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Vasculaire

Publié le 09 nov 2010Lecture 6 min

Devant un AVC, comment suspecter et affirmer une embolie ?

H. ABBOUD, Hôpital Bichat, Paris

Un patient de 58 ans, droitier, a été admis dans le service de neurologie pour une céphalée postérieure et une hémianopsie latérale homonyme gauche survenant au réveil. Dans ses antécédents, on notait un tabagisme estimé à 30 paquets/année, un léger alcoolisme chronique et une hypertension artérielle chronique traitée par amlodipine 5 mg le soir. L’examen clinique initial mit en évidence une hémianopsie latérale homonyme gauche isolée. Le score NIHSS (score utilisé pour évaluer le déficit clinique au stade aigu de l’AVC) était estimé à 1. Les bruits du coeur étaient réguliers, les pouls tous perçus, la tension artérielle était à 167/89 mmHg. Le reste de l’examen clinique et le fond d’oeil étaient normaux.

Un diagnostic d’infarctus cérébral aigu   L’IRM cérébrale (figure) confirma un infarctus isolé de l`artère cérébrale postérieur droite sur les séquences de diffusion, avec un léger hyper signal sur les séquences Flair (imagerie en faveur d’un infarctus cérébral aigu). Figure. IRM + Angio IRM cérébrale. A : Séquence TOF : la partie proximale des artères intracrâniennes ne montre pas de sténose ou d’anomalies particulières. B : Séquence DWI : hyper signal temporal interne évoquant un AIC récent. C : Séquence T2 Flair : légère anomalie du signal, évoquant un AIC aigu. Le Doppler continu des vaisseaux cervicaux et le Doppler transcrânien montraient un flux artériel normal. L’angiographie par résonance magnétique (ARM) des vaisseaux extra et intra-crâniens était normale. En particulier, il n`existait pas d`anomalie de l’axe vertébrobasilaire. La numération formule sanguine, le taux de plaquettes, le bilan hépatique, l’ionogramme sanguin, la CRP et le bilan d’hémostase étaient normaux. L’électrocardiogramme (ECG) s’inscrivait en rythme sinusal à 68/minute. Les échocardiographies transthoraciques puis transoesophagienne ont mis en évidence une hypertrophie ventriculaire gauche, un foramen ovale perméable et un anévrysme du septum inter ventriculaire de 11 mm. La fonction ventriculaire gauche était normale. Il existait une plaque d’athérome de 3 mm sur la crosse de l’aorte sans thrombus.   À ce stade du bilan, on retient l’hypothèse d’un infarctus cérébral crypto génique et un traitement par antiagrégants plaquettaires a été instauré.   Toutefois, vu le jeune âge du patient, une IRM abdominale de diffusion était faite à la recherche d’un infarctus abdominal. En effet, cette dernière confirme la présence d’un infarctus rénal aigu. Les artères rénales étaient normales. Le Holter-ECG des 24 heures fait à la sortie du patient de l’hôpital, soit à J5 de son AVC ne met pas en évidence d’arythmie supra-ventriculaire ou ventriculaire significative. Au terme du bilan, le diagnostic retenu était celui d’un infarctus cérébral d’origine embolique et un traitement par antivitamine K a été instauré avec un objectif d’INR entre 2 et 3. Algorithme décisionnel d’un AVC embolique « probable » Commentaire   Une fois le diagnostic d’infarctus cérébral confirmé, le bilan étiologique est une étape cruciale qui conditionne la prise en charge et surtout la prévention secondaire. Les infarctus cérébraux (AIC) présentent une grande diversité étiopathogénique, avec trois variétés principales : athérosclérose en cause dans 20-25 % des cas, les embolies d’origine cardiaque en cause dans également 20-25 % des cas et les maladies des petites artères perforantes responsables de 25 à 30 % des infarctus cérébraux, mais susceptibles également de provoquer, quoique plus rarement, des hémorragies cérébrales. les autres causes telles que dissections, hémopathies, vascularites, etc., ne représentent toutes ensembles, que moins de 10 % des infarctus cérébraux.   Dans 25 à 40 % des cas l’AIC reste de cause inconnue après des investigations très complètes comprenant une angiographie cérébrale et une ETO(1), et jusqu’à 60 % des cas chez le sujet jeune(2). Cependant, l’angiographie cérébrale faite dans les 6 heures trouve une occlusion embolique d’une artère cérébrale dans 66 % des cas(3). Lorsqu’elle est faite plus tard, elle n’en trouve que dans 20 % des cas. Ceci indique l’existence probable d’une source d’embolie non identifiée. La reconnaissance d’une source cardiaque potentielle d’embolie cérébrale est essentielle en raison des implications thérapeutiques qui en découlent. En effet, sur le plan de la prévention secondaire, les antiplaquettaires constituent l’une des principales approches thérapeutiques d’efficacité démontrée dans la prévention secondaire des infarctus cérébraux non cardioemboliques. Quand il s’agit d’une embolie d’origine cardiaque, la prévention repose sur le traitement spécifique de la cardiopathie causale lorsqu’il est possible et sur le traitement par anticoagulants oraux dont la supériorité par rapport aux antiplaquettaires est largement démontrée dans cette indication. Cependant, le diagnostic formel d’infarctus cérébral embolique est souvent difficile à porter en raison, d’une part, de l’absence de critères cliniques fiables et validés, d’autre part de la difficulté de mettre en évidence une source cardiaque directe par les examens para-cliniques. Il repose avant tout sur les examens complémentaires, bien que la sémiologie neurologique et l’examen clinique fournissent souvent des éléments d’orientation utiles.   