publicité
Facebook Facebook Facebook Partager

Coronaires

Publié le 19 avr 2005Lecture 9 min

Maladie coronaire : prise en charge des coronariens stables : qu'est-ce qui a changé ?

J. QUARMAND

Les Journées européennes de la SFC

Un symposium « Maladie Coronaire » organisé le 20 janvier 2005 sous la présidence de R. Ferrari (Ferrara, Italie) et M. Bertrand (Lille) a montré que la prise en charge de la maladie coronaire a considérablement changé au cours de ces dernières années, grâce aux données de la recherche clinique et une meilleure compréhension des mécanismes physiopathologiques.

Prise en charge du coronarien stable N. Danchin (HEGP, Paris) La compréhension du syndrome coronaire a nettement évolué au cours des 25 dernières années et la prévention secondaire repose aujourd’hui sur les bêtabloquants, les antiplaquettaires, les statines, les inhibiteurs de l’enzyme de conversion et le contrôle des facteurs de risque (FR) cardio-vasculaires (CV), le tout symbolisé par le vocable « BASIC ». Vocable qui rappelle que l’on peut y arriver sans difficulté et que c’est la base d’un traitement efficace. Toutes les familles thérapeutiques de « BASIC » ont abondamment fait leurs preuves dans des études cliniques, particulièrement les IEC. Les études HOPE et EUROPA ont établi le bénéfice chez les coronariens : dans EUROPA, le perindopril a permis une baisse de 20 % des événements CV chez des coronariens stables (p = 0,0003). Ces résultats ont été concrétisés par des recommandations américaines (niveau de preuve A), les recommandations européennes devant suivre prochainement. Malheureusement, un gros effort reste à faire pour qu’elles soient appliquées : la surveillance des prescriptions montre qu’à peine 60 % des patients reçoivent un IEC en prévention secondaire et souvent moins encore (CALICOROS). Les prescriptions diminuent avec l’âge des patients (ELIAGE-MG). Des facteurs de risque cardio-vasculaire aussi importants que l’HTA, le diabète, l’hypercholestérolémie sont correctement contrôlés dans à peine 25 % des cas. Au plan européen, de grandes disparités existent, l’Ouest de l’Europe arrivant en dernier pour le suivi des recommandations. L’étude Euro Heart Survey est cruelle pour la qualité des soins prodigués : en cas d’angor stable, 45 % des non-prescriptions d’aspirine sont motivées par « l’absence d’indication » (22 % pour contre-indication) ; pour les bêtabloquants, respectivement 46 et 24 % ; pour les statines : 51 et 19 %. Ainsi, de gros progrès restent à faire pour que la règle « BASIC » soit appliquée.   Les IEC ont-ils un effet anti-ischémique ? C. Thuillez (Rouen) Expérimentalement, les IEC, et particulièrement le perindopril, ont un effet antiathéroscléreux. La dysfonction endothéliale est à la base de l’athérosclérose et les IEC la réduisent in vitro et in vivo (Antony et Nitemberg 1994, Salvetti 2000) ; ils interviennent aussi sur les phénomènes inflammatoires (adhésion des monocytes, inflammation, prolifération) qui aboutissent à l’athérosclérose. Les mécanismes font appel à la réduction des radicaux libres oxygénés et à l’augmentation du taux de bradykinine permettant l’induction de la synthèse d’oxyde nitrique (NO), entraînant un ensemble de réactions bénéfiques. Les IEC s’opposent à la survenue des syndromes coronariens aigus en stabilisant la plaque : baisse du contenu lipidique, de l’inflammation et épaississement de la chape fibreuse de recouvrement. De plus, ils ont un effet inhibiteur sur le PAI-1 avec élévation de l’activité t-PA. Ainsi, les IEC ont des effets anti-ischémiques indirects. Qu’en est-il des effets anti-ischémiques directs des IEC ? Les IEC limitent la taille de l’infarctus, la sidération myocardique et potentialisent le préconditionnement (ischémique). Chez l’homme, le perindopril (8 mg/j) atténue le sus-décalage de ST à l’échographie de stress dobutamine de 42 % et les anomalies de la cinétique segmentaire de 39 % (Morishita 2002). À l’effort, le perindoprilate en aigu réduit de 32 % le sus-décalage de ST et de 67 % la PTDVG (Bartel 1999). Le perindopril (4 à 8 mg/j) augmente la réserve coronaire de 67 % chez l’hypertendu traité pendant 1 an, réduit la masse VG de 11 % et la fibrose vasculaire de 22 % (Schwartzkopf, Hypertension 2000). Les IEC, via la bradykinine, stimulent l’angiogenèse anti-ischémique. Ainsi, par de nombreux mécanismes bien élucidés, le perindopril a démontré des effets bénéfiques chez les coronariens : - une protection endothéliale, - une prévention de l’athérosclérose et une stabilisation de la plaque, - une inhibition de l’agrégation plaquettaire et de la thrombose, - une amélioration de la réserve coronaire.   