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Coronaires

Publié le 24 nov 2009Lecture 7 min

Infarctus aigu du myocarde avec élévation du segment ST - Stratégies de prise charge en préhospitalier

T. PETROVIC, C. LAPANDRY, F. LAPOSTOLLE, SAMU 93, hôpital Avicenne, Bobigny

L’obtention d’une issue optimale chez des patients ayant un syndrome coronaire aigu (SCA) dépend de la réalisation d’une reperfusion myocardique précoce soutenue par l’initiation rapide d’un traitement anti-agrégeant plaquettaire et anticoagulant. La mise en route préhospitalière du traitement permet de réduire significativement l’intervalle entre le début des symptômes et la reperfusion. L’induction préhospitalière d’un traitement de reperfusion est associée à de meilleurs résultats cliniques à court et à long terme comparativement au traitement intrahospitalier. La supériorité significative du traitement associant le clopidogrel à l’aspirine a été démontrée. La majorité des patients devraient également recevoir de l’héparine (fractionnée ou non). Une amélioration du pronostic des patients présentant un syndrome coronaire aigu a été obtenue dans différents pays européens avec une prise en charge reposant sur l’initiation préhospitalière d’une stratégie de reperfusion.

Le temps écoulé entre le début de la douleur et la reperfusion coronaire conditionne le pronostic des patients présentant un syndrome coronaire aigu (SCA)(1,2). Toutes les recommandations récentes insistent sur l’importance d’une reperfusion aussi rapide que possible, qu’elle soit mécanique (angioplastie) ou pharmacologique (fibrinolyse)(3-6), le délai de reperfusion étant plus déterminant pour le pronostic que la méthode de reperfusion utilisée. Bien que l’angioplastie soit considérée comme supérieure à la fibrinolyse, il est admis que la fibrinolyse doit être administrée si une angioplastie ne peut être exécutée par un praticien expérimenté dans des délais brefs(3-6). De plus, chez des patients pris en charge précocement après le début de la douleur, la fibrinolyse et l’angioplastie ont des issues similaires(7). Les thérapeutiques de reperfusion doivent être associées à des traitements antiagrégants plaquettaires et anticoagulants(3-6). L’introduction précoce de ces traitements adjuvants améliore le pronostic(8,9). Choix de la stratégie de reperfusion Le choix de la stratégie de reperfusion doit être préhospitalier. Il se fait en fonction du délai entre le début des symptômes et le premier contact médical, ainsi que du délai d’accès à l’angioplastie. Si elle est indiquée, la fibrinolyse doit être instaurée le plus vite possible par l’équipe médicale d’urgence pour réduire la mortalité à court et à long terme(1,3-6,10-12). Elle est, au mieux, débutée au domicile du patient ou dans l’ambulance. En effet, la fibrinolyse préhospitalière est associée à une réduction des délais de traitement (en moyenne une heure, en comparaison à la thrombolyse intrahospitalière), ainsi qu’à une réduction de la mortalité intrahospitalière(1,3,11-13). Instaurée très précocement (< 2 heures depuis le début des symptômes), la thrombolyse peut même être plus efficace que l’angioplastie en termes de mortalité à 30 jours(14). La tenectéplase est aujourd’hui l’agent fibrinolytique de premier choix(8). L’angioplastie est traditionnellement considérée comme supérieure à la fibrinolyse(3-6,15,16). Cependant, retarder l’angioplastie expose à un taux plus élevé de mortalité par rapport à une fibrinolyse immédiate(17). Si elle est indiquée, l’angioplastie doit être réalisée, selon des recommandations américaines et européennes récentes, par un praticien expérimenté dans un délai de 90 à 120 minutes après le premier contact médical en fonction de la stratification du risque et du délai depuis le début des symptômes(3-6). Un transfert direct en salle de coronarographie, sans passage par un service d’urgences, est indispensable pour obtenir une reperfusion rapide et réduire la morbidité et la mortalité(18). La fibrinolyse et l’angioplastie ne s’opposent plus. Elles peuvent être utilisées conjointement, l’intervention coronaire percutanée faisant suite à la reperfusion pharmacologique. Selon des recommandations de la conférence de consensus française de l’HAS (figure)(5) : • Le traitement fibrinolytique doit être préférée si le délai entre la survenue de la douleur et l’instauration du traitement est < 3 h ou si l’angioplastie ne peut être réalisée dans les 90 min après le premier contact médical. • L’angioplastie primaire doit être préférée si le délai entre le début de la douleur et l’initiation du traitement est > 3 heures et si l’angioplastie peut être réalisée dans les 90 min après le premier contact médical. À défaut, le traitement fibrinolytique est la meilleure option. • Fibrinolyse et angioplastie peuvent être combinées ; la fenêtre optimale de réalisation de l’angioplastie après fibrinolyse est de 3 à 24 h, sauf angioplastie de sauvetage. Figure. Algorithme de prise en charge des patients avec syndrome coronaire aigu ST+ Modalités de prise en charge préhospitalière Une surveillance électrocardioscopique continue, la présence d’un défibrillateur portable, deux voies veineuses périphériques de bon calibre, un traitement antalgique et, si besoin, anxiolytique font partie du minimum requis pour une prise