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Thérapeutique

Publié le 22 mai 2007Lecture 5 min

La place des anti-GP IIb/IIIa

Y. COTTIN, L. LORGIS, I. L’Huillier et Ph. BUFFET, CHU de Dijon


Thromboses et Urgences Coronaires
La place des anti-GP IIb/IIIa au cours des procédures d’angioplastie percutanée est codifiée par les recommandations de la Société Européenne de Cardiologie. Ces dernières tiennent compte pour l’essentiel de la présentation clinique. L’ensemble de ces situations sera détaillé dans cette revue.

Dans l’angor stable Chez les patients à bas risque devant bénéficier d’une angioplastie, l’étude randomisée ISAR-REACT a comparé l’abciximab à un placebo. Les critères d’exclusion de cet essai étaient un diabète insulinodépendant et la présence d’un thrombus visible à l’angiographie. La perfusion d’anti-GP IIb/IIIa était débutée immédiatement avant l’angioplastie. Sur le critère combiné (décès, infarctus de myocarde ou revascularisation en urgence du vaisseau traité) aucune différence significative n’a été mise en évidence entre les deux groupes. Ces résultats viennent conforter les analyses rétrospectives ou de sous-groupes des études EPISTENT ou ISAR-SWEET qui montrent des résultats divergents, suggérant respectivement un bénéfice de l’abciximab chez les patients stentés dans cette indication ou une absence d’effet favorable. Dans l’angor stable, le très faible risque de l’angioplastie doit être mis en balance, d’une part, le risque hémorragique et d’autre part, le coût de ce traitement. Pour ces raisons, les anti-GP IIb/IIIa ne sont plus indiqués systématiquement dans le traitement périprocédural mais discutés au cas par cas. À ce jour, ils sont réservés aux procédures à haut risque et/ou aux lésions complexes, telles que les occlusions perprocédures, les thrombus visibles et ou les phénomènes de flow ou no-reflow.   Dans l’infarctus sans sus-décalage du segment ST persistant L’évaluation du risque du patient est l’étape clé dans la prise en charge car elle conditionne la stratégie ultérieure. Elle est simple, fiable et repose sur trois scores de risque : TIMI, GRACE ou PURSUIT. Cette stratification, l’utilisation des stents et des anti-GP IIb/IIIa, ont clairement démontré le bénéfice d’une stratégie invasive précoce chez les patients à risque élevé ou intermédiaire. Ces travaux concluent qu’une stratégie conservatrice ne doit être proposée qu’aux patients à faible risque. Si le bénéfice des anti-GP IIb/IIIa dépend du risque initial, il est tout particulièrement marqué chez les patients diabétiques. Enfin, le bilan angiographique doit être précoce, mais non urgent : en effet, le bénéfice de l’angioplastie associée est particulièrement significatif : - en cas de réalisation du geste au cours de l’hospitalisation, - si la perfusion d’anti-GP IIb/IIIa est débutée avant l’angioplastie. Si l’administration d’inhibiteur des récepteurs GP IIb/IIIa est débutée, elle doit être poursuivie sur une durée de 12 heures (abciximab) ou de 24 heures (tirofiban, eptifibatide) après la procédure si une angioplastie est réalisée. L’ensemble des métaanalyses a démontré, sous anti-GP IIb/IIIa, une augmentation des hémorragies majeures, mais sans augmentation de l’incidence des hémorragies intracrâniennes. En conséquence, comme pour la fibrinolyse, la recherche et le respect des contre-indications doivent être systématiques avant de débuter le traitement. Les recommandations de l’ESC stratifient en 3 groupes l’emploi des anti-GP IIb/IIIa après un traitement standard comprenant aspirine, clopidogrel, héparine de bas poids moléculaire, dérivés nitrés et bêtabloquants : - patient à haut risque avec stratégie invasive immédiate (< 2,5 h) avec abciximab ou eptifibatide ; - patient à haut risque avec stratégie invasive précoce (< 48 h) avec tirofiban ou eptifibatide ; - patient à bas risque et avec stratégie invasive : discussion si besoin de abciximab ou eptifibatide.   