IEC et cardiopathie ischémique : nouvelles données cliniques et biologiques R. Ferrari (Ferrara, Italie) L’étude EUROPA (EUropean trial on Reduction Of cardiac events with Perindopril in stable coronary Artery disease) menée avec le perindopril a été fondatrice pour la reconnaissance du bénéfice apporté par les IEC chez les coronariens stables sans dysfonction VG. Malgré une incidence basse d’événements sous placebo (2,4 %), le perindopril, à la dose de 8 mg/j a permis une réduction de 20 % du critère composite (décès CV, IDM, arrêt cardiaque) (p = 0,0003), cela, en réduisant la PA de 5/2 mmHg seulement. La baisse de la PA ne peut à elle seule expliquer les résultats d’EUROPA : l’effet du perindopril a été observé indépendamment de la PA à l’inclusion, et même en l’absence de réduction de la PA sous traitement. D’ailleurs, l’amplitude du bénéfice sous perindopril a été supérieure à ce qui était prévisible par la baisse de PA. D’ailleurs, dans l’étude ACTION (A Coronary disease Trial Investigating Outcome with Nifedipine GITS), dans laquelle la nifédipine GITS a permis une réduction de PA de 6/4 mmHg, il n’y a pas eu de bénéfice comparativement au placebo. Dans l’étude PEACE, le trandolapril a induit une baisse de PA de 4,4/3,6 mmHg ; les événements des groupes trandolapril et placebo ont été identiques. L’hypothèse de départ de l’étude EUROPA était la possibilité d’un effet vasculaire et antiathéroscléreux du perindopril à la dose de 8 mg/j. Une étude ancillaire d’EUROPA a donc été prévue pour tester en détail cette hypothèse : PERTINENT (PERindopril – Thrombosis, InflammatioN, Endothelial dysfunction and Neurohormonal activation Trial). Des cellules de veine ombilicale humaine (HUVEC [human umbilical vein endothelial cells]) ont été mises en culture et incubées avec du sérum de volontaires sains appariés pour l’âge (n = 45) ou de patients de l’étude sous placebo (n = 44) ou sous perindopril (n = 43) prélevées à l’inclusion et à 1 an. Y ont été dosés la production et l’activité de ecNOS (endothelial cell nitric oxide synthase), le rapport entre deux protéines du cytosol (BAX [proapoptotique] et BCL2 [antiapoptotique]) et le taux de cellules HUVEC entrant en apoptose (tableau 1 et figure 1). Ces résultats montrent donc une augmentation de la tendance à l’apoptose et de la dysfonction endothéliale, chez ces patients coronariens à risque à l’entrée dans l’étude, et une amélioration significative de chaque paramètre sous IEC sans effet du placebo. Cela paraît important, car l’excès d’apoptose, par la perte de continuité endothéliale, permet l’initiation de l’athérosclérose. Figure 1. Rapport Bradykinine/Angiotensine II. Les auteurs ont aussi étudié différentes cytokines et hormones : - angiotensine II (ARAII) par RIA après séparation par HPLC, - bradykinine (BK) par RIA après séparation par HPLC, - tumor necrosis factor (TNF) alpha par ELISA. En effet, ces différentes substances sont connues pour moduler l’ecNOS et le rythme de l’apoptose endothéliale (tableau 2 et figure 2). Figure 2. Analyse des cellules endothéliales de la veine ombilicale. Les patients ont donc dans ces circonstances (coronaropathie à fort risque de complications) une activation de l’angiotensine II, une production accrue de TNF alpha et une baisse de la bradykinine protectrice, anomalies toutes corrigées au moins en partie sous perindopril. Aucune corrélation n’a pu être notée entre ces résultats et la PAS, la PAD, ni avec les autres traitements. Les seules corrélations observées : - bradykinine – expression ecNOS (r = 0,43) ; - bradykinine – activité ecNOS (r = 0,45). Pour mieux préciser l’effet du perindopril sur la fonction endothéliale, les investigateurs ont mesuré les taux plasmatiques du facteur von Willebrand (vWf), marqueur de l’altération cellulaire endothéliale. Le vWf est également augmenté chez ces patients coronariens et le perindopril corrige en partie l’anomalie (p < 0,05 contre placebo à 1 an). Il apparaît de plus comme un facteur pronostique dan EUROPA : lorsqu’il est bas, la survenue du critère principal est nettement plus rare (p < 0,01). Les auteurs concluent donc, à la lumière de PERTINENT que, chez les patients coronariens, le traitement par le perindopril à la dose de 8 mg/j : - augmente la bradykinine, laquelle