Publié le 30 mar 2010Lecture 6 min
Les recommandations sur l'HTA - Le choix de la combinaison
J. AMAR, Pôle cardiovasculaire et métabolique, CHU Toulouse
Les preuves s’accumulent démontrant que la grande majorité des hypertendus sont redevables de combinaisons d’antihypertenseurs pour parvenir au contrôle de leur pression artérielle.
Box 6 : les combinaisons d’antihypertenseurs (adapté des recommandations européennes sur l’HTA de 2009)
• Les preuves s’accumulent démontrant que la grande majorité des hypertendus sont redevables de combinaisons d’antihypertenseurs pour parvenir au contrôle de leur pression artérielle.
• La stratégie adéquate est d’associer au traitement initial, une seconde molécule à moins que la première ait été mal tolérée ou n’ait amené aucun effet en termes de baisse de pression artérielle.
• La combinaison de deux antihypertenseurs pour l’initiation du traitement pourrait être intéressante, en particulier chez les patients à haut risque chez lesquels un contrôle rapide de la pression artérielle pourrait être bénéfique.
• Lorsque cela est possible, l’usage de combinaisons fixes doit être préféré en raison de la simplification du traitement qu’elle procure avec un avantage attendu en termes d’observance.
Parmi les bithérapies synergiques, celles qui ont démontré un bénéfice en termes de morbimortalité cardiovasculaire sont les combinaisons IEC + diurétique, ARA II + diurétique, diurétique + inhibiteur calcique (ICA) ou IEC + ICA. La combinaison ARA II + ICA est aussi rationnelle et efficace. Ces combinaisons sont à recommander en priorité.
• La combinaison bêtabloquant + diurétique a démontré un bénéfice sur le pronostic cardiovasculaire. Cependant, elle favorise le développement du diabète et devrait être évitée sauf raison précise chez les patients prédisposés. L’association IEC + ARAII n’amène pas de bénéfice spécifique et est associée à une incidence accrue d’effets indésirables. Son intérêt chez les patients avec néphropathie et protéinurie demande à être confirmé dans des études évaluant des critères « durs ».
• Dans 15 à 20 % des cas la bithérapie est insuffisante. Lorsqu’une trithérapie est requise la combinaison la plus rationnelle semble être un bloqueur du SRAA, un inhibiteur calcique et un diurétique.
L’abandon d’un dogme
C’est là un paragraphe clé car le maniement des combinaisons est au cœur de la stratégie d’utilisation du traitement antihypertenseur.
Les recommandations européennes de 2009 sur les combinaisons font très clairement le choix de la combinaison. Elles prônent l’abandon de la monothérapie séquentielle et du dogme de la monothérapie initiale ; elles s’inscrivent avec netteté en faveur des associations fixes ; elles désignent des bithérapies préférentielles qui reprennent pour l’essentiel le schéma de la HAS 2005 (figure). Elles mettent cependant à l’index la bithérapie bêtabloquant et diurétique chez les patients avec syndrome métabolique. Concernant les trithérapies, elles proposent une combinaison de référence associant bloqueur du système rénine angiotensine, inhibiteur calcique et diurétique.
Figure : Bithérapie synergique selon la HAS 2005.
Le choix de la combinaison
Comme le souligne le texte de la recommandation, la très grande majorité des patients requiert une combinaison d’antihypertenseurs pour parvenir au contrôle. L’abandon du dogme de la monothérapie initiale se fonde avant tout sur cette évidence. De plus, les experts européens s’appuient sur une analyse a posteriori – analyse de circonstance – de l’étude VALUE suggérant l’intérêt d’un contrôle précoce de la pression artérielle. Cette justification est fragile. Cependant, au-delà de l’argumentaire, cette recommandation fait une brèche dans ce dogme de la monothérapie initiale qui contribue sans doute à laisser certains de nos hypertendus au seuil du contrôle.
