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Cardiologie générale

Publié le 29 jan 2008Lecture 8 min

AHA 2007 - Le congrès de la recherche fondamentale

A. HAGEGE, HEGP, Paris

Le congrès de l’American Heart Association (AHA) reste le plus grand congrès mondial de cardiologie, aussi bien sur les plans de l’assistance que du gigantisme du centre de congrès, particulièrement marqué à Orlando, comme de l’exposition de médicaments et de matériel. C’est aussi le seul à réunir aussi étroitement cliniciens, épidémiologistes et chercheurs, environ la moitié des communications étant consacrée à la recherche fondamentale.

  Insuffisance cardiaque   L’étude RethinQ (Resynchronisation Therapy in narrow QRS) avait pour objectif d’évaluer l’apport de la resynchronisation ventriculaire chez l’insuffisant cardiaque à QRS fins, une population importante d’insuffisants cardiaques qui actuellement ne bénéficient pas de la technique. Les 172 patients en stade NYHA III, à QRS < 130 ms et FE < 35 % avaient un asynchronisme ventriculaire démontré par échocardiographie TM et Doppler tissulaire. Aucun bénéfice à 6 mois n’est retrouvé chez ces patients, ni sur le plan de l’amélioration fonctionnelle (test de marche de 6 min, qualité de vie), ni sur celui de paramètres plus objectifs comme la consommation maximale d’oxygène à l’effort ou les volumes ventriculaires. Pour des QRS entre 120 et 130 ms, il semble y avoir un bénéfice modéré qui devra être confirmé. Cette étude confirme les données de l’étude PROSPECT (Providing Regional Observation to Study Prediction of Events in the Coronary Tree), présentée au congrès de l’European society of cardiology, qui avait montré que les critères échocardiographiques de désynchronisation utilisés n’étaient pas des critères fiables, car peu reproductibles pour la plupart d’entre eux. Peut-être les conclusions de RethinQ devraient être tempérées par les modalités imparfaites de sélection des patients. CORONA (Controled Rosuvastatin in Multinational Trial in Heart Failure) est un essai thérapeutique en double aveugle contre placebo conduit chez plus de 5 000 patients > 60 ans ayant une insuffisance cardiaque systolique ischémique et n’étant pas sous statine. La rosuvastatine administrée pendant 3 ans à la dose de 10 mg/j n’a pas influé sur le critère primaire d’évaluation (mortalité cardiovasculaire, infarctus et accidents vasculaires cérébraux), ni modifié la mortalité globale ou cardiovasculaire, ce, alors que le LDL-cholestérol a diminué fortement sous traitement. Il faut signaler cependant qu’une grande partie des patients sont décédés de mort subite (43 % des décès) ou d’insuffisance cardiaque (25 % des décès) et très peu par infarctus ou accident vasculaire cérébral (< 5 %), et qu’il existe sous statine une diminution significative du nombre d’hospitalisations pour causes cardiovasculaires et pour insuffisance cardiaque, ainsi qu’une diminution significative des infarctus et des accidents vasculaires cérébraux. Cette étude ne remet, bien sûr, pas en cause la prescription de statine chez le coronarien et en postinfarctus, et d’ailleurs ne reflète pas la « vraie vie » puisqu’aujourd’hui la majorité des patients de CORONA serait effectivement sous statine car coronariens (mais l’étude a été conçue en 1999 !). Rythmologie   L’étude AF/CHF (Roy, Montréal) montre que chez l’insuffisant cardiaque le contrôle de la fréquence fait aussi bien que le contrôle du rythme cardiaque chez les patients en fibrillation auriculaire. Cette étude européenne et américaine menée chez plus de 1 300 patients suivis 2 ans montre que le choc électrique (éventuellement renouvelé) ne fait pas mieux que le traitement médical (amiodarone essentiellement) sur la mortalité cardiovasculaire, critère principal de jugement, ni sur les critères secondaires (mortalité totale, aggravation de l’insuffisance cardiaque, accident vasculaire cérébral, hospitalisations, qualité de vie et coût des thérapeutiques). Cette étude confirme les résultats de l’étude AFFIRM rapportée 5 ans auparavant qui montrait que, chez les patients en FA sans dysfonction ventriculaire gauche systolique, le contrôle du rythme ne fait pas mieux que le contrôle de la fréquence cardiaque. L’étude MASCOT (Management of Atrial fibrillation Suppression in CHF Comorbidity Therapy) montre que, chez les patients resynchronisés pour insuffisance cardiaque systolique, la fonction de stimulation anti-FA ne devrait pas être systématiquement enclenchée car : - elle n’est pas utile chez la plupart des patients, - elle interfère avec l’efficacité de la resynchronisation. Il faut signaler que la FA a été relativement peu fréquente chez ces patients (3,3 % à un an).   