augmente l’activité ecNOS ; - réduit les taux d’angiotensine II et de TNF alpha ; - réduit le rythme de l’apoptose des cellules endothéliales, - réduit les taux de facteur de von Willebrand, lesquels sont prédictifs du pronostic. Tous ces effets concourent à améliorer la fonction endothéliale. Ainsi, le perindopril diminue les activations hormonales et la production de cytokines délétères réduit l’apoptose et la tendance procoagulante. Une autre étude ancillaire d’EUROPA, l’étude PERFECT, a également montré une amélioration de la fonction endothéliale sous perindopril, se traduisant par une amélioration de la vasodilatation induite par le flux sanguin. Cette amélioration est une quasi-normalisation chez l’hypertendu, à la différence d’autres traitements : inhibiteurs calciques, bêtabloquants, même sélectifs, ARA II (Hypertension 2003 ; 41 : 1281-6). L’ensemble de ces résultats montre une amélioration de la dysfonction endothéliale sous perindopril, qui peut, au moins en partie, expliquer le bénéfice observé sous 8 mg/jour de perindopril dans EUROPA.   Nouvelles recommandations européennes : un traitement "BASIC" pour tous ! J.-P. Bassand (CHU de besançon et président sortant de la Société européenne de cardiologie) Les objectifs du traitement sont d’améliorer le pronostic en prévenant l’IDM et le décès, de minimiser, voire d’abolir les symptômes. Pour y arriver, les études menées depuis une vingtaine d’années ont permis d’arriver à des recommandations claires, endossées par les sociétés savantes : bêtabloquants, antiplaquettaires, statines, IEC, contrôle des facteurs de risque : « BASIC » Une importance particulière revient au diabète ; Euro Heart Survey réalisé de février 2003 à janvier 2004 sur près de 5 000 coronariens a montré que 32 % seulement des patients avaient une tolérance normale au glucose ! Ce sont eux qui ont le meilleur pronostic, les diabétiques ayant une survie considérablement réduite. De plus, la survenue d’un accident coronarien n’améliore pas la prise en charge du diabète. La glycémie à jeun ne suffit pas à la recherche d’un diabète et il faut en passer par l’HGPO. L’atteinte rénale doit être perçue comme un facteur de risque coronarien à part entière, affectant en particulier la survie, et pas comme un obstacle à la coronarographie. C’est chez le diabétique que l’atteinte rénale, matérialisée par une microalbuminurie, exerce à plein sa nocivité (Micro-HOPE). Dans tous les cas, un traitement adéquat, par inhibiteurs du SRA, atténue grandement le surrisque lié à la protéinurie ; il est spécialement bénéfique chez les diabétiques et les hypertendus (HOPE, Micro-HOPE, PROVE-IT). MARVAL n’a pas montré une supériorité des ARA II. Le traitement des coronariens, en dehors du principe « BASIC », peut faire appel au nicorandil (étude IONA : amélioration du pronostic), aux nitrés et assimilés et à des agents métaboliques comme la trimétazidine. Abordant à nouveau les IEC, J.-P. Bassand a bien souligné les bénéfices observés dans les études HOPE et surtout EUROPA, qui ont démontré que le perindopril à dose de 8 mg/j a permis une réduction de 20 % du critère composite primaire (décès CV, IDM, arrêt cardiaque), également retrouvé chez les diabétiques (PERSUADE). L’étude PEACE a été peu convaincante (trandolapril, 4 mg/j), en partie pour des raisons méthodologiques : moins de patients à la dose d’IEC prévue, moins d’observance, plus de patients revascularisés et sous statine, un groupe placebo avec une faible incidence de survenue des critères de l’étude. Mais ces différences ne rendent pas compte de l’efficacité insuffisante observée dans PEACE et il est probable que l’efficacité du trandolapril soit différente de celle du perindopril. En effet, ce dernier s’est montré efficace sur la réduction du risque quel que soit le niveau de risque des patients à l’inclusion : bas (– 15 %), moyen (– 34%) ou élevé (– 11 %). Ainsi, les études récentes, de méthodologie parfaite (HOPE, QUIET, EUROPA et PEACE), montrent que les IEC n’apparaissent pas égaux : le perindopril a fourni la preuve de sa grande efficacité chez les coronariens, à la dose de 8 mg/jour.

Attention, pour des raisons réglementaires ce site est réservé aux professionnels de santé.

pour voir la suite, inscrivez-vous gratuitement.

Si vous êtes déjà inscrit,
connectez vous :

Si vous n'êtes pas encore inscrit au site,
inscrivez-vous gratuitement :

Version PDF

Articles sur le même thème

  • 28 sur 81
publicité
publicité