Le choix de la combinaison fixe
La recommandation européenne s’appuie sur une évidence de bon sens qui repose cependant sur peu de preuves. La qualité de vie de nos patients et leur observance pourraient être améliorées si le nombre de pilules à ingérer était réduit. Les combinaisons fixes apporteraient un début de solution. Dans le contexte français, on peut ajouter qu’elles peuvent aussi contribuer à réduire le coût direct de l’ordonnance pour l’hypertendu à haut risque. Cet argument n’est pas anodin pour nos patients aux revenus les plus modestes.
Le choix de certaines combinaisons fixes
Les experts européens désignent les combinaisons IEC + diurétique, ARAII + diurétique, ARA II + ICA, ICA + diurétique, IEC + ICA comme les bithérapies électives et maintiennent à l’index la bithérapie bêtabloquant + diurétique. Quels sont les niveaux de preuve soutenant ces choix ?
• La stratégie IEC + ICA est argumentée par le résultat des études ACCOMPLISH et ASCOT démontrant une supériorité sur le pronostic cardiovasculaire chez des hypertendus cumulant les facteurs de risque par rapport respectivement à la combinaison IEC + diurétique et bêtabloquant + diurétique.
• La stratégie ICA + diurétique est argumentée à la marge par l’amélioration de critères secondaires dont l’infarctus du myocarde en comparaison de la combinaison ARA II + diurétique chez les hypertendus à haut risque inclus dans l’étude VALUE (à noter que dans cette étude le critère primaire n’était pas significativement différent entre les deux stratégies).
• La stratégie ARA II + diurétique est argumentée par les résultats de l’étude LIFE en comparaison de la bithérapie bêtabloquant + diurétique chez des hypertendus avec hypertrophie ventriculaire gauche électrique.
• La stratégie ARA II + ICA est argumentée selon la recommandation par son caractère rationnel et efficace.
• L’association IEC + ARA II est récusée : l’étude ONTARGET conduite chez le patient à haut risque a montré l’absence de bénéfice à attendre d’une telle stratégie avec, au contraire, un effet délétère rénal. La recommandation européenne rappelle le faible niveau de preuve dont dispose le double blocage du système rénine angiotensine chez les patients néphropathes. En effet, la fiabilité des données fondant l’étude COOPERATE, seule étude suggérant le bénéfice clinique de cette stratégie, a été directement mise en cause.
• La mise à l’index de la combinaison bêtabloquant + diurétique se maintient.
La recommandation européenne reconnaît à la combinaison bêtabloquant et diurétique la démonstration d’une réduction de la morbidité et de la mortalité.
Cependant, elle l’accuse d’augmenter le risque de diabète. Après avoir pesé ces deux évidences, la recommandation la met au ban chez les patients à risque de maladie métabolique. Cette position n’est pas partagée par la recommandation française de 2005. À ce jour, il n’existe pas d’étude d’intervention démontrant, sous bêtabloquant + diurétique, une augmentation du risque de diabète envisagé comme critère primaire. L’assertion défendue par les recommandations européennes repose sur des études d’observation et l’analyse de critères secondaires. Ensuite, quelle est la signification d’une augmentation de la glycémie sous bêtabloquant en termes de risque cardiovasculaire ? L’augmentation du risque de macro-angiopathie chez les patients diabétiques n’est pas discutable : il est doublé ou triplé par rapport à des sujets non diabétiques. À l’inverse, il est peu discutable qu’un contrôle strict de la glycémie n’améliore pas de façon décisive le risque d’infarctus du myocarde (cf. les études UKPDS, ACCORD, VETERAN).
Ainsi, l’élévation de la glycémie n’est pas le facteur causal de la maladie coronaire du diabétique et, par ailleurs, l’augmentation de la glycémie chez le diabétique est un marqueur du risque d’événements cardiovasculaires mais pas un acteur de ce risque. On peut donc s’interroger sur la signification pronostique d’une augmentation de la glycémie sous bêtabloquant et diurétique et sur la pertinence de leur mise à l’index.
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