en charge préhospitalière. L’oxymétrie de pouls systématique oriente l’oxygénothérapie si nécessaire. L’équipe intervenant doit être capable, dans un délai minimal, de faire un diagnostic clinique et électrocardiographique, d’évaluer le risque et d’administrer un traitement de reperfusion(4,19). Ceci peut aussi être réalisé par des personnels paramédicaux formés et travaillant en liaison avec les spécialistes(19), comme cela se fait dans certains pays. Toutefois, la morbidité, la mortalité et la sécurité sont meilleures lorsque les équipes préhospitalières incluent des médecins urgentistes (système français), même si le délai de prise en charge est allongé(20). Traitements « adjuvants » L’aspirine L’aspirine est la thérapeutique de base du SCA ST+ améliorant le pronostic des patients(21). Elle doit être administrée dès que possible à tous les patients ne présentant pas de contre-indication, à une dose de 162 à 325 mg per os(3-6). L’aspirine doit être prescrite par téléphone par le médecin régulateur du SAMU, dans l’attente de l’arrivée de l’équipe de SMUR. En cas de contre-indication à l’aspirine, le clopidogrel est utilisé(3-6). Les thiénopyridines Les thiénopyridines inhibent l’agrégation plaquettaire induite par l’adénosine diphosphate. Le clopidogrel est préféré à la ticlopidine car il a moins d’effets indésirables ; il ne nécessite pas de surveillance biologique et peut être administré une fois par jour. Globalement, le clopidogrel est associé à une amélioration significative de l’évolution des patients, que la stratégie de reperfusion soit pharmacologique ou mécanique(22,23). Le traitement par clopidogrel est recommandé dès la phase aiguë(3-6). La dose recommandée varie en fonction de la stratégie de reperfusion choisie et de l’âge du patient : fibrinolyse : 300 mg si < 75 ans ; 75 mg si > 75 ans ; angioplastie : 300 à 600 mg. La dose quotidienne ultérieure est de 75 mg/j. Le prasugrel, nouvelle thiénopyridines plus puissante, ne fait pas actuellement partie de l’arsenal thérapeutique préhospitalier. Les héparines Le choix de l’héparine à utiliser – héparine de bas poids moléculaire (HBPM) ou héparine non fractionnée (HNF) – dépend, entre autres, de la stratégie de reperfusion, de l’âge du patient et de la présence ou non de comorbidités(3-6). Les recommandations européennes récentes préconisent l’administration intraveineuse d’HBPM pour tous les patients qui reçoivent un traitement fibrinolytique sélectifs (tableau). L’utilisation d’héparine en association à des agents fibrinolytiques non sélectifs autres que la streptokinase n’est pas recommandée (activité anticoagulante intrinsèque), sauf en cas de risque élevé d’embolie systémique(6). L’HNF reste à ce jour le traitement anticoagulant de référence en cas d’angioplastie primaire(5,6). Le fondaparinux peut être considéré comme une option thérapeutique antithrombotique favorable, uniquement chez les patients avec SCA ST+ fibrinolysés par streptokinase et pour lesquels une angioplastie n’est pas programmée(6,24). En cas d’angioplastie, la bivalirudine semble être aussi efficace que l’association héparine–anti-GPIIb/IIIa, et pourrait présenter des taux significativement plus bas d’hémorragies massives, de décès de cause cardiaque, de mortalité toutes causes et d’effets indésirables cliniques(25). Les anti-GPIIb/IIIa Les anti-GPIIb/IIIa bloquent la dernière étape de l’agrégation plaquettaire. Ils constituent un traitement adjuvant standard de l’angioplastie(3-6). Le bénéfice de l’administration d’un anti-GPIIb/IIIa chez des patients présentant un SCA ST+ traités par angioplastie primaire a été établi sur la perméabilité coronaire, la fonction ventriculaire gauche et la mortalité(26). L’utilisation d’un anti-GPIIb/IIIa en préhospitalier avant une angioplastie est faisable et sûre(27). Mais si l’utilisation préhospitalière d’un anti-GPIIb/IIIa (tirofiban) comparée à l’administration d’un placebo (en association à aspirine, clopidogrel et HNF) améliore la résolution du segment ST avant et après angioplastie, elle ne semble pas associée à une meilleure perméabilité coronaire ou à un bénéfice clinique net(28). De plus, il ne semble pas y avoir de différence significative quant aux flux TIMI avant et après revascularisation et quant à l’issue finale entre une administration préhospitalière et aux urgences chez des patients présentant un SCA ST+ traités par angioplastie(28). L’utilisation de routine des anti-GPIIb/IIIa chez des patients destinés à recevoir des agents fibrinolytiques n’est pas recommandée actuellement(3-6). En pratique Diagnostic rapide, évaluation précise et reperfusion précoce sont les clés pour diminuer la mortalité des patients présentant un SCA. Toute décision thérapeutique doit être guidée par l’étroite corrélation existant entre vitesse de reperfusion et amélioration de l’issue finale, tant pour la fibrinolyse que pour l’angioplastie primaire. Quelle que soit la stratégie thérapeutique choisie, le traitement médical initial doit pouvoir être débuté en préhospitalier. Un traitement adjuvant préhospitalier précoce par anti-agrégant plaquettaires (aspirine et/ou clopidogrel) et héparine (le plus souvent HBPM) doit être considéré comme une procédure de routine pour les patients présentant un SCA ST+.

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