publicité
Facebook Facebook Facebook Partager

Mise au point

Publié le 29 fév 2012Lecture 6 min

Quelle est la place des enregistreurs ECG longue durée ?

D. BABUTY, B. PIERRE, cardiologie pôle Cœur, Thorax, Vaisseaux, Hôpital Trousseau, Tours

L’enregistreur ECG longue durée est depuis 10 ans un outil diagnostique qui a pour intérêt majeur d’établir une relation étroite entre les symptômes et l’ECG chez des patients souffrants d’événements rares. Le principal symptôme justifiant leur implantation est la syncope récidivante inexpliquée. L’objectif devant une syncope est d’identifier l’origine cardiaque du fait de sa gravité. Cependant, les outils diagnostiques sont souvent décevants et peu rentables (19 tests diagnostiques en moyenne, avec 20 à 30 % d’échecs selon Edvardsson et al., 2011).

L’enregistrement de l’ECG pendant la syncope est la méthode de référence, justifiant le développement d’enregistreurs ECG de longue durée, implantables (type Reveal® de Medtronic) ou externes (type SpiderFlash-t™de Sorin). Implantation L’insertion des Holter implantables est sous-cutanée, les électrodes étant dirigées au contact de la peau,  en position verticale à droite ou à gauche du sternum, au 4e ou 5e espace intercostal. Chez les enfants ou la femme jeune, une implantation axillaire est possible avec un excellent recueil de l’ECG. Programmation et contrôle Qu’il s’agisse d’enregistreurs implantables ou non, les zones de détection des bradycardies et tachycardies sont programmables, ainsi que leur durée et le nombre d’événements. Limites de la méthode Bien que l’activation automatique des derniers appareils ait amélioré leur efficacité (30 % d’échecs lors d’une activation manuelle), leur limite est liée à la perte transitoire du signal (sous-détection) ou à l’inverse à la surdétection d’artéfacts qui saturent les mémoires de l’enregistreur. Une autre limite est l’absence d’information sur le statut hémodynamique du patient. Syncopes récidivantes et enregistreur implantable ECG La moitié des patients implantés pour syncope récidivante refont une syncope, corrélée dans 50 % des cas à une arythmie. Le plus souvent une bradycardie est documentée, à type de pause sinusale plus que de  bloc auriculoventriculaire (BAV). Les tachycardies sont rares. Les résultats dépendent de l’âge, de la cardiopathie sous-jacente, de la présence ou non d’un bloc de branche, de la réalisation ou non d’une exploration électrophysiologique. Chez les patients les plus âgés, la probabilité d’un événement rythmique est élevée (RR x 3) et le BAV est le plus fréquent (53 %) ; chez les patients plus jeunes les pauses sinusales sont fréquentes dans notre expérience.  La plupart des syncopes récidivent dans la première année : 31, 50, 78 et 93 % à 1, 2, 6 et 12 mois. Les événements rythmiques sont moins fréquents (25 %) chez les patients implantés pour de simples lipothymies.  Influence de l’ECG basal et de la cardiopathie sous-jacente En présence d’anomalies de la conduction ou de bradycardie sinusale, de troubles de la repolarisation ou d’une cardiopathie, l’exploration électrophysiologique est recommandée (ESC 2009).  En l’absence d’anomalie de la conduction infrahisienne ou d’arythmie inductible, l’implantation d’un Holter est utile.  Chez les patients avec intervalle HV normal, la pause sinusale est fréquente alors que le BAV l’est moins (moins du tiers dans l’étude B4, 2011), même en présence d’un bloc bifasciculaire (BBD et HBAG) dans notre expérience. À l’inverse, en présence d’un bloc de branche droit (BBD) associé à un hémibloc postérieur gauche (HBPG), l’implantation en première intention d’un stimulateur est justifiée car le risque de BAV complet est très élevé. La présence d’une cardiopathie ou des antécédents d’insuffisance cardiaque sont des facteurs de risque majeurs de syncopes cardiaques selon les scores d’EGSYS et OESIL, justifiant des investigations approfondies dont l’exploration électrophysiologique. Au terme du bilan et en l’absence d’altération de la FEVG, le Holter implantable n’a pas démontré une forte prévalence d’arythmie ou de BAV. Chez les patients dont la FEVG est altérée, l’implantation d’un DAI en première intention se discute car le risque d’arythmie ventriculaire grave est élevé. Holter implantable en l’absence de cardiopathie et d’anomalie ECG Chez ces patients, l’arrêt sinusal ou la bradycardie sinusale est la principale cause des syncopes récurrentes, évoquant un mécanisme neurocardiogénique. Typiquement, une bradycardie s’installe suivie d’une asystolie parfois extrêmement prolongée (70 secondes chez une de nos patientes, moyenne 15 à 17 secondes). Les résultats du Holter implantable sont indépendants des