Coronaires   L’étude TRITON-TIMI 38 montre que le prasugrel aura un rôle à jouer dans les syndromes coronaires aigus pris en charge par angioplastie puisque, dans cette large étude menée chez plus de 13 000 patients devant avoir une angioplastie programmée pour angor instable, ce nouvel antiagrégant plaquettaire permet une réduction significative de 19 % des événements du critère primaire (décès cardiovasculaire, infarctus, AVC) avec réduction significative de 24 % des infarctus non fatals et de 52 % des thromboses de stent. Après un suivi moyen de 14,5 mois, on note une augmentation significative de 32 % du risque hémorragique sous prasugrel. Trois facteurs de risque d’hémorragie sont identifiés : l’âge > 75 ans, un poids < 60 kg et un antécédent d’AVC ou d’AIT. Dans ces populations, le risque de saignement, notamment cérébral, surpasse les bénéfices de cette nouvelle thiénopyridine. En prenant en compte le risque hémorragique, il y a cependant un bénéfice clinique net particulièrement élevé chez les patients < 75 ans, de poids > 60 kg et en l’absence d’antécédent d’AVC, alors qu’il est neutre dans la population opposée ; en cas d’AVC ou AIT, il y a un effet délétère du prasugrel. Le prasugrel a cependant été comparé à des doses relativement faibles de clopidogrel (dose de charge de 300 mg puis 75 mg/j), ce qui tempère les résultats en termes d’efficacité comme de tolérance. Reste à définir comment sera positionnée cette nouvelle drogue dans le futur. De nouvelles données rassurantes pour les stents actifs puisque le plus large registre jamais collecté comparant stents actifs et stents nus (17 000 patients) mené entre 2003 et 2005 avec un suivi de 2 ans, montre des taux d’infarctus identiques dans les deux groupes, avec cependant moins de décès et moins de procédures de revascularisation dans le groupe stent actif (en chiffres absolus -2 et – 4 %) (Mauri, États-Unis). L’étude COURAGE montre que l’angioplastie n’améliore pas le devenir clinique chez les patients ayant une coronaropathie stable sous traitement médical optimal. À 18 mois, chez les 2 287 patients inclus et randomisés entre les deux attitudes, les taux de décès ou infarctus sont globalement identiques. Il faut cependant souligner que, lorsque l’angioplastie entraîne une réduction marquée du territoire ischémique au stress, le taux de décès ou infarctus est diminué de 53 %, résultat significatif en analyse de sous-groupe.   Imagerie   L’étude CORE-64 montre une bonne fiabilité du scanner coronaire pour la détection des sténoses coronaires angiographiques (sensibilité, spécificité, valeurs prédictives positive et négative > 85 %) chez les patients > 40 ans, sans calcifications coronaires importantes (score calcique < 600). En dépit de ces résultats encourageants, une forte suspicion (et controverse) vis-à-vis de la technique voit le jour, liée notamment au fait que ces études ne portent pas sur les populations dans lesquelles sont appliquées actuellement le scanner coronaire en routine (diabétique, sujet âgé, calcifications coronaires, sujets peu enclins à présenter des lésions coronaires…).   Cardiopathies congénitales La supplémentation en acide folique pourrait être bénéfique pour prévenir les cardiopathies congénitales, comme le montre une étude canadienne (Ionescu) dans laquelle le renforcement de l’apport alimentaire en acide folique entraîne une diminution de 6 % de l’incidence des cardiopathies congénitales sévères, telle la tétralogie de Fallot.   