L’examen clinique   Indépendamment de l’âge, ce cas clinique amène à discuter de manière générale les examens à réaliser devant un infarctus cérébral. Dans ce domaine, les données de l’examen clinique sont primordiales et peuvent apporter des arguments étiologiques. Un examen clinique soigné à la recherche d’anomalies cutanées (angiokératome de Fabry, télangiectasies cutanéomuqueuses, un livedo racemosa (syndrome de Sneddon), taches «cafés au lait » (maladie de von Recklinghausen), élasticité anormale (syndrome d’Ehlers-Danlos), etc.), du squelette (retard staturo-pondéral, hyper laxité ligamentaire, etc.) ou au fond d’oeil (emboles de cristaux de cholestérol, malformations vasculaires, des ischémies rétiniennes multiples [syndrome de Susac], etc.) dispense parfois d’examens para-cl iniques inutiles. Par ailleurs, dans certains cas, les données cliniques peuvent orienter vers une probable cause embolique. Dans le cas clinique présenté ci-dessus, la présence d’une hémianopsie latérale homonyme isolée dans un contexte de céphalée postérieure pouvait orienter pour un mécanisme embolique. S’ajoute la normalité de l’axe vertèbrobasilaire avec l’absence de maladie athéromateuse (tableau 1). Quel examen para-clinique peut nous aider dans notre démarche étiologique ?   L’IRM – Angio IRM cérébrale L’imagerie par résonance magnétique (IRM) aide non seulement à confirmer le diagnostic d’infarctus mais à préciser sa localisation, la présence d’une zone de pénombre et l’existence d’une occlusion artérielle permettant ainsi d’orienter le geste thérapeutique adéquat (thrombolyse intra-veineuse s’il existe une zone de pénombre ou intra-artérielle, une angioplastie-stenting dans certain cas très sélectif). L’IRM de diffusion est une nouvelle technique qui permet un diagnostic plus précoce de l’infarctus par rapport à la séquence pondérée T2 de l’IRM classique et différencie mieux les lésions ischémiques récentes des lésions anciennes. De plus, cet examen peut aider dans la démarche étiologique de l’AIC. Elle peut trouver des anomalies pariétales artérielles cervicales extra-crâniennes (dissection artérielle, athéromatose, maladie de Takayasu, dysplasie fibromusculaire), intracrâniennes (maladie de Moya-Moya, artérite, athéromatose) ou orienter dans certains cas vers une étiologie embolique. (tableau 2) Le bilan cardiaque • Les échocardiographies transthoracique et transoesophagienne restent une étape fondamentale dans le bilan de l’AVC, fournissant à la fois des signes directs (thrombus dans l’auricule) et indirects d’une éventuelle pathologie cardioembolique. Dans notre cas, l’association d’un FOP et d’un ASIA est considérée comme cause probable d’embolie. La prise en charge thérapeutique de cette anomalie reste controversée dans l’attente des résultats des études thérapeutiques randomisées actuellement en cours.   • L’enregistrement Holter standard dure 24 h et ne détecte de fibrillation auriculaire que chez 5 % des patients qui ont présenté comme dans notre observation un AIC ou un AIT. Il est probable qu’un enregistrement cardiaque ambulatoire prolongé permet de dépister un plus grand nombre de fibrillations auriculaires que le bilan standard chez les patients qui ont présenté un AIC cryptogénique(4).   L’IRM abdominale Les résultats d’une étude autopsique de patients décédés d’un infarctus cérébral ont démontré une prévalence d’infarctus abdominaux (39 %) plus importante chez les patients décédés d’un AVC cardioembolique que chez les autres(5). De même, la présence d’un infarctus abdominal était associée dans 78 % des cas à une cause cardioembolique. La même équipe a retrouvé une prévalence de 22 % d’infarctus abdominal aigu en séquence de diffusion chez des patients hospitalisés pour infarctus cérébral cardio-embolique(6). Toutes ces données laissent penser à une place pour l’IRM abdominale dans le bilan étiologique de l’infarctus cérébral cryptogénique.   Les résultats de ces deux études doivent être confirmés par d’autres études randomisées afin de confirmer le rôle de l’IRM abdominale dans le bilan étiologique de l’AVC ischémique. Avec le soutien institutionnel de Sanofi Aventis

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