résultats du test d’inclinaison. Le Holter implantable peut être utile dans ces syncopes pour décider d’une éventuelle implantation de stimulateur comme cela a été proposé par Brignole en 2006 et est en cours d’évaluation dans l’étude ISSUE 3. Valeur des arythmies asymptomatiques enregistrées Dans 15 % des cas, une arythmie sévère est documentée par le Holter implantable en l’absence de symptômes. Les arythmies suivantes sont à considérer et à traiter : épisodes de BAV Mobitz II ou complet, pauses ventriculaires > 3 secondes, tachycardies supraventriculaires rapides et prolongées, tachycardie ventriculaire (ESC 2009). Holter implantable et syncopes : en théorie et en pratique La rentabilité du Holter implantable pour le diagnostic des syncopes récidivantes est très bonne : 43 % de diagnostics dans l’étude RAST versus 20 % au terme d’un bilan exhaustif ; 42% versus 7 % dans l’étude d’Eastbourne. De plus, le délai avant diagnostic est raccourci. Schématiquement, en l’absence de cardiopathie sous-jacente, d’antécédents familiaux de mort subite, avec un ECG normal, l’implantation du Holter doit être rapide, précédée éventuellement d’un test d’inclinaison (classe IB). À l’inverse en présence d’une cardiopathie, d’un ECG anormal ou d’antécédents familiaux de mort subite, une exploration électrophysiologique est réalisée avant de décider l’implantation d’un Holter (classe IB) ; enfin, la pose d’un Holter implantable est recommandée avant l’implantation d’un stimulateur chez un patient avec syncope vasovagale, pour documenter une bradycardie sévère (classe IIa B).  Ces recommandations européennes (2009) sont néanmoins mal utilisées. En 2010, Vitale a montré que seulement 18 % des patients recevaient un Holter implantable alors que 69 % relevaient de cette indication.  Le diagnostic des syncopes était 8,7 fois plus fréquent chez les patients implantés. Situations particulières L’enfant L’implantation par voie axillaire est moins traumatisante, avec un recueil ECG excellent. Les études sont rares mais les résultats comparables à ceux observés chez l’adulte. Le sujet âgé Le problème est celui des chutes à répétition qui peuvent cacher des syncopes. Deux études ont montré que ces chutes inexpliquées étaient fréquemment corrélées à des bradycardies. L’implantation d’un Holter est une solution pour éviter une escalade diagnostique. J wave syndromes Le syndrome de Brugada et le syndrome de repolarisation précoce se rencontrent chez des patients se plaignant de syncopes qui ne sont pas toutes d’origine rythmique. L’implantation d’un DAI prophylactique n’est pas anodine dans cette population jeune et le recours au Holter peut  être une solution lorsque les caractères sémiologiques de la syncope ne sont pas convaincants. L’épilepsie Deux problèmes restent non réglés chez les patients épileptiques : la syncope convulsivante et la mort subite. En effet, le taux de mort subite est anormalement élevé chez ces patients et l’implantation d’un Holter a montré un nombre élevé de bradycardies, soit d’origine neurocardiaque, soit rattachées à des crises d’épilepsie temporale (bradycardie ictéale).  Certaines syncopes vasovagales s’accompagnent de convulsions (syncope convulsivante) conduisant à un égarement diagnostique. La réalisation d’un test d’inclinaison ou l’implantation d’un Holter permet de résoudre le problème diagnostique chez les patients recevant un traitement antiépileptique adapté. La fibrillation atriale Le nouveau Reveal® DX permet une analyse fiable de l’activité atriale (sensibilité 96 %, spécificité 85%). Ce nouvel outil pourrait s’appliquer à la surveillance de patients avec fibrillation atriale rebelle aux agents antiarythmiques, à l’évaluation des résultats de la déconnexion des veines pulmonaires, à la recherche de fibrillation atriale après accidents vasculaires ischémiques chez les patients à risque de fibrillation atriale. Enregistreur ECG longue durée : implantable ou externe ? Le choix dépend de la fréquence des symptômes. Plus ils sont rares, plus nous sommes amenés à mettre un Holter implantable. À l’inverse si les symptômes sont assez fréquents, un enregistreur externe est suffisant. De même chez le sujet jeune l’enregistreur externe est moins traumatisant. Cependant, il faut tenir compte des contraintes liées aux enregistreurs externes qui peuvent conduire à l’abandon de l’enregistrement.

Attention, pour des raisons réglementaires ce site est réservé aux professionnels de santé.

pour voir la suite, inscrivez-vous gratuitement.

Si vous êtes déjà inscrit,
connectez vous :

Si vous n'êtes pas encore inscrit au site,
inscrivez-vous gratuitement :

Version PDF

Articles sur le même thème

  • 3 sur 7
publicité