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Mise au point

Publié le 31 mai 2015Lecture 4 min

Tachycardies sinusales inappropriées

P. LANFRANCHI, Clinique plein Ciel, Mougins

Il est fréquent lors de consultations pour palpitations de rencontrer des tachycardies d’allure sinusale. Elles concernent le plus souvent des femmes jeunes qui en plus de ces palpitations se plaignent souvent d’asthénie importante et d’intolérance à l’effort. Cette situation génère fréquemment, du fait du caractère très anxiogène de ces symptômes, de nombreuses consultations et la réalisation d’examens complémentaires, souvent peu contributifs. Par ailleurs, les différents traitements testés se révèlent souvent peu efficaces ou mal tolérés.

Le diagnostic de tachycardie sinusale inappropriée est souvent posé à l’issue du bilan initial, mais parfois avec excès. Il existe en effet trois entités nosologiques distinctes se traduisant à l’électrocardiogramme par une « tachycardie sinusale ». Avant d’évoquer ces diagnostics, il faut au préalable avoir éliminé toutes les causes habituelles de tachycardie sinusale comme l’anémie, l’hyperthyroïdie, la présence d’une cardiopathie sous-jacente, pour ne citer que les principales. La tachycardie sinusale inappropriée Sa présentation clinique se caractérise par des symptômes très invalidants associés à une fréquence de repos supérieure à 100 battements par minute, peu sensible aux manœuvres vagales, avec des variations progressives de la fréquence cardiaque au Holter ECG(1). Le pronostic est excellent, et la survenue de cardiopathies rythmiques rare. La physiopathologie de ce trouble n’est pas clairement établie et navigue entre la dysautonomie neurovégétative, d’éventuelles canalopathies ou des phénomènes auto-immuns. La prise en charge consiste le plus souvent à rassurer les patients et insister sur l’absence d’implication pronostique de cette tachycardie, tout en leur conseillant de diminuer les excitants (tabac, café, alcool) et de faire du sport afin d’augmenter leur tonus vagal. Le recours au traitement médicamenteux est parfois inévitable. Les bêtabloquants et l’ivabradine représentent alors le meilleur choix(2,3). La prescription d’ivabradine dans ce contexte se fait hors AMM et des explications doivent être fournies aux patientes sur les potentiels effets tératogènes de la molécule. Enfin, la modulation du nœud sinusal par radiofréquence ne doit être proposée qu’en dernier recours (indication de classe IIb) en raison d’un taux de succès procédural moyen et d’un risque de complications sévères non négligeable (dysfonction sinusale définitive nécessitant l’implantation d’un stimulateur ; paralysie diaphragmatique, sténose de la veine cave supérieure, etc.). Les tachycardies parasinusales Il s’agit là encore de tachycardies d’allure sinusale, liées cette fois à la présence d’un circuit de réentrée empruntant le nœud sinusal. Cette anomalie se répartit de façon égale dans les deux sexes, contrairement aux tachycardies sinusales inappropriées dans laquelle les jeunes femmes sont principalement représentées. Ces tachycardies se caractérisent par un caractère subintrant, un début et une fin brutale sur les enregistrements, et une sensibilité aux manœuvres vagales (figure 1). Figure 1. Tachycardie parasinusale stoppée par une manœuvre vagale (massage sinocarotidien). La réponse aux différents traitements est variable et le recours à une ablation par radiofréquence permet souvent de régler définitivement le problème. En effet, il ne s’agit pas dans ce cas de moduler le nœud sinusal lui-même, mais de détruire le circuit de réentrée ou le foyer bordant le nœud sinusal. Les cartes d’activation permettent souvent de différencier la zone de primodépolarisation atriale en rythme sinusal de celle en tachycardie, et ainsi guider le geste d’ablation (figures 2 et 3). Figure 2. Cartographie tridimensionnelle lors d’une ablation de réentrée parasinusale, la zone d’émergence de la tachycardie, en rouge, étant indiquée par la flèche. Figure 3. Normalisation du rythme cardiaque, sinusal, en fin de procédure ablative. Le syndrome de tachycardie posturale Cette anomalie se caractérise par une tachycardie sinusale à l’orthostatisme et qui disparaît en décubitus. Il s’agit d’une dysautonomie avec réponse exagérée du système sympathique lors du changement de position. Ces tachycardies sont habituellement bien calmées par les bêtabloquants(4, 5). Conclusion  En dehors des cardiopathies, de l’anémie, des troubles ioniques et endocriniens, les tachycardies sinusales sont représentées par trois entités nosologiques dominantes. Des tests simples tels que le Holter ECG, les manœuvres vagales ou la réalisation d’ECG de décubitus et en orthostatisme permettent le plus souvent de poser un diagnostic précis. Si la base du traitement médicamenteux est la même pour ces trois tachycardies, seules les tachycardies parasinusales peuvent être traitées facilement et sans risque de complications sévères par l’ablation. 

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