Thérapie cellulaire Il faut souligner la place extraordinaire consacrée cette année à la thérapie cellulaire dans les maladies cardiaques et vasculaires, comme si, après l’enthousiasme des non lointaines premières années et des premiers essais cliniques, on revenait à des données plus fondamentales, à la recherche du meilleur type de cellules souches à utiliser, de la meilleure méthode pour les cultiver, et du meilleur moment pour les administrer après un infarctus du myocarde. Trois nouvelles études cliniques ont aussi été rapportées. L’étude CAUSMIC est basée sur la délivrance de myoblastes squelettiques autologues prélevés par biopsie à la cuisse et délivrés par cathétérisme intracardiaque avec guidage par système Noga® (Dib, San Diego). On note une amélioration de la classe NYHA et de la qualité de vie à 6 et 12 mois chez les patients traités par rapport au placebo, avec réapparition d’une viabilité tissulaire dans la zone nécrotique, et effet antiremodelage ventriculaire, sans surcroît d’arythmies dans le groupe traité. Ces données confirment les données de l’étude MAGIC menée par voie chirurgicale et ont amené la FDA à autoriser une étude clinique de phase 2 chez 165 patients. L’étude FINCELL a comparé en double aveugle l’administration intracoronaire de cellules souches médullaires autologues ou de placebo 2 à 6 jours après un infarctus du myocarde (Huikuri, Finlande). La fraction d’éjection s’améliore significativement à 6 mois (de 58,8 à 65,9 %, p < 0,002), sans arythmie ou resténose, alors qu’il y a stabilité des paramètres chez les patients sous placebo. Une étude similaire (IC/IM-BMC, Ang, Grande-Bretagne) ne retrouve aucune différence concernant la contractilité échographique par rapport au placebo, que les cellules souches médullaires soient injectées par voie intramusculaire ou intracoronaire.   Prévention   L’étude POISE (Peri-Operative Ischemic Evaluation) montre que les bêtabloquants ne préviennent pas les accidents cardiovasculaires majeurs lors d’une chirurgie non cardiaque, le métoprolol LP (100 mg en préopératoire puis 200 mg/j jusqu’au 30e jour) ayant été incapable de prévenir à 30 jours les décès cardiovasculaires, les infarctus et les arrêts cardiaques non fatals chez les patients d’au moins 45 ans, à haut risque cardiovasculaire. Cette métaanalyse de 31 études ayant inclus au total près de 4 000 patients montre que, si les bêtabloquants diminuent de 44 % les événements cardiovasculaires délétères, notamment ischémiques myocardiques, la mortalité cardiovasculaire reste inchangée avec une augmentation importante du risque de bradycardie et d’hypotension périopératoire. Le premier essai contrôlé randomisé évaluant l’arrêt du tabac sur le risque d’événement cardiovasculaire montre qu’un programme d’intervention intensif mené chez près de 200 fumeurs hospitalisés pour un événement cardiovasculaire aigu est bénéfique à 24 mois avec un taux d’abstinence multiplié par 3,5 chez les patients pris en charge de manière agressive et, parallèlement, une réduction relative du risque d’hospitalisation de 44 % et de la mortalité totale de 77 %. Un bénéfice majeur est à tempérer par le taux d’abstinence obtenu dans le groupe traité (33 versus 9 % dans le groupe pris en charge de façon usuelle), ce qui veut dire que l’abstinence à long terme reste très médiocre chez ces patients pris en charge intensivement, même après un événement coronaire aigu. Dans ce contexte, la vaccination contre la nicotine pourrait être une option valide pour cesser de fumer selon une étude de phase 2 qui montre que la production d’anticorps contre la nicotine est associée à un taux plus élevé de sevrage tabagique que le placebo, avec des taux de sevrage à 12 mois de 16 versus 6 % pour le placebo (Rennard). Le NicVax® est un dérivé chimique de la nicotine lié à une protéine qui induit une réponse immunologique. Les anticorps produits se lient à la nicotine dans le flux sanguin et préviennent le passage de la nicotine au travers de la barrière hémato-encéphalique, permettant d’éviter les sensations stimulantes positives de la nicotine qui sont médiatrices de ses propriétés addictives. Et pourquoi ne pas pallier les problèmes d’observance dans l’HTA par un vaccin dirigé contre l’angiotensine II ? C’est ce qu’a fait J. Nussberger (Lausanne) avec une certaine efficacité sur les chiffres (-5,6 mmHg sur la systolique et -2,8 mmHg sur la diastolique par rapport au placebo), avec pour seul inconvénient actuel la nécessité de réitérer l’injection tous les 4 à 6 mois...

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