaque d’urgence. En 1959, à Boston, Bernard Lown (né en 1921) effectue le premier choc cardiaque externe permettant la réduction d’une fibrillation auriculaire et le traitement d’une tachycardie ventriculaire ; c’est lui qui introduit en Occident la défibrillation par courant continu. Le premier modèle de défibrillateur transportable dans une ambulance est disponible en 1966 ; il pèse 70 kg (figure 18). Les défibrillateurs semi-automatiques font leur apparition dans les années 80 ; les automatisés 15 ans plus tard. Depuis 2007, en France, les défibrillateurs automatisés externes sont utilisables par tous, selon le décret du 4 Mai 2007 : Toute personne, même non médecin, est habilitée à utiliser un défibrillateur automatisé externe. Le cœur artificiel Le cœur artificiel s’est imposé comme un espoir de la chirurgie cardiaque pour la prise en charge des insuffisances cardiaques terminales Le 2 décembre 1982, à Salt Lake City, l’équipe de William C. DeVries (né en 1943) greffe pour la première fois un cœur artificiel modèle Jarvik 7 (fabriqué par Robert Jarvik et Kolff), qui fonctionne grâce à un compresseur externe posé sur un chariot et relié au patient par des tuyaux lui traversant la poitrine. Le patient meurt 112 jours plus tard ; très médiatisée, cette première implantation d’un cœur artificiel chez l’homme est vivement controversée (figures 19 et 20). En février 1986, à Paris, à l’hôpital Broussais, Alain Carpentier pose une prothèse de modèle Pierce fonctionnant sur le même principe que le Jarvik. Le 3 juillet 2001, une équipe chirurgicale de Louisville (Kentucky) dirigée par Laman Gray et Robert Dowling implante un cœur artificiel ; l’intervention dure 7 heures. Le cœur de remplacement AbioCor est fabriquée par Arrow, son coût est de 100 000 US $. Fabriqué en titane et en polyuréthane, cette prothèse est actionnée par un moteur miniaturisé dont l’alimentation est assurée par une batterie d’une autonomie de 30 min. Une batterie externe de la taille d’un baladeur est accrochée à la ceinture et permet la recharge. Pesant 1 kg, ce cœur remplace les deux ventricules et les quatre valves correspondantes, le système de pompe et le boîtier de commande sont placés dans l’abdomen. Quatorze essais identiques sont réalisés en Allemagne, en Autriche et en France avec la prothèse AbioCor (certains essais ont été réalisés dès 1999 en Europe). En octobre 2008, le Pr Carpentier, présente un prototype d’un cœur entièrement miniaturisé fabriqué avec l’aide technique d’EADS. Ce cœur est réalisé avec des biomatériaux viscoélastiques comme les valvules aortiques ou mitrales ; il permet de surmonter l’obstacle de la thrombose. Alain Carpentier a reçu avec Albert Starr le prix Lasker 2007 pour ses travaux sur les bioprothèses valvulaires.                          

Attention, pour des raisons réglementaires ce site est réservé aux professionnels de santé.

pour voir la suite, inscrivez-vous gratuitement.

Si vous êtes déjà inscrit,
connectez vous :

Si vous n'êtes pas encore inscrit au site,
inscrivez-vous gratuitement :

Version PDF

Articles sur le même thème

  • 2 sur 94
publicité
publicité