L’ajustement des doses des anti-GP IIb/IIIa est primordial En témoigne un travail récent du registre CRUSADE publié dans Circulation. Des doses excessives sont parfois administrées dans la vraie vie, chez 25 % des patients dans ce travail. La population étudiée concerne les femmes, les insuffisants rénaux et les patients > 75 ans. De manière intéressante, les auteurs démontrent : - chez l’homme : une absence de surrisque hémorragique grave entre l’absence d’anti-GP IIb/IIIa et une dose adaptée (5 versus 5 %) mais avec un surrisque hémorragique en cas de dose excessive (14 %) (p < 0,001) ; - chez la femme : le risque hémorragique augmente significativement, entre l’absence d’anti-GP IIb/IIIa et une dose adaptée (8 versus 12 %) et mais surtout en cas de dose excessive (8 versus 19 %).   Dans l’infarctus avec sus-décalage du segment ST persistant De nombreuses études randomisées ont démontré que l’angioplastie primaire doit être préférée à la thrombolyse, si elle est réalisée précocement et surtout par une équipe expérimentée. La stratégie facilitée consiste en l’administration de substances pharmacologiques avant l’angioplastie avec pour objectif une artère ouverte lors de la procédure de dilatation. Ce concept d’angioplastie facilitée est difficile à appréhender car il a évolué durant ces dernières années. Néanmoins, un faisceau d’arguments montre que le délai entre la prise en charge médicale et l’angioplastie est déterminant, et qu’une administration précoce d’anti-GP IIb/IIIa avant l’admission en salle de cathétérisme dans l’infarctus avec sus-décalage du segment ST doit être privilégiée. Le tirofiban et l’eptifibatide ont été moins étudiés que l’abciximab dans l’IDM avec sus-décalage du segment. La recommandation pour l’emploi de l’abciximab repose sur 5 études randomisées majeures : RAPPORT, ISAR-2, CADILLAC, ADMIRAL et ACE, au cours de l’angioplastie primaire. En effet, pour chacune de ces études il existe une réduction significative du critère combiné : décès, réinfarctus, ou revascularisation du vaisseau traité, respectivement 11,3 vs 5,8 %, 10,5 vs 5,0 %, 6,8 vs 4,5 %, 14,6 vs 6,0 % et 10,5 vs 4,5 %. De plus, dans la métaanalyse parue dans le Lancet en 2006, Keeley et al. reprennent les résultats des 9 études majeures comparant la stratégie facilitée par des anti-GP IIb/IIIa. Ces auteurs démontrent un bénéfice sur le flux TIMI 3 préprocédural (26 versus 15 %, p = 0,0001), et une tendance sur le flux final mais non significative (90 versus 85 %, p = 0,057). La dernière publication, TITAN 34, a comparé après randomisation chez 316 patients, l’impact de l’administration d’eptifibatide aux urgences par rapport à son administration en salle de cathétérisme. L’incidence de flux normal préprocédural est significativement plus importante dans le bras urgences (24,3 versus 14,2 %, p = 0,026), sans augmentation d’accidents hémorragiques majeurs ou mineurs (6,9 versus 7,8 %), ce qui confirme les travaux précédents. Les auteurs démontrent surtout l’impact sur le flux de la durée de traitement par les anti-GP IIb/ IIIa préalable au transfert en salle de cathétérisme pour l’angioplastie, démontrant clairement que la période préangioplastie reste majeure pour optimiser le résultat.   En pratique   Dans l’attente de l’actualisation des recommandations, la place des anti-GP IIb/IIIa est à ce jour majeure, bien codifiée dans la prise en charge des syndromes coronaires aigus, et en particulier en cas de stratégie invasive.

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